🇨🇮 En Côte d’Ivoire, la fédération de taekwondo a été mise à l’arrêt suite à des affaires de harcèlement sexuel.
La championne ivoirienne, Mariama Cissé a raconté à Brut le harcèlement sexuel qu'elle subissait de la part de son coach.
La championne ivoirienne, Mariama Cissé a raconté à Brut le harcèlement sexuel qu'elle subissait de la part de son coach.
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00:00Mon coach qui me faisait des avances, je crois qu'il a plus de 60 ans, avec les refus, j'ai commencé à être mise à l'écart et voilà, ça a coupé mon élan parce que je comptais plus à l'équipe nationale, j'ai été remplacée même sans un test match.
00:17Franchement, c'était difficile parce que je n'avais personne à la fédération pour pouvoir régler mon problème. C'est suite à cela que j'ai compris que je n'aurais pas une place à l'équipe nationale si je ne cède pas à ce coach-là.
00:38Je suis Cissé Mariama, athlète taekwondoïne de haut niveau, membre de l'équipe nationale de taekwondo ouarienne. J'ai été d'abord sélectionnée à l'équipe nationale suite à des tests matchs en février 2022 et c'est là que j'ai commencé à faire mes compétitions internationales.
00:59Ma première compétition, c'était au Niger et mon premier championnat d'Afrique, c'était au Rwanda, là où j'ai eu ma première médaille, une médaille de bronze. Cette médaille-là m'avait donné tellement de force de pouvoir continuer et je m'entraînais dur chaque fois pour pouvoir atteindre mes objectifs.
01:21Je suis même allée au championnat du monde où j'ai fait une belle performance, mais malheureusement, j'ai eu à traverser des situations. J'étais... mon coach qui me faisait des avances, il m'envoyait des messages pour me dire qu'il voulait que je sois sa copine.
01:44Il me disait aussi de vivre, mais moi, je n'étais pas d'accord avec. Au début, je faisais un peu la maligne, genre je ne comprenais pas et tout, mais le jour où je lui ai fait comprendre que je n'étais pas d'accord avec, c'est ce jour-là qu'il m'a sorti du genre, moi, je suis là pour toi.
02:07Et quand on est allé à la compétition au Rwanda, j'ai laissé d'autres personnes pour venir te coacher. C'est comme ça que tu me remercies, en fait. Et c'est de là que c'est parti. Ça a commencé à être un peu bizarre entre nous. C'était le coach de l'équipe nationale de taekwondo.
02:27Non, il ne m'a pas clairement dit qu'il voulait coucher avec moi, mais il m'a fait comprendre qu'il voulait que je sois sa copine. Il ne m'a pas dit je veux coucher avec toi, non. Et souvent, même, il m'invitait, mais moi, je ne partais pas. Une fois, il m'a envoyé un message, Mariama, tu es où? J'ai des tickets pour Miss Côte d'Ivoire, je crois. Tu viens, on part ensemble. Je lui ai dit non, que je n'étais pas disponible du tout.
02:52Après, c'est devenu du harcèlement parce qu'on me disait des choses qui étaient vraiment blessantes. Mais à l'époque, moi, je me disais, mais tu sais pourquoi tu es là, en fait? Ces propos-là ne vont rien te faire. Mais là où j'ai vraiment senti ces abus, c'était un moment où on ne me calculait pas. Je viens aux entraînements. C'est comme si je ne fais pas partie de l'effectif, en fait.
03:18Donc, c'est à ce moment-là que j'ai vraiment commencé à sentir l'abus. Quand il a commencé à avoir ce comportement envers moi, je me suis rendue chez lui, allait lui demander pardon si j'avais fait quelque chose qu'il n'avait pas aimé et que ce n'était pas mon intention. Ce jour-là, il m'a dit qu'il n'avait pas de problème, mais ça dépendait de moi aussi.
03:44Et malgré ça, ça continuait. Ça continuait et ça continuait malgré mon pardon que je suis allée demander. Je suis allée à Dakar et je suis revenue. J'ai repris les entraînements. On a tous repris les entraînements et ça continuait toujours. Mais cette fois-ci, je m'étais décidée d'arrêter complètement le taekwondo.
04:06Ce jour-là, j'étais allée lui dire que l'ambiance ne me plaisait pas et que je préférais me retirer et tout. Et il a dit que lui n'avait pas de problème, mais que la balle était dans mon camp, que ça dépendait de moi. Bon. Et j'ai commencé à m'entraîner à Evolution et j'ai commencé à faire aussi des Opens. J'avais pas de problème avec la fédération.
04:28Moi, j'avais eu déjà un club qui m'accueillait et puis qui me faisait participer à mes compétitions pour me permettre d'avoir mes médailles et tout. J'ai réalisé que j'avais vraiment besoin de la fédération. Lorsqu'il y a eu le championnat d'Afrique ici en Côte d'Ivoire, celle qui m'avait remplacée n'était pas apte pour participer à la compétition.
04:52Du coup, c'était moi qui devais participer à la compétition. Mais j'ai reçu des appels me disant de demander pardon à ce coach-là, chose que j'ai refusée parce que je ne lui ai rien fait. Ils m'ont dit, si je demande pardon, on va aller sur de nouvelles bases, demander pardon pour que tout ça s'arrange et tout. J'ai refusé. Je leur ai dit que si moi, je dois participer au championnat d'Afrique, si Dieu veut que je participe, je vais participer.
05:17À ma surprise, j'ai vu qu'ils ont pris une junior pour combattre dans la catégorie de moins de 57. Là, j'ai compris que sans la fédération, il y a des compétitions auxquelles je ne pourrais pas participer, des compétitions très importantes telles que le championnat d'Afrique, les Jeux africains, le championnat du monde, les qualifications pour les Jeux olympiques ou même les Jeux olympiques.
05:46Donc là, quand j'ai compris ça, je me suis dit, mais tu vas te battre, tu vas travailler dû et arriver à un certain moment où tu ne pourras pas partir tant que tu ne fais pas quelque chose. Et c'est là que j'ai décidé de porter plainte pour que tout aille bien.
06:00En premier lieu, j'ai écrit une lettre au directeur technique de la Fédération ivoirienne du Taekwondo. C'était en décembre. Comme je n'ai pas eu de suite, j'ai porté plainte à la Fédération pour assaillement sexuel et abus de pouvoir. J'ai porté plainte à la Fédération, au CNO, au ministère des Sports et puis au Nifam.
06:23Quand j'ai porté plainte, il y a eu une réaction immédiate de la Fédération. Le président de la Fédération m'a envoyé un retour, un courrier retour pour me dire que dès ces instants-là, on met directement le coach à l'écart pour des investigations. Donc directement, ils ont écarté le coach et le DTN.
06:48Le ministère a saisi la police. Par la suite, je suis allée devant un juge. Là-bas aussi, je suis allée, j'ai fait une déposition, une autre déposition. Et après cela, on a fait une confrontation, lui et moi, et le juge et la troisième personne qui avait... la deuxième personne, pardon, qui me soutenait parce qu'elle avait aussi vécu ces situations similaires.
07:14Après la confrontation, je n'ai pas eu de retour jusqu'à aujourd'hui. Ça fait quand même longtemps que je n'ai pas de suite. Donc du coup, j'ai cherché à savoir comment je peux avoir des suites. J'ai donc écrit une lettre au ministère des Sports pour connaître un peu la suite de l'histoire.
07:34Je veux que la fédération et le ministère fassent plus parce que je ne veux pas aussi que d'autres personnes puissent subir la même chose. Si on ne prend pas de mesures, il y aura encore d'autres qui vont parler. Et arrivé un moment, on ne va plus parler parce qu'on sait qu'il n'y aura pas de retour. Il n'y aura pas de sanctions plus. Donc on va plutôt peut-être être écarté. Donc on va préférer se taire.
08:03Je crois que nos dévancés l'ont fait aussi. Elles n'ont pas voulu parler parce qu'elles avaient peur aussi de perdre leur place.
08:10Aujourd'hui, j'explique cette histoire avec souris. Ils vont même penser que je n'ai pas vécu des moments de paix, des moments difficiles où je ne dormais même pas. Mais c'est en grande partie grâce à ma famille.
08:25Souvent, je me dis qu'on a une porte fermée et on se concentre sur la porte qui est fermée parce qu'on veut que c'est elle qui s'ouvre. Pourtant, il y a une deuxième porte qui peut être ouverte juste à côté de nous. Nous, on ne la voit pas. Franchement, c'était cette porte-là qui était la grande porte que je devais prendre. Donc je ne me suis pas pitoyée sur mon sort. J'ai préféré continuer ailleurs. Et puis aujourd'hui, ça m'est réussi.