Marseille: "Cette revendication institutionnelle de la "DZ Mafia" est une surprise", estime Jérôme Durain (sénateur PS de Saône-et-Loire)

  • il y a 41 minutes
Un adolescent de 15 ans et un chauffeur VTC de 36 ans ont été tués ces derniers jours à Marseille sur fond de narcotrafic. Alors que le commanditaire se revendique de la DZ Mafia, le clan a publié ce mercredi 9 octobre une vidéo pour dénoncer la situation et affirmer n'avoir aucun lien avec ces meurtres.

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Transcription
00:00Il y a des choses qui sont nouvelles dans l'actualité, d'autres qui ne le sont pas.
00:04Malheureusement, les crimes par des jeunes gens, par des très jeunes mineurs,
00:09ce n'est presque pas surprenant vu ce qu'on avait découvert.
00:11En revanche, cette revendication institutionnelle de la DZ de mafia est quand même une surprise
00:17parce qu'on ne les avait jamais vus assumer à ce point une dimension centrale au cœur de la société
00:24avec cette revendication et cette prétention à être des gens tout à fait respectables.
00:30Oui, qu'est-ce que ça dit de cette organisation ?
00:32C'est ce que vous dites, c'est qu'ils essayent de s'acheter une respectabilité ?
00:36Ça veut dire que d'abord, ces organisations criminelles sont au cœur de la société, elles l'assument.
00:41Ce que dit notre rapport de commission d'enquête du 14 mai, c'est ça.
00:46C'est que le trafic de drogue, il est presque institutionnel.
00:51Au cœur de la société, une emprise économique, une emprise territoriale,
00:53une emprise sur des quartiers, une emprise sur des populations.
00:56Et là, on a l'impression qu'ils veulent faire ça au grand jour,
01:01sans être dans la clandestinité, sans se cacher.
01:04Donc c'est à la fois surprenant et je trouve très inquiétant surtout.
01:07Oui, c'est inquiétant parce que ça dit aussi sans doute l'implantation, la puissance de ces groupes
01:15qui parfois, on se dit parfois que ces groupes ont une puissance notamment financière et peut-être matérielle
01:21supérieure aux institutions. Est-ce que c'est le cas ?
01:25Moi, j'ai souvent parlé d'une guérilla depuis notre commission d'enquête en disant que finalement,
01:32le fort, c'était les organisations criminelles et le faible, c'était la puissance publique.
01:37Et là, on a le sentiment qu'on savait déjà que la violence était désinhibée,
01:42avec des codes criminels qui évoluaient.
01:44Ce n'est plus des règlements de comptes « propres » entre truands,
01:49c'est des gens qui utilisent des armes de guerre et qui rafalent n'importe comment avec des victimes collatérales.
01:55Et là, on a le sentiment qu'ils sont aussi désinhibés dans une activité criminelle qui a presque pignon sur rue.
02:02Alors, on savait déjà que les codes commerciaux empruntaient au marketing le plus efficace,
02:10avec des codes visuels, avec des QR codes, avec des fonds de commerce qui se revendent,
02:16des points de deals qui se revendent, des listes de clientèle qui se revendent,
02:20comme un fonds de commerce classique, comme un tabac presse ou un floriste.
02:24Là, on a le sentiment qu'on va encore plus loin et que finalement, ça fait partie de notre environnement social normal.
02:31Bon, ce n'est pas le cas, il va falloir qu'on se batte parce que la situation est grave.
02:34Jérôme Durain, il y a une enquête qui est ouverte sur cette vidéo, d'une part pour l'identifier
02:38et d'autre part pour essayer d'identifier les personnes qui y apparaissent.
02:41Il y a une chance qu'on les identifie ?
02:44Écoutez, je ne suis pas enquêteur, je n'ai pas cette chance ni ces qualités.
02:48En revanche, je pense que c'est important qu'on réaffirme collectivement que ce trafic de drogue, il n'est pas normal.
02:56C'est une activité criminelle.
02:58Je suis très inquiet de ce que ça peut produire chez les jeunes qui peuvent y voir encore une envie de rallier cette marque
03:05parce que ce qui est proposé, c'est une marque.
03:06C'est presque un entretien d'embauche géant ou un appel à bonne volonté.
03:11Donc, il faut que cette enquête aboutisse parce qu'on ne peut pas laisser prospérer sur ce crime.
03:16Mais Jérôme Durain, ce qu'on comprend aussi à travers vos propos, c'est qu'en fait, on n'a plus les outils.
03:20Et vous avez proposé au mois de mai, votre commission a proposé la création d'un parquet anti-stupe et d'une DEA à la française.
03:26DEA, c'est la structure antidrogue américaine.
03:29Ça, on est où ?
03:30Voilà, un nouveau gouvernement est là, un nouveau ministre de l'Intérieur, un nouveau ministre de la Justice,
03:33d'ailleurs qui sera l'invité d'Apolline de Malherbe tout à l'heure à 8h30.
03:36Ça, on est où ?
03:38Alors, ma collègue Marie-Arlette Carlottis, sénatrice de Marseille,
03:41qui a un peu initié toutes ces démarches de commission d'enquête,
03:44a posé la question hier au gouvernement et au ministre de la Justice,
03:47qui lui a dit qu'un texte, notre texte, d'ailleurs la proposition de loi qu'on a déposée avec Étienne Blanc,
03:52le rapporteur de la commission d'enquête, serait mise à l'examen avant la fin de l'année.
03:57Il n'est que temps parce qu'il y a la DEA à la française.
04:01Il y a le parquet national anti-stupéfiants.
04:03Et puis, il y a beaucoup d'autres mesures qu'on propose pour lutter contre le trafic
04:06parce que vraiment, la situation est grave.
04:09Qu'est-ce que ça permettrait justement ces nouveaux outils ?
04:12Parce qu'il y en a des outils.
04:13On connaît l'investissement évidemment de la police, de la justice aussi,
04:17même si on se dit parfois que les condamnations ne sont pas suffisantes.
04:20Qu'est-ce que ça changerait, ces outils ?
04:22D'éviter d'être dans une forme parfois d'amateurisme ou de bricolage
04:27avec des institutions qui ne se parlent pas les unes avec les autres.
04:29La police avec la justice, la justice avec Bercy.
04:33Un ministre de l'intérieur de droite face à un ministre de la justice de gauche,
04:38ça va mieux se parler qu'auparavant, vous pensez ?
04:40Écoutez, ils ont choisi d'être ensemble dans le même gouvernement,
04:42donc maintenant, il faut qu'ils fassent le boulot.
04:44Mais s'ils ne se parlent pas, alors on ne progressera pas
04:47parce qu'on ne peut pas lutter, on l'a dit en début d'entretien,
04:50contre des gens qui sont extrêmement professionnels,
04:52et ils le montrent encore hier avec cette conférence de presse,
04:55extrêmement organisés, extrêmement pointus, avec des moyens illimités,
04:58quand on bricole et que chacun fait ce qu'il veut dans son coin.
05:00Donc, il faut un vrai pilotage.
05:02Il faut des outils nouveaux pour la procédure pénale.
05:04Il faut s'occuper des repentis.
05:06Il faut s'occuper des prisons.
05:07Il faut s'occuper du blanchiment et de la saisie des avoirs criminels.
05:11Allez taper au portefeuille.
05:12Si on ne fait pas ça, alors des conférences de presse,
05:15on en aura beaucoup d'autres.
05:16Et tout ça dans un contexte budgétaire assez contraint quand même.
05:20On va le voir tout à l'heure, évidemment, avec la présentation du budget.
05:22Merci d'avoir été en direct avec nous ce matin.

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