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À 15 jours de l'élection présidentielle aux États-Unis, les intentions de vote mettent en lumière un clivage de genre dans le pays. Les femmes se tournent vers Kamala Harris tandis que les hommes, et notamment les jeunes, choisissent notablement plus Donald Trump.

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00:00Léa Salamé, Nicolas Demorand, le 7-10.
00:03À deux semaines de l'élection américaine, l'indécision est à son comble, les sondages
00:08se resserrent, les candidats sont au coude à coude et personne ne peut prévoir qui
00:13sera élu le 5 novembre prochain.
00:15Alors, comment vous, amis auditeurs, amis auditrices, voyez-vous la situation ? J'attends
00:20vos questions au 01 45 24 7000 et sur l'application de Radio France pour vous répondre, pour
00:27en parler.
00:28Dites-nous Léa, qui sont nos invités ?
00:30Ramah Yad d'abord, bonjour à vous, vous êtes ancienne secrétaire d'État, directrice
00:34Afrique et Senior Fellow Europe pour le Think Tank Atlantic Council à Washington, vous
00:39publiez « Les leçons de l'Amérique, nations et puissances » aux éditions de l'Armatan,
00:44l'Amérique où vous vivez désormais depuis plusieurs années.
00:47Philippe Corbet, journaliste, vous avez été directeur de la rédaction de BFM et ancien
00:51correspondant de RTL aux États-Unis et on vous suit sur votre blog où vous couvrez
00:56quotidiennement l'élection américaine.
00:58Et il y a Shamoum qui est avec nous également, bonjour à vous, politologue, professeur
01:02à l'Université Johns Hopkins, on vous avait reçu il y a un an pour votre livre
01:07« Le piège de l'identité » aux éditions de l'Observatoire, je précise que vous êtes
01:10allemand, naturalisé, américain, bonsoir, bonsoir, bonjour !
01:14Ça commence bien !
01:16C'est déjà l'élection américaine !
01:18C'est déjà l'élection américaine, on va dire ça comme ça !
01:20Voilà, bienvenue à tous les trois, avant d'analyser le rapport de force ultra serré
01:25à 15 jours du vote, dites-nous d'abord ce qui vous a marqué, ce qui vous a frappé
01:29dans cette campagne, elle devait être le match retour Trump-Biden, un match qui n'intéressait
01:34d'ailleurs pas beaucoup les Américains, mais il y a eu la tentative d'assassinat
01:40de Trump, il y a eu le retrait de Biden, il y a eu la première femme noire candidate
01:45avec Kamala Harris, quel fait marquant donc de ces derniers mois, retenez-vous, il y a
01:51Shamoum qui…
01:53Pour moi, la chose la plus frappante dans cette élection, c'est que c'est la troisième
01:56fois que Donald Trump se présente en tant que président, ce qui est très inhabituel
02:00aux Etats-Unis, et que même s'il est encore très impopulaire, même si beaucoup, beaucoup
02:06d'Américains n'aiment pas du tout Donald Trump, dans toute la probabilité, il a 50%
02:11de probabilité de gagner cette élection, alors pour moi la question c'est pourquoi
02:16est-ce que Donald Trump peut-être va gagner, même s'il est tellement impopulaire ?
02:21Pour répondre à ça, il faut aussi regarder un peu sur le côté démocrate.
02:24On va décliner les raisons du fait qu'elle n'a plus le vent dans le dos, Kamala Harris,
02:31que c'est lui qui l'a maintenant dans le dos, on va essayer de comprendre pourquoi,
02:34mais d'abord Ramayad, qu'est-ce que vous vous retenez de cette étrange campagne américaine ?
02:39Oui, j'aime bien ce mot étrange, parce que c'est effectivement ce qui ressort,
02:43en tout cas, quand on vit à Washington, dans le bulb, où ça s'agit de partout dans
02:52cette campagne, c'est l'étrangeté, c'est la dispersion, mais au fond, ce qui me frappe
02:58c'est qu'il y aura deux faits de campagne important en fait, au milieu de tout ce bruit
03:05médiatique autour de cette campagne, le premier c'est la manière dont les ennuis
03:10judiciaires de Donald Trump se sont écartés de la campagne, et il y en avait beaucoup,
03:16c'est-à-dire chaque cas judiciaire aurait pu entraîner sa chute, que ce soit la Géorgie
03:23avec l'élection 2020, à Washington aussi il y avait un procès, à New York il y avait
03:29un procès avec son ancienne maîtresse, et puis la Floride avec le cas des documents
03:35classifiés, tout ça est soit reporté, soit annulé, soit à la peine, donc ça c'est
03:41une chose autour du personnage qui est quand même assez extraordinaire pour un challenger
03:45si je puis dire.
03:46Et la deuxième chose c'est le remplacement historique du candidat naturel, Joe Biden,
03:52par sa vice-présidente, par sa voix sponsorière, et après autour de ça, deux thèmes de campagne
03:58sont sortis, enfin deux éléments, autour de lui il a radicalisé son discours sur l'immigration
04:04en passant de « build the wall », c'est-à-dire construisez le mur, à « mass deportation »,
04:10déportation de masse.
04:11Et quant à elle, elle a abandonné « save democracy » de Joe Biden, qui était donc
04:16sauver la démocratie, comme si ce n'était plus un élément pertinent, comme si c'était
04:20face à Trump, et maintenant c'est « freedom », du nom de la chanson de Beyoncé.
04:24Donc c'est ça qui résume les deux positions, avec une polarisation qui est maintenant presque
04:30parfaite, c'est-à-dire que les démocrates ont choisi, les républicains ont choisi,
04:34on avait sept états-clés où c'était pendant, et maintenant peut-être qu'il n'y en a plus que deux ou trois.
04:40Donc c'est quelques milliers de voix qui peuvent faire la différence et changer non seulement
04:45le sort de l'Amérique, mais de nous tous.
04:47Philippe Corbet, vous parlez de « guerre civile froide » dans votre blog, pour décrire
04:51cette campagne, quels en sont les signes ?
04:54Guerre civile, il faut le comprendre dans le sens américain de « civil war », ce
04:57qu'on appelle en France la guerre de sécession, c'est-à-dire deux pays qui au fond s'éloignent,
05:01se séparent.
05:02La guerre de sécession c'était autour de l'esclavage il y a 150 ans, là c'est sur
05:05d'autres questions.
05:06Mais il y a une dimension de guerre civile et en même temps c'est une guerre froide
05:10puisqu'il n'y a pas de conflits, il n'y a pas de combats, il y a eu certes le 6 janvier
05:13mais il n'y a pas d'émeutes au quotidien, il n'y a pas d'attaques contre des institutions
05:18au quotidien.
05:19Mais on sent que ça peut éclater à tout moment, donc il y a une dimension de guerre
05:22civile froide.
05:23Moi ce qui me frappe, pour compléter ce que disait Ramallah, parce que je suis absolument
05:26d'accord avec ce qu'elle a dit, tous ces événements n'ont peu ou pas changé les
05:29sondages, c'est qu'on va probablement avoir l'élection la plus genrée.
05:34C'est-à-dire que jamais, jamais Kamala Harris n'avait eu dans les sondages autant de soutien
05:39des femmes, y compris des femmes blanches plutôt conservatrices, elle n'a jamais eu
05:44un soutien aussi large.
05:45Et en même temps, jamais l'écart de Donald Trump d'un républicain sur les hommes n'a
05:49été aussi large.
05:50Et on le voit notamment sur les hommes jeunes, les hommes de moins de 30 ans, Donald Trump
05:54a fait tout un travail ces dernières années pour parler à ces jeunes hommes, ces jeunes
05:57hommes qui ont grandi avec la révolution MeToo et qui sont un peu paumés.
06:00Et on va peut-être voir quelque chose autour d'un clivage homme-femme très profond, plus
06:05profond que d'habitude.
06:06C'est la une de libération ce matin, qui montre effectivement les hommes avec Trump,
06:12les femmes avec Kamala Harris.
06:14Et ce clivage-là est plus puissant que celui qui traverse les communautés, le vote latino,
06:19le vote des africains-américains ? Dites-nous, comment voyez-vous les choses ?
06:24Ça en fait a beaucoup changé et c'est un des mythes que beaucoup d'Européens ont
06:27qui regardent l'Amérique, où ils pensent que vraiment, si on connaît la communauté
06:33d'origine de quelqu'un qui vote, on sait qui va voter.
06:37Et plus ou moins c'était vrai en 2016, où c'était vrai que les Blancs votaient
06:42en grande majorité pour Donald Trump et les Latinos, les Afro-Américains, les voteurs
06:47d'origine asiatique votaient dans la grande majorité pour Hillary Clinton à l'époque.
06:52Déjà en 2020, ça avait beaucoup changé.
06:55Alors en fait, Donald Trump avait presque gagné parce qu'il avait fait de grands progrès
06:59parmi toutes ces minorités.
07:02Et c'était Joe Biden qui a gagné parce qu'en fait il a élargi son marge de vote
07:08entre les Blancs, particulièrement les Blancs diplômés.
07:10Ça va encore aller plus loin cette année-ci.
07:14Et bien justement, c'est intéressant ce que vous dites.
07:17D'ailleurs on voit Barack Obama qui mouille vraiment la chemise, qui les engueule et qui
07:21va aller récupérer le vote noir, notamment, tout ce qu'il peut aller chercher.
07:26On voit ces derniers jours que ça se joue sur ça.
07:29Mais Philippe Corbet, vous nous disiez il y a un peu plus d'un mois, à ce micro, vous
07:32étiez là, début septembre, que Kamala Harris était la favorite de cette élection.
07:38On a lu, Nicolas et moi, votre blog il y a deux jours et demi, et là on lit qu'elle
07:45a perdu le momentum.
07:46Qu'est-ce que ça veut dire ? Expliquez ce que c'est que le momentum.
07:49Le momentum, c'est ce qu'on appelle l'élan.
07:51C'est à la fois l'élan et le moment.
07:53Il y a eu un moment, Harris, très très clair, fin juillet, en août septembre, jusqu'au
07:58débat qui a été très fort et qui finalement a été jusqu'à fin septembre.
08:02On voit là, depuis quinze jours, trois semaines, que le moment s'est un peu effacé, ou plutôt
08:08éparpillé, et que Donald Trump a réussi, par des efforts, par une stratégie cohérente,
08:14à retrouver du vent dans les voiles.
08:15Et c'est assez audacieux ce qu'a fait Donald Trump.
08:18La logique politique, la logique probablement de ses stratégies, aurait été de dire « le
08:21grand point faible de Kamala Harris, c'est l'inflation ». Donc il faut parler économie,
08:25matin, midi, soir, à tous les sujets, parler électorat populaire.
08:27Il a fait un choix inverse.
08:29Il a dit « non, je vais parler d'immigration ». Et il va parler d'immigration de façon
08:32de plus en plus radicale, comme le disait Ramayad, avec des propos totalement ubuesques,
08:36en parlant de déportation de masse, en parlant du sang souillé, des gènes souillés, il
08:45a parlé aussi de… « des clandestins venus des cachots du monde entier que Joe Biden
08:51a laissé entrer, que Kamala Harris va laisser entrer, ces clandestins qui viennent des prisons
08:55du monde entier ». Il dit même que des pays étrangers, des pays d'Amérique latine,
08:58envoient, vident de leur prison, envoient délibérément des criminels assoiffés de
09:02sang, je reprends ces mots, pour semer la panique en Amérique, pour affaiblir l'Amérique.
09:06C'est beaucoup plus radical que ce qu'il disait en 2016 et 2020.
09:09Mais cet argument, visiblement, c'est son intuition, son instinct, semble être un argument
09:13qui lui permet de dépasser, en tout cas, on le voit dans certains sondages, de parler
09:16à des électorats qui s'interrogeaient sur lui et notamment des électorats noirs, latinaux
09:22et plutôt des hommes.
09:23Pourquoi ça marche, Ramayad ? Et pourquoi la dynamique Harris s'enlise ?
09:28Ce qui est assez incroyable, c'est que sur cette question de l'immigration notamment,
09:34il est lui, Donald Trump, à l'origine de la faillite du seul deal sur l'immigration
09:42qui aurait pu exister dans ce pays-là, parce qu'il n'y a pas eu de loi sur l'immigration.
09:45On dit en France, c'est la 30e loi sur l'immigration en 20 ans, mais aux Etats-Unis, il n'y a pas
09:50eu de loi sur l'immigration depuis 1996.
09:53Et ça aurait pu arriver en février dernier, avec ce deal bipartisan de 20 milliards de
10:01dollars qui était porté par différents membres du Congrès, Murphy, Cinéma et Langford,
10:09et à cause de Trump, il a dit, non, vous ne faites pas le deal, parce que j'utilise
10:16le thème de l'immigration pour ma campagne électorale.
10:19Ça, c'est le premier point.
10:20Le deuxième point, c'est l'économie.
10:23Alors l'inflation, certes, en 2022, le niveau de l'inflation avait atteint un taux de 9%,
10:31mais là, il a été contenu à 2,5%, au point que la Fed peut réviser ses taux.
10:36Et je rappelle quand même que Joe Biden a créé des millions d'emplois aux Etats-Unis.
10:45Le taux de croissance familiale est à 30%.
10:47Alors pourquoi elle n'est pas en tête dans les sondages, largement ?
10:50Elle-même, d'ailleurs, on dit que c'est vrai qu'elle a perdu son momentum, parce que c'est
10:55la campagne, c'est la dynamique de campagne, c'est comme ça, mais quand même, on oublie
10:59très vite qu'il y a encore quelques semaines, elle avait fait le rassemblement autour d'elle
11:05au niveau du Parti démocrate.
11:06Très très vite, la transition s'est faite.
11:07Mais c'est vrai, est-ce que vous dites, mais qu'est-ce qu'elle a perdu, même pas en un mois et demi ?
11:10Alors, Yves Chamonk, peut-être, ou Ramayad, allez-y.
11:12Je suis plus ou moins d'accord avec tout ce que Ramayad et Philippe Corbé viennent de dire,
11:16mais je crois qu'il y a un peu une tendance à dire, si les Américains ne vont pas voter contre Trump,
11:21s'ils ne vont pas voter pour Kamala Harris, ça doit être parce qu'ils sont irrationnels,
11:24ça doit être parce que peut-être ils sont racistes ou sexistes.
11:27On ne peut pas le comprendre.
11:29Et en fait, je crois qu'il faut faire un effort pour comprendre ces faits-là.
11:34Alors, par exemple, sur l'inflation, c'est bien vrai que maintenant, l'inflation est sous contrôle,
11:38que les prix aujourd'hui en Amérique ne sont pas beaucoup plus hauts qu'il y a un an.
11:42Mais ce n'est pas comme ça que les gens normales pensent.
11:44Ils comparent les prix aujourd'hui aux prix qu'il y avait il y a cinq ans ou il y a dix ans.
11:48Et c'est vrai que pendant des temps de l'administration de Joe Biden,
11:52il y avait une inflation d'environ 10 % par an, qui a beaucoup, beaucoup changé les prix.
11:57C'était le cas dans d'autres pays aussi.
11:59Alors, ce n'est peut-être pas la faute de Joe Biden,
12:01mais c'est certainement vrai que pour un voteur normal, il va au supermarché et il dit
12:05« Bah, en fait, c'est beaucoup, beaucoup plus cher qu'avant, c'est compréhensible. »
12:09C'est la même chose sur l'immigration. Je ne suis pas du tout d'accord avec Donald Trump.
12:12Mais c'est absolument vrai que dans la première année, dans la deuxième année de l'administration de Joe Biden,
12:18il a pris certaines décisions, il a révoqué certains ordres exécutifs
12:23qui ont amené à une croissance très, très vite de nombre d'immigrations sans papier qui sont arrivées aux États-Unis.
12:33Et c'est ça aussi qui a vraiment changé le débat sur ça.
12:36Alors, si on regarde les Latinos, par exemple, les voteurs d'origine latino-américains,
12:40une majorité est maintenant en faveur de la déportation des immigrés qui, eux aussi, arrivent de l'Amérique latine.
12:48Voilà, ils sont pour fermer la porte qui leur a permis de rentrer dans le pays.
12:53Philippe Corbet, comment vous expliquez ? Est-ce qu'elle a failli tout simplement Kamala Harris ?
12:59On a dit qu'elle a donné très peu d'interviews par rapport au clan Trump, qu'elle sursurveille, qu'elle cadenasse tout, qu'elle n'a pas assez donné.
13:08Comment vous expliquez qu'en un mois et demi, elle ait perdu l'élan de la Convention démocrate ?
13:12Une campagne américaine, elle dure très longtemps.
13:14Donald Trump est candidat depuis mi-novembre 2022, c'est-à-dire qu'il est en campagne depuis quasiment deux ans.
13:19Elle, elle est candidate depuis le 21 juillet dernier, c'est-à-dire qu'elle a dû mener une campagne en trois mois.
13:24Et on voit que, par exemple, elle n'a pas réussi, elle n'a pas eu le temps de se faire bien connaître des Américains.
13:30Au fond, elle avait été élue en 2020, mais ça n'était pas le personnage principal de la campagne Biden.
13:36Elle a été au pouvoir comme vice-présidente pendant quatre ans, mais les vice-présidents sont souvent en rôle très secondaire.
13:41Et au fond, beaucoup d'Américains ne savent pas exactement qui elle est.
13:43Donc elle a dû passer beaucoup de temps à définir qui elle est, rappeler qu'elle avait été procureure,
13:47tout en disant « attention, mais ce n'est pas pour autant que je serai ceci ou cela ».
13:51Il y a toujours une question de « qui est-elle vraiment ? », alors que tout le monde sait qui est Donald Trump.
13:55On l'aime, on ne l'aime pas. Mais d'une certaine manière, il n'y a personne en Amérique qui ne découvre Donald Trump.
14:00Donc cette difficulté-là, elle est importante.
14:02Et la deuxième, c'est qu'elle est la vice-présidente d'un pouvoir sortant qui est plutôt impopulaire, même assez largement impopulaire.
14:10Et donc elle essaie d'incarner le changement tout en étant la sortante, ce qui n'est quand même pas facile.
14:14Donc elle fait ce qu'elle peut, et d'une certaine manière, qu'on soit à 50-50 ou 48-52 à 15 jours de l'élection,
14:21ce n'était pas gagné à trois mois. Donc ça ne veut pas dire qu'elle ne peut pas gagner.
14:24Ça veut dire qu'elle doit, dans les 15 derniers jours, d'une certaine manière, toucher des gens que pour l'instant, elle n'arrive pas à toucher.
14:28– Et Biden lui donne un coup de main ? Il a digéré ou pas ?
14:32– Disons qu'à chaque fois que Biden parle, il l'embarrasse plutôt qu'à Malaris.
14:36C'est-à-dire qu'il… il y a quelques jours, par exemple, il y avait des bons chiffres économiques,
14:40il s'est pointé dans la salle de presse de la Maison Blanche pour se vanter de ces chiffres-là.
14:44Je comprends que lui, par égo, ait envie de mettre en avant des bons chiffres,
14:47mais pour toute une partie de l'Amérique qui, comme le disait H.A. Monk, a une perception différente de l'économie,
14:52ça a donné une impression de ventardise déplacée.
14:56– Un problème de Joe Biden dans cette campagne reste que les Républicains peuvent poser une question simple à Kamala Harris
15:05et aux autres démocrates, et c'est « est-ce que vous êtes stupide ou est-ce que vous nous avez menti ? »
15:11Parce que c'est très clair à ce moment-là que Joe Biden a des vrais problèmes à l'acrité mentale,
15:18qu'il a eu ces problèmes depuis des années, et les démocrates n'en ont pas parlé.
15:23Alors c'est évident en politique, si tu es la vice-présidente, tu ne peux pas dire la vérité sur ton président,
15:30sur ton chef qui, en fait, a des problèmes à l'acrité mentale,
15:33mais pour des voteurs normaux, c'est difficile à communiquer.
15:36Et pourquoi tout nous a dit, à chaque étape, que Joe Biden est la personne la plus vivace, la plus énergétique du monde ?
15:45On a très bien vu dans ce débat qu'en fait, il ne l'est pas.
15:48– Oui, il ne l'est pas, enfin Donald Trump non plus,
15:50elle essaye de jouer Kamala Harris ces derniers jours sur l'âge de Donald Trump et sur ses divagations,
15:56parce que lui aussi, elle dit à juste titre, il ne termine pas une phrase, ou alors il part parfois sur des…
16:02– Oui, elle essaye en fait aussi de sortir de la caricature qu'on voudrait faire d'elle.
16:10Par exemple, elle sort des sentiers battus en affirmant,
16:17pour toucher l'électorat sans doute républicain ou modéré ou indépendant, qu'elle a une arme.
16:22Bon, et puis elle répète plusieurs fois qu'elle a une arme,
16:25et qu'on lui demande si elle va tirer, si elle va tirer, oui, oui, bien sûr, je vais tirer en rigolant.
16:29Bon, ça, c'est quand même quelque chose qui veut…
16:33c'est un élément de campagne pour s'adresser à l'électorat de Donald Trump.
16:36Quand elle va chez Fox News pour faire une discussion,
16:40comme pour combler la frustration de ne pas pouvoir débattre avec Trump,
16:44qui, je le rappelle, lors du premier débat, elle l'avait largement battue,
16:46enfin, on en parle comme si c'était il n'y a pas si longtemps quand même.
16:50Donc, elle se retrouve dans un entretien très musclé face au…
16:55– Avec la star de Fox.
16:58– Bon, ça aussi, c'est une manière de s'adresser et de sortir de la caricature peut-être ultra-démocrate
17:03qu'on voudrait faire d'elle.
17:04Quand elle choisit Tim Walz, son vice-président, qui est un homme de la campagne,
17:10qui ressemblerait exactement du terroir, qui est son antithèse en apparence,
17:15ça aussi, ça dit quelque chose, c'est sa volonté de sortir d'une éventuelle caricature.
17:19Et puis, elle a été première flic de San Francisco, première flic de Californie,
17:22et elle le rappelle régulièrement.
17:25Donc, c'est quelqu'un qui, je pense, a tout donné.
17:28Et que c'est difficile de dire « ah, elle n'a pas fait ça, elle n'a pas fait ça ».
17:32Si elle ne gagne pas cette élection, c'est peut-être qu'une bonne partie de l'Amérique,
17:38je rappelle, une bonne partie qui refuse toujours le résultat de l'élection de 2020 quand même,
17:43l'aura voulu, voilà.
17:44– On va passer au Standard Inter, où nous attend Simon.
17:47Bonjour Simon, bienvenue.
17:50Vous êtes là ? Oui, on vous écoute.
17:53– Oui, je voudrais savoir si on peut se poser la question, ou vous poser la question,
17:56de savoir si la culture woke et sa diffusion dans la société américaine,
18:01notamment dans les écoles, n'est pas une des raisons qui peut aussi faire perdre le camp démocrate
18:06et constituer une sorte de plafond de verre dans sa conquête des hommes,
18:09et en particulier, par exemple, des hommes de culture afro-américaine
18:13dont le New-York Times stigmatisait un petit peu l'autre jour le machisme.
18:19– Merci Simon pour cette question qui veut répondre, il y a Chamounk, allez-y.
18:23– Oui, absolument, alors je viens de voir un sondage par exemple,
18:26dans lequel 61% des Américains disent que le parti républicain,
18:29le parti de Donald Trump, est trop extrême.
18:31Alors ça devrait aider les démocrates à gagner,
18:34ce n'est pas le cas que l'Américain moyen aime bien Donald Trump,
18:37mais dans le même sondage, on voit aussi que les 55-56% des Américains
18:41pensent que le parti démocrate, lui, est aussi trop extrême,
18:45et c'est certainement lié à la perception que le parti démocrate soit woke,
18:52qu'il fait partie du milieu de l'élite américaine qui domine les institutions
18:58et qui est beaucoup partie sur ses idées,
19:00et c'est un des problèmes de Kamala Harris,
19:03parce qu'en fait, à la fin, je crois, probablement,
19:06parce qu'on est sûr qu'elle est assez modérée,
19:09qu'elle était le premier flic de San Francisco,
19:12comme Ramayad vient d'évoquer, etc.
19:14– Oui, mais il y a San Francisco dans le premier flic de San Francisco,
19:19c'est quand même ça le problème.
19:20– Et on lui ressort des déclarations qu'elle avait dites il y a quelques années
19:25qui sont plus radicales que ce qu'elle pense aujourd'hui.
19:28– Dans la campagne de 2020, quand elle voulait devenir la candidate démocrate,
19:33elle a pris des positions très de gauche,
19:36elle a par exemple demandé aux gens qui la suivaient sur Twitter
19:43de donner de l'argent pour des gens qui avaient fait des crimes
19:49pendant les manifestations de 2020.
19:51– Ramayad, vous en parlez du wokisme dans votre livre,
19:54vous dites « l'obsession wokiste a été opportunément fabriquée
19:57par des extrémistes dont l'agenda politique
19:59est de se débarrasser pour de bon des politiques de lutte
20:02contre les discriminations », vous écrivez ça,
20:03mais manifestement, il y a un retour de bâton anti-wokiste partout,
20:07et dans ce vote notamment,
20:08et quand vous parlez des jeunes hommes de moins de 30 ans,
20:11c'est une réaction, ce que dit Philippe Corbet, anti-wokiste.
20:14– Retour de bâton, c'est le titre du chapitre sur le féminisme.
20:18On assiste à un backlash, effectivement, sur toutes ces questions,
20:22une sorte de résistance, mais qui n'est pas nouvelle.
20:25Je veux dire, dans les années 60,
20:26quand les femmes se battaient pour leurs droits reproductifs,
20:29il y avait également en face un mouvement patriarcal très fort,
20:32incarné d'ailleurs par des femmes, pour s'opposer.
20:34Il faut voir autour aujourd'hui, puisque cette histoire homme-femme,
20:38c'est vrai que c'est une campagne très genrée au niveau de l'électorat,
20:40mais de la même manière que Kamala Harris fait des efforts
20:43pour se faire passer pour moins radicale qu'elle ne l'est,
20:46Donald Trump, de temps en temps, envoie un signal,
20:49il s'entoure d'une espèce de garde prétorienne féminine,
20:52qui, certes avec une arme à la main,
20:54mais qui, en tout cas, essaie de tenir des propos parfaitement…
21:01qui accompagnent le masculinisme trumpien.
21:04– Quand vous écoutez certaines émissions d'opinion de Fox News
21:08ou des radios conservatrices, qui sont des émissions très écoutées
21:11aux Etats-Unis, ou des podcasts, l'un des sujets qui revient beaucoup,
21:13c'est la question trans, des droits trans.
21:16Et notamment, une déclaration ancienne de Kamala Harris,
21:19se disant favorable au financement par de l'argent public
21:22de la transition de genre pour des prisonniers.
21:25C'est une position ancienne, elle ne revient plus sur ce sujet-là,
21:28mais on voit bien que ça a rentré dans l'esprit
21:30de beaucoup de républicains ou de soutiens de Donald Trump,
21:33et on voit les soutiens de Donald Trump,
21:34ou les relais d'opinion comme des animateurs radio ou télé,
21:37reprendre beaucoup cette question trans,
21:39y compris en attaquant Tim Walz, qui est surnommé « Tump on Walz »,
21:45parce qu'il avait souhaité que des distributeurs de tampons
21:48soient présents dans les toilettes des hommes également.
21:51C'est une question qui est lancinante, qui ne fait pas la lune des journaux,
21:54mais qui est très présente dans le discours autour de Donald Trump.
21:56Et qui fait écho au niveau étranger aussi,
21:59parce que des présidents ou chefs d'État comme Vladimir Poutine,
22:03certains pays du Sud, beaucoup et de plus en plus,
22:06se rejoignent sur cette question de l'identité sexuelle
22:09et des théories du genre, pour incarner quelque part une sorte d'attraction.
22:12Je raconte ça dans mon livre, où sur la partie politique étrangère,
22:15c'est un écho très très profond,
22:17et c'est la raison pour laquelle sur la scène internationale,
22:19un Donald Trump n'est pas si isolé, malgré son idéologie isolationniste.
22:23Il y a un retour de bâton puritain partout, et ça n'épargne pas les États-Unis.
22:29Question d'Axel sur l'appli d'Inter.
22:31Quel regard portez-vous sur le soutien d'Elon Musk à Donald Trump ?
22:36Et Elon Musk peut-il faire basculer la présidentielle ? Qui veut répondre ?
22:42Vas-y, Philippe.
22:44Si Donald Trump est élu, il devra remercier Elon Musk,
22:49qui aura mis tous ses efforts ces derniers mois.
22:51C'est vraiment une question de ces tout derniers mois.
22:53Ça vient d'une discussion autour d'un petit déjeuner entre les deux à Palm Beach en mars,
22:58quand Donald Trump lui a dit « c'est le moment de s'engager, c'est le moment de mettre de l'argent ».
23:01Ces derniers jours, il promet de donner un million de dollars par jour
23:06à des gens qui s'inscrivent sur les listes électorales dans une sorte de tirage au sort.
23:10C'est totalement illégal par ailleurs.
23:11Mais il met tout son effort aussi symbolique.
23:13C'est-à-dire qu'avec Musk, c'est l'idée d'une Amérique conquérante,
23:17d'une Amérique qui va vers mars, d'une Amérique innovante.
23:21Il ne faut jamais oublier une chose sur Musk.
23:22Musk vient d'Afrique du Sud.
23:23Il a grandi dans l'Afrique du Sud de l'apartheid.
23:25Et ça a marqué aussi son développement personnel.
23:28Pour terminer, il nous reste 30 secondes.
23:30On va vous demander une prédiction.
23:32On ne vous en voudra pas.
23:33On précise d'ores et déjà qu'on ne vous en voudra pas, parce que personne ne peut savoir.
23:38Qu'est-ce qui va se passer aussi dans ces 15 derniers jours ?
23:41Est-ce qu'il va y avoir un « game changer » ?
23:44Quelque chose qui va faire changer le cours et redonner du vent dans les voiles d'un « que tu aimes à l'Aris » ou pas ?
23:50Allez, on se lance.
23:52On est en octobre.
23:54Il y a un mot qui ne change pas.
23:56Ça fait un an que vous dites « Donald Trump va être élu ».
23:58Non, non, non.
24:00C'est bien possible qu'il va être élu.
24:02Je crois que c'est comme jeter une monnaie.
24:05C'est 50-50.
24:07Chaque personne qui prétend avoir la réponse n'est pas sérieuse.
24:11En fait, bon, on connaît.
24:13Y'a Chamounk qui ne se lance pas.
24:15On le comprend.
24:17Il la joue à pile ou face.
24:19Moi, j'essaie de rationaliser un peu autant que possible.
24:21Un manial, un nom.
24:23Je me réfère à Ned Silver.
24:26Non, attend, Ned Silver, parce que Philippe Corbière en parlait.
24:29Qui fait des statistiques.
24:31Qui dit que c'est le vote populaire qui pose problème aux démocrates.
24:33Pour moi, c'est 50-50.
24:35Il faut qu'elle gagne à 3-4 points de plus que Donald Trump
24:39pour pouvoir l'emporter.
24:41C'est ça qui rend les choses compliquées.
24:43Vous mouillez pas beaucoup.
24:45Si c'était demain, demain mardi, il gagnerait.
24:47Mais en 15 jours, il peut y avoir quelque chose qui se joue.
24:49C'est ceux qui hésitent encore.
24:51Ceux qui n'ont pas encore fait leur choix.
24:53Après des années de campagne Trump.
24:55Y'a quelque chose qui peut jouer.
24:57Est-ce qu'ils veulent reprendre 4 ans de Trump ?
24:59Est-ce que le spectacle Trump ne les épuise pas ?
25:01Est-ce qu'ils n'ont pas envie de baisser le son ?
25:03Et ça, ça peut être déterminant.
25:05Merci à tous les trois.
25:07Yashamouk, artiste, ancien correspondant de RTL aux Etats-Unis.
25:11On renvoie à votre blog.
25:13Très bon.
25:15On le lit toujours avec plaisir.
25:17Yashamouk, votre livre,
25:19Le piège de l'identité aux éditions de l'Observatoire.
25:23Ramayad, votre livre,
25:25Les leçons de l'Amérique.
25:27Nations et puissance chez l'Armatan.
25:29Merci à tous les trois.

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