Face aux ouragans, aux chaleurs extrêmes et aux inondations qui se répètent, il devient urgent d’adapter nos territoires. Nicolas Perrin, directeur régional d’Enedis Paris et Marie Dégremont, responsable des études à la Fabrique de la Cité présentent les solutions qui peuvent être apportées pour développer des plans d’adaptation.
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00:00Retrouvez le débat de Smart Impact avec Veolia.
00:06Générique
00:12Dépression Kirk en France, ouragan Milton en Floride.
00:15Les épisodes climatiques extrêmes se multiplient.
00:18Comment adapter nos villes et nos côtes à cette exceptionnelle qui devient la norme ?
00:23On en parle avec Marie Dégremond. Bonjour.
00:25Vous êtes responsable des études à la Fabrique de la Cité.
00:28Nicolas Perrin, bonjour. Bonjour.
00:30Directeur régional Île-de-France.
00:32Dès les 10, on va présenter en quelques mots la Fabrique de la Cité.
00:36C'est un cercle de réflexion, cercle de réflexion des transitions urbaines.
00:40Ça veut dire quoi concrètement ?
00:41Oui, c'est un laboratoire d'idées où on réfléchit notamment aux politiques publiques sur les transitions urbaines,
00:45notamment dans les villes moyennes.
00:47Et par politique publique, c'est celle de transition énergétique,
00:49de transition des mobilités ou encore d'adaptation au réchauffement climatique.
00:53Je disais en préambule, c'est chaleurs extrêmes, des longues périodes de sécheresse, des inondations qui se répètent.
01:01L'exceptionnel devient la norme. Vous le ressentez, ça ?
01:04Alors, ce n'est pas du ressenti, c'est des données qui sont confirmées par les climatologues
01:08et des événements qui étaient très rares, des crues centenales ou des crues trentenales
01:12qui se produisent par exemple deux fois par an désormais dans certains territoires.
01:16Donc ce gros changement est confirmé par toutes les données et puis aussi par des événements récents.
01:21Donc ça pose la question de l'adaptation de nos villes, de nos territoires.
01:25Et c'est le cœur de ce débat, un mot d'Elie Dys.
01:28Alors, j'ai les chiffres sur Paris, c'est 1200 salariés, 1,6 million de clients.
01:32Sur l'île de France, c'est quoi ?
01:34C'est à peu près x3, x3,5.
01:37Donc, on opère en France, à l'échelle nationale, 1,4 million de kilomètres de lignes
01:46qui sont soit aériennes pour à peu près une partie d'entre elles, soit la moitié d'entre elles
01:50et puis souterraines pour les autres.
01:52Sur Paris même, on opère 9200 kilomètres de lignes de réseau.
01:57Et historiquement, j'ai tendance à dire, le réseau qui est partout et à proximité de chacune des habitations,
02:03il est évidemment affecté et impacté par les conditions climatiques depuis sa naissance.
02:10C'est la question que j'allais vous poser sur la sensibilité et l'adaptation à ces épisodes climatiques extrêmes.
02:18Cette adaptation, elle est permanente ou alors il y a une prise de conscience relativement récente ?
02:24Elle est permanente depuis que le réseau existe.
02:27On a cherché à renforcer notamment le réseau aérien, puisqu'on a commencé à créer au 19e siècle du réseau aérien.
02:33On a eu deux événements assez majeurs qui nous ont impactés sur le réseau de distribution.
02:37C'est 1999, la tempête du siècle, qui nous a effectivement durement impacté sur les réseaux aériens.
02:44Et puis on a un deuxième épisode sur lequel on avait peut-être plus parlé des conditions et des impacts sanitaires,
02:50mais qui est la canicule de 2003, qui a eu un impact, et notamment sur le réseau parisien et francilien,
02:56qui a eu un impact assez majeur sur notre réseau souterrain
03:00et notamment certains dispositifs qui permettent de faire la jonction entre les morceaux de câbles,
03:04qui sont ce qu'on appelle des boîtes de jonction.
03:06Comment ça a fondu ?
03:08De gros dominos. Ils n'ont pas fondu, mais ils n'ont pas devenu des charleurs extrêmes.
03:12Ils avaient été conçus dans les années 50-60.
03:15Ils n'avaient pas forcément anticipé ce type de sollicitations extrêmes en termes de température.
03:20Et donc cette tempête de 1999 et cette canicule de 2003,
03:25elles ont forgé des politiques d'investissement et de résilience,
03:29de renforcement de la résilience des réseaux électriques.
03:32Ça veut dire qu'il faut quoi ? Des plans d'adaptation ?
03:34C'est de ça dont on parle, Marie Dégremond ?
03:37Oui, parce qu'il n'y a pas uniquement le secteur de l'électricité,
03:40mais il est interdépendant avec beaucoup d'autres secteurs,
03:42comme le secteur des transports ou des télécommunications,
03:45ou encore de l'eau. Pour faire de l'eau potable, on a besoin d'électricité.
03:48Donc c'est tout un ensemble de secteurs qui font fonctionner l'économie.
03:51On pense aussi aux bâtiments.
03:52Si le bâtiment fonctionne mais que les transports ne fonctionnent pas,
03:55ou inversement, ça pose problème.
03:57Donc on a besoin d'une certaine cohérence.
03:59Ce plan d'adaptation qui avait été lancé par le précédent gouvernement,
04:02c'était d'établir des référentiels différents,
04:06des référentiels passés pour s'adapter à ce climat,
04:09et de faire en sorte que ce soit mis en cohérence
04:11avec l'ensemble des secteurs concernés.
04:13C'est quoi, quand on parle d'un plan d'adaptation ?
04:16Ça veut dire quoi ? Ça veut dire des investissements,
04:18des infrastructures à modifier ?
04:22On en est où de sa mise en oeuvre ?
04:24On en est où de sa mise en oeuvre ?
04:25Ça a été stoppé par la dissolution.
04:27Comme tant d'autres choses.
04:29Ce plan a été préparé par le gouvernement précédent
04:31et par les administrations qui ont beaucoup travaillé,
04:33notamment sur une trajectoire d'adaptation
04:35en rehaussant le niveau de température moyenne
04:39et les intempéries aussi,
04:41et les risques auxquels sont exposées l'ensemble des infrastructures.
04:43Et à partir de cette trajectoire technique,
04:45on devait décliner sur des obligations de résistance
04:48pour les différents secteurs concernés.
04:50En se disant, on peut être dans une trajectoire à plus 4 degrés.
04:53C'était prévoir une trajectoire à plus 4 degrés.
04:55Ensuite, on peut se dire,
04:57est-ce qu'il ne faut qu'une trajectoire à plus 4 degrés ou une autre, par exemple ?
04:59Mais déjà, fixer cette trajectoire
05:01et dire que tout le monde doit essayer de réfléchir
05:03à comment s'aligner sur ça,
05:05et pas uniquement les secteurs qui ont plus l'habitude
05:07de gérer des crises, c'était l'idée.
05:09Et puis, c'était l'idée de discuter du niveau de service.
05:11Est-ce qu'on considère qu'une route
05:13peut être coupée 10 jours par an ou pas ?
05:15Et quels moyens on a décidé de mettre ou pas ?
05:19Jusqu'où on fait de l'adaptation ?
05:21Et tout ça, ça se discute politiquement,
05:23mais il y a des choses qu'on met quelque part,
05:25peut-être qu'on les met moins à un autre endroit.
05:27Évidemment, justement, en parlant de ressources,
05:29sont des investissements lourds pour adapter
05:31ces infrastructures dont on parle ?
05:33Pour le réseau de distribution, c'est trois choses.
05:35Ce sont effectivement des investissements lourds.
05:37On consacre chaque année, au plan national,
05:39à peu près un milliard d'euros
05:41à renforcer la résilience du réseau de distribution.
05:43On va consacrer 185 millions d'euros
05:45sur les cinq prochaines années,
05:47spécifiquement sur le réseau parisien
05:49et sur l'augmentation de la résilience du réseau parisien.
05:51Et donc, ce sont des travaux,
05:53soit d'enfouissement du réseau aérien,
05:55soit de renouvellement d'un certain nombre de composants
05:57du réseau souterrain.
05:59Avant de réaliser l'investissement,
06:01c'est aussi beaucoup de travail avec des organismes
06:03de recherche spécialisés pour comprendre
06:05comment va se déformer et comment va impacter
06:07le climat sur les différents risques
06:09avec lesquels le réseau peut être confronté.
06:11Ça peut être effectivement les canicules,
06:13ça peut être également, sur Paris,
06:15les inondations,
06:17et l'actualité, effectivement,
06:19on le montre aujourd'hui,
06:21ça peut être dans d'autres territoires,
06:23la croissance des incendies,
06:25la croissance des épisodes de vent et de tempête, par exemple.
06:27Et donc, ce qui est important pour un distributeur comme Enelis,
06:29c'est de pouvoir avoir une vision assez claire
06:31de comment le climat et la déformation du climat
06:33va pouvoir impacter de façon plus importante,
06:35en intensité et en fréquence,
06:37les différents réseaux et les exposer.
06:39Et puis, la troisième chose,
06:41quand on a étudié,
06:43quand on a investi,
06:45et on investit chaque année,
06:47on travaille sur des perspectives 2040,
06:492035-2040,
06:51et qu'on n'a pas pu,
06:53éventuellement, assurer
06:55la résilience immédiate du réseau,
06:57c'est aller sécuriser et remettre en service
06:59les réseaux qui ont été impactés.
07:01Et c'est un des grands enseignements
07:03de la tempête de 1999, on a créé une force d'intervention
07:05rapide d'électricité.
07:07Ça, on en reparlera, qui s'appelle FIRE, en quelque sorte.
07:09Quand je le lis, je le lis FIRE,
07:11force d'intervention rapide d'électricité.
07:13Je vous reposerai une question là-dessus,
07:15ça coûte plus,
07:17puisqu'on parle d'investissement lourd quand même,
07:19ça coûte plus cher d'attendre et de réparer
07:21la catastrophe ? Vous voyez ce que je veux dire ?
07:23Ça coûte plus cher d'attendre et de réparer ?
07:25C'est-à-dire que quand il y a une catastrophe
07:27climatique,
07:29le coût de la réparation,
07:31est-ce qu'il est forcément plus important
07:33que l'investissement qui consiste à adapter
07:35les infrastructures ?
07:37C'est des bilans de rentabilité qui sont parfois complexes
07:39à mener. Ce qu'on sait
07:41et ce qu'on partage avec des gens qui
07:43travaillent sur le sujet, comme la Fabrique de la Cité,
07:45c'est que la récurrence
07:47des interventions
07:49va forcément coûter beaucoup plus cher que l'investissement.
07:51Et c'est pour ça qu'on arrive à décider aujourd'hui
07:53de programmes d'investissement qui sont très volontaristes
07:55quand même sur les distributeurs,
07:57pour pouvoir renforcer la résilience des réseaux
07:59dans un contexte où, économie se décarbonant,
08:01la sensibilité aux produits électricité
08:03va croissante.
08:05Vous avez, Marie Dégraud, montré
08:07au cabinet du ministre de la Transition écologique
08:09et de la cohésion des territoires, Christophe Béchut.
08:11Est-ce que nos modèles
08:13de gouvernance sont adaptés
08:15à cette nouvelle donne climatique ?
08:17Ou alors est-ce qu'on est encore
08:19un peu à travailler en silo en fonction
08:21des administrations, des régions ?
08:23Je m'exprime en tant que Fabrique de la Cité,
08:25mais je pense qu'effectivement,
08:27beaucoup de choses sont remises en cause par ce réchauffement climatique,
08:29parce qu'il concerne
08:31tous les secteurs de la société, parce qu'il concerne
08:33notre capacité à gouverner sur le territoire.
08:35Par exemple, quand il y a des feux de forêt,
08:37des inondations, du recul du trait de côte,
08:39ça remet en cause la manière
08:41dont on va assurer la prospérité,
08:43l'attractivité économique du territoire.
08:45Donc ça, c'est des choses très fortes.
08:47On a su développer des infrastructures par le passé,
08:49désormais il va falloir les préserver.
08:51Et tout ça, on parlait d'investissements massifs,
08:53c'est des investissements qui s'étalent dans le temps.
08:55Et pour ça, il faut avoir de la visibilité.
08:57Donc il faut soit réutiliser des outils
08:59qui ont été utilisés pour développer
09:01le réseau d'électricité, ou le réseau
09:03ou les grands barrages hydrauliques, soit peut-être en trouver
09:05de nouveaux. Mais là, il y a aussi des nouveaux
09:07modèles économiques à trouver.
09:09Des nouveaux modèles économiques et un échelon
09:11territorial. Le bon échelon,
09:13c'est quoi ? Parce qu'effectivement, on ne va pas
09:15investir de la même façon
09:17dans une région où c'est plutôt la sécheresse
09:19qui va être la catastrophe climatique
09:21récurrente, et dans une autre qui va plutôt
09:23être confrontée à des inondations.
09:25Le bon échelon, c'est quoi ? Alors, il y a déjà la coordination
09:27entre tous les secteurs. Donc là, l'État a toute sa place
09:29pour donner cette visibilité. Par exemple,
09:31on parlait des projets
09:33qui peuvent être très chers. Si on les multiplie,
09:35ça peut être encore plus cher.
09:37Mais si on regarde
09:39collectivement, peut-être qu'on a quand même
09:41intérêt à les faire. Si l'intérêt collectif
09:43est très important, peut-être que la puissance
09:45publique peut dire que ce projet est coûteux,
09:47mais à l'échelle individuelle, vous allez quand même le faire.
09:49Il y a tout un tas de choses
09:51à imaginer à l'échelle nationale, et puis à l'échelle
09:53territoriale, c'est l'échelle du terrain,
09:55celle où on va pouvoir voir le bassin versant
09:57et configuré de telle ou telle manière, les inondations
09:59vont ruisseller de telle ou telle vallée
10:01et condamner différents
10:03bâtiments publics. Par exemple, ça, c'est à cette échelle-là
10:05que ça se gère.
10:07L'adaptation au réchauffement climatique,
10:09c'est pas la même chose en Gironde ou en Seine-et-Marne.
10:11Et ça, ça nécessite aussi d'avoir
10:13des données à l'échelle territoriale qui sont de plus en plus
10:15développées du point de vue scientifique, et aussi
10:17des discussions, des
10:19scénarisations, des exercices de prospective.
10:21Et par exemple, la région Paca est en train
10:23de le faire pour les transports, mais je sais que
10:25d'autres collectivités et d'autres échelles
10:27territoriales le font. Et donc, cette force
10:29d'intervention rapide électricité, FIRE,
10:31pour reprendre votre prononciation
10:33qui est la bonne, j'imagine qu'elle a
10:35été là, ou qu'elle est, très mobilisée
10:37avec la dépression Kerk
10:39qui vient de s'abattre sur toute une partie de la France.
10:41Alors, effectivement, elle est actuellement mobilisée,
10:43puisqu'on a envoyé des renforts sur deux territoires
10:45particuliers, le territoire de Pyrénées-Landes
10:47qui a été assez durement affecté, et puis
10:49le territoire d'Alsace-Range-Comté.
10:51On a mobilisé un certain nombre de salariés
10:53d'autres régions, pour pouvoir venir
10:55en appui des équipes locales et les aider
10:57à réparer le réseau et remettre en service
10:59le plus rapidement possible les clients
11:01afin d'assurer la consommation
11:03et le fonctionnement normal
11:05de nos territoires.
11:06Est-ce que vous anticipez un
11:08dimensionnement différent de cette
11:10force d'intervention rapide ? Vous voyez ce que je veux dire ?
11:12Si on est confronté à des catastrophes qui se
11:14multiplient, est-ce qu'il va falloir y avoir
11:16de plus en plus de salariés d'Enedis prêts à faire ça ?
11:18C'est une bonne question. Cette FIRE, elle évolue,
11:20vous avez entièrement raison, depuis la
11:22façon dont elle a été créée il y a une
11:24vingtaine d'années. Pas forcément
11:26tellement en nombre, mais plutôt
11:28en termes de mobilisation. On fait des choses aujourd'hui
11:30qu'on ne faisait pas il y a vingt ans et notamment,
11:32on pré-mobilise les équipes et on déplace
11:34les équipes en renfort avant même la survenue
11:36de l'événement. On ne le faisait pas forcément il y a vingt ans.
11:38On commence à s'équiper en moyens de télécommunication
11:40puisque Marie
11:42a abordé le sujet. On a une interdépendance
11:44de différents réseaux et d'infrastructures
11:46et les interdépendances entre les
11:48réseaux de télécommunication et les réseaux d'électricité
11:50sont assez fortes. Donc on s'équipe de moyens
11:52qui nous permettent d'avoir et de sécuriser
11:54nos télécommunications et donc
11:56c'est un objet un peu vivant cette FIIR
11:58qui est en train effectivement
12:00de s'adapter aux nouvelles conditions.
12:02L'essentiel pour nous reste
12:04quand même de pouvoir faire les travaux
12:06et les investissements qui vont permettre de limiter
12:08les impacts d'événements extrêmes
12:10et limiter l'intervention
12:12de la FIIR.
12:14Merci beaucoup.
12:16Merci à tous les deux d'être venus
12:18partager ces enjeux
12:20dans ce Smart Impact. On passe tout de suite
12:22à notre rubrique consacrée
12:24aux startups, startups
12:26éco et socialement
12:28responsables.