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00:007h46, matinée spéciale sur France Blog à l'Auxerre, on donne la parole aux agriculteurs Maya.
00:08Oui absolument, crise agricole grogne contre le gouvernement, promesses non tenues et menaces de nouvelles actions.
00:15Nos exploitants ont besoin d'être entendus.
00:18En studio avec nous ce matin, un agriculteur et viticulteur à la tête du domaine des majestes à Saniac, près du ZES.
00:25Bonjour Thomas Boué.
00:26Bonjour.
00:27Vous avez 39 ans et vous êtes donc agriculteur, pourtant il y a 5 ans vous étiez encore en train de monter des films documentaires.
00:33Qu'est-ce qui vous a ramené à la terre de vos parents ?
00:36Eh bien oui effectivement, moi j'ai grandi à la ferme, mes parents étaient maraîchers, arboriculteurs.
00:43Et en fait je n'ai pas voulu faire ça tout de suite.
00:47D'abord j'ai fait des études de cinéma, d'audiovisuel, et puis finalement j'ai travaillé quelques années là-dedans.
00:56Puis au bout d'un moment j'ai décidé d'arrêter et je suis revenu à la terre.
01:01C'est quoi le déclencheur, c'est le départ à la retraite de votre papa ?
01:04Alors pas directement, il y avait de ça, mais finalement je me suis rendu compte qu'en travaillant dans un bureau,
01:13la plupart du temps finalement je n'étais pas en meilleure santé.
01:17Mon père maraîcher a eu beaucoup de problèmes de dodo, mais finalement moi j'en ai eu aussi en travaillant devant un ordinateur.
01:24La perspective aussi, finalement d'être dehors c'est ce que j'avais connu, de travailler avec mes mains,
01:32j'avais besoin de redonner du sens à tout ça, revenir à la campagne aussi.
01:37Vous aviez envie de remettre les mains dans la terre, littéralement, ça doit quand même un petit peu donner le vertige non ?
01:43La transmission c'est pas évident, vous avez repris l'exploitation de vos parents si je ne me trompe pas.
01:48Il y a beaucoup d'aléas, comment on fait face ?
01:51Eh bien, comment on a fait face dans ma famille, c'est beaucoup par la diversification, c'est clair.
01:58Je pense que pour la plupart des agriculteurs, on a toujours une solution de côté,
02:03puisqu'on sait depuis toujours qu'il y a des aléas climatiques qui peuvent être catastrophiques si on est en monoculture.
02:09D'ailleurs, si je regarde autour de nous, en tout cas dans l'usage,
02:14je ne connais pas d'agriculteur qui ne soit pas diversifié, au moins avec deux ou trois cultures qui s'alternent au long de l'année.
02:22C'est la solution pour tenir, forcément ?
02:25Oui, moi je le vois d'autant plus cette année.
02:29J'ai de la vigne, des oliviers, des amandiers, des pêchées des pommiers, des céréales et je fais des fraises aussi.
02:37Et avec tout ça, vous vous en sortez, ça va ?
02:40Eh bien, ça dépend des années. Il y a des années fastes et d'autres où ça ne va pas du tout.
02:46Disons que les deux dernières ont été compliquées quand même.
02:49Quelque part, je m'en sors aussi parce que j'ai la maîtrise sur la vente derrière, un peu plus, en circuit court la plupart du temps.
03:01Vous parlez d'années compliquées dans ces cas-là, est-ce que vous arrivez quand même à vous verser un salaire ou pas du tout ?
03:07Alors là, moi je suis en cinquième année d'installation et en troisième en tant que jeune agriculteur avec le processus de dotation jeune agriculteur.
03:16Donc je peux dire que je suis dans les premières années.
03:21C'est normal si je ne me verse pas encore de salaire, mais je commence à en voir la couleur, on va dire.
03:26Petit à petit. C'est une histoire de famille chez vous, l'agriculture, puisque c'est aussi l'histoire de votre frère, votre frère jumeau, Mathieu,
03:35qu'on a entendu ce matin sur France Bleu Gare Lauser. Lui s'est lancé comme maraîcher en Lauser.
03:40Est-ce que tous les deux, vous vous soutenez ? Est-ce que vous échangez sur vos difficultés ?
03:44Oui, évidemment. Après, on n'est pas tout à fait sur la même zone géographique, pas avec les mêmes conditions climatiques,
03:53la même zone d'achalandise, avec un atelier qui est un peu différent. Lui, il est en maraîchage diversifié.
04:03Mais c'est sûr qu'on échange, oui, on est en lien.
04:06C'est quand même une forme de soutien.
04:08Oui, on a pris de la distance, parce qu'on sait bien entre jumeaux de prendre un peu de distance des fois.
04:13Mais bien sûr, on soutient, oui.
04:15Aujourd'hui, le défi principal, qu'est-ce que c'est pour vous ? C'est l'eau ? Les aléas, en général, c'est quoi ?
04:22Alors, je peux dire qu'effectivement, si on parle de l'eau, moi j'ai l'exemple de mes parents qui irriguaient 4 hectares
04:31de maraîchage en BO depuis 40 ans avec un forage qui n'a jamais manqué d'eau.
04:37Aujourd'hui, moi, là, j'ai très peu de surface en maraîchage et pourtant, j'irrigue que mes fraisiers.
04:44Et là, en 2022 et 2023, je n'avais plus d'eau en août et septembre.
04:49Donc là, on commence à arriver à la fin de quelque chose.
04:53Moi qui voulais développer le maraîchage, je suis coincé.
04:56Et comment on fait dans ces cas-là ? Quand votre forage n'a plus d'eau, vers quoi vous vous tournez ? Comment faire ?
05:01Là, par exemple, ce qui se passe, c'est que j'ai des fraisiers qui meurent, pas tous, et je les remplace chaque année.
05:09Ça doit être un crève-cœur.
05:11Oui, c'est sûr. C'est du travail en plus, c'est compliqué.
05:17Vous le voyez comment, l'avenir ?
05:19Moi, je suis plutôt optimiste en général.
05:23J'essaie d'aller de l'avant, de trouver des solutions pour amener de la fraîcheur sur les parcelles, par exemple, pour que les sols retiennent mieux l'eau.
05:35J'ai de la chance quand même d'être pas très loin du Gardon et dans des terres assez riches de limon, d'argile, qui retiennent bien l'eau aussi.
05:45Là, il va y avoir, je pense, une sélection. A mesure du temps des parcelles, il y en a qui seront plus arables, plus travaillables.
05:54On va revenir sur des zones où c'est encore possible.
05:58L'an dernier, vous avez lancé une opération, l'opération Jean Racine, qui est spécifique à l'usage. Est-ce que vous pouvez nous en parler un petit peu, nous expliquer ce que c'est ?
06:06Oui, effectivement. Jean Racine, c'est une association qu'on a montée entre des paysans et des paysannes de l'usage.
06:14L'année dernière. Et l'idée, c'était de se retrouver. Au départ, c'était pour créer un petit réseau d'entraide, de soutien, où on discute, où on se retrouve.
06:25Et finalement, on a décidé de créer une association foncière qui, grâce à des dons, va acquérir des terres agricoles pour non seulement les préserver, garder leur vocation.
06:42Mais aussi aider des jeunes à s'installer, parce que c'est quand même un des enjeux clés maintenant.
06:48Il n'y a plus de jeunes qui veulent s'installer sur le territoire, parce que déjà, on a une pression immobilière qui est très forte.
06:56Et donc, pouvoir les mettre à disposition de ces jeunes qui, souvent, se forment dans le Gard, mais ne trouvant pas de terre, partent ailleurs.
07:05Partent, sont obligés d'aller plus loin. Comme vous le savez, Thomas Boué, on reçoit ce midi, sur France Bleu, le Premier ministre Michel Barnier.
07:14Est-ce que vous auriez une question à lui poser, vous ?
07:17Moi, j'aurais envie de lui dire, Monsieur Barnier, qu'est-ce que vous voulez manger demain ?
07:25Et pour vos enfants et vos petits-enfants, est-ce que vous avez une vision là-dessus ?
07:31Parce qu'en fait, maintenant, on a besoin de reprendre les bases de c'est quoi notre contrat social, quelque part.
07:40Et comment on rêve l'avenir ? Permettons-nous de rêver un peu, et d'imaginer, qu'est-ce qu'on peut faire pour nourrir nos citoyens et nos paysans ?
07:55On a des appels, puisque vous pouvez nous appeler également, pour soutenir les agriculteurs, les agricultrices au quotidien.
08:00Vous êtes peut-être vous-même agriculteur. Appelez-nous pour nous donner vos réactions, pour nous dire ce que vous ressentez au quotidien.
08:06On a un appel de Jérôme, d'ailleurs, de Bourdique, Maya.
08:08Oui, absolument. On est en ligne avec Jérôme Bertrand. Bonjour.
08:11Bonjour, Jérôme.
08:12Oui, bonjour.
08:13Alors, vous nous appelez, vous réagissez, ce matin, à cette journée spéciale crise agricole.
08:19Vous-même, vous êtes agriculteur. Qu'est-ce que vous avez envie de dire, ce matin ? Est-ce que vous êtes en colère ?
08:25Est-ce que vous êtes désespéré ? C'est quoi votre sentiment ?
08:27Oui, on est en colère et dépité. Depuis un an, ça fait quatre ans que les choses n'évoluent pas.
08:36On nous met des règles encore plus compliquées que ce qu'elles étaient, des contraintes.
08:41Moi, je suis un bio, un éleveur bio. On n'a plus d'aide de la PAC, alors qu'on a tous les containers.
08:48Il y aurait des solutions, mais les solutions, on ne va pas les voir.
08:51Là, vous voyez, aujourd'hui, il y a le mien. Alors, c'est super, le mien.
08:54Mais on parle du local, on parle du circuit court et tout.
08:56Tous les politiques vont aller là-bas déguster des choses.
08:59Il n'y a pas un politique qui met la main au portefeuille pour sauver la bâtoire d'Alès.
09:03La bâtoire d'Alès, c'est 5 000 euros, ça, c'est 4 000 euros. On ne peut pas le sauver.
09:06Et on va les faire venir de la viande, par le mercure sûr et de partout.
09:09Beaucoup d'affichages et peu d'actions, si je comprends bien, Jérôme.
09:13Beaucoup d'affichages et peu d'actions, de la communication, mais finalement, rien pour vous.
09:16Il y a beaucoup de paroles en l'air.
09:18Et je veux dire, quel ministre qu'il y a à l'agriculture, jusqu'à présent, c'est que des paroles.
09:22Que des promesses qui ne sont jamais tenues.
09:25Ça fait des années que ça dure, et puis là, ça s'est aggravé avec ce nouveau gouvernement.
09:28Bon, là, on en a pâti aussi, parce qu'il n'y avait pas de gouvernement jusqu'à maintenant.
09:32Quand on voit les politiques qui se déchirent, qui ne sont pas capables de s'entendre,
09:35et que nous, derrière, on travaille, on essaie de nourrir la frontière,
09:38on essaie de sauver nos exportations, qu'on ne pourra sûrement pas transmettre,
09:41parce qu'on ne peut pas accéder aux terres.
09:44Je veux dire, on ne peut rien acheter, on ne peut rien faire.
09:47Les banques ne suivent pas, personne ne suit. C'est catastrophique, quand même.
09:50— Jérôme, qu'est-ce que vous lui demandez, vous, à Michel Barnier ?
09:53— À Michel Barnier ?
09:55— Notre premier ministre, qu'on reçoit entre 13h et 14h. Qu'est-ce que vous voudriez lui dire ?
10:00— Qu'il fasse le tour des campagnes.
10:04Qu'il n'aille pas forcément chez les gros propriétaires.
10:08Qu'il se rapproche du peuple, du peuple le nourrissier, parce que nous, on nourrit les gens.
10:13On le fait. On a une agriculture qui est remarquable.
10:16Et elle est reconnue dans le monde entier.
10:19Je pense qu'il faudrait qu'il s'approche du monde rural, mais pas forcément par les gros syndicats.
10:23Malgré qu'ici, dans le Gard, on est bien soutenus par les syndicats.
10:27On a de très bons syndicats dans le Gard.
10:29Je veux dire, on a une très bonne chambre agriculteure aussi, par Magali Sommard et tout, qui est bien gérée.
10:33Mais qui se rapproche vraiment des petits gens et qui se pâchent vraiment sur les dossiers et qui arrêtent de promettre des choses.
10:39Parce qu'honnêtement, je vous le dis honnêtement, les syndicats vont faire des manifestations, tout ça.
10:45Mais la colère, elle commence à monter.
10:48Mais alors vraiment, vraiment costaud, il va se passer des choses que même les syndicats pourront pas les arrêter.
10:53Alors là, après, ça va être une catastrophe, parce qu'il y en a qui...
10:56— Et on suivra ça dans les jours à venir. Les actions doivent commencer a priori lundi.
11:00Merci beaucoup Jérôme Bertrand pour votre témoignage.
11:03Merci beaucoup.
11:04Thomas Boué, je me retourne vers vous.
11:07Vous avez entendu la colère d'un confrère, une colère que vous partagez également.
11:11— Oui, complètement. En tout cas, je la comprends.
11:15On a un modèle où on nous a poussés à réduire les marges de plus en plus,
11:21donc à devoir augmenter les rendements.
11:24Et à un moment, ça coince.
11:26On a des incidents climatiques qui nous empêchent de vivre notre métier maintenant.
11:32Donc plus c'est ces importations avec des contrats, des marchés à l'international qui sont complètement débridés,
11:42nous, on doit juste suivre derrière.
11:44Et en attendant, il y a l'endettement qui augmente.
11:48— Et on entend votre désarroi à vous, agriculteur, ce matin.
11:51Merci beaucoup, Thomas Boué, d'avoir été notre invité, d'être venu en studio.
11:56— Merci à vous.

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