Le béton fait partie des matériaux les plus consommés dans le monde. Son empreinte carbone est de 85 kg équivalent CO2 / tonne. Réduire son impact environnemental est donc un enjeu majeur du secteur du bâtiment pour s’adapter au changement climatique. Rory Mc Neill, directeur développement d’Ecocem, nous explique comment cette société développe un béton bas-carbone. Lionel Bertrand, directeur de l’innovation et de la construction durable chez Point P, nous présente une de leurs innovations : un mur fabriqué à partir de terres d’excavation.
En partenariat avec le SIBCA (du 7 au 9 octobre 2024).
En partenariat avec le SIBCA (du 7 au 9 octobre 2024).
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00:00Retrouvez le débat de Smart Impact avec Veolia.
00:12C'est le débat de ce Smart Impact. On est toujours au CIPCA au salon de l'immobilier Bacarbone.
00:17Je vous présente mes invités tout de suite. Lionel Bertrand, bonjour.
00:19Bonjour.
00:20Bienvenue, vous êtes directeur de l'innovation et de la construction durable chez Point P et Rory McNeil, bonjour.
00:25Bonjour.
00:26Directeur développement chez Ecosem. Aller, question rapide de présentation pour démarrer.
00:31Point P, c'est une enseigne qui est connue du grand public.
00:34Peut-être que nos téléspectateurs et téléspectriens ne savent pas forcément c'est quoi.
00:38C'est une enseigne du groupe Saint-Gobain. On peut le présenter comme ça.
00:40Tout à fait. Point P, c'est la principale enseigne de distribution du groupe Saint-Gobain.
00:44Nous accompagnons tous les professionnels du bâtiment dans leurs projets de construction, rénovation ou aménagement.
00:50On a une offre de produits, solutions, services disponibles dans 1000 agences, 350 showrooms.
00:56Ce qui nous permet d'être un vrai animateur de la rénovation énergétique et un moteur de la construction durable et locale.
01:02Justement, on va découvrir certaines innovations et notamment on va parler de circularité.
01:06Avec vous, Rory McNeil, présentez-nous Ecosem.
01:09La société Ecosem est une société franco-irlandaise qui existe depuis 25 ans maintenant.
01:15Elle a été fondée dans la foulée de la signature des accords de Kyoto à la fin des années 90.
01:20Avec la vision de notre fondateur Donald O'Ryan, qui est encore le PDG de l'entreprise.
01:25Sa vision, c'est comment réduire l'empreinte carbone du secteur de la construction.
01:31En commençant par le poste qui est le plus carboné, qui est celui du béton.
01:35Comment adresse-t-on l'empreinte carbone dans le béton ?
01:38Il faut regarder qu'est-ce que c'est que le béton bas carbone finalement.
01:42Le béton en soi est composé, il faut savoir qu'après l'eau, c'est le matériau le plus consommé par l'homme sur la Terre.
01:50C'est déjà une échelle qui est énorme.
01:53Donc ça veut dire que c'est un levier de décarbonation qui est effectivement majeur.
01:58Exactement. Et si on descend d'un niveau et on regarde ce qu'il y a à l'intérieur du béton standard,
02:02il se trouve qu'il y a des agrégats, c'est-à-dire des cailloux, du sable, de l'eau,
02:08mais surtout la colle qui permet d'agglomérer ces éléments pour faire de la roche synthétique.
02:14C'est une chimie, c'est le ciment.
02:17Le ciment portland ou le ciment traditionnel est composé d'un ingrédient qui a un défaut majeur,
02:23malheureusement, c'est son empreinte carbone.
02:25Donc ça s'appelle le clinker. Le clinker c'est produit en cimenterie.
02:29On va chauffer à 1450 degrés du calcaire et de l'argile.
02:35Et donc l'idée, parce qu'on ne va pas trop parler du béton classique,
02:39c'est de nous présenter les avantages du bas carbone.
02:42Exactement. Donc l'idée c'est d'agir sur le clinker.
02:46Le clinker c'est la partie carbonée, ça représente 95% de l'empreinte carbone du béton.
02:51Donc nous, dans le cadre de l'économie circulaire, on va récupérer des coproduits
02:57qui étaient initialement des déchets issus d'autres industries pour remplacer le clinker dans le béton
03:03et du coup mécaniquement le rendre bas carbone.
03:05Alors vous nous expliquerez ça en détail, parce qu'effectivement c'est passionnant de voir
03:08comment on transforme des déchets finalement en nouvelles ressources.
03:11Lionel Bertrand avec Point P, vous présentez une innovation.
03:15Alors je disais dans la présentation, c'est un mur augmenté.
03:18Alors quand j'entends ça, je me dis ok, c'est quoi un mur augmenté ?
03:21Alors tout à fait, je parlais de Point P qui était moteur pour la construction durable et locale.
03:26Ça se traduit en deux choses, collaborer avec des acteurs majeurs de la construction,
03:31typiquement Ecosem, pour la décorisation de notre offre.
03:33Ça se traduit également par une innovation que l'on porte en propre.
03:36Et d'ailleurs à ce salon, le CIPCA, nous présentons Terlian,
03:40qui est une démarche résolument circulaire, que je pourrais vous résumer en trois points.
03:43Valoriser les terres d'excavation, déchets majeurs disponibles en France.
03:48On parle de plus de 30 millions de tonnes disponibles dans mille lieux de stockage,
03:52donc sur tout le territoire.
03:54Massifier son usage dans la construction.
03:58Ça, ça passe par permettre aux artisans de la mettre en œuvre, c'est-à-dire respecter leurs gestes.
04:03Avoir des systèmes constructifs qui sont certifiés, autorisés à la commercialisation,
04:08et donc assurables par le CSTB, qui est le centre d'études du bâtiment,
04:11qui permet ces choses-là.
04:13Et enfin, valoriser les performants de cette terre d'excavation,
04:18pour l'occupant des habitations, à savoir le confort d'été,
04:22avoir moins chaud l'été, le confort d'hiver, avoir moins d'humidité dans les bâtiments l'hiver,
04:27et ainsi régner des économies d'énergie et des économies de coûts d'équipement type climatisation.
04:31Alors, qu'est-ce qui fait que vous employez cette expression de mur augmenté ?
04:34Qu'est-ce qu'il a de plus que les autres, en quelque sorte ?
04:36Le mur augmenté, c'est simplement la terre.
04:38On n'a pas la prétention d'avoir inventé les bénéfices de la terre,
04:42on veut juste les valoriser à grande échelle.
04:45Ce mur augmenté, c'est que la terre, intrinsèquement, a cette capacité à stocker la chaleur l'été.
04:50Et on est tous conscients des vagues de chaleur qui arrivent.
04:53On n'a pas chaud un jour, on a chaud plusieurs jours d'affilée.
04:56La terre a cette capacité à stocker la chaleur.
04:58Typiquement, pendant 14 jours, elle peut stocker entre 10 et 14 fois plus de chaleur
05:02qu'un autre mode constructif, du bois ou du parpaing.
05:06Et l'hiver, elle va pouvoir absorber une partie de l'humidité des bâtiments
05:09et vous permettre de gagner jusqu'à 2 degrés de chauffage pour avoir la même sensation de confort.
05:13Donc, le mur augmenté, c'est simplement que la terre a des bénéfices intrinsèques
05:17que l'on souhaite valoriser massivement dans la construction.
05:20Alors qu'effectivement, l'an dernier, il y a un Français sur deux
05:23qui déclare avoir souffert de la chaleur dans son habitation.
05:28Donc, c'est vraiment un phénomène qui prend de l'ampleur.
05:31Vous parliez des coproduits.
05:32Donc là, vous récupérez des coproduits de quelle industrie
05:35pour l'intégrer finalement à votre ciment ou votre béton bas carbone ?
05:38Tout à fait. Je dirais que notre offre première génération,
05:42en fait, dans le cadre d'Ecosem qui existe depuis 25 ans, comme je le disais,
05:46et depuis 15 ans en France.
05:47On a deux usines en France, une à Dunkerque et une à Fosse-sur-Mer à côté de Marseille.
05:51Et on travaille avec l'industrie sidérurgique pour récupérer,
05:54dans le cadre de la fabrication de la fonte, un déchet historique
05:57qui est maintenant un coproduit.
05:59Et en fait, ce produit est, par le process que nous mettons en œuvre,
06:04granulé, broyé et permet de remplacer une partie du clincaire dans les bétons.
06:09Donc ça, c'est notre offre historique.
06:10Ensuite, on est allé vers une deuxième génération d'offres il y a quelques années
06:13qui est le mélange de cette addition dans le cadre de ciments bas carbone
06:18qui sont normés, qui sont reconnus dans la norme française au niveau de leur emploi dans le béton.
06:23Et on a une troisième génération d'offres qui arrive, qui est notre solution ACT,
06:26qui va permettre de réduire de 70% l'empreinte carbone des bétons,
06:30dès aujourd'hui, en fait, au niveau du ciment en agissant sur le clincaire.
06:33Qu'est-ce qu'elle a de plus, cette solution ?
06:34Cette solution, elle utilise plusieurs types de produits qu'on va broyer,
06:40qu'on va mélanger et qui sont beaucoup plus massifiables
06:43que notre solution historique qui est le laitier,
06:45qui est une très bonne solution, que ce soit technique, au niveau carbone, etc.
06:49Mais la solution ACT est beaucoup plus massifiable que la solution historique.
06:54Et en fait, on va aller chercher d'autres additions, d'autres produits.
06:57On appelle ça des SCM, donc c'est des matériaux cimentaires de substitution
07:01pour aller réduire les taux de clincaire dans les bétons.
07:04Ce qui est magnifique avec, je dirais, l'industrie du béton et du BPE,
07:08c'est qu'il existe 3000 à peu près BPE en France.
07:12Donc il y a, à une demi-heure d'un chantier n'importe où en France,
07:15une centrale à béton.
07:16La centrale à béton, en soi, elle n'émet pas de CO2.
07:19Ce qui émet du CO2, c'est l'utilisation du clincaire et du ciment.
07:22Donc si on vient agir sur le taux de clincaire chez le cimentier,
07:25qui est celui qui fabrique, qui mélange,
07:27on va réduire l'empreinte carbone des bâtiments.
07:29Lionel Bertrand, à quel point c'est devenu un préalable à tous les nouveaux chantiers ?
07:33C'est-à-dire que là, vous êtes dans l'innovation, certains des pionniers, etc.
07:37Vous êtes en train d'inventer les solutions pour le secteur de l'immobilier.
07:43Mais à quel point vos clients vous disent « il nous faut ça, sinon on ne vient pas ».
07:47Vous voyez ce que je veux dire ?
07:48Est-ce que c'est un présupposé d'une certaine façon ?
07:51Dans la construction durable, en effet, il y a vraiment aujourd'hui deux axes majeurs.
07:56Le carbone, à savoir abaisser le carbone de la construction,
08:00qui est d'une part demandé par le client et imposé par la réglementation,
08:03à savoir l'Aéro 20-20 qui impose des seuils de carbone de plus en plus bas.
08:07Aujourd'hui, sur un salon comme le CIPCA, les gens réfléchissent à comment atteindre le seuil carbone en 2030,
08:13puisque le seuil carbone actuel pour eux est déjà derrière eux.
08:17Il faut encore améliorer ça.
08:19Ça passe par des liens bas carbone notamment, ça passe par des changements de mode constructif,
08:24mélanger le béton, le bois, et nous on pense également à la terre, alléger les bâtiments.
08:29Donc tous les moyens sont bons pour réussir à diminuer l'impact carbone.
08:34L'autre vecteur, comme je dis, c'est la circularité, où de plus en plus d'acteurs,
08:38aujourd'hui, en avance de face sur les réglementations, demandent à avoir des matériaux avec plus de contenus recyclés,
08:44qu'ils soient biosourcés, géosourcés ou matériaux secondaires.
08:47Et également, enjeu capital, la fin de vie, comment est-ce qu'on assure aussi la recyclabilité en fin de vie des matériaux.
08:54Oui, penser tout le cycle de vie du produit.
08:57Et l'A.P. est typiquement un acteur majeur de cela, puisque à travers la REPS,
09:02c'est-à-dire la récupération de ces chantiers, nous collectons tous les chantiers du bâtiment,
09:06de nos artisans, et permettons, grâce à des filières bien précises, de les recycler,
09:10le béton, comme le bois, comme le biosourcé.
09:12Rory McNeil, est-ce que c'était compliqué de convaincre il y a 25 ans ou 15 ans en France,
09:18alors qu'aujourd'hui, au contraire, on vient vous chercher avec des solutions comme les vôtres ?
09:21Vous avez tout à fait raison.
09:22Je pense que quand Donald, qui a fondé l'entreprise il y a 25 ans,
09:25dans la foulée, comme je le disais, des accords de Kyoto, s'attendait à ce que ça aille beaucoup plus vite.
09:29Finalement, notre solution a mis du temps avant d'être mature au niveau de la demande carbone.
09:35C'est une solution qui existe de par ses qualités techniques,
09:39puisque c'est quelque chose qui est employé historiquement dans des bétons assez techniques,
09:43qui ont besoin de répondre à des enjeux de résistance aux sulfates, de chaleur d'hydratation.
09:47Mais la part bas carbone devient vraiment pertinente aujourd'hui.
09:50C'est pour ça qu'on évolue vers notre solution de demain, 3ème génération ACT.
09:54D'ailleurs, vous travaillez avec des chercheurs, des universités, pour continuer d'inventer, de trouver des solutions ?
10:00Tout à fait, vous avez raison. Je ne l'ai pas mentionné, mais on a 30 doctorats en permanence qui sont intégrés chez Ecosem.
10:05On a un labo dans la région parisienne.
10:08On a une collaboration par chair universitaire avec l'INSA Toulouse, l'ENS Saclay.
10:15On a vraiment toute une panoplie de chercheurs qui nous amènent dans notre pipeline ces solutions de demain,
10:21qu'on est en train d'introduire pour faire évoluer aussi le marché vers ces solutions de bas carbone.
10:26On se rejoint, je pense, sur la partie normative,
10:30puisqu'il est important aujourd'hui que les normes évoluent pour permettre l'utilisation de ces solutions.
10:35Ce n'est pas forcément le cas aujourd'hui, donc c'est un énorme travail également.
10:38Est-ce que c'est aussi facile d'usage ? Pour les constructeurs, c'est pareil ?
10:44Ça suppose une formation ?
10:47Il y a deux choses. Notre philosophie en tant que partenaire des artisans et des constructeurs,
10:52c'est de ne pas changer leur geste, c'est de respecter leur métier.
10:55Donc oui, à partir du moment où c'est assurable, où on a fait le travail en amont avec le CSTB,
11:00avec des partenaires qui vont soit normaliser, soit certifier,
11:03notre philosophie, c'est de toujours respecter les artisans pour que ce soit facile à mettre en œuvre,
11:07à un coût maîtrisé, à savoir qu'il ne faut pas que le confort et la construction durable
11:13soient forcément réservés à une élite qui puisse payer des surcoûts insupportables pour tous les Français.
11:21Donc on limite à moins de 4% les surcoûts.
11:23Merci beaucoup, merci à tous les deux d'être venus nous présenter ces solutions.
11:27On passe à notre rubrique Smart Ideas tout de suite.