LE CORPS HIGH TECH_ VIVRE AVEC LES PROTHESES _ DOCUMENTAIRE

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LE CORPS HIGH TECH: VIVRE AVEC LES PROTHESES | DOCUMENTAIRE

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00:00Je me souviens de ma mère en larmes, me disant qu'ils allaient sûrement m'amputer la jambe.
00:09C'était un moment très dur.
00:14On se demande, qu'est-ce que je ne pourrais plus faire que je faisais avant ?
00:20Et des milliers de choses vous viennent à l'esprit.
00:27On ne peut pas être en colère indéfiniment.
00:30Il faut s'habituer au fait qu'on ne pourra plus vivre comme avant.
00:34Et ça, ça prend avec le temps.
00:37Après une amputation, recevoir une prothèse est souvent synonyme d'espoir.
00:42Celui de retrouver une vie comme avant.
00:45Chercheurs, médecins et ingénieurs du monde entier conçoivent des pièces de rechange ultra perfectionnées.
00:51Comment fonctionnent ces membres artificiels high-tech ?
00:54Et comment vit-on avec une prothèse ?
01:11Été 2012, Jeux Paralympiques de Londres.
01:14Épreuve du saut en longueur masculin.
01:18Ce qui m'a le plus frappé, c'était le monde qu'il y avait dans le stade.
01:22Pendant qu'on attendait, j'entendais le bruit de fond et c'était déjà impressionnant.
01:25Mais à notre entrée, ça a été la folie.
01:28Quand j'ai compris qu'ils applaudissaient parce qu'on venait d'entrer, ça a été un sentiment incroyable.
01:33J'avais le sourire collé au visage.
01:38Ce sont les premiers Jeux Paralympiques pour Marcus Rehm, l'apogée de sa carrière sportive.
01:48Plus l'heure avançait, plus la tension montait.
01:51J'observais mes concurrents en me disant, lui-là, il a un sacré physique.
01:55Quand l'épreuve a commencé, c'était très intense, avec une grande excitation.
02:07Chez lui, en Rhénamie, Marcus Rehm travaille comme orthoprothésiste.
02:11Il fabrique et assemble des prothèses pour les patients.
02:14Un métier qui demande du tact et de l'empathie.
02:21Avec les clients qui ont une prothèse depuis longtemps, j'ai tendance à garder mon histoire pour moi.
02:26Mais face à quelqu'un qui me reproche de ne pas comprendre ou de ne pas savoir de quoi je parle,
02:32je réponds, si, je sais très bien de quoi je parle.
02:35J'ai moi-même une prothèse.
02:37À 23 ans, Marcus vient de finir sa formation.
02:40Il aime la diversité de ce métier.
02:42Un travail manuel exigeant des connaissances poussées en anatomie
02:45et un contact étroit avec la clientèle.
02:50J'étire lentement la matière par-dessus le moule.
02:55Puis j'appuie doucement.
02:58Ensuite, j'ajuste l'ensemble sous vide d'air.
03:02Marcus est en pleine fabrication d'une emboîture,
03:05la partie qui sert d'interface entre le moignon et la prothèse
03:08et qui est chargée d'assurer une tenue optimale.
03:11On ne voit si ça convient qu'au moment où le client enfile l'emboîture.
03:14Mais là, je suis assez satisfait du résultat.
03:17C'est la première fois que j'envoie une emboîture.
03:20C'est la première fois que j'envoie une emboîture.
03:24Marcus travaille à mi-temps.
03:26Sportif de haut niveau, il consacre une grande partie de ses journées
03:29aux entraînements et aux compétitions.
03:32En 2008, il a signé avec l'école d'élite sportive du Bayer Leverkusen.
03:35Le club sponsorise, entre autres, ses prothèses de sport très coûteuses.
03:38On voit bien la différence entre une prothèse de sport très coûteuse
03:41et une prothèse de sport très coûteuse.
03:44On voit bien la différence entre une prothèse de sport très coûteuse
03:47et une prothèse de sport très coûteuse.
03:51On voit bien la différence entre une prothèse de tous les jours
03:54et une prothèse de sport.
03:56C'est cette lame en carbone qui fait office de pied.
03:59Elle est conçue pour restituer l'énergie quand on court,
04:02ce que fait normalement la cheville.
04:05C'est un peu plus perfectionné qu'une prothèse de vie quotidienne.
04:14Marcus s'entraîne souvent deux fois par jour sur cette piste.
04:18Ici, il s'est fait des amis et a trouvé l'entraîneur idéal,
04:21Stéphane Herius, une ancienne lanceuse de javelot.
04:29Avec cette prothèse, on a l'impression de marcher sur la pointe des pieds,
04:32ça fait bizarre.
04:34En fait, quand on sprint, on ne court pas sur l'arrière-pied ou sur le talon,
04:37mais seulement sur l'avant du pied.
04:39La lame en carbone reproduit ce mouvement.
04:41Mais quand je marche, j'ai donc l'impression d'être sur la pointe des pieds,
04:44ce qui me donne cette drôle de démarche.
04:48Le club de Marcus est l'un des grands promoteurs du handisport en Allemagne.
04:55Au Bayer Leverkusen, tout le monde est logé à la même enseigne.
04:58Les handicapés s'entraînent tout naturellement aux côtés des valides.
05:06Parfois, un valide participe à l'une de nos épreuves de saut en longueur.
05:09Et on voit que Marcus saute bien plus loin que certains jeunes valides du club.
05:14C'est formidable pour la confiance en soi,
05:16parce qu'on se rend compte qu'on peut faire beaucoup avec une prothèse.
05:26Plus que deux mois avant les Jeux paralympiques de Londres,
05:29c'est le rêve de Marcus, pour lequel il s'entraîne dur depuis des années.
05:36Désormais, l'entraînement lui sert surtout à ajuster et régler au mieux sa prothèse.
05:41Elle vient justement de se décrocher un peu de sa jambe.
05:44Marcus doit changer son manchon en silicone.
05:49De l'air s'est infiltré à l'intérieur.
05:51Et quand ça arrive, la prothèse ne tient plus.
05:54Il devient difficile pour moi de sauter correctement,
05:57parce que je ne sens plus bien la prothèse.
05:59Je ne sais pas comment elle se positionne quand je m'appuie dessus.
06:02Je perds un peu le contact avec le sol.
06:05Marcus est le premier athlète appareillé
06:07à avoir dépassé les 7 mètres au saut en longueur.
06:12Au début, j'avais peur que ça fasse mal.
06:14Effectivement, quand on a été amputé depuis peu, c'est douloureux.
06:18Mais avec deux jambes valides aussi, on sent un choc quand on touche le sable,
06:22même si ça ne fait pas vraiment mal.
06:24C'est pareil avec ma prothèse maintenant. Je n'ai plus vraiment mal.
06:29Marcus a du talent et de l'ambition.
06:32Il est l'un des grands espoirs allemands pour les Jeux paralympiques.
06:41Il y a 12 ans, Karl-Heinz Amon a été victime d'un grave accident du travail
06:45à l'aéroport de Düsseldorf.
06:47Alors qu'il aidait deux collègues à charger un avion,
06:50une lourde cargaison lui est tombée dessus.
06:56Quand j'ai perdu mon bras, ça a été terrible.
06:59Le monde s'est écroulé.
07:01C'est normal, on ne sait pas du tout comment on va faire.
07:04Que va dire mon employeur ? Pourrais-je continuer à travailler ?
07:07On a quand même des obligations, comme payer son loyer et sa voiture.
07:11D'ailleurs, pourrais-je encore conduire avec un seul bras ?
07:18Karl-Heinz a dû être amputé du bras gauche au-dessus du coude.
07:21Depuis, il porte une prothèse.
07:24Mais il n'a jamais été du genre à se lamenter.
07:27Il a toujours littéralement pris sa vie en main.
07:33Super, Dennis, il est beau.
07:36L'avantage, c'est qu'avec la prothèse, on ne se brûle pas.
07:39On peut retirer un plat chaud du four
07:42ou une saucisse du grill si elle commence à brûler.
07:52À 48 ans, Karl-Heinz Amon est mort.
07:56À 48 ans, il a déjà testé toutes sortes de prothèses.
08:03Ma première prothèse était purement esthétique.
08:06On ne pouvait rien faire avec.
08:09Elle servait seulement à remplir la manche
08:12et à recréer un équilibre pour la colonne vertébrale
08:15avec un poids à gauche pour éviter que je prenne une mauvaise posture
08:19et que l'épaule remonte.
08:22À l'époque, Karl-Heinz était loin d'être satisfait de cette solution.
08:28Aujourd'hui, il porte une prothèse high-tech.
08:31Son orthoprothésiste, Thomas Münsch, est le seul en Allemagne
08:34à pouvoir proposer ses prothèses myoélectriques
08:37utilisant la technique TMR.
08:43Je trouve ça passionnant d'ouvrir de nouvelles voies.
08:46La technique TMR est toute nouvelle.
08:49À 45 ans, on n'aurait jamais imaginé pouvoir proposer ça
08:52à un patient amputé du bras.
08:55Peux-tu rallumer ta prothèse ?
08:58Je voudrais faire quelques exercices.
09:01Peux-tu plier le coude, s'il te plaît ?
09:04Puis ouvrir la main, fermer la main.
09:07La particularité de cette prothèse,
09:10Karl-Heinz la dirige rien que par la pensée.
09:13Maintenant, plie le coude vers le haut en fermant la main.
09:17Parfait.
09:20Sa prothèse utilise la technique TMR
09:23ou réinervation musculaire ciblée.
09:26Une procédure chirurgicale révolutionnaire
09:29applicable même chez les personnes amputées de tout le bras.
09:32Son principe ?
09:35Les nerfs autrefois reliés au bras, donc devenus inutiles
09:38après l'amputation, sont réimplantés dans un autre muscle.
09:41Dans cette animation, le muscle pectoral.
09:44En quelques mois, les nerfs vont s'y lier
09:47et redevenir fonctionnels.
09:50L'intérieur de la prothèse
09:53est équipé d'électrodes ultrasensibles
09:56en contact étroit avec la peau.
09:59Quand le patient contracte le muscle correspondant,
10:02le signal est capté par la prothèse
10:05qui reproduit le mouvement.
10:08Pour simplifier, je dis souvent
10:11qu'on recâble le bras du patient.
10:14Ainsi, quand il veut ouvrir la main,
10:17le patient va contracter un certain muscle,
10:20ce qu'il ne pouvait pas faire avant l'opération
10:23puisque le nerf n'entraînait aucune réponse.
10:26Ce nerf qui servait auparavant à diriger les muscles de la main
10:29pour qu'elle s'ouvre, contracte désormais l'un des muscles.
10:32C'est ce qui se passe avec M. Hammond.
10:35Ainsi, quand Karl Heinz fait bouger en pensée son bras absent,
10:39il active le muscle qui a été réinervé
10:42et c'est la prothèse qui bouge.
10:46Quand je pense fermer la main,
10:49donc le mouvement qui fait bouger le pouce et les doigts de la prothèse,
10:52on voit bien le muscle se contracter là-dessous.
10:55C'est juste sur le renflement du muscle
10:58que se pose l'électrode captant le signal.
11:01C'est déjà la 7e emboîture qu'il reçoit
11:04car au début les signaux sont confus
11:07et les signaux sont utilisés pour activer la prothèse.
11:10Ces électrodes sont en contact avec le biceps,
11:13ce qui permet de lever le coude.
11:16L'électrode en dessous dirige la rotation des paumes vers l'intérieur, la pronation.
11:19L'emboîture compte 6 électrodes au total.
11:22Un micro-ordinateur à l'intérieur de la prothèse
11:25analyse les signaux envoyés par les nerfs
11:28et les transforme en impulsions électriques.
11:31Karl Heinz peut ainsi faire 6 mouvements distincts.
11:37Ça semble fabuleux,
11:40mais il ne faut pas oublier que le véritable membre,
11:43le bras, n'existe plus,
11:46donc qu'il n'y a plus aucune sensibilité.
11:49On ne peut ni sentir ni toucher,
11:52on n'a plus de sensation.
11:55Cette prothèse reste une solution de rechange,
11:58ce n'est pas la reconstruction d'un vrai bras.
12:02Sans compter que l'électronique complexe logée dans la prothèse
12:05n'est pas étanche.
12:08Sous la douche, Karl Heinz doit donc se laver avec un seul bras.
12:11Malgré sa haute technologie,
12:14la prothèse ne peut ressentir ni le froid ni la chaleur
12:17et sa force de préhension ne varie pas.
12:20Elle a été réglée suite à des tests.
12:32Aujourd'hui, Marcus s'est entraîné au petit matin.
12:35Dès qu'il a le temps, il va pratiquer un autre de ses hobbies.
12:38Hors de question pour lui d'y renoncer
12:41parce qu'il n'a plus de tibia.
12:44C'est une prothèse normale et c'est une planche normale.
12:47La seule différence, c'est que j'ai une prothèse
12:50alors que les autres riders n'en ont pas.
12:53Le wakeboard a toujours été sa grande passion,
12:56mais c'est aussi ce qui a bouleversé sa vie.
12:59C'était un beau soir d'été.
13:02Marcus avait 14 ans et passait la journée au bord de l'eau avec sa famille.
13:05Il s'apprêtait à partir,
13:08mais les conditions idéales ont incité Marcus à refaire un tour.
13:13J'étais attracté par un bateau.
13:16Il n'y avait pas de téléski nautique comme ici.
13:19Je rideais, j'ai sauté par-dessus la vague et je suis tombé.
13:22Un autre bateau est arrivé par derrière sans me voir et m'est passé dessus.
13:25Mes jambes ont été prises dans l'hélice.
13:29Les secours arrivent immédiatement.
13:32Marcus est encore conscient,
13:35sa jambe droite presque entièrement arrachée.
13:38Je me souviens de ma mère en larmes
13:41me disant qu'ils allaient sûrement m'amputer la jambe.
13:44C'était un moment très dur.
13:47Sur le coup, le monde s'écroule.
13:50La nuit avant l'amputation, j'ai eu affreusement mal.
13:53J'étais déjà au maximum désentalgique
13:56je m'en souviens encore très bien.
13:59Trois jours plus tard, la sentence tombe.
14:02Impossible de sauver la jambe de Marcus.
14:05Je me sentais très seul face à cette situation.
14:08J'ai beaucoup pleuré, je passais mes soirées dans ma chambre
14:11à me demander comment j'allais faire pour continuer à vivre.
14:14Heureusement, le jeune sportif est un bâtant.
14:17Il veut s'en sortir et aller de l'avant.
14:20Il attend avec impatience sa première prothèse.
14:23La première fois que je me suis mis debout sur ma prothèse, ça a été la douche froide.
14:26Ça faisait terriblement mal, je n'arrivais pas à m'appuyer correctement dessus.
14:29Au lieu de me motiver, ça m'a plutôt abattu.
14:32Cela lui a pris du temps
14:35mais aujourd'hui Marcus ne se considère plus comme handicapé.
14:38Il conduit une voiture avec changement de vitesse.
14:41Il n'utilise pas sa cheville pour appuyer sur l'accélérateur
14:44mais évalue la pression sur la pédale avec sa cuisse.
14:47C'est ainsi qu'il a appris à conduire.
14:51Aujourd'hui, il se rend chez un client.
14:56Parfois, avec les personnes récemment amputées,
14:59on joue aussi le rôle de confident.
15:02Surtout quand ils comprennent que j'ai vécu la même chose qu'eux.
15:05Comme je peux me baser sur mon expérience,
15:08je suis quelqu'un à qui ils peuvent s'ouvrir.
15:15Marcus, bonjour.
15:18Comment vas-tu ?
15:21Ouveux a beaucoup de questions à poser à Marcus sur les prothèses,
15:24un sujet qu'il ne maîtrise pas encore.
15:30Je peux dire que Marcus est mon modèle.
15:33Je ne serai jamais aussi sportif que lui, ça n'a jamais été mon truc.
15:36Mais à le voir bouger,
15:39jamais on ne se douterait qu'il est handicapé.
15:42Sa prothèse ne se remarque pas
15:45et c'est absolument formidable.
15:50Est-ce que je pourrais faire du jogging avec ma prothèse plus tard ?
15:53Ça dépendra du type de pied qu'on choisit.
15:56On est tous les deux d'accord pour prendre un pied pour personnes très actives.
16:01Ouveux Schulz a 49 ans.
16:04Pour l'instant, il passe l'essentiel de son temps chez lui
16:07et il a hâte de pouvoir retrouver le grand air.
16:10On pourra faire différents essais en commandant des pieds pour les tester.
16:14Les manchons en silicone apparus il y a quelques années
16:17ont changé l'avis de nombreux amputés tibiaux.
16:20Ils font en sorte que la prothèse reste bien en place sur le moignon.
16:26La recherche va se poursuivre en direction de l'électronique, de la bionique.
16:31Il y aura des chevilles intelligentes pour les amputés tibiaux.
16:34Elles lèveront le pied en phase pendulaire,
16:37ajusteront la position pendant la marche en montée
16:41Il existe déjà des pieds qu'ils font
16:44mais leur poids est encore trop élevé.
16:47Donc je ne crois pas qu'ils conviennent vraiment au quotidien pour des patients actifs.
16:54Pour les amputés fémoraux, il existe déjà des genoux intelligents
16:57qui imitent les mouvements naturels du corps
17:00et reconnaissent quand ils doivent se plier.
17:03Un ordinateur permet de paramétrer la prothèse individuellement
17:06pour chaque utilisateur.
17:09Des capteurs mesurent la vitesse de la marche
17:12et les forces exercées sur la prothèse
17:15jusqu'à 50 fois par seconde
17:18et un microprocesseur régule l'amortissement de l'articulation à chaque pas.
17:21Tout se fait automatiquement
17:24et l'appareiller peut ainsi marcher sur un terrain inégal,
17:27monter des escaliers ou faire du vélo.
17:30La science repousse sans cesse ses limites.
17:33Il existe aussi l'ostéointégration
17:36où le corps de la prothèse est monté directement sur l'os.
17:39Cette technique n'est pas encore tout à fait au point,
17:42il faut encore l'améliorer.
17:45Mais à mon avis, dans les prochaines années, les choses vont beaucoup évoluer.
17:54Voilà quelques mois que Karl Heinz porte sa nouvelle prothèse bionique.
17:57Avec son orthoprothésiste Thomas Münsch,
18:00il s'est rendu régulièrement à Vienne,
18:03le seul endroit où jusqu'à présent des patients ont été appareillés
18:06avec ces prothèses dernier cri.
18:13Arrivé à l'hôpital général de Vienne
18:16pour la dernière visite de contrôle.
18:19C'est ici que Karl Heinz a été opéré par le professeur Oskar Haßmann,
18:22spécialiste en chirurgie plastique reconstructive
18:25et pionnier de la reconstruction bionique.
18:28Une méthode qui suppose de modifier l'anatomie du patient
18:32pour qu'il puisse tirer le meilleur profit d'une prothèse.
18:35Dans le cas de Karl Heinz, il a fallu déplacer des nerfs.
18:43Le problème après l'amputation d'un bras,
18:46c'est qu'il ne reste que deux muscles.
18:49On a le biceps à l'avant qui sert à plier le bras.
18:52On le voit bien bouger.
18:55Et on a le triceps à l'arrière qui fait tendre le bras.
18:58La difficulté, c'est qu'avec ces deux seuls muscles,
19:01M. Hammann doit pouvoir diriger toute sa prothèse
19:04qui offre plusieurs fonctions.
19:07Elle permet la flexion et l'extension du côde,
19:10la pronation, la supination,
19:13l'ouverture et la fermeture de la main.
19:16Au cours d'une opération spectaculaire,
19:19le professeur Haßmann a déplacé certaines terminaisons nerveuses
19:22devenues inutiles suite à l'amputation dans d'autres muscles.
19:25Cela permet aujourd'hui à Karl Heinz
19:28de diriger les six fonctions de sa prothèse.
19:31En Europe, ce genre d'opération n'a encore été pratiqué qu'à Vienne.
19:34Voilà le biceps.
19:37Là, c'est le chef long du biceps, qu'on voit très bien.
19:40Même pour le professeur Haßmann,
19:43cela n'a rien d'une opération de routine.
19:46Le plus compliqué dans la chirurgie des nerfs,
19:49c'est qu'il faut garder à l'esprit
19:53Il faut savoir à quoi sert le nerf,
19:56où il se trouve, comment il est relié au tissu.
20:01Il faut donc connaître l'anatomie dans les moindres détails,
20:04mais aussi les fonctions exactes de ses éléments anatomiques
20:07et enfin les possibilités offertes par la prothèse.
20:12Vous sentez encore quelque chose quand je tapote ?
20:15Non.
20:18Avant l'opération, Karl Heinz souffrait de douleurs continues dans le moignon.
20:21Il ne pouvait pas se passer de médicaments.
20:24C'est l'une des raisons qui l'ont poussé à se faire opérer.
20:27Vous prenez encore des antidouleurs ?
20:30Non, plus du tout.
20:33Il n'y a plus de douleurs causées par des névromes.
20:36Quand un nerf se termine par une cicatrice,
20:39il devient douloureux, parce qu'il n'a plus de finalité.
20:42Mais si on lui redonne une utilité en le déplaçant dans un autre muscle,
20:45alors il peut recommencer à travailler normalement,
20:48en faisant se contracter le muscle
20:51ou en transmettant des sensations.
20:54Pour la plupart des nerfs, c'est le signal qu'il ne doit plus faire mal.
20:57La procédure chirurgicale TMR est si innovante
21:00que beaucoup de spécialistes ne la connaissent pas encore.
21:03Pourtant, elle pourrait aider beaucoup d'amputés,
21:06à condition que les caisses d'assurance maladie
21:09et de prévoyance des accidents du travail jouent le jeu.
21:12Comme beaucoup d'amputés, Karl Heinz a dû se battre longtemps
21:15pour obtenir sa prothèse.
21:18Avant, les caisses tentaient souvent de ne pas payer,
21:21surtout pour les prothèses de jambes.
21:24Une plainte a été déposée et le jugement qui a été rendu disait
21:27qu'un patient avait droit au meilleur de la technologie.
21:30Pour le bras, c'est aujourd'hui une prothèse myoélectrique TMR.
21:33A l'heure actuelle, selon la loi allemande,
21:36le patient a donc le droit de recevoir un appareillage de point.
21:39La caisse de prévoyance des accidents du travail a fini par payer.
21:4220 000 euros pour l'opération
21:45et 80 000 euros environ pour la prothèse.
21:48Karl Heinz Sammon est le premier appareillé allemand
21:51avec une telle prothèse.
21:54Il travaille désormais avec le fabricant en tant que testeur.
21:57C'était risqué.
22:00Cette prothèse est prête à être commercialisée,
22:03mais il y a toujours des possibilités d'amélioration.
22:06Pourquoi elle réagit comme ça ?
22:10A la langue, j'ai remarqué que lorsque je mets la prothèse le matin,
22:13donc quand elle est sèche parce que je n'ai pas encore transpiré,
22:16ses fonctions sont plus stables et plus précises.
22:19Là, je l'ai depuis ce matin
22:22et plus je la porte,
22:25moins les fonctions sont précises.
22:28Quelques années plus tôt, pour concevoir la prothèse,
22:31le professeur Hassmann s'est adressé à la société Ottobock,
22:34un fabricant allemand dont le département de recherche et développement
22:37se trouve à Vienne.
22:40C'est une façon originale de vider un verre.
22:43Le laboratoire du professeur Hassmann
22:46et le fabricant allemand de prothèses poursuivent depuis
22:49une étroite collaboration.
22:52Dans tous les cas où l'on peut restaurer des fonctions corporelles
22:55avec des appareils, nous cherchons à améliorer
22:58l'interface homme-machine.
23:01L'un de nos axes de recherche qui nous semble faisable
23:04est d'incorporer dans la main artificielle des capteurs sensibles
23:07renvoyant un signal au moignon.
23:10Le patient aurait ainsi un retour direct de sa main prothétique.
23:15C'est encore une technologie expérimentale
23:18qui ne sera pas prête du jour au lendemain,
23:21mais c'est l'un des principaux axes de recherche de notre laboratoire.
23:29Le professeur Hassmann a aussi opéré Patrick Mayerhofer,
23:33un jeune Autrichien de 25 ans.
23:36Il y a 4 ans, cet électricien a reçu une violente décharge
23:39entraînant de très graves brûlures.
23:42Sa main droite a pu être sauvée, mais la gauche est restée mutilée.
23:46Le jeune homme a finalement choisi l'amputation.
23:52Comme celle de Carline Sammon, sa prothèse de main bionique
23:55est dirigée par la pensée.
23:58Patrick Mayerhofer peut même bouger chaque doigt séparément,
24:01mais ce genre de prothèse n'existe pour l'instant
24:04que pour les personnes amputées sous le coude.
24:11Je me souviens très bien de ma réaction
24:14quand j'ai eu cette main pour la première fois.
24:17Ça faisait un an que je portais une vieille prothèse
24:20qui était déjà très bien, mais qui ne pouvait qu'ouvrir et fermer la main.
24:23C'était tout.
24:26Avec la main Michelangelo, j'ai 7 positions au lieu d'une seule.
24:29C'était incroyable qui m'a donné un grand sentiment de bonheur,
24:32comme de tirer les 6 chiffres au loto.
24:38La main de Patrick Mayerhofer dispose de 4 doigts articulés
24:41et d'un pouce positionnable séparément.
24:47Si je veux tenir la coupelle, je dois changer de position.
24:50Avant, j'étais en position de prise latérale,
24:53mais c'était un peu trop petit pour tenir la coupelle correctement.
24:56Donc je change pour une prise tripod,
24:59ce qui me permet de mieux l'avoir en main.
25:02Les commandes sont assurées par un micro-ordinateur caché dans la prothèse.
25:08Il ne faut que quelques heures pour apprendre à la manier,
25:11ce n'est pas très compliqué.
25:14Au début, il faut réfléchir pour savoir quelle position utiliser pour quel objet,
25:17mais aujourd'hui je n'y pense même plus.
25:27On entend bien le déclic quand je fais pivoter le poignet.
25:30Peut-être qu'à l'avenir, la commande sera électronique,
25:33mais ce n'est pas encore le cas.
25:44Les gens qui voient ma prothèse pour la première fois sont toujours impressionnés.
25:47Moi, je me dis seulement que c'est ma main.
25:50J'en ai besoin tous les jours, elle fait partie de mon quotidien.
25:53Patrick aide à améliorer encore cette prothèse bionique
25:56en testant chaque innovation développée par les chercheurs.
26:02C'est ici que tout a commencé,
26:05le département de recherche et développement du fabricant.
26:09C'est là aussi qu'est fabriquée la main Michelangelo.
26:18Les ingénieurs électroniciens et les mécaniciens
26:21assemblent les 700 composants avec une précision millimétrique.
26:28Comme presque tout est fait à la main, la fabrication prend du temps,
26:31d'où le prix élevé de cette prothèse dernier cri,
26:34près de 40 000 euros.
26:39Avant que ces membres artificiels high-tech soient disponibles
26:42chez les distributeurs de matériel médical,
26:45ils doivent passer au banc d'essai.
26:52Andrea Vogt-Bolm travaille pour une association
26:55qui accompagne les patients et les aide à se reconstruire
26:58après l'amputation.
27:01Elle sait que les progrès en orthopédie ne rendent pas forcément
27:04les choses plus faciles.
27:07L'amputé typique n'est pas un sportif de haut niveau.
27:1080% des amputés ont plus de 60 ans et souffrent souvent
27:13d'une maladie chronique.
27:16Avant même l'amputation, ils sont confrontés à toutes sortes
27:19de pathologies.
27:24Les médecins font appel à Andrea quand leur patient s'apprête
27:27à quitter l'hôpital, 10 à 14 jours après l'amputation.
27:30Ils sont souvent désemparés.
27:33Rien n'est prévu pour eux dans le système de santé allemand,
27:36une lacune que vient combler son association Ampuvita,
27:39financée exclusivement par des dons.
27:43Madame Visseur, je vous présente Madame Vogt-Bolmau.
27:46Bonjour Madame Visseur.
27:49Une amputation entraîne des changements considérables.
27:52Il faut réorganiser toute sa vie.
27:55Et souvent, les patients âgés se sentent complètement dépassés.
28:00Ce qui m'importe, c'est de savoir comment vous ferez
28:03à votre retour chez vous.
28:06Je vis dans un appartement au deuxième étage, sans ascenseur.
28:09Donc l'un des principaux objectifs de votre rééducation
28:12doit être de pouvoir monter les escaliers,
28:15et rester chez vous.
28:18Avec de la persévérance et une grande volonté, on y arrivera.
28:21Bien sûr.
28:24Mais je dois quand même vous prévenir qu'il y aura des phases
28:27où vous vous direz, c'est trop difficile.
28:30Mais souvent, quand on se sent au plus bas,
28:33on rebondit ensuite avec d'autant plus d'énergie.
28:36La plupart des patients du service ont été contraints à l'amputation
28:39suite à un diabète de type 2 ou à des maladies vasculaires.
28:42C'était aussi le cas de Sieglinde Wieser.
28:45En proie à des douleurs permanentes, malgré d'innombrables opérations,
28:48elle a choisi l'amputation.
28:56Le fabricant m'a dit qu'un jeune homme avait mis sa prothèse
28:59et s'était mis à marcher comme ça.
29:02On dit que leurs prothèses sont de bonne qualité.
29:05C'est pour ça que je me suis adressé à eux.
29:09Tous ont l'espoir de retrouver avec une prothèse
29:12une meilleure qualité de vie.
29:16Ça me met hors de moi d'entendre un médecin dire à son patient
29:19vous allez recevoir une prothèse
29:22et après quelque temps, vous marcherez sans problème,
29:25ça ne se verra même pas.
29:30Alors que tous les médecins savent parfaitement
29:33que 80% des amputés, ces malades dont je vous parlais,
29:36ne remarcheront jamais aussi bien.
29:43En quelques années, la petite association est devenue
29:46un institut de conseil très sollicité par les amputés et leur famille.
29:49La demande est immense.
29:52En complément des groupes de soutien,
29:55Ampuvita propose des séminaires et des cours de mobilité.
30:02Une aide également appréciée par Ingrid Vogt, 74 ans.
30:06Elle a toujours été sportive et attend avec impatience
30:09son heure de gymnastique hebdomadaire.
30:13Ingrid Vogt souffre d'artériopathie oblitérante des membres inférieurs,
30:16un grave trouble circulatoire.
30:19Des plaques d'athérome ont envahi et rétréci
30:22les artères de ses jambes jusqu'à l'obstruction totale.
30:28C'était en 1998.
30:31Dans la rue, j'ai soudain senti une douleur dans le mollet.
30:34Je suis restée sans bouger quelques instants.
30:37J'ai trouvé ça étrange,
30:40mais je me suis dit que j'avais dû faire un faux mouvement
30:43en faisant du sport, que c'était des courbatures.
30:46C'était le même genre de douleur.
30:49Mais ensuite, j'ai constaté que ça s'aggravait.
30:52Avec le temps, je pouvais marcher de moins en moins loin
30:55sans avoir mal.
30:58Et la douleur elle-même empirait.
31:01Ingrid a une véritable odyssée de consultations médicales derrière elle
31:04qui s'est soldée par l'amputation de ses deux jambes.
31:07Voici ma prothèse
31:10qui remonte jusqu'en haut de la cuisse.
31:13À l'intérieur,
31:16il y a une tige de métal
31:19sur toute la longueur
31:22avec une charnière qui fonctionne comme un genou.
31:25Après trois opérations de la jambe gauche,
31:28il ne lui reste plus qu'un moignon très court.
31:31Sous le genou,
31:34il y a plein de nerfs qui se rejoignent.
31:37Des nerfs, des vaisseaux sanguins.
31:40Quand je mets ma prothèse,
31:43ça exerce une pression très forte sur le dessous.
31:46Même si les tissus sont mous,
31:49j'ai du mal à le supporter.
31:52D'autres y arrivent peut-être,
31:55mais je ne le fais pas.
31:58Avec ses prothèses,
32:01Ingrid peut marcher 40 m au maximum.
32:04Son fauteuil roulant n'est jamais loin.
32:07Andrea de l'association Ampuvita
32:10lui rend visite dans son appartement
32:13où elle vit avec son mari Heinz.
32:16Tu as mis tes prothèses aujourd'hui ?
32:19Oui.
32:22Mais elle atteint vite ses limites.
32:25Ça soulage mon genou.
32:28Ça me fait tellement mal.
32:31Je ne sais plus quoi faire.
32:34Son mari Heinz se sent lui aussi démuni.
32:37Les douleurs lancinantes,
32:40Ingrid les supporte au quotidien.
32:43Tu as toujours mal dans la jambe gauche ?
32:46Dès que je marche un peu,
32:49ça me fait très mal au genou.
32:52En plus des problèmes liés à la prothèse,
32:55Ingrid souffre aussi de douleurs fantômes
32:58dans les deux jambes.
33:01Des élancements violents qui la frappent sans prévenir,
33:04surtout quand elle se repose.
33:07Jusqu'à présent, les différents types de traitements
33:10sont restés sans résultat.
33:13Je sais que vous êtes deux à supporter tout ça.
33:16Ce n'est pas toujours le cas.
33:19Beaucoup de couples se séparent
33:22parce que l'amputation est trop dure à gérer.
33:25Mais ce n'est pas facile tous les jours.
33:28Parfois, on s'assoit un petit quart d'heure
33:31et on pleure tous les deux.
33:47Ça me met régulièrement en colère
33:50de voir que des personnes âgées
33:53ne reçoivent pas de prothèse adaptée
33:56après leur amputation.
33:59Je répète sans cesse que ça ne doit pas forcément
34:02être des prothèses de sport ou pour personnes très actives,
34:05mais au moins des prothèses
34:08qui correspondent aux besoins de la personne
34:11pour qu'elle puisse continuer à vivre sa vie.
34:15On dessine un 8 avec le bras vers l'intérieur et l'extérieur
34:18en restant détendu.
34:21Ingrid ne raterait pour rien au monde
34:24son cours de gymnastique du vendredi.
34:27Le couple ne sort plus que rarement de chez lui,
34:30surtout en hiver.
34:33Le plus important, c'est que je fasse bouger mes jambes.
34:36Avec le haut du corps, je reste très active,
34:39mais pour les jambes, ça ne suffit pas.
34:43Pour le moral aussi, il est important
34:46de rencontrer des personnes dans la même situation.
34:49Ingrid a fait ici de nouvelles connaissances.
34:52C'est parfois très dur.
34:55J'imaginais que ce serait un peu plus facile, il faut bien le dire.
34:58Si on reste chez soi à ne rien faire,
35:01ça devient de pire en pire.
35:04Or la plupart des amputés restent chez eux.
35:07On ne les croise pas dans la rue.
35:11Si on m'avait dit à quel point ce serait pénible,
35:14je ne sais pas si j'aurais eu le courage de le faire.
35:17Il m'a fallu beaucoup de force
35:20pour pouvoir recommencer à faire le ménage,
35:23m'occuper des enfants.
35:28Aujourd'hui, après 4 ans, ça va.
35:31Mais marcher sur de longues distances,
35:34ça reste impossible.
35:40Nous retrouvons Marcus Rehm
35:43qui se rend à la salle de musculation.
35:46Plus que 3 semaines avant les Jeux Paralympiques de Londres.
35:49L'athlète a bien l'intention de montrer de quoi il est capable.
35:52Mais il y a un problème.
35:55Les dernières semaines n'ont pas été faciles.
35:58Je n'ai pas pu m'entraîner correctement parce que je me suis blessé.
36:01Ce n'est pas facile à accepter, je suis énervé.
36:04Je sais de garder mon calme,
36:08Avec l'entraînement intensif de ces dernières semaines,
36:11il souffre d'une plaie de pression sur le moignon.
36:14Il faut absolument qu'elle guérisse avant Londres.
36:17Sinon, il risque de ne pas pouvoir participer à la compétition.
36:22L'entraîneur de Marcus l'a mis au repos forcé
36:25pour que sa plaie guérisse.
36:28A si courte échéance de la grande compétition,
36:31il a du mal à l'accepter.
36:34Il a une prothèse dans les locaux de son employeur,
36:37un grand fabricant de matériel médical.
36:40Beaucoup pensent que j'ai un avantage technique
36:43parce que je peux utiliser pour ma prothèse tel ou tel élément
36:46qui n'est pas officiellement commercialisé.
36:49Mais ce n'est pas le cas.
36:52Tous les éléments que j'assemble peuvent être achetés chez les fabricants.
36:55Mon seul avantage, c'est que je sens comment l'emboîture et la prothèse se comportent
36:58et que je sais comment mieux adapter l'emboîture et corriger la position.
37:02Je peux moi-même faire le nécessaire d'après mon ressenti.
37:10Le bricolage tient encore une grande part dans le handisport.
37:13Bataille des matériaux, techno-doppage,
37:16on reproche parfois à ces sportifs d'être avantagés par la technologie.
37:19Pour Marcus, ce sont des accusations infondées.
37:25La plupart des gens pensent qu'avec ce genre de lame,
37:28on saute facilement à 8 mètres sans entraînement.
37:31Au contraire, il faut s'entraîner dur.
37:34Rien que de réussir à courir avec cette prothèse,
37:37c'est déjà une question d'entraînement.
37:40David, un sprinter double amputé de notre club,
37:43m'a raconté que pendant 6 mois,
37:46il n'a fait que de la musculation et des exercices d'équilibre
37:49pour que son dos supporte de courir ainsi.
37:52C'est bien moins facile que ce que les gens imaginent.
37:55Avec l'effet ressort des lames en carbone,
37:58ils pensent qu'il est facile de sauter à 8 mètres.
38:01Mais ce n'est pas si évident.
38:04De retour chez Karl-Heinz.
38:07C'est enfin le week-end.
38:10Après une dure semaine de travail à l'aéroport,
38:13le père de famille est fatigué.
38:16Ses filles ont demandé à fabriquer des lampions.
38:20Micheref, sa femme, a connu Karl-Heinz avec ses 2 bras valides.
38:24C'est elle qui l'a demandé en mariage après l'accident.
38:27Vous voulez un petit ou un gros lampion ?
38:30Moi, j'en veux un gros.
38:33Les 3 filles n'ont pas connu leur père autrement.
38:36Elles n'ont aucune gêne ni appréhension envers sa main artificielle.
38:39Quand papa m'a emmenée à la fête de l'école pour Halloween,
38:42tous ceux de ma classe m'ont regardée.
38:45Le lendemain, ils sont presque tous venus me demander
38:48qu'est-ce qu'il a, ton papa ? Qu'est-ce qui s'est passé ?
38:51Alors, je leur ai expliqué.
38:54Pourtant, je portais une prothèse, non ?
38:57Oui, mais ça faisait quand même un peu bizarre.
39:00Les enfants sont souvent plus honnêtes que les adultes.
39:03Ils ne chuchotent pas derrière votre dos,
39:06ils vous posent directement la question.
39:09Alors, j'explique rapidement comment ma prothèse fonctionne
39:12et on n'en parle plus.
39:15Karl-Heinz aime bricoler.
39:18Dans une grande famille comme la sienne,
39:21il y a toujours quelque chose à faire.
39:24Il fait beaucoup de choses lui-même dans la maison.
39:27Avant, je devais rester à côté de lui pour tenir les vis.
39:30Ça prenait parfois des heures.
39:33Je ne pouvais rien faire d'autre en attendant.
39:36Aujourd'hui, il fait tout tout seul.
39:39Il n'a plus besoin de moi en tant que 2e main.
39:42Karl-Heinz est convaincu que sans prothèse,
39:45il serait aujourd'hui au chômage.
39:48C'est essentiel pour la confiance en soi
39:51parce qu'avec cette prothèse, on ne dépend plus des autres.
39:57Avant, il était impensable pour moi
40:00de nouer mes lacets tout simplement
40:03ou de faire d'autres broutilles
40:06comme déchirer et coller un bout de papier.
40:09Même les choses les plus simples sont impossibles sans prothèse
40:12puisque tout notre quotidien est prévu pour demain.
40:20Karl-Heinz considère-t-il chanceux
40:23d'avoir reçu une prothèse aussi perfectionnée.
40:26Cela la triste de penser au nombre d'amputés dans le monde
40:29qui sont laissés pour compte.
40:33Comme ici, à Haïti,
40:36l'un des pays les plus pauvres au monde.
40:39Après le violent tremblement de terre de janvier 2010,
40:42plus de 4000 personnes ont dû être amputées
40:45du bras ou de la jambe.
40:48Le seul atelier de fabrication de prothèses du pays
40:51s'est effondré.
40:54Pour y remédier, l'association caritative des Johanniter
40:57a fait venir d'Allemagne un cabinet mobile d'orthopédie
41:01et des bénévoles prêts à fabriquer ces prothèses indispensables.
41:09A son arrivée, l'équipe fait la connaissance de Chouteu, 7 ans.
41:13Lors du séisme, la maison familiale s'est effondrée sur lui.
41:17On a pu le sortir des décombres que deux jours plus tard
41:20et il a dû être amputé.
41:24Chouteu vit chez sa grand-mère.
41:27Elle espère que les orthopothésistes allemands
41:30pourront offrir une nouvelle jambe à son petit-fils.
41:38Il est très important de recevoir une prothèse rapidement,
41:412 à 4 semaines après l'amputation,
41:44pour que le patient puisse retrouver une vie normale
41:47le plus vite possible.
41:54L'amputé reste à la maison,
41:57comme les millions d'autres personnes qui n'ont pas d'appareillage.
42:00Ils restent allongés au sol et attendent que leurs proches
42:03viennent les nourrir et les porter ici ou là.
42:06Voilà pourquoi les équipements comme les prothèses de jambe,
42:09les orthèses ou les fauteuils roulants sont essentiels
42:12pour leur rendre une mobilité.
42:17Dans les pays comme Haïti,
42:20la première des préoccupations, on se soucie peu des handicapés.
42:26Le générateur est hors service.
42:29En attendant que la pièce de rechange arrive d'Allemagne,
42:32Marcel Berisville forme 13 jeunes haïtiens
42:35à l'appareillage orthopédique.
42:38Grâce à des dons allemands,
42:41il bénéficie d'une formation pour apprendre le métier
42:44avec un diplôme reconnu internationalement.
42:51Quelques semaines plus tard, Schutte et sa grand-mère
42:54prennent un taxi-moto pour retourner chez les Johanniter.
42:59Le cabinet orthopédique fonctionne de nouveau.
43:02Harry Tsenner, un orthoprothésiste néerlandais,
43:05approche de la retraite.
43:08Quand on lui a proposé de partir à Haïti comme bénévole,
43:11il n'a pas hésité.
43:14Ces gens n'ont rien.
43:18Rien que d'y penser, ça m'empêche de dormir.
43:25Le premier patient du jour est Schneilly, 4 ans,
43:28qui reçoit une prothèse tibiale.
43:31Il faudra régulièrement la changer au cours des prochaines années
43:34pour l'adapter à sa croissance.
43:42Ces moments donnent aux bénévoles la force de continuer,
43:45malgré les conditions de vie difficiles dans le pays.
44:06Pour Schutte aussi, c'est le grand jour.
44:09Harry Tsenner a passé beaucoup de temps à préparer sa prothèse.
44:13C'est un moment très émouvant et important.
44:20Je veux qu'il se sente bien dans sa prothèse
44:23et qu'il puisse marcher.
44:26Cela fait des mois qu'il n'a pas marché sur ses deux jambes.
44:32J'espère qu'il pourra faire quelques pas,
44:35parce que c'est très difficile avec une prothèse fémorale.
44:38On va voir.
44:42Tous ici espèrent que Schutte parviendra vite à surmonter sa peur
44:45et redeviendra le petit garçon joyeux qu'il était avant le séisme.
44:52Ça me rend heureux qu'il puisse à nouveau marcher.
44:57Quand on a été amputé à la cuisse,
45:00réapprendre à marcher en pliant un genou prothétique demande du temps.
45:07J'aimerais pouvoir rejouer au foot.
45:12Schutte devra se montrer patient avant de pouvoir rejouer au foot.
45:15Mais les premiers progrès sont déjà là.
45:18Grâce à sa prothèse,
45:21il pourra peut-être mener une vie presque normale à Haïti.
45:27De retour chez Ingrid Voigt à Hambourg.
45:31Tu peux m'ouvrir la porte ?
45:34Comme ça je vais sortir.
45:37Je perds facilement ma prothèse
45:40parce que j'ai la mort du manchon en silicone.
45:43Ça m'est déjà arrivé plusieurs fois dans l'escalier.
45:46Alors je m'arrête et je m'assoie.
45:49Mon mari, qui n'est jamais loin,
45:52m'aide à enlever rapidement ma prothèse.
45:55On prend un mouchoir pour essuyer le manchon et ma jambe.
45:58Quand c'est sec, je peux remettre la prothèse et continuer.
46:04La différence de poids entre ces deux prothèses,
46:07le manchon oral et tibial, rend la marche encore plus difficile.
46:10Son mari Heinz a toujours peur qu'elle tombe.
46:13Si on décide de le faire correctement,
46:16c'est un boulot à plein temps.
46:19Il n'y a pas de problème tous les jours,
46:22mais il faut être là.
46:25Au début c'était un peu difficile,
46:28mais aujourd'hui je m'y suis fait, ça ne me dérange plus.
46:31Je l'accepte très bien.
46:37Tous deux disent même que ce coup du sort a renforcé leur mariage.
46:48Les Focht ont appris à être heureux malgré tout,
46:51et certaines choses valent la peine de continuer à se battre,
46:54comme leurs vacances annuelles au soleil.
47:01Bonjour, comment allez-vous ?
47:04Vous voulez vous mettre là ?
47:07Je vais pousser la chaise.
47:10Nous voulons aller à Fuerteventura.
47:13Dans votre hôtel habituel ? Oui.
47:16Des vacances à l'hôtel en demi-pension,
47:19mais avec une place supplémentaire dans l'avion,
47:22des bagages en excédent, le fauteuil roulant et la navette pour l'aéroport.
47:25Avant, ils voyageaient plus simplement.
47:28On prenait notre camping-car et on partait sur les routes
47:32Ça a été dur de devoir y renoncer.
47:37On s'est promenés le long du Danube,
47:40on a fait des circuits dans les Alpes,
47:43surtout en Autriche et dans le nord de l'Italie.
47:46C'était super.
47:49C'était de très beaux moments,
47:52parce qu'avec notre camping-car, on était libre.
47:55Pas comme aujourd'hui,
47:58où il y a beaucoup de possibilités faites aux personnes handicapées,
48:01comme les toilettes spéciales
48:04ou bien les endroits surélevés et accessibles en fauteuil.
48:10Il faut toujours réfléchir pour trouver quelque chose de faisable,
48:13chercher de nouvelles destinations accessibles,
48:16trouver un hébergement avec des chambres faites pour les handicapés.
48:19C'est comme ça et ce n'est pas si simple.
48:22Malgré tout, Ingrid et Heinz se sont étonnamment bien adaptés
48:25à ce nouveau mode de vie.
48:28Ils ne sont pas amers d'avoir dû renoncer à tant de choses.
48:31Au contraire, ils se réjouissent de tout ce qui est encore possible.
48:40Pour être honnête,
48:43depuis l'amputation, je suis même plus joyeuse qu'avant.
48:46Mon mari a toujours été le plus joyeux de nous deux.
48:49Quand on était entre amis,
48:52il était toujours le centre d'attention,
48:55tandis que moi, j'étais en retrait.
48:58J'ai toujours été comme ça, mais plus maintenant.
49:01C'était une erreur que je ne fais plus.
49:04Je dois être plus drôle et plus joyeuse
49:07parce qu'ainsi, je peux tout surmonter.
49:10J'ai remarqué que tout était plus facile
49:13quand on prenait les choses avec le sourire,
49:16en se disant, ce n'est pas si grave.
49:22Le jour J est arrivé.
49:2580 000 spectateurs sont réunis dans le stade olympique de Londres.
49:28Les caméras sont braquées sur Marcus Rehm,
49:31l'athlète paralympique de saut en longueur.
49:34Sa plaie à la jambe a guéri à temps.
49:40Super saut de Marcus Rehm !
49:437,14 m, c'est un nouveau record du monde !
49:46Je ne m'attendais pas à sauter aussi loin.
49:49Quand j'ai vu 7,14 m sur le panneau d'affichage,
49:52j'ai pensé, record du monde, qu'est-ce qui m'arrive ?
49:55J'étais vraiment surpris
49:58parce que mon saut ne me semblait pas aussi bon que ça.
50:01Et ce n'est que le début.
50:14Wow ! Encore un saut incroyable, c'est fou !
50:17Super saut de Marcus Rehm !
50:25C'est très loin, 7,35 m !
50:28Encore un record du monde pour Marcus Rehm !
50:34Quand j'ai sauté à 7,35 m, je l'ai su.
50:37Je me suis retourné, j'ai vu le juge lever le drapeau blanc
50:40et je me suis dit, voilà, c'était le bon.
50:46Et le champion paralympique représentant l'Allemagne,
50:49Marcus Rehm !
50:54Je suis encore tout retourné quand je repense à la remise des médailles
50:57et qu'ils ont joué l'hymne allemand.
51:00Mes parents se trouvaient entre le drapeau et moi.
51:03Je les ai vus et j'ai eu les larmes aux yeux.
51:06C'était un sentiment incroyable d'être sur le podium
51:09et de vivre ça avec mes parents,
51:12parce qu'ils m'ont toujours accompagné et soutenu.
51:15Vivre cet instant avec eux, c'était vraiment génial.
51:21Un an après la pose de sa prothèse myoélectrique,
51:24celle-ci est devenue une part de lui-même.
51:27Il arrive même à Karl-Heinz d'oublier qu'il n'a qu'un bras.
51:30Et pourtant, n'importe quelle prothèse,
51:33aussi sophistiquée soit-elle, reste un membre artificiel.
51:39Ce que j'aimerais, c'est avoir une prothèse
51:42qui me permette de sentir les objets,
51:45surtout pour mes enfants.
51:48J'aimerais pouvoir les prendre par la main
51:51et que la prothèse me donne une sensation en retour
51:54pour que je puisse sentir si je les serre trop fort ou pas assez.

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