En 2024, les femmes en France commencent à travailler gratuitement ce vendredi 8 novembre à 16h48 (et 15 secondes précisément), peu d'évolution dans le constat, mais quid des solutions ? On en parle avec Rebecca Amsellem, économiste, fondatrice de la newsletter féministe "Les Glorieuses". Plus d'info : https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/l-invite-de-6h20/l-invite-de-6h20-du-vendredi-08-novembre-2024-6512564
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00:00Et ce 8 novembre, Marion, votre invitée ce matin, est économiste et fondatrice d'une newsletter féministe.
00:06Et la newsletter s'appelle « Les Glorieuses » et mon invitée c'est Rebecca Amselem, bonjour.
00:10Bonjour.
00:10Avec les inégalités de salaire, c'est aujourd'hui que les femmes françaises commencent à travailler gratuitement,
00:15précisément cet après-midi à 16h48, notez-le chères auditrices.
00:19Parce que l'écart de salaire, il est de 14% à équivalent temps plein encore entre les femmes et les hommes.
00:26Comment ça évolue ce chiffre ces dernières années ?
00:28En réalité, c'est que ça stagne. On a commencé à faire ce calcul en 2016.
00:33En 2016, ça tombait en 6 novembre et puis 2016, c'est tombé entre le 3 novembre et le 8 novembre cette année.
00:39Ce qu'on remarque, c'est que l'écart de salaire se résorbe un peu d'un point ou deux, mais ça dépend vraiment des statistiques.
00:46Par exemple, l'année dernière, l'écart de salaire, il était d'environ 15% à équivalent temps plein.
00:50Aujourd'hui, on remarque que cet écart de salaire à équivalent temps plein est de 13,9%.
00:54Donc on pourrait se dire, ça va dans le bon sens, ça se réduit de 1%.
00:58En revanche, quand on regarde une autre statistique, qui est la statistique de tout confondu,
01:02en fait vraiment l'écart de salaire tout confondu, l'année dernière, il était de 22% et cette année, il est de 23%.
01:09Donc ça, ça se creuse de un point.
01:11Il existe déjà aujourd'hui un index de l'égalité professionnelle qui a été mis en place par le gouvernement,
01:16un index entre les femmes et les hommes. Il a été créé il y a 5 ans, ça, c'est pas suffisant ?
01:21Ce qu'on remarque, c'est que ça a été créé il y a 5 ans.
01:23Il y a un certain nombre d'entreprises qui ont 100 points à cet index et pour autant, ça c'est bien.
01:29En revanche, c'est pas pour autant que l'égalité salariale est respectée au sein de ces entreprises.
01:34Je pense qu'on peut aller plus loin, être plus courageux et mettre en place des politiques publiques
01:39qui vont effectivement plus loin que cet index.
01:41Et on va y venir justement, puisque justement cette année, pour votre campagne maudieuse 8 novembre 16h48,
01:47vous publiez une pétition pour mettre en oeuvre des mesures qui endigraient ces inégalités de salaire entre hommes et femmes.
01:53D'abord, il y a des exemples positifs, une boîte à idées en quelque sorte.
01:57Et le premier, c'est la Suède. Expliquez-nous.
01:59Absolument. En fait, ce qu'on a fait, c'est qu'on a publié un rapport en allant chercher les bonnes idées,
02:05les bonnes initiatives, les bonnes pratiques qui viennent des pays qui ont réussi à résorber les inégalités salariales.
02:10Ces pays, c'est quoi ? C'est la Suède, c'est l'Islande, c'est la Nouvelle-Zélande.
02:13La Suède, par exemple, a mis en place, il y a plus de 20 ans maintenant, un congé parental équivalent pour les deux parents.
02:19Alors pourquoi ça a une influence sur l'écart de salaire entre les femmes et les hommes ?
02:23On remarque que si en début de carrière, il n'y a pas vraiment d'écart de salaire entre les femmes et les hommes,
02:28à part entre différents secteurs, et ça c'est quand même un point à souligner,
02:31on remarque en revanche qu'au sein de chaque secteur, l'écart a tendance à se creuser considérablement au moment de l'âge du premier enfant, vers 30-35 ans.
02:39C'est-à-dire qu'à ce moment-là, les hommes ont tendance à avoir des promotions, tandis que les femmes commencent à stagner.
02:44Et c'est un écart qui ne se résorbe jamais dans la carrière professionnelle.
02:47C'est pour ça que la Suède a mis en place ce congé parental, pour faire en sorte que les employés femmes et hommes soient tous mis au même niveau.
02:53Alors ce qui est intéressant aussi, c'est la Nouvelle-Zélande, pourquoi ?
02:55Absolument. La Nouvelle-Zélande, vraiment, c'est une politique publique que j'adore, parce que ça a été mis en place en 2020.
03:01Et ce qu'ils ont fait, c'est qu'ils ont procédé à un rééquilibrage des professions dites féminisées.
03:05Infirmières, par exemple ?
03:07Exactement. Ils se sont dit qu'ils n'allaient pas regarder secteur par secteur, mais ils allaient regarder les métiers dans les différents secteurs,
03:14en mettant en lumière le niveau d'expérience, le niveau de responsabilité, ou encore le nombre d'années requis pour pratiquer ce métier.
03:21Et en fait, ils ont comparé ces différents métiers, et ils ont rééquilibré un certain nombre de métiers.
03:26Et donc, ils ont, par exemple, rehaussé le salaire des infirmières, rehaussé le salaire des sages-femmes,
03:31pour faire en sorte qu'ils soient au même niveau que les officiers de police, ce qui n'était pas le cas jusqu'à présent.
03:35Et de ce rapport, vous tirez donc 7 recommandations. Alors, on ne va pas faire la liste exhaustive, mais il y a ce congé parental,
03:42l'égalité salariale qui serait comme une norme, augmenter les salaires dans ces secteurs à prédominance féminine,
03:47ça c'est le cas néo-zélandais, favoriser le travail flexible sans pénaliser le télétravail.
03:53Il y a une pétition qui a été lancée. Déjà des signatures ?
03:57On a déjà des signatures. Et l'idée, c'est vraiment de faire en sorte d'appliquer ces 7 mesures en France.
04:03Et en fait, ce qu'on a montré, c'était que ces 7 mesures peuvent être appliquées.
04:07On ne les a pas sorties de notre chapeau. Elles ont fait leur preuve dans d'autres pays.
04:10Et on peut faire en sorte de les appliquer ici et avoir des conséquences positives sur les salaires des femmes en France.
04:16Alors, ça c'est effectivement les propositions, le côté positif. Mais est-ce que vous avez vraiment de l'espoir ?
04:20Je vous pose la question parce que Salim Assa, qui est chargée de l'égalité homme-femme, elle n'a qu'un secrétariat d'État.
04:25Elle est sous la tutelle d'un homme. Et elle-même disait il y a quelques années qu'il ne fallait pas un ministère du droit des femmes.
04:31Alors, vraiment, si jamais je n'avais pas d'optimisme, et si je n'étais pas optimiste, je ne serais pas là.
04:35Je suis vraiment persuadée qu'on peut y arriver. Les écarts de salaire entre les femmes et les hommes n'ont jamais été aussi faibles.
04:41En revanche, ils existent. Ils sont encore considérables. Et il suffit d'un courage politique pour mettre en place des politiques publiques.
04:47Et je vais parler d'une mesure, par exemple, qui coûte zéro euro, parce qu'on va toujours rétorquer que ça coûte de l'argent.
04:52C'est le principe d'égal conditionnalité. L'État a un pouvoir énorme. C'est le pouvoir du marché public.
04:59C'est-à-dire qu'il peut conditionner l'accès au marché public, il peut conditionner l'accès aux subventions des entreprises, au respect de l'égalité salariale.
05:06Et voilà. Et ça, c'est une mesure qui, effectivement, ne coûte rien.
05:09On verra si vous êtes entendus, Rebecca Amselem, économiste fondatrice de la newsletter féministe Les Glorieuses.
05:14Merci beaucoup de nous avoir répondu ce matin sur Inter.
05:17Merci à vous.
05:18La météo à suivre.