Tous les jours, une personnalité s'invite dans le monde d'Élodie Suigo. Vendredi 15 novembre 2024 : l’auteur, compositeur, interprète et écrivain Louis Chedid. Il sort aujourd’hui un nouvel album "Rêveur, rêveur" et sera au théâtre des Bouffes du Nord ces 13 et 14 décembre 2024.
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00:00Bonjour Louis Chélide.
00:01Bonjour Élodie.
00:02Vous êtes cet auteur, compositeur, interprète, écrivain, alimenté presque par intraveineuse
00:07par les mots.
00:08Vous avez su, au fil du temps d'ailleurs, qu'il passe les associer pour les transformer
00:11en chansons.
00:12À votre naissance pourtant, Ismaïla, en Égypte, rien n'aurait pu permettre à votre mère
00:16poétesse d'imaginer que vous alliez devenir chanteur, interprète et vous-même écrivain.
00:20Tant le cordon ombilical qui s'était entouré autour de votre cou vous empêchait de crier
00:25même de respirer.
00:26Mais à cinq ans déjà, un concert de classique à la Salle Gavot semble avoir scellé votre
00:31sort, en tout cas vous a donné le goût du son.
00:34Votre voix, vous allez la trouver au sein des petits chanteurs à la croix de bois dans
00:38un premier temps.
00:39Et puis il y a eu ce générateur d'émotions qui est une guitare classique espagnole achetée
00:45par votre père qui va tout faire basculer avec un prof de ski qui va vous apprendre
00:49les premiers accords, ce qui est quand même assez incroyable, notamment les accords de
00:53Django Reinhardt.
00:54C'est lui finalement qui vous a mis sur le chemin et que de chemin parcouru aujourd'hui
00:58avec des tubes à la clé.
00:59L'écriture a débuté alors que vous n'aviez que 16 ans.
01:02Ça fait donc six décennies que vous manipulez la plume.
01:06Aujourd'hui, vous sortez votre nouvel album intitulé Rêveur, Rêveur.
01:09Les rêves sont-ils finalement ce qui vous a scellé un chemin, en tout cas ce qui a
01:14construit un chemin ?
01:15Oui, parce que l'enfance, c'est vraiment un moment décisif dans la vie.
01:21Et moi, j'avais une enfance très entachée par la scolarité, qui était très, très,
01:27très compliquée pour moi.
01:28Mais j'étais en échec scolaire.
01:30Ça ne m'intéressait pas du tout, du tout, du tout.
01:33Il n'y avait qu'un truc qui m'intéressait, c'est lire.
01:35Et ça, ça m'a beaucoup sauvé la littérature.
01:38J'avais la chance d'habiter avec des parents qui lisaient, qui avaient une bibliothèque,
01:42etc. Ma mère étant écrivain.
01:44Enfin, c'est pas, mais enfin, donc j'ai beaucoup, beaucoup lu à l'époque.
01:48Mais ça, ça m'a sauvé.
01:50Mais sinon, si je n'avais pas rêvé à une vie meilleure après le bac, parce qu'en fait,
01:58le bac était un peu une porte qu'il fallait franchir.
02:04Si je n'avais pas rêvé pendant des années et des années à ce que je pourrais faire
02:08plus tard et au côté artiste, parce que j'avais la vision aussi de ma mère qui était
02:14quelqu'un qui écrivait.
02:15Et donc, je me disais, c'est quoi, quand j'étais tout petit, je me disais, c'est quoi?
02:20C'est quoi ce qu'elle fait?
02:21Enfin, je ne comprenais pas.
02:23Elle était en son lit avec sa table un peu inclinée comme ça, son texte.
02:28Et puis elle corrigeait, elle corrigeait ses manuscrits.
02:31Je voyais plein de couleurs, des feutres différents, où elle faisait des ratures, etc.
02:36C'était beau à voir. Et je me suis dit, c'est ça que je veux faire.
02:39Moi, plus tard, je veux rester chez moi, dans mon lit.
02:43Et voilà, et être libre, quoi.
02:47Le premier titre qui ouvre l'album, qui finalement le referme aussi, puisqu'il y a une version
02:51piano voix, c'est les battements de cœur.
02:53Ça veut dire que le cœur a ses raisons.
02:56Moi, je pense que tout est, en tout cas, je ne parle pas pour les autres, je parle pour
03:00moi. Et quand je pense à moi, je pense que l'émotion, l'amour, enfin, il ne faut pas
03:07avoir peur des mots, qu'on porte aux autres et qu'on se porte à soi-même, surtout
03:11d'abord, parce que c'est ça qui est très important, c'est l'amour qu'on se porte à
03:14soi-même, c'est d'arriver à s'aimer.
03:17Et c'est vrai qu'on parlait de l'enfance.
03:20Moi, quand j'étais petit, je ne m'aimais pas parce que je ne me trouvais pas à la hauteur
03:25des attentes des adultes.
03:27Et puis, au fur et à mesure de la vie, il faut apprendre à s'aimer, puisque c'est
03:33vraiment la première chose.
03:34Après, quand on s'aime un peu, ou un peu plus, on regarde les autres, on a
03:41envie de leur donner des sentiments, des émotions.
03:45Et c'est vrai que c'est un métier qui est vraiment fait pour ça, c'est-à-dire que
03:48c'est tellement beau quand on est sur scène, par exemple, et qu'on chante ces chansons
03:52nouvelles et qu'on voit sur le visage des gens l'émotion que ça leur procure, ou la
04:00joie ou la tristesse aussi, parce qu'il y a toutes ces émotions qui se mélangent.
04:05Voilà, c'est-à-dire que moi, j'ai l'impression de servir à quelque chose.
04:12On vous sent plus léger, quand même, depuis l'album précédent et l'album Piano Voix,
04:16qui est venu renforcer quelque chose.
04:17Je m'allège.
04:18Non, mais c'est vrai, je m'allège, je m'allège.
04:24C'est-à-dire qu'aussi, alors il y a beaucoup de gens qui pensent que quand on a fait
04:30beaucoup de disques et tout ça, machin, et puis des succès populaires, des trucs,
04:35il y a beaucoup de gens qui pensent qu'on n'a plus rien à prouver.
04:39Mais c'est le contraire, je veux dire, la barre est de plus en plus haute, c'est de
04:42plus en plus difficile parce qu'on a le background de tout ce qu'on a fait avant.
04:48Mais à la fois, on est quand même pas mal débarrassé de tas de choses qui vous
04:54préoccupez quand vous avez débuté, c'est-à-dire qu'on se demande si on va encore
04:58réussir à écrire une chanson, on est cérébral, on se pose la question.
05:03Chaque phrase est analysée, on perd un temps fou à cérébraliser, en fait.
05:11Et à un moment donné, enfin, en tout cas, c'est mon expérience, à un moment donné,
05:14on se dit je l'ai déjà fait, je sais que c'est possible.
05:18L'inspiration, ça ne se tarait pas, enfin, c'est évident.
05:22Et donc, voilà, j'avance.
05:25C'est étonnant, d'ailleurs, parce que pendant longtemps, vous avez eu du mal à
05:27parler du temps qui passe, justement, parce qu'il y a toujours ce chemin inéluctable.
05:32Et quand vous étiez petit, vous avez eu une prof qui vous a traumatisé.
05:36C'est un prof, c'est un prof, un prof de français qui me disait Est-ce que vous
05:40pensez à la mort ? Et j'avais huit ans, donc je suis hors de...
05:45Ça vous a un peu traumatisé ?
05:46Ça m'a complètement traumatisé parce que je me suis dit Ah merde, oui, j'y pense pas.
05:50Il y a huit ans, c'est un peu normal.
05:52Et je ne sais pas pourquoi il m'a dit ça, ce mec.
05:55Et d'un autre côté, ça a dû me permettre de faire des chansons que je n'aurais
05:59peut-être pas fait si je ne pensais pas ça.
06:01Cet album vous ressemble terriblement et plus on avance, plus les albums vous
06:05ressemblent davantage. C'est-à-dire que vous nous racontez, avant, vous nous
06:07racontiez des histoires qui étaient les nôtres.
06:10Et là, aujourd'hui, vous vous racontez vous-même à travers nous.
06:13Oui, oui, mais ça, c'est sûr.
06:14Ça, c'est tout à fait juste parce que je pense qu'un jour, on s'aperçoit.
06:21Vous savez, j'ai quelques exemples comme ça.
06:23J'avais fait une chanson qui s'appelait Bouc-Belaire et Bouc-Belaire, c'est un
06:26endroit, c'est un village à côté d'Aix-en-Provence où j'allais quand j'étais
06:30petit avec mes parents, qu'il y avait une maison là-bas.
06:33Et c'est vrai que dans toute cette scolarité dont je parlais tout à l'heure,
06:37qui était vraiment punitif pour moi, il y avait juste ces trois mois de vacances
06:42où j'allais à Bouc-Belaire et là, je me sentais vraiment heureux.
06:46Et donc, c'est quelque chose qui m'a vraiment marqué et donc, un jour, je fais
06:51un album qui était fini, mais il me restait une quinzaine de jours et j'ai
06:57fait cette chanson qui s'appelle Bouc-Belaire.
06:59Et quand je suis revenu à Paris, je l'ai fait écouter à mon producteur de
07:03l'époque et je lui ai dit voilà, j'ai fait cette chanson, mais elle est tellement
07:07autobiographique parce que vraiment, elle est très autobiographique.
07:10Elle parle de même les prénoms sont autobiographiques, etc.
07:13Et je lui ai dit bon, ça n'intéresse que moi, je te la fais écouter, mais
07:17franchement, et je lui ai fait écouter.
07:18Je me souviens, il y avait aussi d'autres personnes et les gens étaient hyper
07:24émus par cette chanson.
07:25Je dis ah bon? Et ça m'a beaucoup étonné et là, je me suis dit ce jour là, je
07:31me suis dit en fait, plus on va chercher au fond de soi des choses très
07:36personnelles et plus on peut être universel.
07:39C'est à dire que parce que toutes ces émotions, ces choses qu'on va chercher
07:43au fond de soi, en fait, tout le monde les vit.
07:46Voilà, je vais chercher au fond de moi de plus en plus.
07:49Ça, c'est sûr.
07:50Pour terminer, il y a un titre qui est très fort qui s'appelle Le Bonheur fait
07:53ma joie. C'est quoi le bonheur alors Micheline, pour terminer?
07:57C'est quoi, pardon? C'est quoi le bonheur alors, pour terminer?
08:00C'est deux heures.
08:03Non, mais le bonheur, c'est tout bêtement.
08:05Enfin, pour moi, en tout cas, c'est de vivre comme je rêvais de vivre quand
08:09j'étais ado et d'avoir réussi ça.
08:17Ça, c'est vraiment.
08:19Enfin, je remercie je ne sais qui.
08:22Je me remercie d'ailleurs.
08:24En fait, je pense que c'est plus simple.
08:26Je me remercie d'avoir réussi ça.
08:28Parce que ça, c'est un luxe dans la vie de pouvoir vivre comme on en a rêvé
08:35quand on était petit ou même de vivre comme comme de vivre libre et de pouvoir
08:42faire des choses qui vous plaisent et de ne pas avoir cette sensation de travail.
08:47Et même si on travaille beaucoup.