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Chères lectrices, chers lecteurs,

Enregistrée le mardi 12 novembre 2024, voici la captation de la rencontre de Cécile et Agnès Pivot, autour du livre-hommage dédié à leur père, Bernard Pivot : Le goût des autres.

Signataire d'un texte dans ce livre et proche de M. Pivot, Pierre Assouline de l'Académie Goncourt intervient également.

Vous souhaitant de belles lectures,

L'écume

La Quatrième :

« Pour ce livre, mon père a investi mon bureau. Il y a pris toute la place, que je lui ai laissée bien volontiers. J’ai passé mes journées à son côté, lu des dizaines d’articles, revu ses émissions. Je voulais qu’aux photos sélectionnées, piochées dans ses albums, soient associés des documents écrits, citations, témoignages, interviews, extraits de livres, tweets… Rendre compte du formidable journaliste littéraire qu’il fut, mais pas seulement. Il était un amateur passionné de football et de vin, et un fin connaisseur, du breuvage comme du ballon rond.

Il vouait un autre amour indéfectible, à la région de son enfance, le Beaujolais. Il avait le goût des autres, savait apprécier les bonheurs de l’existence à leur juste valeur. La chance l’a presque toujours accompagné, il n’a eu de cesse de la remercier. Il a aimé la vie, me semble-t-il, comme peu de gens l’aiment. Elle le lui a bien rendu. »

Cécile Pivot

De son enfance à l’académie Goncourt, de Lire à Bouillon de culture en passant par Apostrophes mais aussi par des parties de football ou des vendanges en
Beaujolais, cet album très personnel retrace la vie de Bernard Pivot. Dans ces pages, les lecteurs retrouveront avec bonheur et un brin de nostalgie la passion et l’enthousiasme qui animaient ce grand amoureux des mots et des livres.

Avec un texte de Pierre Assouline de l'Académie Goncourt.
Transcription
00:00Je suis là juste pour vous souhaiter la bienvenue, remercier L'Écume des Pages de leur acquérir, vous dire qu'on est absolument
00:08heureux de se retrouver ici et de se retrouver ici dans une librairie pour
00:12célébrer Bernard Pivot avec Agnès, avec Cécile.
00:17Quand Agnès est venue nous voir chez Calman Levy, c'était au début du mois de juillet en disant
00:23Cécile, pardon.
00:24Voilà, je suis perturbé de les voir toutes les deux en fait, parce que c'est la première fois que je les vois toutes les deux
00:28dans ce projet, donc ça m'a un peu perturbé.
00:32Cécile est venue nous voir
00:33début du mois de juillet en disant mais on a retrouvé
00:37dans l'appartement de Bernard plein d'albums de photos, d'albums de photos qui avaient été faits par Agnès, je ne me suis pas trompé.
00:44Et que ce sont des albums qui sont absolument émouvants, ça serait formidable qu'on puisse en faire un livre.
00:52Et alors vous voyez, là on est
00:54on est pas trop tard dans l'année, on est encore au mois de novembre, donc autant vous dire que tout ça a été fait
01:00assez rapidement, mais dans une ambiance de joie formidable, donc
01:05merci Agnès, merci Cécile pour votre confiance.
01:08C'est une confiance qui boucle en plus quelque chose qui est très jolie, parce que vous le savez, certainement beaucoup d'entre vous le savent ici,
01:14le premier livre, le premier roman de Bernard Pivot a été publié chez Calman Levy
01:19dans cette maison qui a été créée en 1836, donc il avait
01:22décidé que son premier livre serait là et on l'a retrouvé d'ailleurs, c'était très émouvant.
01:28Donc c'est un livre, en vous écoutant et en écoutant les premières personnes qui l'ont vu, c'est un livre, tout le monde dit, c'est un livre
01:34qui ressemble à Bernard Pivot, c'est un livre dans lequel on a
01:38parti de sa vie, on a toute son émotion, on a plein de photos, vous êtes très nombreux, donc on va pas parler pendant trop longtemps
01:42pour vous laisser du temps de discussion avec Agnès et Cécile, donc encore une fois,
01:47merci à toutes et à tous de me dire ici, je vois plein de figures qui me sont familières, ça me touche beaucoup
01:51et je passe la parole à Cécile.
01:55Bonsoir à tous, merci d'être là, merci à l'équipe Montepage de nous accueillir, Philippe a tout dit,
02:01voilà, je vais louper toute mon introduction, ce n'est pas grave.
02:09En effet, c'était des albums qui étaient chez notre père,
02:13faits par Agnès,
02:15donc il y avait l'album Ouvrez les guillemets, il y avait les albums Apostrophes, l'album Le Beaujolais, il y a eu
02:21Lady Codor, donc il y avait énormément
02:24d'albums
02:25qui étaient en fait dans sa bibliothèque et comme Bernard n'était pas du tout quelqu'un qui était dans la nostalgie,
02:31son mot préféré était aujourd'hui, on ne regardait jamais de photos ensemble et je pense que ces albums, ils sont fichés perdument,
02:38voilà, complètement, on peut le dire
02:41et je pense que
02:43beaucoup d'entre vous le savent,
02:46quand une personne disparaît et qu'on retourne chez lui, c'est extrêmement éprouvant et on ne voit pas les choses de la même façon et
02:52encore moins les photos
02:54et donc j'ai regardé tous ces albums et je me suis dit, le livre, il était là en fait,
03:01il était là, en tout cas, c'était un point de départ formidable,
03:06donc je suis très vite allée voir Calman Levy, je vais vous la faire courte, voilà, qui a été tout de suite très enthousiaste,
03:12je voulais vraiment faire ce livre avec des gens que j'aimais, voilà, que j'estimais, en qui j'avais confiance,
03:17ce qui est le cas avec Calman Levy,
03:20Constance Gournais, qui n'est pas là, qui est en retard, tiens, Constance est en retard,
03:26s'est occupée de la maquette,
03:30voilà, donc ce livre s'est fait durant tout l'été,
03:33je tenais à ce qui est du texte, je ne voulais pas qu'il y ait que des
03:37je ne voulais pas qu'il y ait que des photos, donc
03:40j'ai revu énormément, bonsoir Pierre,
03:45j'ai revu énormément d'émissions,
03:48j'ai écouté des interviews de Bernard, et donc il y a dans ce texte beaucoup d'interviews qu'a donné Bernard,
03:57d'extraits
03:58et de textes que les journalistes ont écrits au moment de son départ d'Apostrophe, au moment de son départ de Bouillon de Culture,
04:05et moi j'avais déjà au départ beaucoup d'archives chez moi en fait, parce que quand il avait
04:10arrêté Apostrophe, et quand il avait arrêté Bouillon de Culture,
04:13et c'est vous dire comme j'étais fière de mon père, j'avais acheté tous les journaux qui parlaient de lui,
04:18donc j'avais déjà tout ça au départ, et puis après j'ai vu beaucoup d'émissions
04:21que je ne connaissais pas, j'ai découvert de temps de sa vie que je ne connaissais pas en travaillant sur ce livre,
04:27qu'on a voulu en effet très
04:30très joyeux,
04:32même si moi j'ai beaucoup pleuré en le faisant,
04:36et j'ai demandé aussi à Pierre Assouline, très vite, tout de suite, Pierre qui est derrière moi,
04:44d'écrire un
04:46texte. Pour moi c'était important que ce soit Pierre, parce que
04:49c'était à la fois un collaborateur de Bernard pendant 30 ans, 40 ans, je ne sais plus exactement,
04:56à lire, et puis après ils se sont retrouvés au Goncourt, ils ne se sont jamais vraiment quittés,
05:00et
05:02je vais vous dire aussi pourquoi j'ai choisi Pierre Assouline dès le départ, c'est parce que dans tous les hommages qui ont été rendus à Bernard
05:09au moment de sa mort,
05:12Pierre a parlé d'une chose qui moi me tenait vraiment à coeur au sujet de Bernard, il a parlé de sa gentillesse,
05:17et pour moi c'était en effet, mon père était quelqu'un d'extrêmement gentil, et c'est Pierre qui a parlé de ça,
05:24voilà, donc pour moi c'était
05:26c'était extrêmement important.
05:29Je remercie évidemment les éditions Calman, Constance qui n'est pas là,
05:37sans les albums d'Agnès cela ne se serait pas fait.
05:39Voilà, il y a eu une scène formidable chez nous, comme Anne-Marie, Pierre, était là, et tu leur as ouvert les cartons, j'ai vu Anne-Marie
05:47qui était très émue aussi. Oui absolument, et puis Anne-Marie évidemment tout l'été je l'ai appelée pour lui dire Anne-Marie qui est sur cette
05:54photo, et ça c'était quelle année, et
05:57dis-moi, est-ce que ça c'était à Postrenf, ou est-ce que c'était Bouillon de Culture ?
06:01Vous savez tous qu'Anne-Marie c'est tout, c'est Anne-Marie Bourgnon, la collaboratrice de Bernard, qui c'est tout en fait.
06:10Voilà, on m'a demandé, je vais finir là-dessus, on m'a demandé quelle était ma photo préférée du livre, alors je vais vous le dire, ma photo préférée
06:18c'est évidemment, je n'ai plus la page,
06:22alors je vais vous la retrouver,
06:26Agnès ne va pas m'aider parce qu'elle ne la connait pas.
06:52Pendant que tu cherches la page, et avant de te redonner la parole pour conclure, je voudrais que Pierre Assouly nous dise quelques mots justement de ce texte, de comment il a abordé ce texte, et comment il a été dans ce livre.
07:11Alors je vais juste finir avant, voilà, c'est pas grave, vous trouverez dans le livre, comme ça j'en aurai fini, je vais laisser la place à Pierre.
07:18C'est la photo où on est en voyage à Prague avec nos parents, et on n'a pas fait tant de voyages que ça avec nos parents, à l'étranger, et c'est une photo d'Agnès.
07:28On est au cimetière juif de Prague, et Bernard a une rose à la main, un carnet dans l'autre avec un stylo, et il va aller déposer une rose sur la tombe de Franz Kafka, et je trouve que cette photo est magnifique, c'est une photo d'Agnès.
07:43Et puis il y a un texte qui est mon préféré, à part celui de Pierre, mais qui est un texte au long cours, celui de Pierre, qui est, je ne vais pas vous le lire parce que c'est un texte, je pense que je peux le lire 50 fois, il me fera pleurer 50 fois,
07:55mais il se finit comme ça, c'est une lettre qui est écrite pour Le Figaro, c'est Patrick Modiano, qui rend hommage à Bernard, et qui s'adresse à lui.
08:05Et le texte termine comme ça, c'est un texte qui date du 18 mars 2001.
08:12Et puis les années ont passé, et chaque fois que je vous ai vu sur le plateau d'apostrophes et de brouillons de culture, c'était toujours la même ironie, la même curiosité, et cette manière subtile de taquiner l'interlocuteur pour qu'il puisse s'exprimer.
08:27Chaque fois, j'ai retrouvé votre gentillesse du printemps 1968. Je crois qu'avec vous, ce sera toujours le printemps. Voilà.
08:37Applaudissements.
08:47C'est difficile de parler après Patrick Modiano. C'est un drame. Moi, j'ai fait un groupe à l'entraîneur du K2 en me demandant d'écrire un texte qui n'est pas un texte de biographe,
09:00mais qui est une biographie quand même, enfin un portrait, parce que j'ai eu ce bonheur, ce privilège d'abord de travailler avec Bernard pendant 10 ans au magasin de lire.
09:10Et ensuite, il m'a demandé de lui succéder. J'ai continué à le voir en tant que successeur. La première chose, quand je lui ai dit mon premier acte, ça sera de modifier l'ours du journal,
09:25parce qu'il n'est pas écrit que ça a été fondé par vous, ce journal. Et le moment où vous partez, c'est la moindre des choses. Il me dit oui à une condition.
09:34C'est vous marquer par Bernard Pivot et Jean-Louis Savance-Rebel. Ça, c'est lui. C'est-à-dire toujours rétablir des vérités, ne pas tirer la couverture à lui.
09:45Ensuite, on a continué à se voir quand il est parti, donner des conseils. Et puis, quand il est venu à l'Académie Goncourt, qui m'a fait venir, le premier mot qu'il m'a dit, c'est maintenant, on se tutoie.
10:00Parce que, vis-à-vis de son patron, dans la presse, on le voit. Mais dès qu'on devient confrères, à égalité, si je puis dire, puis autour de la table, on se tutoie.
10:12Ça a modifié les choses. Il nous a apporté, à l'Académie Goncourt, son indépendance. C'est-à-dire que, même s'il existait un peu déjà, à partir du moment où il était là, et encore plus quand il l'a présidé,
10:26les éditeurs, que nous aimons tant, n'ont pas tenté de faire pression. Il y a même eu un moment où il nous a dit, c'est bizarre, il ne nous emmerde plus. Il n'y a plus de pression, il n'y a plus rien.
10:44Peut-être qu'on n'existe plus, finalement. Ce n'était pas le cas, mais c'est-à-dire qu'il nous a abrités sous son parapluie. Et ensuite, quand il a démissionné, au bon moment, comme pour Apostrophe, comme pour Bouillon de Culture, avec un instinct très sûr, on ne s'est jamais entendus.
11:04Puisque, comme tu le sais, on déjeunait ensemble très très souvent, et on parlait énormément, on se racontait des histoires, on disait du mal des oeufs, c'était bien. Surtout des confrères du milieu littéraire, c'était formidable.
11:20Et tu as évoqué la gentillesse. Oui, ce n'est pas le dessus qu'on a appuyé quand il est parti. On a appuyé sur plein de qualités professionnelles, mais les qualités humaines, personnelles sont aussi importantes, si ce n'est davantage, la gentillesse.
11:40J'ajouterai, ça va avec, une exceptionnelle générosité. Générosité financière, tout bête, jusqu'à la prodigalité. Mais générosité de son temps, de ses amitiés, parfois de son influence, de ses réseaux, comme on pourrait dire. Il était toujours prêt à aider. Et ça, ça a beaucoup compté.
12:05Quand on s'est revus l'année dernière fois, il m'a apporté quelques livres sur l'histoire des Goncourt. Il m'a dit, je fais des ménages dans la bibliothèque et ça te servira davantage à toi qu'à moi de lire des livres de Lucien Descartes, des livres qu'on trouve maintenant chez les bouquinistes.
12:24Ils sont plus réédités et ils sont très utiles, parce que c'est plein de potins. Parce qu'il adorait les potins. Et si j'ai tenu à ce qu'on marque le cadre de presse numéro 10, s'agissant de l'art, c'est parce que fondamentalement, du début à la fin, il n'a jamais cessé d'être journaliste et de se présenter comme journaliste.
12:48Tout ça est un peu dans ce texte, dans ce très beau livre qui est très émouvant. Je crois que c'est le plus bel hommage qu'on pouvait lui faire. Non pas une soirée qu'on avait envisagée avec des tas de choses bien, comme on l'a dit, mais ce livre magnifiquement réalisé. Merci Philippe.
13:07Merci à vous deux. Merci à Corinne Lépée qui a été l'éditrice sur ce livre qui se cache là-bas parce qu'elle adore se cacher. Juste avant de vous laisser avec Cécile et Agnès, deux petites choses pour terminer.
13:24D'abord, parce que dans le livre de Bernard, vous allez avoir tout ce qu'on a évoqué, le milieu littéraire, le milieu journalistique, le milieu intellectuel. Il y a aussi le football, fort le football. Et juste pour vous lire, j'avais ça, un message, malheureusement, pour s'excuser de ne pas être avec vous ce soir, de Michel Platini, qui dit qu'il est très honoré d'être dans ce livre, qu'il avait infiniment d'admiration pour Bernard et qu'il voulait saluer ses filles.
13:49Et puis vous dire que Cécile et Agnès sont venus. On va en partager tout à l'heure avec ces bouteilles de vin qui ne sont pas n'importe quelle bouteille de vin, car ce sont des bouteilles de vin cuvées Bernard Thivaud et qui a un vin à son nom. Et Cécile me disait que ce vin allait perdurer et que la cuvée Bernard Thivaud allait continuer à être produite.
14:09Donc merci à vous toutes et à vous tous. Je vois plein d'amis. Je vois Eric Orsena. Je vois Denis Jambard. Je vois plein de gens. Merci à toutes et à tous d'être venus. Et on vous laisse avec Cécile et Agnès. Bonne soirée.

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