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"Miséricorde" d'Alain Guiraudie, sort en salles mercredi 16 octobre.
Transcription
00:00J'ai pas eu tellement de confrontations difficiles,
00:04mais j'ai pas commencé le cinéma à 16 ans, moi.
00:07J'étais au théâtre avant.
00:08Mais il y a une chose que je sais,
00:10c'est que je me suis toujours méfiée des rôles de séductrice dans le cinéma.
00:14Où il fallait être à poil,
00:15où c'était chargé d'ambiguïté,
00:19ça pouvait être beau, mais ça pouvait être dérangeant, gênant.
00:22Où est-ce que tu étais encore passé toute la journée ?
00:24J'étais avec le curé.
00:26Bon lui, il ferait mieux de dire des messes plutôt que de se promener.
00:31Tu peux rester ?
00:32Ce soir ?
00:33Même quelques jours.
00:34Enfin, tu fais ce que tu veux.
00:36Il y a toujours la chambre de Vincent.
00:38Pourquoi tu restes ici ?
00:39Tu l'aimes bien ma mère ?
00:40Ouais.
00:42Je vais faire une machine.
00:44Il y a quelqu'un ?
00:45Alors Martine, pour moi, c'est assez une nouvelle aventure,
00:48dans un cadre assez étrange,
00:51qui est un peu le cinéma de Girodi,
00:54pour ceux qui le connaissent.
00:56Et j'étais très contente de me retrouver
00:57dans cette sorte d'univers un peu mystérieux,
01:01austère et drôle.
01:02Et ce qui m'a intéressée, si vous voulez,
01:05c'est l'extrême solitude de ces personnes
01:07qui viennent d'un petit village
01:10vide, presque.
01:12Eux-mêmes ont l'air un peu vides,
01:14mais ils sont profondément humains.
01:16Ce qui m'a intéressée, c'est que moi, je leur sers à boire.
01:19Du pastis, tout le temps.
01:21Donc c'est, je ne sais pas comment vous dire,
01:24il y a une récurrence de cette dame qui est là
01:27et qui reçoit son monde avec énormément de simplicité.
01:32C'est vraiment des personnages très simples.
01:35J'avais vu tous ces films avant,
01:36et j'aimais beaucoup ce sujet
01:39où les personnages sont à la limite d'une folie, en fait.
01:42Et tous ces personnages sont à la limite d'une grande chute.
01:46Et ça m'avait impressionnée.
01:48Et je l'avais dit à quelqu'un qui travaillait avec lui à ce moment-là,
01:51et lui sortait d'un de ses films qui avait été un échec.
01:54Le film venait de sortir et je me suis dit,
01:56oh, c'est dur pour lui, c'est tellement un cinéaste extraordinaire.
02:01Donc j'avais fait savoir que j'étais emballée par son travail
02:04au moment où il y avait une difficulté pour lui réelle,
02:09pour l'encourager en fait.
02:11Et puis, trois semaines après, j'ai reçu le scénario.
02:14C'est drôle, hein ?
02:15C'est bizarre à dire, mais j'étais sûre de l'avoir.
02:18Ça paraît complètement idiot.
02:20C'est superfétatoire, c'est naïf, c'est tout ce qu'on veut.
02:25Mais pour moi, le personnage était plus grand que moi.
02:29Quasiment.
02:30C'est un personnage extraordinaire.
02:33C'est de la haute tragédie.
02:35Je travaille toute seule, je vais à l'opéra, j'écoute de la musique.
02:38Je chante au moins quatre ou cinq heures par jour, vous savez.
02:41Vous pensez qu'elle sait pas qu'elle chante complètement faux ?
02:43Faux, mais sublimement faux.
02:45Divinement faux.
02:47Je vais organiser un vrai concert, Georges, devant un vrai public.
02:50Comment ça, un vrai concert ?
02:52Entre la drôlerie, la tragédie, le pathétique, tout ce qu'on veut.
02:57Je trouve que c'est génial, le travail que Giannulli a fait, il est génial.
03:00Mais c'est aussi génial que ses films d'avant.
03:02Il s'est tombé sur moi et c'est trop bien.
03:04Puis je pensais qu'on avait envie de me donner cette chance-là sur un rôle comme ça.
03:08Puis le film a fait plus d'un million d'entrées.
03:11C'est pas un film facile du tout.
03:13C'est un film ambitieux.
03:17C'est pas un film facile, moi je trouve.
03:20Mais il a marqué les gens, vraiment, c'est chouette.
03:35Ma place, elle est bizarre, je le sais.
03:38Elle est pas régulière.
03:41Elle est pas évidente.
03:42Elle est pas claire et nette.
03:46Elle est un peu ci, puis tout à coup un peu ça, puis après rien du tout, puis après relâche.
03:50J'essaye de chercher, en fait.
03:53Et les grandes bonnes choses, y en a pas beaucoup.
03:56Les vraies bonnes choses qui restent,
03:59qui fait que vous vous investissez et vous parlez au public d'une certaine façon.
04:03Ce métier réserve quand même des tas de surprises, si vous voulez.
04:06On n'est pas toujours dans la perfection.
04:09On recherche, on fouine, on écoute.
04:15Pour moi, c'est un grand voyage, ce métier que je fais.
04:17J'aime bien passer les frontières, en fait.
04:20Moi, j'aime bien m'essayer à des tas de choses.
04:24Même un film comme Marguerite, c'était un peu inattendu pour moi, vous voyez.
04:28Mais quelque part, ça a pris du sens.
04:31Moi, je cherche le sens aux choses.
04:33Et j'aime beaucoup que les choses fonctionnent.
04:35Que dans le divertissement, notamment,
04:37il y ait vraiment un échange dans le divertissement intelligent, on va dire.
04:42C'est toi, là.
04:43Un peu d'huile d'oricin et le tour est joué.
04:46C'est souverain.
04:47Grand-mère, elle nous donnait du chocolat purgatif.
04:49Oh, grand-mère, grand-mère.
04:51Allez, ouvre la bouche.
04:53Ah !
04:57Quel monde d'enfant !
05:00Madame, je ne peux plus approuver vos méthodes.
05:03Ni moi les vôtres, ma fille.
05:05Je trouve que c'est en train d'évoluer très fort.
05:07C'est assez extraordinaire qu'on ferme cette porte pour en ouvrir une autre.
05:11C'est radical.
05:12Et je trouve ça très sain.
05:14Vraiment, c'est radical.
05:16Donc, j'ai l'impression que tout ça, ça va donner autre chose aussi artistiquement.
05:21Comment on va regarder les femmes ?
05:23Comment les femmes vont être plus réalisatrices encore que jamais ?
05:28Comment ?
05:28Je pense qu'il va y avoir un vrai changement artistique.
05:32Et c'est vivant.
05:34Je n'ai pas eu tellement de confrontations difficiles.
05:38Mais je n'ai pas commencé le cinéma à 16 ans, moi.
05:41J'étais au théâtre avant.
05:43Donc, je n'ai pas eu la relation au fait d'être une jeune fille,
05:46où ça, c'est plus compliqué dans la vie.
05:47Dans la vie, j'ai ressenti ce que c'est qu'être une jeune fille.
05:51On l'a toutes ressentie, plus ou moins.
05:53Mais il y a une chose que je sais,
05:54c'est que je me suis toujours méfiée des rôles de séductrice dans le cinéma.
05:59Et pourtant, j'ai travaillé...
06:01Ça fait 25 ans que je suis dans le cinéma, quasiment 28 là, maintenant.
06:0528 ans que je suis dans le cinéma,
06:07et je me suis toujours méfiée des rôles de séductrice
06:10où il fallait être à poil,
06:12où c'était chargé d'ambiguïté.
06:15Ça pouvait être beau, mais ça pouvait être dérangeant, gênant.
06:19Toujours...
06:20Pourquoi ? Je ne sais pas.
06:21J'ai eu un instinct pour me préserver, je pense.
06:25Et je ne me suis jamais retrouvée dans ces rôles-là.
06:27Donc, j'ai toujours eu un peu de distance, en fait.
06:30Je me suis toujours préservée de ça.

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