L’UNESCO protège 51 sites naturels marins. L’organisme a lancé l’ADNE : un programme pour cartographier les espèces qui s’y trouvent et comprendre l’impact du changement climatique sur elles. Un travail qui permet de mieux réagir pour les protéger.
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00:00L'invité de ce Smart Impact, Céphanie Douvert, bonjour.
00:09Bonjour.
00:10Bienvenue, vous êtes chef du programme Marins du patrimoine mondial de l'UNESCO.
00:14Je veux bien qu'on prenne quelques minutes déjà pour présenter ce programme, de quoi
00:19il s'agit notre patrimoine marin.
00:22C'est un programme assez exceptionnel.
00:26L'UNESCO est l'organisation des Nations Unies qui est responsable pour la protection
00:34du patrimoine mondial dans le monde entier, donc à la fois des sites culturels et aussi
00:39naturels.
00:40Donc on a environ 250 sites qui sont des sites classés au patrimoine mondial pour leurs
00:47caractéristiques naturelles, exceptionnelles au monde, et donc parmi ça, on a 51 sites
00:52qui se retrouvent dans la mer.
00:54C'est quelque chose qui n'est pas assez connu, mais bien sûr tout le monde connaît
00:59des sites exceptionnels comme les îles Galapagos en Équateur, aussi la Grande Barrière en
01:06Australie par exemple.
01:07En Barrière de Corail, oui.
01:08Voilà.
01:09Donc on a 51 sites qui sont classés au patrimoine mondial parce qu'ils ont une biodiversité,
01:15ils ont des écosystèmes marins qui sont vraiment exceptionnels et qu'on veut protéger
01:21pour l'humanité et pour les générations futures.
01:23Évidemment, ces 51 sites, c'est une liste qui est fermée, qui peut encore grandir.
01:30Vous avez un peu évoqué les critères, comment on les a choisis ou comment on pourrait,
01:34je ne sais pas, en choisir de nouveaux sites ?
01:37Absolument.
01:38Donc ce n'est pas une liste fermée, ça change presque chaque année.
01:42Donc chaque année, on a un comité du patrimoine mondial qui se réunit et qui représente
01:48en fait tous les pays du monde entier et qui choisit chaque année quels sites seront
01:53classés au patrimoine mondial ou pas.
01:55Il faut postuler en quelque sorte ?
01:57Oui, voilà.
01:58Donc c'est les États qui proposent un site pour être classé au patrimoine mondial.
02:04Et donc deux ans passés, on est passé à 51.
02:07On avait, dix ans passés, on n'avait qu'une quarantaine de sites et donc aujourd'hui,
02:14on a plus de 50 et donc chaque année, ça peut changer chaque année, c'est fur et
02:20à mesure.
02:21Et donc les critères, ils sont très stricts, comme vous dites, ce sont des sites exceptionnels.
02:25Quels sont les critères pour les choisir ?
02:27Oui.
02:28Donc c'est effectivement quelque chose qui est très précis, ce n'est pas comme
02:33« wish list » des sites, c'est vraiment un processus assez réglementé et donc au
02:40cœur de tous, c'est la valeur universelle, exceptionnelle et donc on a dix critères
02:46qui sont les critères de patrimoine mondial, six qui sont liés à tout ce qui est le culturel
02:51mais quatre qui sont liés à tout ce qui est le patrimoine mondial naturel.
02:55Et donc les États doivent vraiment préciser très clairement pourquoi leur site, pourquoi
03:01leur écosystème, pourquoi leur biodiversité est vraiment exceptionnelle, pas juste dans
03:06le pays même et pas juste régional, mais à l'échelle globale.
03:11Donc c'est vraiment très réglementé, très précis, il y a tout un comité d'évaluation
03:17également derrière.
03:18Est-ce que certains de ces sites marins exceptionnels sont menacés ?
03:22Oui, bien sûr, malheureusement, malgré leur statut d'être classés au patrimoine mondial
03:28de l'UNESCO, ils ont des menaces comme tous les autres aires marines protégées dans
03:32le monde.
03:33Il y a 18 000 aires marines protégées dans le monde aujourd'hui et donc les grands menaces
03:37c'est bien sûr tout ce qui est l'infrastructure côtière qui n'est pas durable, surtout
03:43aussi la pêche qui est dans beaucoup des endroits pas durables, souvent aussi une pêche
03:49illégale et après bien évidemment aussi le changement climatique.
03:53Le réchauffement, c'est-à-dire que l'océan se réchauffe, ça a des conséquences sur
03:58les espèces qui vivent dans ces sites classés par exemple ?
04:02Absolument, absolument.
04:03Donc on voit de plus en plus que le changement climatique touche profondément ces écosystèmes
04:10surtout parce qu'on a beaucoup de récifs coralliens, l'UNESCO protège à travers le
04:15patrimoine mondial à peu près 15% des récifs coralliens, donc on voit partout qu'on a
04:21beaucoup d'espèces qui sont en train de disparaître, on a des espèces invasives qui
04:26viennent dans les sites qui changent aussi le fonctionnement des écosystèmes donc il
04:30y a effectivement malheureusement pas mal de problèmes par rapport au changement climatique
04:35et le réchauffement des eaux de l'océan à soi-même qui réchauffe assez vite aujourd'hui.
04:41Oui avec en plus, il ne faut jamais l'oublier, un rôle très important de l'océan c'est
04:45un puits de carbone, est-ce que ces sites classés sont de meilleurs puits de carbone
04:50que le reste de l'océan ? Vous voyez ce que je veux dire ? Sans être trop technique
04:53mais pour savoir s'ils sont encore plus importants ?
04:56Oui, c'est une très bonne question parce que quelques années passées l'UNESCO a lancé
05:00une grande étude pour comprendre ce qu'on appelle le carbone bleu donc c'est comme
05:04les forêts sur terre mais dans les océans, ils sont des mangroves pour la plus grande
05:11partie mais aussi d'autres types d'écosystèmes et on a révélé en fait que ces sites patrimoine
05:18mondial, malgré le fait qu'ils ne sont qu'une collection de cinquantaine de sites,
05:22ils sont hautes pour plus de 20% du carbone bleu dans le monde donc c'est assez énorme
05:31et donc actuellement on est en train de regarder comment on peut les protéger le mieux possible
05:37par exemple dans des lieux en Afrique, en Mauritanie, où il y a plus ou moins 3% de
05:42carbone bleu dans le monde aujourd'hui donc on se rend compte que ces sites marins classés
05:47au patrimoine mondial ont en fait une énorme puissance de capturer le carbone bleu.
05:58Une question peut-être un peu naïve mais la pêche elle est interdite dans ces sites
06:03classés ou elle est réglementée ?
06:04Elle est pour la plus grande partie réglementée parce que ces sites ce n'est pas des lieux
06:08où rien ne se passe, ils sont des lieux où il y a des communautés locales qui y vivent
06:13aussi des communautés traditionnelles qui font la pêche et donc ce n'est pas interdite
06:19mais c'est géré pour la plus grande partie, c'est ça que nous en tant que l'UNESCO on
06:23aide aussi les communautés locales à gérer la pêche pour que ça soit durable et pour
06:28que la plus importante c'est que ça ne touche pas à ces écosystèmes d'une façon
06:35néfaste qu'ils ne peuvent pas se reproduire.
06:38Et alors dans ces sites classés il y a un programme qui est intitulé ADNE pour environnemental,
06:44de quoi il s'agit, c'est quoi ce programme ?
06:45Donc c'est un programme qu'on a lancé pendant 3 ans qui vient de se terminer en
06:51décembre dernier et donc on a lancé et publié tous nos résultats.
06:55C'était une étude pour comprendre beaucoup mieux l'impact du changement climatique
07:01sur la biodiversité et surtout de comprendre si les espèces vont se repartir dans des
07:07autres zones, ce qui est important pour nous parce que quand on protège un certain
07:11site si les espèces d'ici 10-15 ans ne sont plus là, c'est important de le comprendre
07:15aujourd'hui.
07:16Et donc on a utilisé un outil tout innovant qui existait déjà mais qui n'était pas
07:22vraiment bien standardisé, c'était ADNE, ADN environnemental, donc on a pris des échantillons
07:33dans 21 sites patrimoines mondiaux, donc en Afrique, en Bangladesh, dans plein de zones
07:39partout dans le monde, 21 sites dans 19 différents pays et donc on prend un échantillon, on
07:44prend à peu près un litre et demi d'eau et on prend un échantillon et on l'a fait
07:49avec des enfants, donc on a engagé 250 enfants partout dans le monde, la plus jeune était
07:556 ans et donc on prend ces échantillons et donc l'ADN se retrouve dans ces échantillons
08:03et on peut savoir quelles espèces vivent dans la zone.
08:07Exactement, c'est assez intéressant, on peut voir des centaines d'espèces dont un
08:13litre et demi d'eau qui se retrouvent dans ces zones et donc on peut comprendre assez
08:18vite ce qui se passe dans certaines zones, ce qui est important parce que le changement
08:23climatique change assez vite l'impact sur la biodiversité et donc on peut accélérer
08:29en fait nos connaissances à travers le monde.
08:31Donc l'UNESCO s'est investi à travailler avec des meilleurs experts au monde pour
08:36standardiser ce type d'échantillonnage et le faire avec des citoyens, y compris les
08:43plus jeunes.
08:44Et cette cartographie, parce que c'est une sorte de cartographie, on peut imaginer la
08:50démultiplier, pas seulement dans ces sites classés, en quoi ça peut permettre de mieux
08:54protéger l'océan ? Ça permet d'identifier peut-être des espèces menacées par exemple ?
08:59Tout d'abord ça permet de réagir beaucoup plus vite parce qu'aujourd'hui on a plus
09:05de 18 000 aires marines protégées dans le monde, pour comprendre vraiment ce qui se
09:10passe, ça prend souvent avec des méthodes de recherche traditionnelles des années,
09:15ça peut prendre cinq ans avant qu'on comprenne ce qui se passe, donc c'est souvent trop tard
09:19pour réagir au niveau local et donc cette technique, dans quelques mois et même dans
09:24quelques semaines, on peut savoir, on prend les échantillons dans une zone, on comprend
09:29ce qui se passe et par exemple, s'il y a des espèces invasives qui entrent dans un
09:34certain lieu, la gestion qu'on met en place peut réagir très vite et ça ne devient pas
09:40un désastre à long terme, donc c'est un exemple, mais c'est surtout accélérer la
09:46connaissance et donner les moyens aux gestionnaires de réagir d'une manière efficace et surtout
09:54dans un cadre de l'impact du changement climatique à la biodiversité.
09:58Donc ça a été fait par exemple en Corse, pour se recentrer un peu sur la France, dans
10:01le golfe de Porto, on trouve notamment la sublime réserve de Scandola, ça veut dire
10:07qu'on peut savoir s'il y a des dauphins, des requins, je ne vous demande pas la liste
10:12de toutes les espèces, mais c'est à ce point précis ?
10:14Oui, c'est à ce point précis et donc on s'est concentré surtout sur les poissons
10:20parce qu'on voulait comprendre la sûreté des poissons et donc on peut aussi par exemple
10:24pouvoir identifier les espèces qui sont en danger, qui sont vulnérables, qui sont
10:29classées sur la liste rouge de l'IUCN, et donc dans la réserve de Scandola par exemple
10:37on a fait des échantillonnages aussi avec des enfants et donc on avait aussi notre directrice
10:46générale qui a nous joint à Scandola pour prendre les échantillonnages, c'est une façon
10:57de faire la recherche qui engage aussi les citoyens sur place et qui peuvent participer
11:05à la protection de l'océan d'une façon très concrète et très compréhensible, on
11:11a fait aussi toutes les listes de toutes les espèces qu'on a trouvées, tous les poissons
11:15qu'on a trouvés dans un lieu, on a fait aussi une documentation qui donne un retour aux enfants
11:22dans les écoles et qui peut permettre de les engager d'une façon concrète et les sensibiliser
11:30à la future également. Merci beaucoup Fanny Louvert et à bientôt sur Bismarck Fanchège,
11:35on passe tout de suite à notre débat, la décarbonation numérique au programme.