« J’avais besoin de les remercier » : l’hommage d’Eglantine Eméyé aux soignants de son fils Samy

  • il y a 21 heures
L’animatrice, qui a perdu son enfant lourdement handicapé l’an dernier, est retournée dans le service de neuropédiatrie où il a vécu ses derniers jours. Son documentaire « Samy et les anges de la Timone » est diffusé ce soir sur France 2.

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Transcription
00:00Votre invitée média, Céline Baye-Darcourt, est une animatrice dont le chagrin a ému la France entière.
00:05Elle est la maman de Samy, un enfant lourdement handicapé qui est décédé l'an dernier à l'âge de 17 ans.
00:10Elle lui consacre un documentaire ce soir sur France 2.
00:13Bonjour Eglantine Emeyer, c'est aussi un hommage au personnel soignant de l'hôpital de la Timone à Marseille
00:19où était suivi Samy et où il a vécu ses derniers jours dans le service de neuropédiatrie.
00:24Vous avez commencé à tourner quelques mois seulement après son décès, vous éprouviez une urgence à faire ce film ?
00:29Oui, alors déjà je tiens à préciser que ce n'est pas un film sur mon fils et moi, c'est vraiment justement un hommage à ces soignants.
00:34Oui, c'était un cri du cœur très spontané en fait.
00:39J'avais besoin de les remercier tellement je les avais trouvés formidables dans un moment cruel, dur, éprouvant
00:44et en même temps, elles ont réussi à m'apporter un peu de lumière.
00:48De quelle manière justement ? De quelle manière elles vous ont apporté du soutien ?
00:53Vous êtes dans une chambre d'hôpital où vous passez 24 heures sur 24
00:57en essayant d'aller le moins possible dans les couloirs parce que vous ne voulez pas quitter votre enfant
01:01et vous avez là des femmes et des hommes, il y en a quand même aussi, qui ne vous lâchent jamais,
01:06qui viennent tout le temps vous voir alors qu'elles pourraient, elles sont afférées, elles ont 20 milliards de choses à faire.
01:10Et elles viennent dans votre chambre régulièrement, s'assurer que vous avez bu, que vous avez mangé,
01:14que vous n'êtes pas en train de pleurer toute seule, s'occuper de votre fils aussi, elles vous lâchent jamais.
01:19Je les ai trouvées formidables.
01:20Et puis elles arrivent avec le sourire et ce sourire-là, il est très important pour nous.
01:25Alors, je voulais justement qu'on écoute un extrait à propos de ce sourire, parce qu'elles sont lumineuses ces femmes.
01:30Ce sont surtout des femmes, en tout cas dans le documentaire, les aides-soignantes, les infirmières, ce sont des femmes.
01:36Elles endurent, elles aussi, des émotions très fortes parce qu'elles côtoient la mort d'enfants,
01:40ce qui est évidemment le plus terrible, mais elles expliquent pourquoi elles restent.
01:44Anna est rentrée à un mois de vie aux urgences pour une bronchiolite.
01:49Et suite à ça, on s'est rendu compte qu'elle était atteinte de la myotrophie spinale.
01:53Alors, ce n'est pas cet extrait-là que je voulais qu'on entende.
01:57Est-ce que nous avons l'extrait des soignantes, le temps qu'on le trouve ?
02:02Parlez-nous de ces femmes quand même églantines. Elles forcent l'admiration.
02:06Je les ai trouvées totalement admirables.
02:08Elles ont leur vie à gérer.
02:10Elles passent leur journée dans une unité où les enfants ont tous des maladies particulièrement rares,
02:14qui sont donc parfois très dures jusqu'à une fin.
02:18Heureusement, il n'y a pas que ça.
02:20Et en fait, elles sont vivantes.
02:22Elles sont généreuses, très attentives, mais extrêmement vivantes.
02:26Elles continuent à faire la fête, à rigoler, à faire des enfants.
02:31Certaines se posent la question, parce que c'est vrai que c'est difficile de se projeter
02:35quand on ne côtoie que des enfants malades.
02:37Mais non, elles y croient, elles aiment la vie.
02:39Et moi, j'ai trouvé que c'était ça une leçon formidable,
02:42que j'ai plus acquise, comprise après, sur le recul.
02:46Mais pendant que j'étais là-bas, je crois que cette vie-là que je côtoyais, malgré tout,
02:51m'a vraiment aidée à tenir.
02:53– Elles ont vu le film, les infirmières, les aides-soignants ?
02:55– Oui, bien sûr, elles l'ont vu, elles ont été très surprises.
02:57C'est ça qui m'a surprise moi-même.
02:59Je crois qu'elles ne se rendent pas du tout compte de ce qu'elles font
03:02et à quel point elles sont géniales.
03:03D'ailleurs, elles refusent de l'admettre.
03:05– Est-ce que ce documentaire et Glantiné Meillet,
03:07c'était aussi une façon de parler encore de Samy ?
03:10– Ce n'était pas ma volonté première du tout, mais je me suis rendue compte
03:14qu'en le faisant, c'est vrai que j'en ai profité pour le dédier à Samy
03:17et lui écrire cette petite lettre.
03:19Et je crois que j'aime cette idée de continuer à le faire vivre, bien sûr.
03:24– Et en même temps, on sent que c'est assez tôt pour vous,
03:27vous refusez de monter à ce fameux sixième étage dans ce service.
03:31Vous n'étiez pas prête à revoir ce lieu ?
03:33– Non, mais je crois que je me suis lancée dans ce projet
03:35parce que j'avais envie de leur dire merci, sans mesurer à quel point
03:38cette implication était peut-être un peu précoce pour moi.
03:40Donc oui, c'était très difficile.
03:42Je n'ai pas voulu tourner les images moi-même.
03:45– Ce n'est pas vous qui filmez ?
03:46– Non, je ne filme pas.
03:47C'est Olivier Piguetti qui a été formidable sur ce tournage.
03:50Je ne vous cache pas que le montage a été très dur
03:53et que je ne voulais pas y mettre les pieds.
03:54Mais finalement, je l'ai fait en me disant,
03:56il y a un moment, il faut arrêter les tabous.
03:57Et j'avais tellement envie d'aller les remercier.
03:59– Oui, vous y êtes allée.
04:00Et on vous voit avec le médecin qui vous a annoncé
04:03que c'était bientôt fini pour Samy.
04:06– Oui, je pense que je pourrais le revoir tous les mois
04:10pour lui reposer 20 milliards de questions.
04:12Il se trouve qu'en plus, il est extrêmement à l'écoute,
04:14extrêmement disponible.
04:16Je pense qu'en tant que maman,
04:17on n'en a jamais fini de chercher à comprendre.
04:20Et je l'ai revu.
04:22Je crois que j'en ai profité encore pour lui poser des questions.
04:25Et je crois que je tiens à ce lien avec ce médecin.
04:28C'est impossible de l'expliquer,
04:31mais je crois que c'est le dernier lien avec mon fils aussi.
04:33– Mais qu'est-ce que vous cherchez encore à comprendre ?
04:35– Je cherche à comprendre pourquoi, comment.
04:39Comment c'est possible qu'un enfant naisse avec autant de soucis
04:42et que sa fin soit aussi brutale.
04:46Pour moi, ce n'est pas possible.
04:49– Est-ce que ce film vous a un peu aidé
04:52à franchir une étape dans votre processus de deuil, entre guillemets,
04:55si cela existe ?
04:56– Je ne sais pas.
04:57Je crois qu'il a quand même été très douloureux pour moi,
04:59mais je suis très fière de ce film.
05:00Je trouve que ces femmes et ces hommes sont remarquables
05:03et qu'ils le valent bien.
05:05Et puis il y a les parents, parce que vous filmez des enfants malades
05:09et leurs parents qui sont à leur côté jour et nuit,
05:12ils vous ont fait confiance parce que vous avez été à leur place,
05:15parce que vous connaissiez leurs doutes, leurs questionnements, leurs angoisses ?
05:18– Il y a sans doute de ça, mais pour le coup, vraiment,
05:20je tire mon chapeau à Olivier Piguetti,
05:22qui a une pudeur et une façon d'approcher les gens.
05:25Ils lui font confiance.
05:26Et c'est vrai que ce n'était pas évident d'accepter une caméra
05:29dans ces moments très intimes, très douloureux.
05:32Les parents lui ont fait confiance.
05:34Je les en remercie, vraiment.
05:36Et je pense à eux parce que ce n'est pas facile.
05:39– Grâce à vous, Eglantine Emeyer, grâce à Samy,
05:42il y a eu cette médiatisation de l'autisme, du handicap
05:46et surtout du manque de prise en charge des malades,
05:48du parcours du combattant pour les parents.
05:50Est-ce que vous allez continuer à mettre ce sujet en lumière ?
05:52– Je continue, je reste présidente de Un Pas Vers la Vie.
05:55Juste après, je file inaugurer une nouvelle école à Saint-Maur.
05:58Il y a énormément de travail et je ne peux pas lâcher comme ça
06:02toutes ces familles.
06:03Et c'est vrai qu'on n'a plus d'argent aujourd'hui.
06:05Là, je crois qu'on ne peut même plus en demander.
06:07Donc, il va falloir inventer des solutions,
06:09mais on ne peut pas les laisser tomber.
06:10– Il y a déjà eu des petites victoires
06:12depuis que vous avez pris ce sujet à bras-le-corps ?
06:14– Ah oui, énormément quand même.
06:16D'abord, il y a une prise de conscience de la société en général.
06:18Aujourd'hui, on sort avec un enfant handicapé, autiste,
06:20qui fait une crise de nerfs.
06:21Je crois que le regard des gens a changé.
06:22Ils ont compris que ça existait et on est plus facilement aidés.
06:26Bon, il y a plus de prise en charge.
06:31Il y a surtout beaucoup plus de diagnostics précoces.
06:33Par contre, on manque terriblement de personnel et de place
06:36pour des enfants qui ne pourront pas être totalement autonomes
06:39dans la société plus tard.
06:40– Quels sont vos projets, Glantine Emeyer ?
06:42Est-ce que vous en avez ?
06:44– J'ai un peu tendance à vivre au jour le jour.
06:47Je vous avoue que j'ai du mal à me projeter dans l'avenir
06:49parce que la vie m'a appris que la vie était pleine de surprises,
06:51dans tous les sens.
06:52– Donc, pas de projet dans la télévision ?
06:54Il n'y a pas de retour qui est prévu dans les mois qui viennent ?
06:56– Non, j'ai d'autres idées de documentaires plus joyeux.
06:59Donc, je vais commencer à écrire et à en proposer à France Télévisions.
07:03– Merci beaucoup d'être venue nous voir, Glantine Emeyer.
07:05– Merci à vous.
07:06– Votre documentaire s'appelle donc « Samy et les anges de la Timone ».
07:09Il est diffusé ce soir à 22h55 sur France 2.

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