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Depuis le 15 avril 2023, la guerre au Soudan a plongé le pays dans l'une des pires crises humanitaires de ces dernières décennies.

Ce conflit fratricide entre l'armée soudanaise et les paramilitaires des Forces de Soutien Rapide (FSR) a déjà fait des dizaines de milliers de victimes et poussé près de 10 millions de civils à l'exode. À l’abri des caméras, ce drame se déchaîne à travers des actes de violences inqualifiables : viols de masse, exactions brutales, nettoyage ethnique, tandis que le spectre d’une famine à grande échelle plane plus que jamais sur le pays.
Au plus proche des lignes de front, dans un paysage de désolation, à Omdurman, ville qui jouxte Khartoum, encore en proie aux milices des FSR, les témoignages des Soudanais sont précieux. Les habitants reviennent au compte-goutte dans les quartiers libérés par l’armée. Au milieu du chaos, la résilience prend des formes inattendues. Le Soudan, au cœur de la dévastation, refuse de céder et lutte pour sa survie et son avenir.

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Transcription
00:00Nous sommes à Omdurman, sur la rive ouest du Nil.
00:16De l'autre côté, c'est en Khartoum, la capitale du Soudan, totalement inaccessible
00:24et où les combats font rage.
00:25Comment ça va ?
00:31Ça va bien, grâce à Dieu.
00:35Il y a eu une explosion dans notre maison.
00:40Deux roquettes sont tombées à l'intérieur, comme vous pouvez le voir.
00:45Awad est électricien.
00:46Quelques mois auparavant, il a fui les combats avec sa famille pour se réfugier au sud du
00:51pays.
00:52A son retour à Omdurman, il a découvert sa maison en ruine.
00:55Elle a une véranda et une chambre.
00:59Ici, la cuisine et derrière, la salle de bain.
01:03Tout le toit s'est effondré et ça, c'est la terre du toit.
01:08C'est une pièce ancienne en terre.
01:09Elle s'est effondrée.
01:10Il y avait des échanges de tirs avec l'armée.
01:24La milice était dans notre quartier.
01:26J'ai vu ce qui s'était passé quand je suis rentré avec l'armée.
01:31Les gens m'avaient appelé pour me dire que la maison avait brûlé.
01:34Mais Dieu nous dédommagera.
01:37Personne n'était présent, grâce à Dieu.
01:39Seule la maison a été touchée.
01:40On rassemble les briques ici et on va reconstruire complètement la maison.
01:59Awad n'est pas le seul à avoir vu sa maison bombardée.
02:06Ils sont des milliers dans cette situation.
02:11Depuis le 15 avril 2023, un conflit fratricide déchire le Soudan.
02:17Il oppose les forces armées soudanaises du général Abdel Fattah al-Burhan,
02:21de facto chef d'État,
02:23aux paramilitaires des forces de soutien rapide, les FSR,
02:26dirigées par le général Mohamed Hamdan Daglou.
02:30Les FSR tentent de s'approprier le pouvoir par la force.
02:34Selon plusieurs organisations internationales, dont l'ONU,
02:37cet affrontement sanglant se fait au prix d'exactions, tortures,
02:40exécutions sommaires, nettoyages ethniques et viols de masse.
02:45Les civils en sont les principales victimes.
02:55Le calme apparent des rues d'Amnourmane est trompeur.
03:00Ce n'est qu'escorté par l'armée soudanaise
03:02que nous avons pu exceptionnellement approcher la ligne de front.
03:07Dans la région, les paramilitaires mènent une guérilla urbaine intense,
03:12où les explosions de mortiers répondent aux tirs de kalachnikovs.
03:25Nous traversons un paysage de désolation.
03:34Les milices ont mené un pillage systématique,
03:37en passant chaque maison, commerce et institution au peigne fin.
03:44Au cœur de ce chaos, un commissariat de police accueille les plaintes
03:47des habitants qui ont été pris au piège des combats.
03:52Les témoignages unanimes révèlent une atmosphère de panique généralisée
03:55et l'impression que le cours de leur vie a basculé du jour au lendemain.
04:23Le paysage de l'Amnoumane a été détruit.
04:26Le paysage de l'Amnoumane a été détruit.
04:39Non loin des rives du Nil, dans un quartier déserté,
04:42se trouve ce qu'il reste de la maison de Khalifa,
04:44un des hauts lieux culturels du pays.
04:48Aujourd'hui accompagné de soldats,
04:50les responsables du musée veillent sur les fragments des collections
04:53que les pillards ont laissés derrière eux.
04:57Cette pièce appartenait au calife Abdullah al-Taridushi.
05:01Il se réunissait ici avec un certain nombre d'émirs.
05:05Ils discutaient des affaires d'État et de la manière de les gérer.
05:11Ce sont les vitrines où étaient exposées les collections.
05:14Il y avait des pièces historiques.
05:17Elles ont été volées par les milices.
05:22De ce côté, on peut voir une salle réservée à la monnaie,
05:25qui était à l'époque frappée et utilisée à Amnoumane.
05:32Elle a été complètement pillée.
05:38Cette salle, comme vous pouvez le voir, a été détruite, pillée,
05:41vandalisée par les milices.
05:47Cette histoire est importante pour le Soudan et pour le monde entier.
05:51C'est même un patrimoine mondial reconnu par l'UNESCO.
05:57Concernant le musée national du Soudan, on n'a aucune information sûre,
06:01mais il semblerait qu'il ait aussi subi des destructions et pillages.
06:08Les mêmes groupes qui ont occupé ici la maison de Khalifa
06:12se trouvent aujourd'hui dans d'autres musées,
06:14comme le musée ethnographique ou le musée national.
06:20Le musée est toujours menacé.
06:22Vous pouvez entendre les bruits des combats.
06:26En vérité, on ne se sent pas en sécurité à 100%.
06:33Le musée national du Soudan, situé de l'autre côté d'une île,
06:36au cœur de la ville de Khartoum, abrite des vestiges millénaires.
06:42Des artefacts de civilisations égyptiennes et couchites
06:45sont probablement perdus pour toujours.
06:53Les lieux de culte n'ont pas échappé à la folie destructrice.
06:58Mosquées et églises ont été pillées.
07:09Les tombes du cimetière chrétien, profanées,
07:12à la recherche du moindre objet de valeur.
07:24Non loin de là, le site de la radio-télévision soudanaise
07:27fait face à la partie de la ville encore occupée par les milices.
07:41Ces bâtiments et les archives qu'ils abritaient
07:43ont été ravagés en portant une part de la mémoire du pays.
07:56Si personne n'a voulu témoigner devant notre caméra,
07:59nous apprenons que dans ce dédale, les habitants auraient été détenus,
08:02torturés et pour certains, exécutés.
08:20Dans les avenues de la ville, de vastes panneaux honorent l'armée
08:23qui a fait partir tombés au combat.
08:29Aussi étonnant que cela puisse paraître,
08:31il suffit de parcourir quelques kilomètres
08:33pour se retrouver dans des quartiers animés
08:35où commerces et restaurants se succèdent.
08:42Les habitants n'ont d'autre choix
08:43que de vivre avec le danger omniprésent.
08:59De petits cafés traditionnels tenus par des femmes
09:01se réinstallent au milieu des décombres.
09:08Les rares lieux où se réunissent d'anciens voisins.
09:39C'est l'arrivée de l'aéroport.
09:41C'est l'arrivée de l'aéroport.
09:42C'est l'arrivée de l'aéroport.
09:43C'est l'arrivée de l'aéroport.
09:44C'est l'arrivée de l'aéroport.
09:45C'est l'arrivée de l'aéroport.
09:46C'est l'arrivée de l'aéroport.
09:47C'est l'arrivée de l'aéroport.
09:48C'est l'arrivée de l'aéroport.
09:49C'est l'arrivée de l'aéroport.
09:50C'est l'arrivée de l'aéroport.
09:51C'est l'arrivée de l'aéroport.
09:52Les habitants ainsi que les structures étatiques encore en place,
10:10Les habitants ainsi que les structures étatiques encore en place,
10:13profite de ce calme précaire pour s'atteler à la reconstruction de la ville.
10:21colossale face à l'ampleur des destructions.
10:33La plupart des infrastructures sont hors service.
10:36Il faudra des années pour un retour à la normale.
10:45Malgré les circonstances et l'ampleur de la tâche,
10:49les hommes s'affairent chaque jour aux quatre coins de la ville
10:51pour tenter de réparer ici un pylône, là, une canalisation.
11:12L'abnégation de certains travailleurs a permis d'améliorer,
11:15un temps soit peu, le quotidien des habitants.
11:21Ceci est la station de pompage de Beit Almal.
11:26Cette station alimente tout Omdurman.
11:31Nous travaillons très tôt, jusqu'à deux heures du matin,
11:33pour régler les problèmes de manière à ce que l'eau soit distribuée
11:38et que tout le monde puisse se sentir bien.
11:47Durant les combats, alors que personne ne pouvait venir ici,
11:50nos travailleurs ont réussi à entrer dans cette zone.
11:55Quand les citoyens souffrent, nous souffrons encore plus.
12:00Cette eau doit atteindre les populations les plus éloignées.
12:04Les arbres, les animaux, les plantes, tous profitent de notre eau.
12:12Nos ouvriers souffrent d'avoir quitté leur famille, leurs enfants,
12:15mais c'est pour le bien des citoyens qu'ils l'ont fait.
12:20Les gens étaient dans une situation totalement désespérée
12:23et la vie est revenue.
12:36Si l'eau et l'électricité reviennent lentement,
12:39les difficultés d'approvisionnement alimentaire
12:41touchent encore des milliers d'habitants restés sur place.
12:43A Omdurman, l'heure est toujours à la survie.
12:47A Khartoum, sous le contrôle des milices,
12:50la situation est sans doute encore plus désastreuse.
12:54Dans tous les quartiers, des initiatives citoyennes voient le jour
12:56avec les takhyas, des soupes populaires qui maintiennent du lien social
13:00et sont, en l'absence d'aide humanitaire suffisante,
13:03un moyen de subsistance nécessaire pour de nombreuses familles.
13:06Nous préparons des jus, du café, du thé et le petit-déjeuner.
13:13Nous accueillons les gens, ils mangent sur place.
13:17Nous avons développé la takhya de façon à ce qu'il soit facile
13:20et aux gens de vivre dans la société,
13:21ils puissent avoir une bonne expérience.
13:25Les gens utilisent la takhya pour se nourrir,
13:26pour avoir de l'eau, pour venir à la maison,
13:28pour se réchauffer, pour faire des affaires.
13:30gens, ils mangent sur place. Nous avons développé la tequilla de façon autonome. Aujourd'hui nous
13:38bénéficions de soutien d'ici et là mais ce n'est pas régulier. Le plus important quand les gens
13:47reviennent c'est qu'ils aient de l'électricité, de l'eau et de quoi manger. Le bilan humain ne cesse
13:58de s'alourdir chaque jour avec l'intensification des combats dans la région de Khartoum et dans
14:02le reste du pays. L'ONU fête état d'au moins 20 000 morts mais une récente estimation américaine
14:08avance le nombre effrayant de 150 000. Nombre impossible à vérifier tant il est périlleux
14:16pour toute instance officielle de mener des enquêtes sur le terrain.
14:28Les décès dus à l'effondrement du système de santé ne cessent d'accentuer un bilan déjà
14:37tragique. Aujourd'hui 80% des hôpitaux du pays ne fonctionnent plus. Les centres de santé dont
14:49certains ont été récemment construits absorbent un flot incessant de patients venus de toute la
14:54région y compris des zones occupées. Les enfants sont les premiers à subir les conséquences
15:02dévastatrices de cette guerre. 14 millions d'entre eux ont besoin d'assistance.
15:24Les organisations internationales alertent sur le risque imminent d'une famine à grande échelle
15:31en raison des entraves à l'assainissement de l'aide humanitaire et des attaques perpétrées
15:37sur les agriculteurs. Près de la moitié des 48 millions de Soudanais seraient d'ores et déjà en
15:49situation de faim aiguë.
16:19Après la destruction des hôpitaux par les milices dans la plus grande partie de l'Ondourmane dans
16:42la plus grande partie de l'état de Khartoum les gens ont commencé à migrer vers d'autres régions
16:47pour accéder à des soins. Dans les zones contrôlées par les milices de forces de
16:52soutien rapide comme en Khartoum et Bari, les hôpitaux sont pour la plupart détruits et les
16:58services de santé interrompus car ces zones ne sont pas sécurisées. Les médecins et équipes
17:06médicales ont été pris pour cibles. Un grand nombre d'entre eux ont d'ailleurs été tués. Ils ont
17:12beaucoup souffert. Je n'ai aucun contact avec les médecins présents sur place. Aujourd'hui je ne
17:19sais pas où ils se trouvent et si les services de santé fonctionnent. Au milieu de cette tragédie
17:31qui se joue loin des caméras, les atrocités sont passées sous silence. Les témoignages qui
17:38concernent les violences faites aux femmes sont presque impossibles à recueillir. Un rapport de
17:45Human Rights Watch dénonce la récurrence de viols collectifs. Nawal Ali, journaliste au
17:53quotidien Alhumaltali, a bien voulu s'exprimer sur le sujet. Je vois qu'aujourd'hui la couverture
18:02médiatique est inconsistente. Il y a tant de lacunes à combler. Cette guerre a dévoilé beaucoup de choses.
18:09Il y a des violations des droits de la femme, des droits de l'homme en général.
18:15On dit qu'il y a environ des dizaines de milliers de viols commis dans les régions
18:22envahies par les forces de soutien rapide. Aucune femme ne peut en parler mais une grande
18:31partie des cas sont connus. Non seulement ils sont rentrés dans les maisons pour les violer,
18:38ils les ont kidnappés pour les emmener dans des lieux inconnus. De nombreux cas ont été
18:46constatés dans ces lieux, spécialement utilisés par les forces de soutien rapide pour violer ces
18:51femmes. Dans plusieurs lieux, le pays est toujours en guerre. Mais il y a des sortes de
19:02pauses entre les attaques aléatoires des forces de soutien rapide. Le retour à une vie normale
19:08de ces femmes nécessite une réadaptation psychologique très poussée. A l'heure actuelle,
19:14cette réadaptation peut être compliquée. Le Soudan traverse une véritable épreuve avec
19:21cette guerre. Ses effets ne dureront pas seulement un an ou deux mais auront un impact sur le long
19:26terme. Le Soudan compte aujourd'hui plus de 10 millions de déplacés, faisant de cette guerre
19:41la plus grande crise de réfugiés au monde depuis des décennies. Dans la région de Khartoum et les
19:48zones touchées par les combats, ce nombre ne cesse de croître. Alors que 2 millions de Soudanais ont
19:54trouvé refuge dans les camps de fortune des pays voisins, 8 millions d'autres se sont dirigés vers
19:58des régions du pays épargnées par la violence. Chaque jour, le départ en convoi s'organise
20:05spontanément par la seule route sécurisée par l'armée mais semée d'embûches.
20:09De nombreux déplacés se trouvent aujourd'hui à Port-Soudan. C'est ici, sur les rives de la
20:36mer rouge, que le pays a dû se réinventer dans l'urgence pour éviter de sombrer.
20:44De nombreuses institutions gouvernementales s'y sont installées et en quelques mois,
20:48une capitale provisoire a été bâtie tandis que des camps de déplacés parsèment la ville.
20:53Hanan, chef décoratrice à la télévision nationale,
21:05affirme d'Urmane comme tant d'autres. Elle anime aujourd'hui ce camp de déplacés situé dans une
21:11ancienne école. Avec d'autres adultes, elle s'efforce d'aider les enfants à surmonter les
21:18traumatismes qu'ils ont vécu. Tous ensemble, nous essayons de faire sortir les enfants de
21:26l'état dans lequel ils étaient en arrivant. Nous faisons en sorte qu'ils puissent exprimer
21:40et développer leurs talents grâce aux exercices et aux ateliers. Ils avaient l'habitude de jouer
21:48avec des munitions, c'est dire l'impact psychologique. Cette guerre a ancré dans leur
21:56esprit l'idée de créer des armes. Ils ne sont pas sortis de la guerre. Par exemple, un avion nous a
22:02survolé. Ils se sont mis à courir partout. Ils ont vraiment eu très peur. Les avions arrivent,
22:07la guerre arrive. Nous les avons sortis de cet état et nous leur avons proposé des ateliers où ils
22:13pratiquent le théâtre, la danse folklorique, les arts plastiques.
22:37J'aime voir comment les enfants interagissent. Il y avait des disputes entre eux comme chez tous
23:06les enfants. Mon objectif a été de les faire sortir de cette ambiance conflictuelle pour les
23:16plonger dans un univers artistique. Ce sont les enfants eux-mêmes qui veulent développer des
23:27projets et participer à l'avenir du Soudan. L'art est la clé pour rendre le Soudan meilleur.
23:39Ces initiatives pourront aider le Soudan à se relever. Mais avant cela, il faudrait que les
23:51négociations de paix aboutissent. Les récents pour parler ont échoué. Les combats et les
23:58exactions se poursuivent. Ces enfants, comme les millions de déplacés, ne sont pas prêts
24:05de retrouver une vie normale.

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