Depuis l’ère industrielle, notre empreinte carbone ne fait qu’augmenter. Le musée des Arts et Métiers à Paris, fort de ses collections de machines industrielles, a voulu retracer la manière dont notre économie a mené au réchauffement climatique à travers une exposition. Anaïs Raynaud, cheffe de projet du musée, nous explique que cette initiative permet aux visiteurs de repenser leurs relations aux machines pour comprendre comment aujourd’hui, ils peuvent réduire leur impact environnemental.
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00:00L'invité de Smart Impact, c'est Anaïs Reynaud, bonjour.
00:10Bonjour.
00:11Bienvenue, vous êtes chef de projet de l'exposition Empreinte Carbone qui se tient jusqu'au 11 mai au Musée des Arts et Métiers à Paris.
00:18Pourquoi vous l'avez lancée cette expo ? Quelle est l'idée de départ, l'ambition ?
00:22Alors l'ambition de cette exposition, c'est de connecter le Musée des Arts et Métiers qui est un très ancien musée, qui a plus de 200 ans.
00:29Avec des collections très marquées par la révolution industrielle, par l'histoire des techniques.
00:33Avec un enjeu contemporain qui suit de l'empreinte carbone et derrière lui le changement climatique.
00:38Effectivement, enjeu qui nous anime ici dans cette émission quotidiennement.
00:42Comment elle a été imaginée, comment elle a été pensée cette exposition ?
00:45Donc l'idée c'était vraiment de se dire comment le musée avec sa profondeur historique pouvait trouver des résonances et pouvait nourrir le questionnement sur le réchauffement climatique,
00:56sur le changement climatique et la place finalement de ces objets techniques et de la technique un peu au sens large avec ces problématiques-là.
01:04Donc on a essayé de partir de nos collections et de voir comment elle pouvait tisser un récit autour de ces questions-là.
01:11Et je dirais l'autre aspect, c'est vraiment on est un musée qui cherche à décrypter finalement comment les machines fonctionnent,
01:18comment cette technique nous touche dans notre quotidien.
01:21Et finalement, par les machines, par les objets techniques, d'essayer de comprendre comment notre empreinte carbone se forme et du coup comment on peut agir sur elle.
01:27Et on va rentrer dans le détail, on va se balader avec vous dans cette exposition.
01:31Mais alors tiens, j'ai une question de curieuse sur qu'est-ce qu'on trouve, qu'on ne va pas forcément voir dans cette expo,
01:37mais vous dites deux siècles de profondeur, qu'est-ce qu'on trouve ? Des machines ?
01:41Toutes les machines possibles imaginées par le génie humain, c'est ça ?
01:44Toutes les machines possibles.
01:45Alors on remonte très très loin, on a des collections qui remontent à l'Antiquité, au Moyen-Âge.
01:49Et après on est beaucoup un musée d'inventions en quelque sorte.
01:53Donc le premier avion, le premier prototype d'automobile avec le fardier de Cugnot.
01:59Donc on a des objets qui sont des gros marqueurs de l'histoire industrielle.
02:02Le métier à tisser, la machine à vapeur, le moteur à réaction.
02:08Enfin voilà, on a vraiment beaucoup de jalons comme ça de cette histoire industrielle et on a essayé d'en caser quelques-uns dans l'exposition.
02:14Oui, on va en retrouver quelques-uns. Quel public vous espérez toucher ?
02:18Alors nous on a un public qui est très familial et on est très heureux de ça.
02:21Et donc l'idée c'est aussi d'avoir une exposition qui soit accessible en famille, avec des enfants.
02:26Donc on a un parcours jeune public dans l'exposition à partir de 7 ans, d'être un petit peu bon lecteur.
02:31Et après on a beaucoup de dispositifs de médiation qui la rendent vraiment très accessible.
02:35Encore hier, et là c'est les vacances en ce moment, on voit vraiment des tout-petits qui s'amusent
02:39parce qu'on a multiplié des jeux, des façons d'être dans l'exposition un peu décalées, un peu différentes et ça ça plaît beaucoup.
02:46Avec donc un objectif de sensibilisation, de pédagogie sur ces enjeux d'adaptation au réchauffement climatique.
02:54Est-ce que la culture pour vous, une exposition, moi je suis convaincu que c'est un levier fabuleux, mais comment vous le percevez ?
03:03Alors c'est pas simple, surtout que l'empreinte carbone c'est un sujet qui est très présent dans les médias.
03:07On l'entend régulièrement, le changement climatique c'est très souvent la une et c'est vraiment un sujet d'actualité.
03:13Donc c'est quelque chose qui est souvent anxiogène.
03:15Mais qui est parfois pas simple à saisir, qui est assez touffu, assez dense avec beaucoup de chiffres, beaucoup de données, beaucoup d'experts autour.
03:24Et ça c'est vraiment très chouette parce que ça nourrit de façon très solide le débat.
03:27Mais effectivement c'est aussi angoissant parce que c'est lié à tout un tas de catastrophes naturelles, à une actualité qui est elle-même assez dure.
03:36Et l'idée de l'exposition c'est non pas de prendre le contre-pied mais d'accompagner et en fait de donner aussi une vision positive de partir du quotidien des gens,
03:44de ce que les gens connaissent, pour finalement construire une vision de ce qu'est l'empreinte carbone et de comment on peut agir sur elle.
03:51Et ça je trouve que c'est important l'idée de finalement outiller nos visiteurs pour qu'ils arrivent à franchir le pas et potentiellement peut-être s'engager
03:59et eux-mêmes devenir des acteurs d'un changement de comportement et d'une transition.
04:04Oui parce qu'il y a trois grandes étapes. La dernière c'est la fabrique des solutions et on va en parler dans un instant.
04:09Mais d'abord il y a cette machine carbone. C'est ça, on rentre dans l'exposition.
04:15Là c'est un peu la chose.
04:17Qu'est-ce qu'on trouve alors ? Qu'est-ce qu'on voit ?
04:19L'exposition commence par la machine carbone. Donc on a volontairement appelé la première partie comme ça pour aussi recaler le thème de l'empreinte carbone
04:26par rapport à notre identité en tant que musée de technique.
04:29Et on voit des machines. Par exemple on a un modèle de haut fourneau qui évoque le recours au charbon.
04:34On a une machine à vapeur évidemment qui est quand même l'objet emblématique de la façon dont on a contrôlé ces ressources naturelles
04:41et commencé à exploiter celles du sous-sol notamment le charbon puis après le pétrole puis le gaz pour démultiplier la puissance.
04:47C'est pas juste pour dire qu'on est allé forer dans le sous-sol mais c'est parce qu'on a utilisé ces nouvelles ressources
04:53pour un développement économique et industriel sans précédent.
04:57Et donc on revoit un peu ces éléments-là. On voit aussi des machines on va dire presque plus naturelles.
05:02On a un moulin à vent par exemple qui permet d'évoquer les ressources renouvelables
05:07et de montrer que repenser le renouvelable aujourd'hui finalement a aussi une histoire très ancienne.
05:12Oui effectivement et j'imagine quand on se promène dans cette partie de l'exposition, on s'est dit bon ben en fait...
05:20Alors évidemment ça a permis beaucoup de progrès, de progrès des problèmes de santé publique,
05:28des coups de jeu de la population qui sont sortis de la pauvreté.
05:31Enfin bon je vais pas refaire l'histoire de la révolution industrielle.
05:34Mais quand on est là on se dit bon ben le cœur de la situation dans laquelle on est aujourd'hui,
05:39elle s'est créée avec ces machines. Vous voyez ce que je veux dire ?
05:41Il y a un peu de culpabilité qu'on peut ressentir. Comment vous avez géré ça dans la façon de concevoir l'expo ?
05:49On a essayé justement de ne pas pointer du doigt des mauvais responsables.
05:53Déjà parce que je pense que les visiteurs les identifient assez bien aujourd'hui.
05:56Quand on parle des industries extractives, de l'industrie pétrolière,
06:01on sait que c'est des industries qui ont un fort impact sur l'environnement
06:04et je pense qu'on n'a pas besoin de le répéter aux visiteurs.
06:07De rappeler en fait que ces inconvénients-là et ils sont majeurs,
06:11sont entre guillemets la contrepartie d'un progrès de l'amélioration des conditions de vie.
06:16C'est aussi une façon de dire qu'on est tributaire de cette équation-là.
06:20C'est ce qui nous a donné le monde dans lequel on vit.
06:23Maintenant, comment on va pouvoir régler un petit peu les curseurs
06:26et où est-ce qu'on va pouvoir jouer dans notre rapport aux machines,
06:29aux objets qu'elles produisent et finalement aux objets qui nous entourent
06:32et finalement dans les désirs et les usages qu'on peut avoir aussi de ces outils-là.
06:39Est-ce que quand on est au musée des arts et métiers, on est forcément technosolutionniste ?
06:44Absolument pas. On est technophile parce qu'il y a des choses incroyables derrière la technique
06:49et comprendre notre environnement technique, c'est une super façon de saisir l'environnement dans lequel on se trouve.
06:55Justement, la partie de l'exposition qui traite des solutions, elle mélange des solutions techniques.
07:03On va avoir des choses sur la captation du CO2, des choses sur le switch énergétique, les batteries, etc.
07:10Et on va avoir aussi des objets qui parlent de circularité, de réparabilité,
07:14de comment on fait aussi durer les objets qui nous entourent, comment aussi on modifie nos usages.
07:19On a un magnifique objet qui est un tandem 4 places qui est issu de nos collections.
07:23Il est vraiment génial.
07:25On a envie de partir en balade, c'est ça ?
07:27Exactement, mais qui permet tout de suite aussi d'appeler cet imaginaire de mobilité douce
07:31ou en tout cas de mobilité en dehors de la voiture.
07:34L'idée, c'est ça, c'est de proposer aux visiteurs de questionner leurs usages,
07:37de questionner les objets et de jouer un petit peu là-dessus
07:40et de se dire lesquels vont me plaire, lesquels ont un vrai potentiel
07:44et comment je me les approprie ou je les juge.
07:48Il y a une partie de l'expo intitulée l'engrenage des usages.
07:52Il faut prendre son souffle avant de le prononcer.
07:55Avec beaucoup de démonstration autour de l'alimentation.
07:58Qu'est-ce que vous avez cherché à démontrer et à provoquer chez le visiteur ?
08:03L'idée de l'engrenage des usages,
08:05la première partie, on a cette machine carbone
08:07et puis après on entre dans le cycle de vie des objets.
08:10La deuxième, c'est plutôt d'essayer de comprendre pourquoi finalement
08:12on a recours aux objets qui nous entourent.
08:14Qu'est-ce qui déclenche l'achat, l'utilisation au quotidien ?
08:18Et donc on s'est concentré sur une pratique qui est l'alimentation,
08:21qui est une pratique fédératrice.
08:24On mange tous, partout sur la planète.
08:27On est tous sujet à ça, partout sur la planète, de façon très différente.
08:29Et c'est aussi une thématique sur laquelle les visiteurs
08:33et nous en tant que citoyens avons le choix.
08:36C'est-à-dire qu'on fait nos courses, on choisit ce qu'on met dans notre assiette
08:38avec évidemment des contraintes, qu'elles soient sociales, qu'elles soient économiques, etc.
08:41Mais c'est quand même quelque chose sur lequel on a la main directement.
08:44Donc c'était intéressant de questionner les visiteurs sur un usage évident
08:47et même pour les plus jeunes, c'est-à-dire que même un enfant de 2, 3, 4 ans
08:50va pouvoir choisir ce qu'il veut mettre ou pas dans son assiette.
08:53Peut-être que les parents ne seront pas tout à fait sur la même longueur d'onde.
08:56Donc le choix, c'était assez évident pour avoir ce côté très inclusif.
09:00Et après, d'aller chercher dedans, d'aller regarder les modes de production,
09:04les modes de transport, le désir qu'on a de consommer certains aliments plutôt que d'autres,
09:08le désir de s'entourer aussi d'un électroménager de plus en plus massif et complexe.
09:13Ça permettait d'évoquer tout un tas à la fois de pratiques et d'objets liés à ces pratiques-là
09:18et de permettre aux visiteurs de s'exprimer autour de ces usages.
09:22Avec, je crois, des week-end à thème aussi, on va terminer là-dessus,
09:25il nous reste une petite minute qui vont ponctuer comme ça ces mois d'exposition.
09:30Alors c'est indispensable d'accompagner l'exposition et de la rendre vivante.
09:34Qui plus est quand on a une exposition qui vise quand même un petit peu à engager ses visiteurs
09:38sur la voie du changement.
09:40Donc on a des week-end thématiques.
09:42Les prochains vont être en février et puis après à la fin mars sur le numérique et sur le low-tech.
09:47Et l'idée, c'est un musée ouvert avec des démonstrations, presque des cours, des conférences,
09:54des visites, des acteurs aussi sur ces thématiques-là, sur le low-tech,
10:00des gens qui font du low-tech et qui nous le présentent
10:02pour finalement avoir un autre rapport aussi au musée
10:05et à la façon dont on peut soi-même jouer avec cette thématique.
10:09Merci beaucoup Anaïs Reynaud.
10:11Je rappelle qu'empreinte carbone, l'expo se tient jusqu'au 11 mai au musée des arts et métiers à Paris.
10:17On passe à notre débat.
10:18Qu'allons-nous faire de tous ces mètres carrés libérés par les voitures dans nos sous-sols ?