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Le témoignage de Mathilde, qui accuse Gérard Miller d'un viol survenu en 2004, alors qu'elle était âgée de 19 ans. Une enquête a été ouverte par le parquet de Paris en février 2024 à la suite de six signalements contre le psychanalyste, accusé par une soixantaine de femmes de viols ou agressions sexuelles.

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Transcription
00:00livre enquête sur les agressions sexuelles dont est accusé le célèbre psychanalyste Gérard Miller, un ouvrage qui décortique
00:08à ce qui ressemble finalement à un système de prédation. L'autrice Chloé Vienne est mon invitée ce soir, elle ne vient pas seule, elle vient avec Mathilde
00:15qui est l'une des accusatrices. Bonsoir à vous deux, merci d'avoir accepté mon invitation.
00:21Chloé, en fait tout est parti de ce qui s'est passé pour vous, c'était en 2003, c'est ça ? Vous êtes étudiante en école de journalisme avec une de vos amies
00:31qui est également étudiante, c'est votre amie Armel qui arrive à décrocher une interview avec celui qui était à l'époque une véritable star du petit écran, Gérard Miller.
00:42Effectivement, tout commence par cette histoire où Armel décide, c'est extraordinaire pour elle d'avoir cette interview, elle fait cette interview
00:54et puis je lui dis tout de suite après, dès que tu as fini, tu m'appelles et on se rejoint. Donc elle la prépare, elle m'explique les questions qu'elle va donner,
01:03enfin vraiment c'était très très préparé et puis elle sort de chez Gérard Miller et là elle m'appelle et c'est l'effondrement. Elle suffoque.
01:15Pourquoi ?
01:16Et elle est incapable à ce moment-là de me dire ce qui s'est passé. Donc je la rejoins, j'étais avec des amis, je quitte tout le monde et je vais la rejoindre
01:29et là elle qui a fait tant de fois mon code pour rentrer dans mon appartement, qui a les clés de mon appartement, elle est incapable de faire le tour de clé
01:39et elle est assise dans l'escalier et elle m'explique ce qui lui est arrivé chez Gérard Miller et l'agression qu'elle a subie.
01:48Nous sommes avec Mathilde également, bonsoir. Vous avez vécu finalement un peu la même chose, c'est ce même mode opératoire qui est d'ailleurs décrit dans le livre.
01:57Nous sommes le 9 mars 2004, vous avez 19 ans, vous assistez à l'émission de Laurent Ruquier, On a tout essayé, avec laquelle participe notamment Gérard Miller.
02:07Gérard Miller vous invite ensuite à aller voir un spectacle, vous allez voir le spectacle, ensuite il vous invite à aller chez lui et là que se passe-t-il ?
02:16Un peu comme à peu près toutes les autres victimes en fait, c'est vraiment, c'est pas un peu la même chose, c'est quand même vraiment pas loin d'être tout à fait la même chose,
02:23c'est vraiment le même parcours, à savoir une visite de son hôtel particulier qui commence par la salle de projection et puis après on va boire ce fameux verre.
02:34Et puis ce qu'il nous a proposé, à l'origine c'est une invitation pour boire un verre. On va boire un verre, il faut savoir que le verre va être vite expédié.
02:43Il y avait quoi dans ce verre ?
02:45Alors moi du coup c'était, j'en avais parlé à une amie, je lui ai dit c'est un alcool de vieux, je ne me souviens pas ce que c'était, mais en tout cas je buvais très peu, enfin voilà c'était un alcool de vieux, donc je ne peux pas dire ce que c'était exactement.
02:56Et puis ensuite il va nous proposer, parce que je suis avec une amie, il va nous proposer en fait un petit jeu, comme il fait avec ses patients, qu'il fait avec ses patients.
03:07Et donc en fait on va monter à l'étage, donc dans la salle, la fameuse salle japonisante, donc moi je ne me souviens pas exactement des détails de cette salle, si ce n'est qu'on va être allongé, il va nous demander de nous allonger, il va nous mettre dans un état de détente.
03:22Et vous vous sentez fatiguée à ce moment-là aussi ?
03:24Oui, en fait le moment où je monte en fait l'escalier, quand on monte à l'étage, je me souviens être un peu groggy, donc je ne sais pas si c'est l'alcool à ce moment-là, en tout cas une espèce de, voilà je me suis dit je m'accroche à la rampe quand je monte, je me souviens que je n'étais pas…
03:39Est-ce qu'on peut supposer qu'il y avait autre chose que de l'alcool dans votre verre ?
03:42Bah vraiment ça, on ne peut vraiment pas le dire, c'était il y a 20 ans, voilà, c'était il y a 20 ans et on sait qu'avec la soumission chimique, 48 heures après, il n'y a plus du tout de traces.
03:53En tout cas, vous n'êtes pas vraiment dans votre état.
03:55Non, clairement.
03:56Vous êtes allongée donc, et qu'est-ce qu'il se passe ensuite ?
03:59Et donc en fait, il va commencer à nous mettre dans cet état de relaxation par, je ne sais plus, de la respiration, et en fait progressivement, en même temps qu'il nous parle en fait, il va, donc même si en train, c'est cette main-là en fait, il va la prendre et il va commencer à me la caresser, mais le terme caresse me gêne, en tout cas il va la toucher et puis après il va passer sa main sous mon pull, sur mon ventre, jusqu'à la poitrine.
04:21Et vous le laissez faire ?
04:23Mais ce qui est très étrange à ce moment-là, en fait, je suis absolument dans un état de confiance, de détente, il faut savoir que quand on est dans un, en fait je suis dans un état de conscience modifiée, je n'ai plus de discernement.
04:34Parce que lui, il dit qu'il pratique l'hypnose, est-ce que vous étiez hypnotisée à ce moment-là ?
04:37Ça c'est pareil, je ne pourrais pas le dire, en fait, ce qui est très compliqué...
04:40C'est comme un prétexte en fait, je pense qu'il utilise l'hypnose.
04:43D'accord, mais je voudrais savoir pourquoi, finalement, vous n'arrivez pas à réagir, vous êtes...
04:48Je ne saurais pas l'expliquer, je ne peux que le constater.
04:50Et c'est ça qui rend la chose d'autant plus difficile après, à cerner, pourquoi, qu'est-ce qui s'est passé, pourquoi je n'ai pas réagi, pourquoi...
04:56Donc là, il y a un attouchement ?
04:57Oui, qu'on peut qualifier d'agression sexuelle.
04:59D'accord, donc attouchement du corps, des seins, du sexe ?
05:02Voilà, non, des seins.
05:03Des seins ?
05:04Voilà, ça fait...
05:05Et ensuite, qu'est-ce qui se passe ?
05:06Et donc ensuite, on va... Je ne sais pas comment ça s'arrête, est-ce que c'est mon ami qui met fin ou... Voilà, on va sortir, mon ami part.
05:14D'ailleurs, il me dit de partir avec elle, parce que je m'apprête à faire.
05:19Et lui, en fait, me propose à ce moment-là, il me dit, mais tu peux rester si tu veux, j'ai une chambre d'amis, je peux te prêter un tee-shirt.
05:25Et cette phrase-là, pour moi, en fait, va remettre de la confiance, me dire qu'en fait, tout est OK, parce que j'ai envie, que ce soit que je n'ai pas du tout envie.
05:31Pourquoi vous avez envie que ça se passe bien avec lui ? Parce que c'est sa notoriété ?
05:34Pas que ça se passe bien.
05:35Parce que vous avez confiance, c'est quelqu'un que vous admirez ?
05:37Je ne veux pas que ça se passe bien avec lui, je veux que ça se passe bien pour moi, que rien de grave m'arrive, en fait.
05:43Et je préfère choisir que ça se passe bien, plutôt que ce qui est en train de se passer, de me dire que c'est terrible.
05:49Et donc de me dire que finalement, c'est en train de...
05:51Qu'en fait, tout va très bien, que juste avant, ce qu'il m'a fait, c'est ce qu'il fait à ses patients, et que donc, c'est tout à fait OK.
05:55Et que là, ce qui va se suivre est une soirée pyjama, pendant laquelle on va discuter.
06:01Pour moi, c'est OK, en fait, à ce moment-là.
06:03Et alors ensuite, vous dormez sur place ?
06:05Ah non. Non, par contre, je ne verrai pas la couleur du t-shirt.
06:08C'est-à-dire qu'en fait, on va commencer à discuter, et pendant qu'on est en train de parler, il va se tourner vers moi.
06:15Et là, quand je l'écris, en fait, j'ai sa langue dans ma bouche.
06:20Il tente de vous embrasser ?
06:21Voilà, alors je ne dis pas qu'il m'embrasse, je n'ai jamais dit ce mot, j'en suis rendue compte.
06:26J'ai toujours dit qu'il avait mis sa langue dans ma bouche, et c'est vraiment ce qu'il a fait.
06:28C'est aussi froid et mécanique que ça.
06:30D'ailleurs, vous avez cette expression, il a profité de moi comme un buffet froid.
06:36Voilà, c'est ça. Donc là, à ce moment-là, en fait, à partir du moment où j'ai sa langue dans ma bouche,
06:39et où je me rends compte que tout ce qui s'est passé avant, en fait, n'était pas aussi OK que ça en avait l'air,
06:44ou que je voulais bien me le faire croire.
06:46Et là, en fait, je vais basculer dans un état de sidération, donc je ne peux plus bouger, je ne bouge plus, en fait.
06:53Et je vais même, ce qu'on appelle, dissocier.
06:56À ce moment-là, je ne sais pas, je ne comprends pas, donc c'est extrêmement effrayant.
06:58C'est qu'en fait, je vois la scène du dessus.
07:01C'est très particulier comme état psychique, surtout quand on ne sait pas ce qui est en train de nous arriver.
07:07Et la seule chose qui se passe, c'est que je ne bouge plus, mais mon corps tremble, en fait.
07:11Et d'ailleurs, il le constate et il m'en fait part de manière très...
07:15C'est OK pour lui, apparemment, que je ne bouge plus.
07:18Je pense que mon regard doit être pas très animé.
07:22Et je tremble, et c'est OK pour lui. Il continue.
07:26Il se passe quoi ?
07:28Et alors là, je sais, c'est ce que je ne détaillerai pas, mais j'ai porté plainte pour viol.
07:32Donc il vous a violé ?
07:34Voilà, il m'a violé, voilà, tout à fait.
07:36Et lui, il pensait que vous étiez consentante ?
07:38Alors, il peut penser...
07:40Non, mais j'essaie de...
07:41Je n'en sais rien, je veux dire, la question du consentement, à ce moment-là, c'est pas tellement...
07:46En tout cas, vous n'avez rien laissé montrer que vous étiez...
07:49Non, et il n'y a eu aucun signe que ça allait arriver.
07:53Enfin, c'est vraiment, quand je parle, c'est un piège.
07:56C'est vraiment, à ce moment-là, pour moi, c'est...
07:58L'assidération vient de la surprise immense et de l'effroi et de la peur
08:02et d'une incompréhension de ce qui est en train de se passer,
08:04de ce que ce vieux monsieur est en train de me faire.
08:07Il avait quel âge, à l'époque ?
08:08Et lui, il a 10 ans plus que mon père. Je ne sais pas, il avait plus de 50 ans.
08:12Donc, pour vous, c'est plutôt une figure paternelle, rassurante.
08:16C'est quelqu'un qui parle bien, qui est psychanalyste.
08:19Mais voilà, pas que.
08:20Et donc, en fait, vous êtes une jeune fille qui est plutôt admirative de cet homme.
08:24Il se dit, tiens, c'est peut-être intéressant de le rencontrer.
08:26En fait, c'est important, c'est qu'à ce moment-là, en fait, il joue sur plusieurs tableaux.
08:30Il y a ces différentes statures qui créent justement...
08:33C'est la fameuse dissymétrie dont il parle.
08:35C'est OK, mais il n'y a pas juste la dissymétrie liée à l'âge, en fait.
08:38Il y a la dissymétrie liée au fait que c'est un chroniqueur,
08:40que je vois régulièrement à la télé, quelque chose de familier,
08:43donc j'ai confiance en lui.
08:44Il est impressionnant parce qu'il y a les paillettes, etc.
08:47Et puis, effectivement, il y a aussi le côté psychanalyste.
08:49Moi, il joue de ça.
08:50Enfin, il en parle.
08:51Il évoque les jeux qu'il fait...
08:53Enfin, pardon, pas les jeux, mais ce qu'il fait avec ses patients.
08:56Et donc, il y a une forme de...
08:58Comme un médecin, en fait, quand il dit, allongez-vous.
09:00Donc, jamais vous auriez imaginé qu'il avait une idée derrière la tête ?
09:03Non, mais il n'y a pas de drague.
09:05Justement, ça, c'est hyper important.
09:07Il n'y a pas de jeu de séduction ?
09:09Non, c'est ce que j'ai constaté avec toutes les victimes.
09:11C'est qu'il n'y a pas de signaux faibles.
09:13C'est-à-dire qu'il n'y a pas d'ambiguïté ?
09:15Pas du tout.
09:16Quand elles y vont, pas du tout.
09:17Et d'ailleurs, Armel le dit très bien aussi.
09:19Il n'y a vraiment aucun geste qui aurait pu faire penser qu'il n'y a pas un compliment.
09:25Il y a combien de victimes déclarées, d'accusatrices ?
09:28Alors, c'est un peu compliqué, aujourd'hui, de donner un chiffre des victimes.
09:34On va le savoir à partir du moment où l'enquête préliminaire va se terminer.
09:41Là, on aura vraiment un chiffre de victimes qui ont porté plainte.
09:45Est-ce que vous dites qu'à chaque fois, il s'est produit à peu près la même chose ?
09:47C'est le même scénario ?
09:48Ce n'est pas à peu près la même.
09:50Avec la salle japonaise qui est décrite à chaque fois dans son notaire particulier ?
09:53Oui, le home cinéma, l'ordre.
09:55Oui, et puis ces mots.
09:57Il y a des mots qui reviennent tout le temps.
10:00Donc, c'est un mode opératoire.
10:02J'ai même dit un système de prédation.
10:04Est-ce qu'on peut utiliser ce terme ?
10:06Alors, pas sur le mode opératoire.
10:10Moi, je le vois comme une usine.
10:13C'est très mécanique.
10:15Il y a un côté très mécanique.
10:17Moi, je parlais de prédation parce que je me suis sentie une proie.
10:21En fait, je n'ai pas de problème à dire ce mot.
10:23C'est exactement ce que j'ai ressenti de la prédation.
10:26Et je pense à des pièges.
10:29C'est vraiment un scénario de captation.
10:32Il nous attrape, il nous saisit, il nous emmène.
10:34Cette maison, c'est comme le décor de son scénario de l'horreur.
10:37Oui, mais c'est la maison qui rassure.
10:39Si je comprends bien, c'est une maison qui rassure.
10:41Avec sa façon de parler qui rassure.
10:43Ce n'est pas une maison qui rassure, c'est une maison qui impressionne.
10:46C'est fait pour nous en mettre plein la vue.
10:48Oui, mais il a envie de te rassurer.
10:50C'est-à-dire qu'il a envie de rassurer les utiles.
10:52C'est ce que vous décrivez.
10:53Exactement.
10:54Je vais faire comme je fais avec mes patients.
10:56Je fais voir le home cinéma.
10:58Je présente les lieux.
11:00Tout ça est normal.
11:01Je peux mettre en confiance.
11:02C'est une façon de mettre en confiance, de faire voir les lieux.
11:04D'expliquer comment ça se passe.
11:06De faire voir son cabinet.
11:08De se sentir vraiment en confiance.
11:10C'est là où le piège est encore plus dur.
11:13Encore une fois, il n'y a pas de signaux faibles.
11:17Je voudrais vous faire écouter un document.
11:21C'est Gérard Miller interrogé sur l'affaire Depardieu.
11:24Écoutez ce qu'il disait.
11:26Nous avons au moins deux points communs.
11:28On s'appelle tous les deux Gérard et on appartient à la même génération.
11:31C'est une génération, incontestablement,
11:33qui a été élevée dans une ambiance machiste.
11:36C'est incontestable.
11:37Qui a vu néanmoins la naissance du MLF il y a 50 ans.
11:41Et qui a tout de suite été sensibilisée au fait que lorsque c'est non, ça veut dire non.
11:46Et donc, de ce point de vue-là,
11:48quel que soit l'âge que nous puissions avoir aujourd'hui,
11:50en disant qu'à notre époque, ce n'était pas la même chose.
11:52Il y a tout de suite eu, lorsqu'on avait 20 ans, cette idée que non, c'est non.
11:56Et qu'il y a un certain nombre de choses qui ne peuvent pas se faire.
11:59Ça ne veut pas dire que la gaudriole n'est pas possible.
12:02Que la drague n'est pas possible.
12:03Que plein de choses sont possibles.
12:04Il y a quand même un certain nombre de faits, s'ils sont avérés,
12:07qui sont des passages absolument clairs et nets.
12:09Le fait de prendre quelqu'un par la taille,
12:12de la plotter pour dire les choses un peu grossièrement,
12:14c'est de l'agression sexuelle.
12:16Surtout quand la personne a dit non.
12:18Donc là, il est très à l'aise pour dénoncer ce qu'a fait Gérard Depardieu.
12:22C'est assez saisissant quand même, ses propos,
12:24tenus il y a moins d'un an sur ce plateau.
12:27C'est ce que je raconte dans le livre.
12:29C'est que quand il sort de ce plateau,
12:31il va à la rencontre d'Emmanuel Dancourt,
12:34qui est aussi sur le plateau.
12:36Et du coup, il sort du plateau.
12:43Et là, il parle à Emmanuel Dancourt.
12:46Et il dit, je me pose la question de savoir,
12:50si j'ai eu le consentement, qu'est-ce que veut dire le mot consentement ?
12:54Donc c'est hyper troublant.
12:56Parce qu'on a l'impression, dans ce que vous faites voir,
12:59qu'il est complètement à l'aise avec le féminisme,
13:01avec le consentement.
13:02C'est des choses qu'il a complètement comprises.
13:04Et puis, au final, il sort de ce moment-là,
13:08donc de votre plateau,
13:09et il se pose quand même des questions essentielles.
13:11C'est-à-dire, est-ce que toutes ces conquêtes,
13:14selon lui, étaient vraiment consentantes ?
13:17Il faut se poser la question.
13:19Oui, mais je dirais que pour avoir un nom encore frédile
13:21qui est la question, la possibilité que ce...
13:24Mais est-ce que sincèrement, on peut imaginer
13:26que lui, il pense que vous étiez consentante ?
13:28Dans son état d'esprit ?
13:30Vu qu'il ne sait pas ce qu'est le consentement,
13:32en fait, il peut se raconter ce qu'il veut.
13:35Oui, c'est ça, il peut se raconter ce qu'il veut.
13:36Enfin, je veux dire, c'est pas...
13:38Mais je...
13:40La question ne s'est pas du tout posée, en fait.
13:42Vous avez hésité à porter plainte ?
13:45Alors, hésiter, là, en ce moment-là, non, pas du tout.
13:48Enfin, même, ça fait un an.
13:49À l'époque ?
13:50Non, à l'époque, quand j'avais...
13:51Parce que je rappelle que c'est...
13:52J'avais 19 ans.
13:53Alors, j'avais 19 ans.
13:54Il y a 20 ans.
13:55Voilà, quand ça s'est passé,
13:56j'étais à peu près incapable d'expliquer
13:58ce qui venait de m'arriver, ce qui s'était passé.
14:00Et j'étais dans...
14:01J'avais plutôt...
14:02Enfin, ce que font de nombreuses victimes,
14:03à savoir retourner la culpabilité contre moi, en fait.
14:07Et c'est au bout de deux ans, du coup,
14:10je vais aller dans une association
14:11et où là, la psychologue et la juriste que je vais rencontrer
14:15vont me dire que c'est un viol.
14:17Le mot viol vient de l'extérieur,
14:18il a fallu que je l'intègre.
14:21Et à ce moment-là, clairement,
14:23on me déconseille de porter plainte
14:25et ça me va très bien.
14:26On vous déconseille, pourquoi ?
14:27On me déconseille, mais ça me paraît faire sens.
14:31Je veux dire, à cette époque,
14:32il n'y avait pas la place, en fait.
14:34Il n'y avait pas la place.
14:35On ne pouvait pas être entendu,
14:36pas être cru.
14:37Et je pense que ça aurait été...
14:39Mais pourquoi ?
14:40Parce que c'est une star ?
14:41Parce que c'est un notoriété ?
14:42Parce que vous êtes jeune ?
14:43Bien sûr, bien sûr.
14:44C'est un combat perdu d'avance ?
14:45Bien sûr.
14:46Mon père me dit, mais tu te serais pris un TGV.
14:47Je pense que l'image, c'est exactement ça.
14:49On est déjà au plus mal.
14:50Pas ça, pas ça en plus, quoi.
14:52Pas me rajouter ça.
14:53Alors, justement, quel a été le déclic ?
14:55Et en fait, ça fait à peu près un an,
14:57ce sont tout est remonté.
14:59Il y a eu Adèle Haine,
15:00enfin tout ce que j'ai pu entendre.
15:01Quand j'ai lu les livres de Vanessa Springora,
15:04j'ai vraiment eu cette image
15:05de tirer le fil d'un tissu de mensonge.
15:08Il y avait tellement de choses à déconstruire.
15:11Il y a quand même une forme d'emprise
15:14dans son scénario de captation.
15:16Il rentre par effraction.
15:19Il y a plein de choses à déconstruire.
15:21Est-ce que les faits sont prescrits ?
15:23Dans mon cas, oui.
15:24Qu'attendez-vous finalement de la justice ?
15:26C'est très, très dur.
15:28C'est très, très dur de savoir
15:29que là, on est quand même très nombreuses
15:32à avoir été des jeunes majeurs
15:35au moment des faits.
15:36Et donc, pour nous, là, a priori,
15:38à la fin de l'enquête préliminaire...
15:39Il ne se passera plus rien.
15:40Voilà.
15:41On sera constatées comme témoins.
15:42Vous ne regrettez pas d'avoir peut-être
15:44plainte plus tôt, peut-être,
15:45pour éviter qu'il y ait d'autres victimes ?
15:46Non, je n'étais pas...
15:49On ne pense pas comme ça.
15:50On ne pense pas à d'autres victimes.
15:52Déjà, penser victime pour soi,
15:53déjà, se reconnaître soit victime,
15:55c'est quand même un cheminement
15:57et ça nous emmène à un endroit quand même
15:59assez sombre, difficile et douloureux.
16:00Donc déjà, c'est déjà pour soi.
16:02Et non, ce n'est pas quelque chose...
16:04Chloé, quelle est sa défense ?
16:06Qu'est-ce qu'il dit avec tous ces témoignages ?
16:09Moi, j'ai essayé de le joindre plusieurs fois.
16:12Il n'a jamais voulu me parler directement.
16:16Mais il ne reconnaît pas.
16:18Lui, il parle de consentement,
16:20il parle de dissymétrie, il parle...
16:23Voilà.
16:24Aujourd'hui, non.
16:26Peut-être qu'on apprendra plus de choses
16:28à partir du moment où il sera entendu aussi,
16:30parce qu'il dit à chaque fois
16:32qu'il réserve sa parole à la justice.
16:34Donc aujourd'hui, on a...
16:36Est-ce qu'il pourra répondre ?
16:37Puisque Mathilde nous dit que...
16:39Ah, bien sûr, oui.
16:40Il y a des mineurs,
16:42donc les faits ne sont plus prescrits.
16:46Oui, et pour les mineurs,
16:47les faits ne sont plus prescrits.
16:48Donc, bien sûr.
16:49Et il y en a plusieurs.
16:51Il y a plusieurs plaintes qui ne sont pas prescrites.
16:53Donc, oui.
16:54Donc, ils sont instruits en ce moment.
16:55Exactement.
16:56Mais s'il est jugé,
16:57ce ne sera pas pour l'ensemble de son oeuvre.
16:59Donc, bon, bref, voilà.
17:01De ses actes.
17:02De ses actes, oui.
17:03Mais il y aura sûrement des procès.
17:05On ne peut pas le...
17:07Oui, on espère.
17:08On espère.
17:09Je pense que la justice va en tout cas
17:11faire en sorte qu'il y ait une enquête
17:14et que les victimes soient entendues, en tout cas.
17:16Merci, Chloé Vivienne.
17:18Serial Miller aux éditions Stock.
17:20Merci, Mathilde, d'être venue sur le plateau témoigner,
17:22raconter ce qui vous est arrivé il y a maintenant 20 ans.

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