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A l’image de cette exposition qui met en valeur les nombreux métiers et méthodes scientifiques que ce fabuleux objet de recherche mobilise, les enseignants peuvent s’appuyer sur l’engouement suscité par la préhistoire auprès des plus jeunes comme des plus grands. Ce peut être l’occasion de proposer aux élèves des activités pluridisciplinaires motivantes et de leur faire découvrir des métiers scientifiques de tous horizons. Avec : Jean-Jacques Delannoy, géomorphologue, professeur des Universités, université Savoie Mont Blanc à Chambéry et membre du comité scientifique de l’exposition ; Christelle Guiraud, commissaire de l'exposition la grotte Chauvet, l'aventure scientifique à la Cité des sciences et de l'industrie ; Fatima Rahmoun, ingénieure et professeure de physique-chimie, chargée de projets pédagogiques à la Main à la pâte.

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00:00:00Merci Philippe. Et bonjour à toutes, bonjour à tous. Bienvenue pour ce nouveau TEDUC consacré
00:00:18à la grotte Chauvet, cette aventure scientifique. Alors découverte en 94 par trois spéléologues,
00:00:24fermée naturellement pendant 20 000 ans, la grotte Chauvet est dans un état de conservation
00:00:28remarquable. Jamais ouverte au public, les recherches y ont débuté en 98 et n'ont jamais
00:00:34cessé depuis, mêlant des disciplines scientifiques extrêmement variées, de l'archéologie à la
00:00:40paléogénétique, en passant par la géomorphologie. Jean-Jacques Delannoy nous en parlera. Aujourd'hui,
00:00:45la Cité des sciences, avec l'exposition Grotte Chauvet, l'aventure scientifique,
00:00:49propose une plongée dans ses explorations scientifiques et place le visiteur dans les
00:00:53pas et dans la peau des chercheurs, au cœur de la démarche scientifique. Alors vous aurez
00:01:00l'occasion tout à l'heure de visiter cette exposition, donc cette table ronde est un peu
00:01:04une entrée en matière. Et pour nous guider dans cette exploration, nous avons la chance d'avoir
00:01:08avec nous Christelle Guirault, Jean-Jacques Delannoy et Fatima Ramoun. Bonjour à tous les
00:01:15trois. Fatima Ramoun, vous êtes initialement professeure de physique chimie en collège et
00:01:22aujourd'hui chef de projet pédagogique à la main à la pâte, où vous vous occupez plus
00:01:26spécifiquement de la chimie et des matériaux dans le cadre de l'éducation au développement durable
00:01:32notamment. Christelle Guirault, vous êtes commissaire de l'exposition Grotte Chauvet,
00:01:36l'aventure scientifique à la Cité des sciences et de l'industrie, et vous accompagnerez tout à
00:01:41l'heure les enseignants sur la visite. Et puis Jean-Jacques Delannoy, vous êtes géomorphologue,
00:01:45professeur des universités à l'université Savoie-Montblanc à Chambéry. Vous travaillez
00:01:50sur la grotte depuis le début, donc depuis la fin des années 90 en fait. Et forcément j'ai envie
00:01:57de commencer avec vous et de vous poser une première question toute simple. La première
00:02:03fois que vous êtes entré dans la grotte, est-ce que vous pouvez nous en parler ? Qu'est-ce que
00:02:08vous avez ressenti puisque vous êtes un des rares quand même à être entré dans cette grotte ?
00:02:11Alors effectivement j'ai eu la chance d'aller dans cette grotte magnifique dont on parlera
00:02:19tout au long de la journée, de l'après-midi. Je vais dire un truc horrible. En fait ma première
00:02:28visite de la grotte, moi je suis géomorphologue, donc c'est l'étude des formes du relief. Et je
00:02:35me suis spécialisé dès l'adolescence dans l'étude des grottes, parce que je commençais à la spéléologie
00:02:42il y a 13 ans. Et j'ai vraiment en fait créé mon métier de chercheur dans les grottes pour faire
00:02:50parler les grottes, parce qu'une grotte c'est plein plein plein de mémoires qui sont enregistrées
00:02:54dedans. Et donc moi c'est plutôt les formes que je regarde, parce que chaque forme c'est un processus,
00:03:01c'est une histoire. Et donc on peut comme ça raconter l'histoire d'une grotte et plein d'autres
00:03:07choses à travers une grotte. Et quand je suis rentré dans la grotte, j'ai regardé surtout les
00:03:12formes de cette grotte, qui est une grotte avec des formes magnifiques, mais vraiment magnifiques.
00:03:16Et en fait effectivement on va voir que c'est une grotte qui nous permet vraiment de parvenir
00:03:22pratiquement 5 millions d'évolutions de notre planète. Et vous voyez sur les photos des choses
00:03:30qui interpellent. Et bien entendu, je savais que c'était une grotte ornée, c'était pour ça que
00:03:36j'étais là. Et après effectivement c'était comment ces peintures, ces fresques s'inscrivent
00:03:44dans cette topographie, dans cette morphologie de la grotte. Parce que c'est une grotte qui a quand même
00:03:50des formes extrêmement particulières, très très organiques, et des formes très très rondes,
00:03:57très en douceur. Et les oeuvres s'inscrivent bien dedans. Donc en fait très vite il y avait
00:04:02une connexion qui s'est faite entre les oeuvres et puis la morphologie.
00:04:06Ah oui, on dit souvent qu'il y a un avant et un après Chauvet. Alors on dit peut-être ça du
00:04:12point de vue de l'art pariétal. Pourquoi est-ce qu'elle est si unique en fait cette grotte ?
00:04:17Alors unique pour plein de choses. Mais d'abord au niveau de l'histoire de l'art bien sûr,
00:04:23c'est une grotte qui a complètement cassé la manière de voir l'histoire de l'art. Puisque
00:04:28jusque là, on imaginait dans le monde et le concept du progrès, qu'au fur et à mesure qu'on
00:04:33va vers aujourd'hui, les formes d'expression artistique étaient de plus en plus abouties.
00:04:38Et là il se trouve qu'on a parmi les oeuvres artistiques, mais il n'y a pas que les oeuvres,
00:04:45les installations, le 3D qui est déjà dans cet art-là, tout ça a été inventé il y a 36 000
00:04:54ans. Et donc ça a complètement cassé les modèles de l'histoire de l'art. Puisque si on regarde un
00:04:59petit peu avant Chauvet, quand on regarde des livres de l'histoire de l'art, on voit que la
00:05:03période de 36 000 ans, c'est vraiment des dessins qui sont hyper frustres. On ne connaît presque pas
00:05:10les figurations animales, etc. Et là non, en fait les oeuvres les plus abouties d'un point de vue
00:05:15pictural, d'un point de vue technique de peinture, de préparation des toiles, de la toile minérale,
00:05:23etc. Tout est déjà inventé à Chauvet. Donc ça, c'était une révolution totale. Donc ça a
00:05:30complètement cassé. Et d'ailleurs, ça a été d'autant plus fort dans la communauté, je veux dire
00:05:34surtout archéologique, peut-être moins dans la communauté de l'histoire de l'art, que d'abord
00:05:39les archéologues, beaucoup d'archéologues dans le monde ont nié en fait les premières datations.
00:05:43Ils ont dit c'est pas possible que ce soit un truc aussi vieux. Et il a fallu beaucoup de temps au
00:05:49niveau de la recherche scientifique pour démontrer que si, c'est bien 36 millions. Et la deuxième
00:05:55chose, c'est, il y a un avant et un après, c'est la manière d'étudier à la grotte. Et c'est à
00:06:04partir de la grotte Chauvet, c'est vraiment des atouts de type interdisciplinaire, donc brassant
00:06:09beaucoup de disciplines pour travailler tous ensemble sur une grotte. Et ça, c'est vraiment
00:06:13unique. Vous voulez réagir ? Ah voilà, super. Parce que déjà, c'est très intéressant parce que
00:06:24Jean-Jacques a dit, je vais vous décevoir, parce que moi j'ai regardé les formes en arrivant dans
00:06:28la grotte. Et donc, vous savez peut-être tous ou pas, mais en tout cas, c'est une grotte ornée et
00:06:33majeure. Et généralement, quand on entend parler de la grotte Chauvet, c'est pour ses peintures
00:06:37parietales. Et nous, dans cette exposition, on n'a pas fait une reconstitution, vous verrez. Et on
00:06:43ne va pas parler que de l'art parietal, on va surtout parler des chercheurs qui font de la
00:06:47recherche dans la grotte. Qui sont ces chercheurs et ces chercheuses ? Donc quelles disciplines se
00:06:52côtoient et travaillent ensemble ? Et aller faire découvrir à nos visiteurs ces méthodologies et
00:06:59ces conditions de recherche aussi, mais dans tous les domaines de sciences. Et donc, on va aller
00:07:03explorer non pas seulement l'art parietal, mais bien sûr les formes, la géomorphologie, comment on
00:07:09fait cette recherche par le regard notamment. Donc là, vous verrez, il y a des choses que tu vas
00:07:14développer ici, mais qui sont aussi dans l'exposition. Et puis, tu viens de parler des
00:07:18datations qui sont quelque chose de majeur dans la recherche à Chauvet, puisque les conditions de
00:07:22recherche empêchent de se déplacer partout, de fouiller, de toucher. Donc, du coup, la datation
00:07:27par les mini-prélèvements est une entrée de recherche. Et donc, voilà. Et donc, ça, c'est des
00:07:32chimistes, des physiciens chimistes, par exemple, qui font ça. Chimistes de la matière. Et voilà.
00:07:36Et donc, ça, c'est vraiment une entrée très importante. Et c'est quelque chose qui n'existe
00:07:40pas actuellement dans les expositions liées à la préhistoire. Savoir comment les scientifiques
00:07:47étudient, qu'est-ce qu'ils étudient, comment ils étudient pour acquérir les connaissances que nous
00:07:52avons aujourd'hui, là, de la Grotte-Chauvet, puis de la préhistoire en général. On va développer ce
00:07:57que propose effectivement l'exposition et cet angle est effectivement très intéressant de la
00:08:00démarche scientifique, plutôt que simplement nous montrer ce que l'on sait aujourd'hui de la
00:08:05Grotte-Chauvet. Avant ça, j'aimerais qu'on s'attarde un tout petit peu sur les recherches
00:08:09qui se mènent actuellement à la Grotte. Parce qu'il faut rappeler, donc, qu'elle n'est pas
00:08:13ouverte au public. Elle est ouverte aux scientifiques seulement une semaine par an.
00:08:16Alors, je crois qu'avant, c'était trois semaines maintenant. OK. Donc, sur un temps restreint,
00:08:22en tout cas. Et se côtoient donc plein de disciplines pendant ce temps restreint. Donc,
00:08:27c'est une organisation de la recherche qui est déjà assez inédite, en fait, sur cette Grotte. Et
00:08:32depuis toujours ? Depuis le début, en fait. Cette équipe, elle a été constituée d'emblée,
00:08:38avec une dimension interdisciplinaire. D'abord, parce que les photos ne rendent pas toujours
00:08:48compte de la Grotte. Heureusement qu'il y a des personnages. Donc, c'est une Grotte qui est
00:08:55vraiment extrêmement grande. Souvent, on fait des comparaisons avec la Grotte de Lascaux. La Grotte
00:08:59de Lascaux, c'est une petite Grotte. Là, c'est une Grotte qui est gigantesque. 600 mètres de
00:09:03développement. Là, on voit mieux. Donc, il y a un très, très, très grand volume. Et il y avait
00:09:11aussi autre chose qui est extrêmement importante à dire, parce que c'est ça aussi qui a fait la
00:09:15recherche à Chauvet. Déjà, Christelle en a parlé. On ne se déplace que sur des passerelles comme
00:09:22vous le voyez sur la photo. En fait, ces passerelles passent exactement au même endroit
00:09:26que le chemin des découvreurs quand ils ont découvert la Grotte. Donc, ce qui est à la fois
00:09:31très, très bien, puisque là, du coup, on n'altère pas du tout la cavité. Parce que cette Grotte,
00:09:37elle a énormément de particularités. Mais j'allais presque dire qu'en dehors de la force de son art,
00:09:44c'est son état de préservation qui est remarquable. On a vraiment l'impression qu'ils sont partis.
00:09:53Les ours, les hommes, on a les empreintes au sol, on a les petits éléments, les petits
00:09:59éléments qui ont été laissés de bois, de charbon de bois, mais aussi de saguet, etc. Ils sont posés
00:10:07comme ça, comme si moi, je pose la bouteille là et puis on revient demain. Non, sauf qu'il y a 36
00:10:12000 ans que c'est là. Donc, ça, c'est du coup, d'emblée, l'idée était de dire, il y a tellement
00:10:18de choses qu'il faut regarder, observer, apprendre de tout ce qu'on a sous les yeux, on va ne pas faire
00:10:26du tout de fouilles archéologiques. Alors, c'est quand même assez, je veux dire, difficile parce
00:10:30qu'en fait, souvent, quand on parle de grottes, de citornées, tout de suite, on pense fouilles. Et
00:10:34en fait, là, il y a déjà énormément, énormément d'informations qui existent dans la Grotte à
00:10:38chercher. Et puis finalement, au lieu de faire des fouilles, qu'on va dire, dans le sol, on va faire
00:10:43finalement des, avec la même démarche qu'une fouille, mais sauf qu'on va travailler sur des
00:10:48temporalités, des chronologies qui sont sur les parois, qui sont inscrites sur les parois avec
00:10:52des superpositions de peinture, avec le type de roche, etc. Donc, de fait, cette interdisciplinarité,
00:11:02elle a fonctionné de manière extrêmement bien et vite parce que tout le monde était
00:11:07déstabilisé. Parce qu'en fait, dans tous les corps de métiers scientifiques, on ne pouvait pas faire
00:11:12ce qu'on avait l'habitude de faire. En général, moi, je gratouille, je touche. Là, je n'ai pas le droit
00:11:18de toucher, pas le droit de gratouiller. Le paléontologue, il prend l'os, il recourt, etc.
00:11:22Le paléontologue, il va s'approcher très, très près, etc. Donc, en fait, tout ce qui était nos
00:11:28manières de faire de la recherche, on a perdu, en fait, nos outils. Donc, il a fallu reconstruire
00:11:32ensemble nos outils de la recherche et on l'a fait d'emblée de manière interdisciplinaire et au
00:11:37travers, donc, de ce travail. Donc, c'est vrai que ça a été quelque chose d'extrêmement puissant
00:11:42qui fait qu'aujourd'hui, c'est presque une école, en fait, de recherche dans les grottes du monde
00:11:48entier. Et en l'occurrence, le choix de cette grotte pour une exposition est d'autant plus
00:11:54pertinent que tout part de l'observation. Et ça, c'est quelque chose qu'on peut tous faire. Notamment,
00:12:01il y a une visite virtuelle qui est possible, que propose le ministère de la Culture. On peut
00:12:05accéder, comme ça, à une visite virtuelle de la grotte. On peut se promener, on peut zoomer sur
00:12:10les oeuvres. Moi, je l'ai fait. Je trouve ça absolument génial et on peut le faire avec des
00:12:13enfants. Fatima Ramoun, d'ailleurs, vous, à la Fondation La main à la pâte, vous proposez un
00:12:19parcours notamment sur les peintures pariétales et notamment sur Chauvet, mais aussi sur Lascaux.
00:12:24Et la porte d'entrée, c'est l'observation. Oui, effectivement. Au départ, on n'était pas
00:12:33forcément sur l'art pariétal. On cherchait justement à trouver une place à l'enseignement
00:12:39des sciences à l'école primaire et notamment la chimie, la physico-chimie. Et nos professeurs
00:12:46des écoles n'étant pas très scientifiques, ce n'est pas toujours évident pour eux de réussir
00:12:50à accompagner les élèves dans une démarche scientifique, dans une appropriation de ce qu'est
00:12:54la science et comment elle se fait. Et du coup, on a regardé les programmes officiels et on s'est
00:12:58rendu compte qu'il y a un endroit où il y avait énormément de chimie, de physico-chimie. C'était
00:13:01sur la partie art plastique puisqu'on était sur la matérialité des oeuvres d'art. Et donc,
00:13:06on était vraiment sur la matière. Et du coup, on s'est plongé là-dedans. Et pour, au départ,
00:13:14les cycles 2, donc CP, CE1, CE2. Puis après, nos tests ont continué en cycle 3. Et puis,
00:13:20même maintenant, j'ai des professeurs de collège et de lycée qui me disent qu'ils ont pris les
00:13:23activités et qu'ils les ont adaptées à leurs élèves. Donc finalement, c'est une proposition
00:13:27qui intéresse beaucoup. On a eu la chance aussi de travailler avec des experts scientifiques du
00:13:32laboratoire d'archéologie moléculaire et structurelle de l'AMS, qui est basé à Jussieu,
00:13:37à Sorbonne Université, notamment avec Philippe Walter et son équipe. Et on a vraiment cherché
00:13:44à utiliser des oeuvres d'art pour faire des pas de côté en physico-chimie. Et du coup,
00:13:53ce qu'on a choisi de faire, parce qu'on s'est dit que c'était une super entrée et pour les
00:13:58enseignants de l'école primaire, mais aussi pour leurs élèves, c'était de démarrer avec des
00:14:02observations et l'observation de grottes et de belles photos de grottes, parce qu'on a cette
00:14:06chance-là d'avoir accès à de magnifiques photos qu'on peut utiliser en classe. Et donc,
00:14:14effectivement, il y a tout un premier travail avec les élèves d'observation, de description des
00:14:19oeuvres, donc beaucoup de langage aussi. Et puis après, on se pose la question de, finalement,
00:14:22comment ils ont pu faire à l'époque ? Comment ça a pu être réalisé ? Et donc, il y a plein
00:14:28d'idées, parce qu'ils ont déjà une culture de l'art parietal, soit familiale, soit à l'école,
00:14:32on a déjà parlé de ça. C'est dans les programmes et du coup, ils ont plein plein d'idées. Et on
00:14:37leur propose d'essayer d'expérimenter, d'essayer d'extraire des couleurs de matière première,
00:14:44potentiellement disponibles à l'époque ou pas. Après, on essaie de voir un peu aussi avec les
00:14:50possibles et leurs idées. Et on va, du coup, essayer d'extraire ces couleurs. Et on va,
00:14:56au départ, être un peu déçu parce qu'on n'arrive pas forcément à si bien extraire. Les techniques
00:15:01d'extraction ne sont pas toujours évidentes. Et on va apprendre des gestes techniques. On va
00:15:04revenir sur la rigueur scientifique et on va être de plus en plus efficace. Et après,
00:15:09on va se poser la question de qu'est-ce que c'est qu'une peinture et comment on la formule ? Et là,
00:15:13on va vraiment être sur des activités très rigoureuses, cadrées, pour vraiment apprendre à
00:15:20formuler, à savoir ce qu'il y a dans une peinture absolument, ce qu'on peut y ajouter. Et on va
00:15:26donc fabriquer des peintures. Et à partir de nos idées, on va finalement retracer toute l'histoire
00:15:32de l'art. Puisque l'histoire des techniques de peinture, c'est l'histoire des liens et des
00:15:37différents apports techniques par rapport aux liens. Bien sûr, les pigments se sont, au fur et
00:15:42à mesure, aussi multipliés. Mais au départ, la palette de l'artiste est assez restreinte. Et
00:15:46pourtant, on voit ces oeuvres magnifiques avec ce peu de matière disponible. Et donc voilà,
00:15:52on va vraiment faire, à partir de cette entrée magique, pour les élèves et leurs professeurs,
00:15:58de commencer avec ces magnifiques oeuvres d'art. Ça va nous permettre vraiment de faire tout un
00:16:03parcours scientifique et d'essayer de nous rapprocher aussi de la manière dont les
00:16:06chercheurs travaillent. Pardon, mon micro ne marchait pas. Ce qu'il faut préciser, c'est que
00:16:12vous avez travaillé avec des experts, avec des scientifiques, du laboratoire d'archéologie
00:16:18moléculaire et structurelle qui est basé à Jussieu, le laboratoire CNRS Sorbonne Université,
00:16:22qui est aussi un laboratoire qui est impliqué dans les recherches de la grotte et qui est mis
00:16:29en valeur aussi dans l'exposition. Donc il y a vraiment une filiation entre toutes ces activités.
00:16:35Dans l'exposition, justement, l'idée, ça va être de mettre les enfants, les visiteurs plus
00:16:43globalement, dans la peau de scientifiques en leur proposant les expériences, même des
00:16:47scientifiques, mais à hauteur d'enfants. Comment on fait cette adaptation-là ?
00:16:51Alors attendez, voilà, c'est bon. Notre objectif étant de parler des scientifiques et de la
00:17:02recherche dans la grotte Chauvet, on a vraiment voulu mettre à disposition de nos visiteurs,
00:17:06que ce soit des enfants ou des adultes. Ça s'adresse vraiment à tout le monde et on est
00:17:11assez content, parce que ça marche bien pour chacun, de les mettre dans cette posture et
00:17:17physique et intellectuelle. Et donc, par exemple, puisqu'on a bien signifié que le regard était
00:17:24hyper important et l'observation était bien importante, dans notre exposition, on met nos
00:17:28visiteurs dans la posture d'observer, ce qui paraît un peu banal, entre guillemets, où c'était des sciences,
00:17:33où on montrait toujours beaucoup de choses. Là, on leur propose de regarder des choses avec parfois
00:17:38un petit guide ou accompagné, par exemple, de la voix de Jean-Jacques dans un des dispositifs, et de
00:17:43prendre le temps, ce temps un peu long de l'observation, parce qu'en fait, on ne voit pas les choses
00:17:47comme ça, qui nous apparaissent comme par magie. Donc ce temps-là, il est important et on le voit
00:17:53dans la recherche, en général, le temps est important. Donc ça, c'est quelque chose de très important
00:17:59pour nous, de les mettre dans la posture d'observation. Donc ça peut faire des liens avec les activités
00:18:03de la main à la patte, par exemple. Et puis, après, nous, comment on fait ça ? En tant que
00:18:08concepteur d'expo, on s'est dit qu'on allait partir, on s'est mis des partis pris très forts, qu'on allait
00:18:13partir de la donnée des chercheurs et des chercheuses, et uniquement ça. C'est-à-dire qu'on n'a pas
00:18:18inventé des jeux, des scénarios séparés pour expliquer un contenu, on est parti de ce que nous
00:18:26donnaient les chercheurs. Donc il n'y a que les images et les données des chercheurs. Donc ça, c'est
00:18:30vraiment chouette et on n'a jamais menti, entre guillemets. Donc tout ce qu'on décrit vient de
00:18:36nos chercheurs. Par exemple, il y a quelques activités sur des ordinateurs, il y en a 4, 4, 5. Et en fait,
00:18:43pourquoi ? Parce que là, typiquement, dans leur recherche, les chercheurs avaient besoin de
00:18:47l'outil informatique, par exemple. Voilà. Donc ça, c'est un exemple. Et puis après, c'est une
00:18:53collaboration étroite avec toute l'équipe des chercheurs, qui sont d'ailleurs présentés dans
00:18:58l'exposition avec des portraits, photos, textes, et pour certains, petits commentaires audio. Et ce
00:19:04qu'on a voulu faire, vraiment, et ça marche assez des premiers retours qu'on a, c'est qu'on
00:19:10désacralise un peu le scientifique. C'est-à-dire que finalement, c'est des personnes comme vous et
00:19:15nous, on a tous nos compétences. Vous en pédagogie, Jean-Jacques en géomorphologie. Et finalement,
00:19:20voilà, les visiteurs qui viennent dans l'expo et les enfants peuvent tout à fait s'identifier
00:19:24à ces personnes. En plus, il se trouve que c'est quand même des activités qui sont assez
00:19:29concrètes pour les publics. Et donc, ils peuvent tout à fait se mettre dans la peau et, par exemple,
00:19:34détourer une empreinte qu'on voit au sol. Bon, c'est pas si simple de voir les empreintes, de les
00:19:38détourer, de les identifier. C'est un travail très complexe en paléontologie et écnologie. Mais en
00:19:43fait, nous, on est arrivé à montrer à travers directement les photos des chercheurs, faire faire
00:19:49aux visiteurs exactement la même chose, comparer par exemple son détourage à celui du chercheur,
00:19:53et ensuite comprendre comment on identifie que c'est une empreinte d'un loup et pas d'un cuiron,
00:20:00qui est une autre espèce de canidée. Et voilà. Et on les mène comme ça jusqu'au bout de l'analyse.
00:20:04Et en fait, c'est très agréable, très satisfaisant pour les visiteurs, y compris les enfants.
00:20:09Oui, et puis l'exposition, elle met en évidence des nouvelles méthodes aussi d'analyse. Vous disiez,
00:20:15voilà, le fait qu'on soit contraint comme ça, on doit rester sur la passerelle et puis bon,
00:20:19on ne peut pas tout toucher, on ne peut pas tout voir, on ne peut pas faire de prélèvements.
00:20:21La contrainte stimule la créativité, y compris dans la méthode scientifique finalement. Et est-ce
00:20:27que vous pouvez nous donner comme ça un exemple finalement de recherche qui est née de cette
00:20:32contrainte en fait ? Est-ce que c'est une nouvelle technique ou pas ? On a redonné peut-être des
00:20:44lettres de noblesse de ce qu'est la carte. Puisque globalement, on a un plan, soit on peut faire une
00:20:53carte du sol ou soit des relevés des parois. Et le fait de fabriquer des cartes, ce sont des actes
00:21:03de création. En fait, pour tout chercheur, chaque fois qu'il va poser un espace donné, c'est quoi ce
00:21:10caillou ? C'est quoi cet os ? Pourquoi cet os, il est disposé comme ça ? Pourquoi là, il est disposé
00:21:15comme ça ? À chaque fois, on va donner un statut à tous les objets qui sont au sol. Et donc en fait,
00:21:19on va, pour chacun de ces objets au sol, on va raconter l'histoire de l'objet. Et puis après,
00:21:25l'histoire de la grotte et une chronologie du temps qui va se faire. Et je pense que la carte a
00:21:31été justement un élément de fédérateur. Parce qu'en fait, tout le monde, on est tous des sciences
00:21:36de terrain. Ce qu'on appelle les sciences de terrain, on va sur le terrain, on observe, on relève, on fait
00:21:41des analyses, on touche d'habitude. Et donc, la manière de retranscrire cette information, alors
00:21:48on peut faire effectivement sur des supports informatiques, tablettes, etc. Mais on est encore
00:21:53très très papiers, crayons de couleurs, etc. Parce qu'on peut se tromper aussi au fur et à mesure
00:22:01qu'on va dessiner, qu'on va gammer. Parce que tiens, ça c'est ça. Et puis après, on voit là-bas. Ah ben non, finalement, ce que j'ai
00:22:06représenté là, c'est pas bon puisque là-bas, j'ai la réponse, etc. Donc finalement, ces cartes, elles
00:22:14vont en fait, la production de ces cartes, c'est tout un processus de création scientifique qui va à un
00:22:19moment donné, puisqu'on est sur le même support, se croiser. Et donc du coup, de pouvoir comme ça
00:22:24raconter un peu l'histoire de la grotte. Parce que la grotte, elle a vécu avant, elle a vécu
00:22:30pendant les fréquentations humaines et animales. Et puis elle a continué de vivre après. Et aussi,
00:22:35justement, toutes les interactions qui ont eu lieu avec les fréquentations et les traces laissées par
00:22:40les animaux et les autres. Donc ça, ça a été quelque chose d'assez fort, je veux dire, dans le processus de création.
00:22:49Et après, qu'il y a été aussi de croiser. Bon, bien entendu, on a parlé de l'interdisciplinarité, donc il va être de croiser
00:22:58beaucoup, beaucoup d'informations, de créer presque des nouveaux champs de recherche. Parce que
00:23:03effectivement, là, je vois une paroi avec un enfant qui éclaire. Bon, c'est vrai que les parois
00:23:08à la grotte Chauvet, elles ont des formes, vous allez le voir quand vous allez à l'exposition, des formes extrêmement
00:23:14sinueuses et ce que j'appelle un peu organiques parce qu'elles sont très douces, etc. Et c'est vrai que
00:23:20ces dessins sont inscrits là-dedans. Et le fait, des fois, de travailler sur la lumière ou sur le son,
00:23:26va aussi redonner un statut au choix qu'ont eu les femmes et les hommes de dessiner à cet endroit-là
00:23:36et pas à cet endroit-là. Parce qu'il n'y a pas de hasard. Je veux dire, c'est un processus qui est
00:23:40extrêmement long. Je ne vais pas dire de création parce qu'on n'est pas dans la création vraiment
00:23:45artistique avec l'art pariétal. On est sur plus des modes de communication liés à l'oralité et à
00:23:51les transmissions de savoir. Mais qu'importe, on appelle ça art pariétal et c'est inscrit dans
00:23:57la terminologie. Mais tout ça pour dire que ces femmes et ces hommes, il y a 36 000 ans,
00:24:05ils ont été dans la grotte. Ils y sont revenus. Ils y sont revenus. Ils y sont revenus. Ils sont
00:24:09tellement venus et revenus qu'ils ont aménagé la grotte. Les endroits, c'est un peu compliqué.
00:24:13Donc, ils ont fait des marches. Ces endroits, il y avait des blocs. Ils ont déplacé les endroits.
00:24:16Il y avait des croisements. Donc, on pourrait se faire. Ils ont fait des cernes pour dire c'est
00:24:20plutôt à droite qu'à gauche. Donc, ça veut dire qu'ils sont revenus là-dedans et il y a eu des
00:24:23choix qui ont été faits pour peindre tel ou tel endroit. Donc, notre travail aussi, justement,
00:24:30on ne va jamais reconstituer pourquoi ils ont fait ces œuvres et ça, on s'interdit aujourd'hui
00:24:35de faire ça. Par contre, de définir pourquoi ils ont choisi cette paroi-là, pourquoi ils ont
00:24:42choisi cette technique-là parce qu'à Chauvet, il y a au moins 7 ou 8 techniques différentes de
00:24:47peinture. Tout ça, c'est en résonance avec la paroi, le type de paroi, la texture et des choses
00:24:53comme ça. Donc, du coup, et pareil avec les animaux puisque les animaux, ils ont aussi laissé
00:24:58leurs traces sur les parois. En fait, globalement, on a toujours des espaces communs de regard et de
00:25:05discussion, d'échange et ne serait-ce que pour créer une chronologie parce que chacun voit sa
00:25:11chronologie dans chacun de ses champs disciplinaires. Mais après, on dit, ah oui, maintenant ça s'est
00:25:16passé entre ça et ça. Donc, ça donne une force à l'observation. Oui, on a la sensation que
00:25:21l'interdisciplinarité, en fait, elle crée sans arrêt de nouvelles questions et de nouveaux champs
00:25:25de recherche parce que sinon, on pourrait se dire, bon ben voilà, ils sont sur cette passerelle très
00:25:29étroite. Depuis près de 30 ans, vous menez les recherches depuis cette petite passerelle. Alors,
00:25:35il y a eu des petits prélèvements quand même qui ont été faits, raisonnés, très très faibles. On a
00:25:41analysé les peintures, les traces, les empreintes, les ossements et un peu naïvement, on pourrait se
00:25:47dire, bon ben, est-ce qu'on pourrait se retrouver face à une impasse ? Au bout d'un moment, ça y est,
00:25:51on a tout vu, on a tout compris. Ben non, en fait, parce qu'en fait, les questions sont infinies.
00:25:54Elles sont infinies et on a développé beaucoup de technologies, justement, pour dépasser la
00:26:00passerelle. Donc, ça va être tout ce qui est l'acquisition qu'on appelle aujourd'hui 3D,
00:26:04quoi. Donc, avec le relevé de ce qu'on appelle lasergrammétrie ou photogrammétrie qui nous
00:26:08permettent, en fait, ensuite de retraver en laboratoire sur, j'aime pas le terme, clones
00:26:14numériques, en fait, une sorte de, voilà, on emmène l'agro dans son laboratoire, un modèle 3D. Et ça,
00:26:20c'est intéressant parce que, du coup, ce modèle 3D nous permet aussi, on a tous eu des révélations
00:26:25comme ça en regardant ce modèle 3D, parce qu'à un moment donné, ben, nous, on est toujours au ras
00:26:29du sol, quoi, là où on marche, quoi. Mais dès lors qu'on va pouvoir se déporter, déporter le regard
00:26:35plus haut ou plus bas, etc., il y a des tas de perspectives qu'on voit, qu'on découvre et qui
00:26:41étaient aussi les perspectives qu'ils recherchaient et qu'on n'a pas forcément la vision quand on le
00:26:45regarde comme ça. Donc ça, c'est effectivement quelque chose qui a été une technologie assez
00:26:53nouvelle, même précurseur à la Grotte Chauvet, puisque c'est là que toutes les acquisitions 3D
00:26:57dans les Grottes Ornées ont démarré, avec force, avec beaucoup de qualité, puisque c'est ça qui a aussi
00:27:02permis de faire une réplique, ce qu'on appelle la Grotte Chauvet 2. Et voilà, quoi, donc, c'est technique,
00:27:09mais il y a, quoi, j'avais prévenu, je pourrais être très, très bavard, parce qu'il y a beaucoup,
00:27:14beaucoup, beaucoup de choses qui sont fortes là-dessus. Mais quand on voit cette image,
00:27:21elle est, quoi, là-dedans, il y a énormément de mémoire. Si on regarde, par exemple, la base de
00:27:28la paroi, vous voyez, on voit que la roche est extrêmement polie, elle brille sous la lumière.
00:27:36Ça, ce sont les ours, ce sont les ours qui passent, parce que les ours, la Grotte Chauvet n'aurait pas
00:27:41été une Grotte Ornée, elle aurait été de toute façon connue comme la plus grande grotte à ours d'Europe.
00:27:45Donc là, les ours, forcément, ils ne voient pas, donc ils frottent, ils se guident contre la paroi des
00:27:51grottes pour aller et venir dans la grotte, donc il y a tout ce poli. Donc il y a l'histoire de l'ours qui est là.
00:27:56Et on voit bien qu'à un moment donné, c'est clair et puis après c'est sombre. Après, il y a tous ces argiles
00:28:02qu'on a, qu'on voit qui donne, qu'on est un peu orangé, etc. Et puis on se dit, tiens, mais je la vois pas sur
00:28:07les peintures, tout simplement parce que les hommes, ils ont enlevé cette argile et on voit
00:28:11d'ailleurs au-dessus, des lions, des traces de doigts et tout ça. Donc ils ont enlevé tout ça pour
00:28:15préparer, comme un artiste prépare sa toile. Là, ils ont préparé la toile minérale et puis c'est là
00:28:21qu'ils ont commencé à faire les peintures. Et puis justement, c'est ça qui est génial en fait,
00:28:26c'est aussi que l'artiste, il s'adapte toujours à la matière et puis à sa toile. Et là, donc il y a
00:28:33cette argile, dont il ne sait pas trop que faire, mais il n'a pas l'enlevé et qui va mélanger
00:28:38finalement avec le charbon, le charbon de bois et qui va faire donc quelque chose qui est unique,
00:28:43puisque il n'y a que ça à chauver. Tout ce qui est le système de l'estompage, qui sont donc tous
00:28:47ces noirs, ces gris, etc. C'est la matière qu'il a mélangé avec l'argile et avec les charbons de
00:28:53bois. Et puis là-dessus, on voit encore plein d'autres histoires. On voit qu'il y a des ours qui
00:28:57sont griffés. En fait, ce sont les ours qui sont repassés par là et qui ont griffé les parois.
00:29:03Après, les hommes ont repeint au-dessus des griffes. Donc, rien que sur cette histoire-là,
00:29:07on a une histoire infinie de ce qui s'est passé à cet endroit-là. Et là, c'est un tout petit
00:29:13endroit de la grotte. Par exemple, tout ça, tout ce que Jean-Jacques vient de décrire,
00:29:19vous pouvez le découvrir dans l'exposition en étant guidé dans des activités. Voilà,
00:29:24donc ça, c'est déjà une chose. Et je voulais rebondir sur ce que vous disiez tout à l'heure,
00:29:28Marie-Catherine, par rapport aux innovations éventuelles. Quand on a commencé à travailler
00:29:33sur l'expédition, on s'est assez amusé du fait que cette équipe de chercheurs,
00:29:37elles travaillent avec des outils à la fois très low-tech, parce qu'en fait, ils partent à pied
00:29:44depuis le fond du vallon. Ils montent avec leurs sacs à dos, y compris l'eau et la nourriture,
00:29:49voilà, jusqu'à l'entrée de la grotte. Il faut marcher avec du dénivelé. Et puis après,
00:29:53ils rentrent leurs affaires dans la grotte. Et donc, ils ont vraiment développé une agilité
00:29:58comme ça, technique, sur plein de petits outils très agiles. Par exemple, nous,
00:30:04ça nous avait beaucoup amusé, un compteur de gouttes développé par Dominique Gentil. Et en
00:30:08fait, il veut savoir combien d'eau coule d'une stalactite sur une stalagmite. Il met un petit
00:30:14haut-parleur et il enregistre les blocs des gouttes. Et à la fin de l'année, il sait combien
00:30:20de litres d'eau sont passés par là. Donc ça, c'est très ingénieux, c'est tout bête. Et puis,
00:30:24à la fois, tout ça, toute cette activité et ces outils un peu low-tech, et cette activité qui
00:30:32semble un peu banale parce que c'est que le regard, qui est un regard quand même compétent,
00:30:36bien sûr, il est mis en relation avec toute la question, avec des innovations technologiques,
00:30:45des technologies très high-tech, entre guillemets, comme par exemple, la datation,
00:30:50c'est quand même pas rien, d'aller isoler des isotopes, d'aller les mettre dans des
00:30:54spectromètres, d'aller comptabiliser les isotopes des atomes, par exemple, mais aussi toute la
00:30:59question mathématique, sciences numériques avec les modèles 3D qui sont des modèles
00:31:03géoréférencés sur lesquels on travaille après avec précision. C'est pas juste une petite 3D
00:31:08comme ça. D'ailleurs, la 3D qui a servi à faire la réplique n'est pas celle sur laquelle vous
00:31:11travaillez, parce qu'elle n'est pas assez définie. Il y a aussi des compétences de mathématiciens et
00:31:18de statistiques très importantes. Il y a quand même des ingénieurs physiciens du feu, par exemple,
00:31:28pour faire des modélisations à partir des données de la grotte, des feux qui auraient pu avoir lieu
00:31:34dans la grotte. Cette chose-là, elle interagit bien ensemble, c'est très intéressant. Une autre
00:31:40chose qui nous avait beaucoup marqué, et tu en as parlé aussi Jean-Jacques, donc je fais le lien, c'est
00:31:44que cette recherche, elle est en fait, dans cette interdisciplinarité, elle est chronospatiale.
00:31:49C'est-à-dire que la carte est l'élément commun sur lequel on met ces données ensemble pour
00:31:56se parler entre les diverses disciplines et se poser de nouvelles questions, avoir de nouvelles
00:32:00connaissances, aller vers de nouvelles connaissances. Et la datation, qu'elle soit absolue
00:32:06avec les datations chimiques ou relatives, avec toutes ces questions de qu'est-ce qui s'est
00:32:12passé, est-ce que le cheval noir, là, c'est le premier ou le dernier décidé ? Voilà, éventuellement, cette
00:32:17datation chronologique, relative ou pas, elle va venir s'intercaler
00:32:24pour finalement avoir une compréhension générale de qu'est-ce qui a bien pu se passer ici, entre
00:32:28des humains qui venaient, des animaux qui sont là, et voilà, avec tous les trous qu'on a, parce
00:32:34que c'est quand même une véritable enquête avec pas beaucoup de preuves, mais finalement, c'est
00:32:38complètement passionnant de voir comment toutes ces connaissances peuvent être mises en commun pour
00:32:43aller encore au-delà. Et ce que je trouve rigolo, c'est qu'on écoute beaucoup, vous dites
00:32:48passionnant, et puis on voit et on entend la fascination encore 30 ans après chez Jean-Jacques
00:32:53Delannoye, mais c'est vrai, l'émerveillement est intact quand on vous entend parler des peintures, et
00:32:57donc j'ai l'impression quand même, effectivement, que cet émerveillement, cette curiosité, c'est
00:33:02vraiment l'entrée, c'est la base pour avoir envie, et c'est aussi avec les enfants, j'imagine,
00:33:06la porte d'entrée essentielle, et c'est sûr que les peintures rupestres et Chauvet, c'est une
00:33:13chouette porte d'entrée, c'est pour ça que vous l'avez choisi, est-ce que c'est toujours ça le
00:33:17point de départ, justement, d'abord la curiosité, d'abord on questionne, pourquoi, je comprends pas,
00:33:22c'est ça le point d'entrée ? L'idée, effectivement, c'est toujours d'essayer d'avoir une première
00:33:27situation qui va être engageante pour les élèves, qui va leur donner envie de se poser des questions,
00:33:31parce qu'en fait, c'est pas si évident que ça de se poser des questions, et effectivement,
00:33:35l'observation d'un scientifique, spontanément, on ne l'a pas, même dans la vie, même nous,
00:33:40adultes, et ça se travaille, c'est une compétence, justement, qu'on peut travailler, observer comme
00:33:44un scientifique, et donc se donner des critères, qu'est-ce que je vais observer, sur combien de
00:33:50temps, enfin voilà, et c'est vrai qu'on a besoin d'avoir cet engagement, parce que les activités
00:33:57vont être difficiles, en fait, pour les élèves, il va falloir qu'ils s'approprient une démarche
00:34:01scientifique, qu'ils tâtonnent, mais qu'après, ils y mettent beaucoup de rigueur, et effectivement,
00:34:06si on ne réussit pas à avoir une situation très engageante pour eux, ça peut, effectivement,
00:34:10du coup, être plus difficile à mener pour l'enseignant, et ce qui est assez intéressant
00:34:14aussi avec ces oeuvres d'art, c'est leur conservation, et c'est vrai que se pose la
00:34:21question aussi de comment c'est possible qu'on ait encore de si belles oeuvres d'art,
00:34:26alors qu'on peut voir des oeuvres plus récentes qui ont été extrêmement dégradées, et du coup,
00:34:32c'est aussi l'occasion de se poser la question de la conservation et de la dégradation des couleurs,
00:34:36et on a effectivement... Et vous avez fait aussi des activités autour de cette question ? Effectivement,
00:34:40on essaie vraiment de... Alors nous, c'était avec les physico-chimistes du LAMS, mais on a
00:34:44vraiment essayé, avec un défi sur une oeuvre d'art un peu rudimentaire que l'enseignant
00:34:50fabrique, qu'il va dégrader, alors si c'est les beaux jours, on peut dégrader à la lumière,
00:34:55puisque c'est quand même un des paramètres les plus destructeurs pour les oeuvres d'art,
00:34:59ou alors si c'est l'hiver, on a prévu justement de dégrader avec plutôt du jus de citron,
00:35:04si on prend un jus qui est un peu sensible à l'acidité, voilà, et du coup, on va vraiment
00:35:11se mettre dans la peau d'un chercheur du LAMS et on va essayer de remonter comment a été produite
00:35:16cette oeuvre d'art par l'enseignant, et qu'est-ce qui lui est arrivé, comment est-ce qu'elle a été
00:35:21dégradée, bien sûr en cadrant le travail et en les accompagnant, mais on est vraiment, parce qu'après
00:35:25on peut leur montrer une vidéo qu'on a pu, on ne l'a pas tournée celle-ci dans notre parcours de
00:35:31formation, mais les auteurs nous ont permis, nous ont donné le droit de l'utiliser dans le parcours
00:35:36de formation pour les enseignants, qui peut être montrée aux élèves, où on voit justement une
00:35:41doctorante du LAMS qui travaille sur la tapisserie de Bayeux et qui essaie de remonter aux couleurs
00:35:47d'origine et qui fait exactement le même travail qu'eux, mais bien sûr avec d'autres outils et pas
00:35:53le capteur œil comme nous en classe, mais bien sûr avec des outils beaucoup beaucoup plus...
00:35:57Le même questionnement et puis l'enquête, parce que c'est vrai que moi, ce qui est beaucoup ressorti
00:36:01quand je suis allée voir l'expo, je me suis dit, oh c'est génial, on mène une enquête, on a
00:36:05vraiment cette impression de mener une enquête, on reconstitue, tiens, dans quel ordre ils ont fait
00:36:08ça, puis d'ailleurs, c'est super, on peut comprendre l'ordre dans lequel ont été peints, en fait,
00:36:13ces chevaux, ces animaux, et simplement en observant les traits, c'est assez passionnant,
00:36:19ça je dois dire, le côté enquête, et il faut rappeler, on lit que cette grotte, on a pu entendre
00:36:25que cette grotte, c'est un peu comme si ces habitants, alors qu'ils soient humains ou non-humains, étaient
00:36:29partis hier, mais en fait, bon, quand même, elle a changé, on disait, voilà, les œuvres sont peut-être très
00:36:34bien préservées, les peintures sont très bien préservées, les ossements aussi, mais elle a changé,
00:36:38et ça aussi, c'est une histoire qu'il faut reconstituer. Oui, c'est vrai, la grotte, bon, une grotte,
00:36:45comme j'ai dit tout à l'heure, elle a vécu avant, elle s'est formée, elle a son histoire, et puis après, les
00:36:51hommes et les femmes, les humains sont venus là, ils ont laissé leurs traces, et puis, il y a 21 000 ans,
00:37:00en fait, il y a trois épisodes qui fait qu'à un moment donné, il y a un grand pan de rochers,
00:37:05d'escarpements, qui est juste au-dessus de la grotte, qui est tombé, et qui a donc scellé la grotte, donc plus personne ne
00:37:10rentrait dans cette grotte, ce qui explique son état de conservation. En fait, les grottes, c'est le meilleur
00:37:14endroit où on peut conserver les choses. D'ailleurs, il y a aussi d'autres types de produits qui sont
00:37:21stockés sous terre, donc, parce qu'on peut avoir une grande longévité, mais voilà, et donc, la grotte a
00:37:30continué à vivre, et ça, c'est quelque chose qui est important à apercevoir, parce que nous, on voit la
00:37:35grotte aujourd'hui comme on la voit, et on va peut-être projeter des tas de connaissances, de savoirs
00:37:42qu'on a acquis, etc., en fonction de ce qu'on voit, sauf que la grotte, elle a continué à évoluer, il y a des
00:37:49endroits où le sol s'est effondré, et puis surtout, il y a eu beaucoup de stalactites et stalagmites qui
00:37:54ont poussé, puisque quand la grotte a été visitée, ce n'était pas un épisode froid, donc du quaternaire,
00:37:59donc avec une végétation qui est assez indigente, donc finalement, les stalactites et stalagmites ne poussent pas
00:38:06pendant les épisodes froids, et puis après, on a ce qu'on appelle l'holocène, donc depuis 15 000 ans, qui est le
00:38:12climat tel qu'on le connaît aujourd'hui, et à ce moment-là, on va avoir les stalactites et stalagmites qui vont pousser.
00:38:16Et donc, du coup, aujourd'hui, comme première question à laquelle je vous ai répondu, c'est une super belle grotte,
00:38:22et moi, c'est ce que j'ai regardé le premier an, et puis surtout, il y a des concrétions magnifiques, avec des couleurs
00:38:26magnifiques, etc., etc., et que du coup, ça altère un peu le regard, c'est ça qu'on voit, mais du coup, ça altère la lecture
00:38:37qu'on a du paysage souterrain, j'ai dit bien paysage souterrain, qu'ont connus les hommes de la préhistoire.
00:38:43Et par exemple, il y a une galerie, qu'on appelle la galerie du cactus, qui se situe juste après une salle où il y a
00:38:49énormément de restes animaux, et surtout, donc, d'ours, et là, donc, c'est une grotte, une partie de la grotte où il y a beaucoup
00:38:57de représentations d'ours sur la paroi. Et il se trouve que cette galerie, elle est un peu cachée aujourd'hui par des tas de colonnes,
00:39:04ce qu'on appelle les stalagmites, un rideau de stalactites et stalagmites. Donc, on aurait pu interpréter, ah, ben, ils ont fait les dessins
00:39:12là-derrière, parce que c'est un endroit un peu caché, donc un peu intime par rapport aux ours, etc., etc. Donc, on peut raconter
00:39:17des tas d'histoires comme ça, sauf que c'est des histoires qu'on se raconte aujourd'hui, mais qui n'est pas du tout l'histoire de l'époque,
00:39:22parce qu'à l'époque, il n'y avait pas du tout de stalactites et stalagmites, et cette galerie était totalement ouverte.
00:39:27Pareil, sur les sols, on voit sur le sol, là, la première partie du sol avec la passerelle, on voit quelque chose qui brille, la calcite, etc.
00:39:34Tout ce dépôt de calcite, c'est de la calcite qui s'est déposée depuis 10 000 ans et qui, petit à petit, avance, prograde, et va venir recouvrir
00:39:43le dépôt marron sur lequel on a les empreintes humaines et les empreintes animales. Ce n'est pas très grave, la calcite, parce qu'au contraire,
00:39:50elle va nous conserver encore plus les choses et les traces pour les générations à venir, et c'est très bien.
00:39:56Et donc, pareil, à un moment donné, dans les premières périodes des visites, il y avait justement le fameux panneau de chevaux
00:40:05que vous avez montré tout à l'heure. Au sol, il y a une sorte de petit bassin, aujourd'hui, qui existe, et donc, c'est vrai qu'aujourd'hui,
00:40:14avec la lampe, si on éclaire l'eau, on voit le panneau de chevaux qui se reflète dans l'eau. Et, tout au début, les paritalistes, ils ont beaucoup discuté dessus.
00:40:24Peut-être parce qu'il y a ça, donc, en fait, il y a des reflets, etc. Sauf qu'à l'époque, il n'y avait pas d'eau, il n'y avait pas de calcite, tout ça.
00:40:32Donc, c'est important de remettre, parce que ça permet aussi vraiment de pouvoir intellectuellement se mettre dans l'aspect cognitif et penser du choix qui a été fait
00:40:45des espaces qui ont été peints et d'autres espaces qui n'ont pas été peints, puisque la grotte Chauvet, elle a, comme je l'ai dit, une très, très grande grotte,
00:40:53et puis, qui a surtout cette particularité d'une grotte qui est toute en respiration, c'est-à-dire qu'on a les endroits où c'est peint,
00:41:00des endroits où il n'y a pas du tout de peinture, des endroits où c'est peint, ensuite, des endroits où il n'y a pas de peinture, des endroits qui peinent.
00:41:06Enfin, un très, très bon musée où il n'y a pas toutes les oeuvres qui sont au même endroit.
00:41:09Donc, et du coup, ça permet en même temps de digérer un petit peu les oeuvres, etc. Et tout ça fait partie d'un construit, c'est un pensée, ce n'est pas le hasard qui fait ça.
00:41:19Et bien entendu, on a toujours, et ça c'est vrai pour toutes les grottes du Paléolithique supérieur, il y a toujours des exceptions, bien entendu,
00:41:26où les peintures les plus fortes, les oeuvres les plus réussies, elles sont au terme de la grotte.
00:41:31C'est un peu comme un roman, un opéra, c'est l'endroit où il y a de la force et c'est vraiment les endroits qui sont les plus forts.
00:41:38Oui, en vous entendant, on comprend bien qu'il y a tout un cheminement, questionnement, enquête, hypothèse, essai, erreur, requestionnement, etc.
00:41:48Ça, ce n'est pas quelque chose de nécessairement naturel, en fait.
00:41:52La curiosité, on pourrait dire, oui, est naturelle à un certain âge quand on est petit, on peut se poser plein de questions.
00:41:58Ça se perd un peu aussi, peut-être, en grandissant, et il faut l'entretenir.
00:42:02Dans les démarches que vous menez, Fatima Ramoun, avec les élèves, comment on fait ? Vous disiez, il faut que ce soit très engageant.
00:42:09Alors, peut-être c'est plus facile avec une grotte qui a quelque chose de fascinant, néanmoins, quand même, il faut apprendre à observer et à se poser des questions,
00:42:14parce qu'on peut observer sans se poser de questions. Comment on fait ça ? C'est toujours une question difficile.
00:42:20De toute façon, la curiosité, effectivement, on l'a très jeune, mais elle se perd, elle se perd assez rapidement.
00:42:28Et c'est vrai qu'il faut avoir l'habitude de se poser des questions pour s'en poser.
00:42:33C'est un peu comme la créativité, il faut savoir déjà pas mal de choses pour être créatif, donc du coup, ça se développe.
00:42:38C'est-à-dire qu'au début, avec les élèves, en début d'année, on va être assez directifs, on va apporter du savoir,
00:42:44on va apporter du savoir-faire aussi, et au fur et à mesure qu'on va travailler avec la classe et qu'on va multiplier des situations
00:42:50où ils vont être dans une posture de scientifiques, même si ça reste adapté à transposer à la classe,
00:42:56bien évidemment, avec les limites de ce qu'on peut faire en classe, au bout d'un moment, spontanément, ils vont se poser des questions
00:43:02et ils vont justement être de plus en plus curieux. Mais c'est vrai que, surtout au collège, on peut avoir vraiment au démarrage d'une année
00:43:10des difficultés face à une oeuvre, ou face à une expérience, ça peut être aussi en biologie, si on s'intéresse à la biodiversité,
00:43:22on peut, au départ, ne pas vraiment se poser de questions parce que ça se perd très très vite.
00:43:28Et c'est à force de se poser des questions et d'être accompagné par l'enseignant qu'on va, du coup, retrouver cette curiosité.
00:43:35Je vais un petit peu rebondir parce que c'est des questions qui sont extrêmement importantes.
00:43:40Alors peut-être que nous, on est encore des grands enfants et qu'on continue à regarder la grotte dans toutes ses dimensions.
00:43:46Mais c'est vrai que c'est des choses qui se perdent très très vite et surtout, c'est quelque chose qui n'apparaît pas sérieux,
00:43:51de se poser sur un caillou et simplement de regarder et d'observer. En fait, il faut avoir l'humilité que tout est sous nos yeux.
00:44:01En fait, on n'invente rien. On ne fait qu'avoir des clés de lecture qui nous permettent de raconter une histoire
00:44:08qui est inscrite dans un paysage, qui est inscrite dans une grotte, qui est inscrite sous nos yeux.
00:44:12Et ça, c'est vraiment un apprentissage qui, moi je le trouve extrêmement riche, moi je le fais beaucoup avec mes étudiants,
00:44:18de s'asseoir, de regarder et de passer du temps parce qu'en fait, il faut du temps aussi.
00:44:23Et je veux dire que le temps, c'est quelque chose aujourd'hui qu'on a de moins en moins parce qu'on se laisse embarquer.
00:44:29On a le droit aussi de freiner le temps et d'apprendre à regarder. Et je sais, c'est juste une petite parenthèse,
00:44:36je ne veux pas trop miser la parole, je faisais souvent l'expérience avec les étudiants.
00:44:39Je pense que je vous l'avais raconté avec le premier cours, on sortait dehors. Bon, j'ai la chance d'être à Chamlier,
00:44:45il y a des montagnes tout autour. Donc je disais, dessinez ce que vous voyez. Alors, je suis géographe,
00:44:50donc dessinez ce que vous voyez. Mais qu'est-ce qu'on doit dessiner, tout ça ?
00:44:54Il n'y a pas d'importance, vous dessinez tout ça. Et après, je reprenais donc chacun de leurs dessins.
00:44:58Et puis, ils disaient, qu'est-ce que vous allez en faire ? J'ai dit, on verra, on verra plus tard.
00:45:01Et on faisait exactement le même exercice. Au bout d'un an, on sortait dehors, au même paysage, on dit,
00:45:06bon maintenant, dessinez. Et après, je leur montrais leurs deux dessins. Et en fait, les deux dessins,
00:45:10ils avaient eu les clés de lecture et du coup, ils mettaient des choses. Donc, ils apprenaient à lire un paysage,
00:45:15à mettre des limites de forêt, de mettre des rochers, de mettre des routes, de mettre des choses comme ça.
00:45:21Donc, ils structurent un paysage. Et du coup, ça donnait vraiment cette école de l'observation et du regard,
00:45:27et surtout de l'humilité, de dire, bon, tout ça est sous mes yeux, comment je vais pouvoir regarder ça ?
00:45:32Quel est le fil conducteur qui va me permettre d'aller de là à là et de dire, waouh, c'est super, et pourquoi ?
00:45:37Et ainsi de suite. Et ça, je trouve que c'est des choses qu'on perd un peu parce qu'on ne prend plus le temps de regarder.
00:45:43Généralement, quand on se promène, on suit son GPS pour être sûr de ne pas avoir perdu la trace.
00:45:48On ne regarde plus une carte, on ne regarde plus le paysage. Bon, c'est toutes des choses qu'on perd un petit peu
00:45:52et qui sont quand même des choses extrêmement importantes de la science de la nature et des hommes
00:45:56parce que même les hommes, ils ont laissé leur empreinte partout, dans le paysage, depuis le chemin qui était peut-être
00:46:02un chemin de transhustérance qui est devenu un chemin aujourd'hui d'un conneau forestier qui est ensuite devenu une route.
00:46:07Il y a toute cette histoire-là qui est sur ce tracé-là et je pense que ça, il faut qu'on apprenne à se redonner du temps
00:46:14à regarder, à observer et puis d'être accompagné parce qu'après, il y a aussi des tas de gens qui savent lire autrement
00:46:19le paysage, les paysans, les forestiers, les cantonniers, n'importe qui.
00:46:25Tout ça, je pense avoir de se nourrir. C'est l'interregard mais c'est comme de l'interdisciplinarité et on se nourrit des autres.
00:46:32C'est ce que permet l'Expo, de s'arrêter un peu et d'apprendre à regarder avec ce regard notamment de scientifique.
00:46:39Oui, c'est ça et puis justement, cette exposition-là, tout à l'heure, je vais vous faire une petite introduction
00:46:43puis je vais vous laisser découvrir mais globalement, on ne fait pas de visite guidée de l'exposition
00:46:47parce que justement, on veut que les visiteurs découvrent par eux-mêmes et chacun, chaque personne,
00:46:53que ce soit un adulte ou un enfant va entrer dans un contenu ou devant un dispositif d'une façon qui lui est propre en fait
00:46:59par son intérêt qui est plus ou moins élevé à ce moment-là.
00:47:03Et en fait, ce qu'on essaie de faire nous en tant que muséographe, c'est qu'il y a une curiosité à aller chercher
00:47:09mais il faut quand même qu'elle soit là et puis après, on essaie de donner les clés de compréhension
00:47:13et de l'utilisation du dispositif de façon très évidente pour ne pas qu'il y ait d'entraves,
00:47:18« je ne sais pas ce qu'on me demande et donc quoi, quoi, quoi ».
00:47:21Et puis ensuite, de guider pour donner les clés de lecture le plus de façon cognitive, le plus évident possible.
00:47:32Donc je pense qu'on n'est pas trop mal là. Des fois, on se loupe.
00:47:37Ce n'est pas si facile de faire des expos réussies à tous les niveaux.
00:47:41Mais en tout cas, là, il y a quelque chose qui marche vraiment très bien en plus parce que ça s'adresse à divers publics
00:47:47et d'intérêts différents parce qu'on dit souvent adulte-enfant mais en fait, il y a certains adultes qui ne sont pas très intéressés
00:47:53sur un sujet en particulier, pas sur tous automatiquement, et des enfants au contraire qui sont hyper intéressés.
00:47:58Donc ça dépend vraiment de l'implication de chacun.
00:48:02Je vous donne la parole avant de vous présenter ensuite quelques ressources.
00:48:05Mais je crois qu'il est temps de vous laisser vous poser des questions parce que vous êtes certainement curieux.
00:48:17Et j'essaie de me débattre avec ce PowerPoint.
00:48:22Bonjour. Ça marche tout seul. Moi, j'ai deux questions, une question un peu technique.
00:48:26Est-ce que, parce qu'à l'époque, ils n'avaient pas toutes les lampes qu'on voit sur les photos, l'éclairage.
00:48:30Est-ce que vous simulez, soit en 3D, soit même dans la grotte, un éclairage potentiel de l'époque ?
00:48:37Ça, c'est la question technique. Et la question l'autre, je ne sais pas comment on peut la classifier.
00:48:41Est-ce que j'ai lu un livre il y a quelques temps sur la caverne imaginaire de Loïc Le Quellec
00:48:48qui essaye d'interpréter les raisons des arts pariétaux ?
00:48:56Je n'ai pas tout lu en détail, mais c'est quand même assez convaincant son argumentaire et assez intéressant.
00:49:01Et donc, je ne sais pas si la communauté scientifique, qu'est-ce qu'ils en pensent actuellement de cette idée-là ?
00:49:09La première, c'était par rapport à l'éclairage. Effectivement, ça, c'est une grande question.
00:49:14Parce qu'on va loin sous terre. En plus, les œuvres sont toujours dans les zones noires.
00:49:19Elles ne sont jamais dans les zones de pénombre près de l'entrée.
00:49:21Donc, il faut pénétrer la grotte. Donc, on a besoin de lumière.
00:49:24Aujourd'hui, on a deux types d'éclairage qui ont été utilisés.
00:49:29Donc, c'est la lampe à huile, à Grèce, grâce à l'animal essentiellement.
00:49:34Il y en a une qui a été retrouvée dans les grottes de Lascaux.
00:49:39Il y en a qui ont été retrouvées dans les grottes de Neyra, en Andalousie,
00:49:42où tout le parcours était guidé par des lampes à Grèce, etc.
00:49:48Dans le cas de la grotte Chauvet, on n'a pas du tout trouvé de témoins de lampes à Grèce.
00:49:53Par contre, on a trouvé beaucoup de témoins de torches,
00:49:57notamment des torches qui sont faites avec du pin-sylvestre.
00:50:01C'était le seul arbre qui existait à l'époque en climat froid dans la région.
00:50:06Et d'ailleurs, c'est le même pin-sylvestre qui a fait les charbons pour faire les fusains, pour faire les dessins.
00:50:10Et on sait que là, elles se déplaçaient essentiellement avec des torches.
00:50:17Et ça, on le sait parce qu'une torche, pour la raviver, il faut qu'on la frotte sur la paroi,
00:50:22ou sur un caillou, et on a les endroits où les frotter.
00:50:26Donc là, au moins à Chauvet, on a ça.
00:50:28Après, il y a eu des grands feux dans le Chauvet aussi.
00:50:31Dans l'exposition, on en parle, effectivement, des feux assez importants qui ont suffisamment chauffé la paroi
00:50:37et que le calcaire, c'est vraiment un très, très mauvais thermique,
00:50:42c'est un très mauvais conducteur, donc la roche, elle casse, elle pète.
00:50:46Donc du coup, on a ces éléments-là.
00:50:49Après, on ne sait pas trop le rôle de ces feux.
00:50:51Est-ce que c'est pour faire de l'éclairage ? Est-ce que c'est pour d'autres choses ?
00:50:54Et donc là, j'en viens à la deuxième question.
00:50:59Globalement, dans la communauté archéologique et ethno-archéologique et anthropologique mondiale,
00:51:09on essaye de ne pas trop, trop, trop interpréter les choses.
00:51:13Parce qu'on peut faire des parallèles avec, j'ai la chance de travailler en Australie,
00:51:18et aussi avec les Amérindiens, qui sont, au moins en Australie,
00:51:24qui dessinent encore leur site avec une tradition orale, etc.
00:51:28Ça, c'est une culture.
00:51:30Mais est-ce que cette culture fait sens avec notre culture du paléolithique ?
00:51:34Je pense qu'aujourd'hui, on n'ose plus le faire.
00:51:37Par contre, de dire que, et ça, c'est une réalité, quoi, une réalité.
00:51:42Jusqu'au moment, on va nous dire que ce n'est pas vrai.
00:51:45Pour l'instant, il y a quand même un trait de force, on va dire.
00:51:48C'est que tout ce qui est là, pariétal, est associé à l'oralité.
00:51:52Tant qu'on a l'oralité, il y a des éléments d'histoire véhiculés par le discours oral,
00:51:59par la transmission orale, qui va être porté sur des parois.
00:52:04Pendant le paléolithique, chasseur-cueilleur, c'est surtout autour de l'animal,
00:52:08parce que l'animal, c'est tout.
00:52:10Le territoire des hommes, c'est le territoire de l'animal,
00:52:13parce que l'animal, c'est celui qui nourrit.
00:52:15Donc, on va se déplacer.
00:52:17Comme on a des saisons chaudes et des saisons froides, les tropeaux se déplacent.
00:52:21Les hommes vont être nomades pour ça.
00:52:23On va se vêtir dans l'animal et les tentes et tout ça,
00:52:28elles sont faites avec des fonces de mammouth et tout ça.
00:52:31Donc, ça, c'est vraiment ce qui est important.
00:52:33Dès lors qu'on va arriver au néolithique, on a encore une tradition orale.
00:52:37Là, on change complètement,
00:52:38puisqu'à partir du néolithique, c'est l'homme qui devient agriculteur,
00:52:42cédentaire, etc.
00:52:43Et donc, c'est lui qui crée son territoire.
00:52:45Et là, c'est très, très rigolo, parce que très intéressant,
00:52:48c'est qu'on voit tout de suite qu'au niveau de l'art barriétal,
00:52:51c'est l'homme qui est au centre.
00:52:53Et ses activités.
00:52:54Donc, on voit bien que c'est quand même une expression des cultures qui existent
00:53:00en lien avec leur territoire,
00:53:02et comment on se fabrique un territoire,
00:53:04comment on vit dans un territoire.
00:53:06Donc, ça, c'est vraiment des choses qui sont fortes
00:53:08et sur lesquelles il y a vraiment des choses qui sont extrêmement développées,
00:53:12qui vont aussi se développer beaucoup sur pourquoi il y a tant de grottes
00:53:17et il y a si peu de grottes ornées.
00:53:20Ça veut dire que les grottes ornées correspondent à des endroits qui sont choisis,
00:53:24et qui ne sont pas choisis au hasard.
00:53:26Généralement, elles sont choisies dans des endroits
00:53:28où d'un point de vue géographique, paysager,
00:53:30on a des paysages qui sont extrêmement forts.
00:53:32La grotte Chauvet, c'est un exemple,
00:53:34puisqu'on a une entrée de gorges, des gorges de l'Ardèche,
00:53:37qui est tout de suite barrée par une arche naturelle,
00:53:39qui est le pont d'Arc.
00:53:40Et juste là, à cet endroit-là, il suffit de tourner sa tête à gauche,
00:53:44on voit l'entrée de la grotte Chauvet.
00:53:46Donc, on ne peut pas la louper.
00:53:47C'est-à-dire que la grotte Chauvet, dans les traditions orales,
00:53:49est extrêmement facile à expliquer où elle est.
00:53:52Globalement, toutes les grottes d'un gorge de l'Ardèche,
00:53:55et même en Dordogne, etc.,
00:53:56sont toujours des endroits qui sont faciles à expliquer par l'oralité.
00:54:00Il y a toujours un point saillant dans le relief ou dans la vallée
00:54:02qui vont dire « elle est là, elle n'est pas ailleurs ».
00:54:04Et ça, c'est extrêmement important.
00:54:06Et ça, on le retrouve aussi avec les populations aborigènes,
00:54:08avec la Dreamline.
00:54:09Pour pouvoir aller d'un endroit à un autre,
00:54:11un site rituel à un autre,
00:54:13c'est essentiellement au niveau de points qui sont saillants.
00:54:16Donc, aujourd'hui, on est plutôt dans cette...
00:54:20D'ailleurs, c'est une science qui est en train de se développer
00:54:22dans ce qu'on appelle l'archéologie des paysages,
00:54:26ou le paysage de l'archéologie,
00:54:27parce que là, on a vraiment des choses qui sont suffisamment tangentes
00:54:31pour qu'on puisse construire un discours.
00:54:33Dès lors, on va passer peut-être dans d'autres sphères,
00:54:37et j'aime beaucoup Jean-Louis le Québec,
00:54:39c'est un ami.
00:54:42Après, bon, voilà, c'est un point de vue, on va dire.
00:54:44Après, il y a d'autres points de vue.
00:54:55Oui, oui, avec les mythes.
00:54:56Parce qu'en gros, pour ceux qui ne savent pas,
00:54:58la caverne originelle, si je ne me trompe pas,
00:55:00il a imaginé, ce chercheur Jean-Louis Klogelek,
00:55:03que l'art pariétal serait le témoin d'un mythe originel
00:55:08à l'époque du paléolithique,
00:55:10qui serait partagé par plusieurs cultures nomades en Europe,
00:55:14et je ne sais pas s'il va jusque dans le monde.
00:55:16Mais en tout cas, voilà, c'est cette idée-là,
00:55:18et c'est peut-être aller un peu loin dans l'interprétation,
00:55:21ça pose une idée.
00:55:22Après, voilà.
00:55:23Moi, je sais qu'il y a certains chercheurs
00:55:25qui ne sont pas tout à fait d'accord pour aller aussi loin
00:55:27dans l'interprétation,
00:55:28notamment dans l'équipe de recherche de la vôtre.
00:55:32Par contre, au départ, la puissance de l'oralité
00:55:36dont ils parlent est extrêmement puissante.
00:55:39Aujourd'hui, d'un point de vue cognitif,
00:55:41notre cerveau se réduit de plus en plus
00:55:43parce qu'on déporte complètement toute notre mémoire
00:55:45sur du papier, sur des tablettes, sur ceci et cela.
00:55:48Donc, je veux dire, à l'époque, tout se passe là.
00:55:51Je veux dire, toute la mémoire, elle n'est que là.
00:55:53Et je vous invite à regarder un documentaire
00:55:56qui a été fait il y a quelques années,
00:55:58en Australie, qui s'appelle Phone Prince,
00:56:01des empreintes humaines,
00:56:02et où il y a un reportage qui est fait dans les années 50,
00:56:06moins 50, 30, quoi, les années 40-50,
00:56:09de deux vieilles personnes,
00:56:11de vieux aborigènes qui sont au bord de l'océan,
00:56:15de Terre d'Arnhem,
00:56:17en direction de la Papouasie-Nouvelle-Guinée.
00:56:20Et ils disent des choses qui sont hallucinantes.
00:56:24Ils disent, nous, on vient de là.
00:56:26Mais vraiment, on dit, ils viennent de là.
00:56:28Je veux dire, donc, ils expliquent, etc., etc.
00:56:30Dans les années 40-50, il n'y avait pas
00:56:33l'histoire des variations du niveau de la mer
00:56:36pendant les épisodes froids,
00:56:37ce n'était pas connu qu'avant, etc., etc.
00:56:39Donc, on vient de là,
00:56:40mais de manière extrêmement précise dans le discours.
00:56:43Et après, les travaux scientifiques
00:56:45ont montré, effectivement,
00:56:46qu'avec l'abaissement du niveau marin universel,
00:56:49effectivement, l'Australie était collée à l'Australie
00:56:52et qu'entre l'Australie et l'Indonésie,
00:56:54il y avait juste quelques îles du type Gibraltar
00:56:57qui permettaient de faire la connexion
00:56:59avec, donc, le continent euro-asiatique.
00:57:01Et c'est par là qu'ils sont arrivés,
00:57:03les hommes en sapiens.
00:57:04Et de raconter ça dans les années 40-50
00:57:07avec une force de la réalité,
00:57:11ça, c'est extrêmement puissant.
00:57:13Donc, il y a effectivement des tas de mythes,
00:57:14il y a des tas d'histoires,
00:57:16il y a un tas de choses qui sont vécuées par la réalité.
00:57:20Ce que les chercheurs parétalistes,
00:57:22notamment Carol Fritz,
00:57:24m'a expliqué dans le travail de l'expo,
00:57:27c'est que le fait qu'on voit ces dessins
00:57:30qui ont une certaine homogénéité
00:57:32et dans le bestiaire et dans la façon de dessiner,
00:57:35ça nous amène à penser
00:57:37que ce n'était pas n'importe qui qui dessinait,
00:57:39parce que sinon, il y aurait beaucoup plus de diversité
00:57:41et que du coup, il y avait une transmission déjà
00:57:43de la culture du dessin,
00:57:45des personnes particulières dans la société,
00:57:48et que ça faisait partie justement
00:57:50d'une culture à se transmettre,
00:57:52donc de cette culture de la réalité.
00:57:54Et quelque chose autour d'une mythologie,
00:57:58on peut appeler ça croyance, religion,
00:58:00mais en tout cas, quelque chose qui structure
00:58:02et qui se transmet.
00:58:03Et donc, ça, c'est avéré.
00:58:05Après, on peut mettre dessus
00:58:07si c'est le mythe originel ou pas,
00:58:09c'est autre chose.
00:58:11En tout cas, cette chose-là est réelle.
00:58:13Et puis après, par rapport à votre question,
00:58:15la première,
00:58:17les chercheurs,
00:58:19ils n'allument pas des torches
00:58:21dans la grotte pour faire leurs recherches,
00:58:23par contre, à travers leur 3D,
00:58:25ils sont capables de faire...
00:58:27Ah, il ne fallait pas le dire, non, non,
00:58:29mais vous ne le faites pas, je le sais.
00:58:31Et donc, ils peuvent, dans leur 3D,
00:58:33se poser ces questions-là.
00:58:35D'ailleurs, les chercheurs, Catherine Ferrier
00:58:37et Jean-Claude Leblanc, qui font les études sur les feux,
00:58:39se posent la question de
00:58:41s'il y aurait quelque chose autour du rituel
00:58:43et du son et lumière.
00:58:45Alors, ça, c'est non moins nous,
00:58:47mais est-ce que la lumière a une importance ?
00:58:49Et puis, il y a aussi les paritalistes
00:58:51qui nous disent bien que les parois,
00:58:53on les voyait à l'époque,
00:58:55les humains préhistoriques les voyaient autrement que nous
00:58:57parce que ce n'était pas la même lumière.
00:58:59Et puis aussi, ils font des études d'acoustique.
00:59:01Et alors, la question de
00:59:03est-ce qu'il y a des peintures dans les endroits
00:59:05où ça résonne bien et tout ça,
00:59:07elle existe depuis très longtemps,
00:59:09mais il n'y a pas encore la réponse, en fait.
00:59:11C'est imaginaire.
00:59:13Donc là, à Chauvet, ils font des études d'acoustique.
00:59:15Ils ont déjà réalisé une simulation numérique de la grotte
00:59:17telle qu'elle existe aujourd'hui,
00:59:19c'est-à-dire avec les concrétions, la calcite et la passerelle.
00:59:21Et l'objectif, mais ça, ça sera dans quelques années,
00:59:23c'est d'atteindre la simulation acoustique
00:59:25de la grotte
00:59:27à l'époque du paléolithique.
00:59:29Et là, on va pouvoir avoir
00:59:31des retours acoustiques intéressants.
00:59:33Donc ça, c'est présenté dans l'exposition
00:59:35et vous pouvez écouter la grotte telle qu'elle est aujourd'hui,
00:59:37vous enregistrez même.
00:59:39Et puis rendez-vous dans 5-6 ans.
00:59:41Ce que je trouve juste intéressant par rapport à votre intervention,
00:59:43c'est est-ce que finalement la mise en récit,
00:59:45ce n'est pas aussi une façon d'intéresser le public ?
00:59:47C'est-à-dire, oui, c'est une interprétation,
00:59:49c'est une hypothèse.
00:59:51Si elle est présentée en tant que telle,
00:59:53c'est très bien.
00:59:55Et finalement, c'est peut-être cette mise en récit,
00:59:57faire sens, essayer de faire des liens,
00:59:59peut-être un peu audacieux,
01:00:01mais qui permet aussi d'intéresser, de nous intéresser beaucoup.
01:00:03C'est sûr.
01:00:05J'ai l'intention peut-être de le dire.
01:00:07Parce qu'en fait, aujourd'hui, ce n'est plus le cas.
01:00:09Alors ça, ce n'est pas moi qui l'ai inventé,
01:00:11c'est des chercheurs qui me l'ont dit.
01:00:13Mais les propres préhistoriens
01:00:15ou archéologues se sont fait avoir,
01:00:17ils ont inventé des histoires
01:00:19et ils ont cru à leurs propres histoires.
01:00:21Ils sont tombés dans leur mythologie presque.
01:00:23C'est Jean-Luc Le Calais qui m'a raconté ça
01:00:25à l'occasion d'une exposition précédente.
01:00:27Parce qu'en fait, à un moment donné,
01:00:29on a envie, on est des humains, de se raconter des histoires.
01:00:31Et de savoir en sortir.
01:00:33À un moment donné, mais là, dans l'équipe de recherche chauvaise,
01:00:35vous êtes très très claires là-dessus.
01:00:37Ce qu'on sait, c'est ça.
01:00:39Ce qu'on peut imaginer, c'est ça.
01:00:41Entre les deux, il y a un monde et il y a certaines choses
01:00:43où on ne saura jamais répondre aux questions.
01:00:45Ça engouffre la créativité.
01:00:47Est-ce que vous aviez peut-être d'autres questions ?
01:00:49Une ou deux questions encore ?
01:00:51Vous avez dit au néolithique qu'il y avait un changement
01:00:53dans la représentation dans les grottes.
01:00:55Est-ce qu'il y a un lien avec un remplacement
01:00:57de la population qui peut être suivi par la génétique ?
01:00:59Est-ce qu'on sait un petit peu
01:01:01que les populations d'il y a 50 000 ans
01:01:03ont été remplacées par des gens
01:01:05qui venaient de plus loin ?
01:01:07Et que les paysans,
01:01:09les gens qui venaient de plus loin,
01:01:11ont été remplacés par des gens
01:01:13qui venaient de plus loin ?
01:01:15Est-ce qu'il y a un lien ?
01:01:17Est-ce qu'il y a un lien ?
01:01:19Et que les paysans de l'époque,
01:01:21génétiquement, on voit qu'il y a eu
01:01:23une modification.
01:01:25Et je me demandais pour les grottes,
01:01:27dans le cas des dessins des grottes,
01:01:29est-ce que c'est un changement de culture
01:01:31ou c'est un changement carrément de population ?
01:01:33Je dirais plutôt de culture
01:01:35d'un premier temps.
01:01:37En sachant qu'on n'est que
01:01:39migration, on n'est que migrants
01:01:41depuis la nuit des temps.
01:01:43Et que là aussi, la révolution
01:01:45qu'on dit néolithique,
01:01:47de devenir sédentaire,
01:01:49pasteur et agriculteur,
01:01:51renaît à un carrefour qui a toujours existé
01:01:53par le monde, qui est le Proche
01:01:55et Moyen-Orient. C'est toujours là
01:01:57qu'on vient de l'Afrique,
01:01:59on est parti vers l'Asie, on est parti vers l'Europe.
01:02:01Après, aujourd'hui,
01:02:03on découvre qu'il y a aussi des populations
01:02:05qui sont de l'Asie,
01:02:07mais aussi
01:02:09des autres groupements humains.
01:02:11Mais globalement, pour ce qui est
01:02:13de la révolution lithique, on voit très très bien
01:02:15la progression de la culture
01:02:17qui va
01:02:19irriguer. En fait, il y a aussi
01:02:21une irrigation qui est autour de tout ça, mais qui va vraiment
01:02:23irriguer dans les deux sens,
01:02:25aussi bien côté
01:02:27Asie que côté Europe.
01:02:29Et
01:02:31on arrive à très très
01:02:33bien suivre cette migration.
01:02:35En fait,
01:02:37c'est chez nous où c'est arrivé le plus tard.
01:02:39Et pratiquement
01:02:414 000 ou 5 000 ans après
01:02:43cette révolution est commencée
01:02:45au Proche et au Moyen-Orient. Et ce qui est intéressant,
01:02:47c'est qu'on voit, effectivement, d'un point de vue génétique,
01:02:49donc ça va être surtout sur les animaux
01:02:51qui vont être
01:02:53utilisés
01:02:55dans les troupeaux, etc.
01:02:57On voit qu'effectivement, avec cette onde
01:02:59qui va avancer, on voit les animaux
01:03:01d'un point de vue génétique, et aussi dans les temporalités
01:03:03qui sont différentes, qui vont changer
01:03:05soit parce qu'on va
01:03:07extraire le lait,
01:03:09on va donner à manger de manière différente, etc.
01:03:11Et donc, on voit cette progression comme ça.
01:03:13Sur les hommes,
01:03:15sur les populations,
01:03:17je ne me rappelle pas avoir lu
01:03:19des choses à ce niveau-là, ou du moins,
01:03:21peut-être, mais je ne me suis jamais posé cette question-là.
01:03:23Mais, bon,
01:03:25après, on est aussi dans des populations qui vont
01:03:27de plus en plus se mélanger,
01:03:29puisqu'on commence à devenir
01:03:31de plus en plus nombreux,
01:03:33et c'est ça qui fait aussi
01:03:35l'expansion de par le monde.
01:03:37Le passage
01:03:39du palolithique
01:03:41chasseur-cueilleur au néolithique,
01:03:43c'est qu'une question de place.
01:03:45À un moment donné, on ne peut pas être tous
01:03:47aux mêmes endroits, autour de l'eau,
01:03:49autour de la ressource, donc il faut qu'on se déplace.
01:03:51Et c'est aussi le fait qu'on se déplace
01:03:53qu'on doit commencer à créer ses propres ressources
01:03:55avec
01:03:57les animaux,
01:03:59et puis avec
01:04:01les graines et les plantes, etc.
01:04:03C'est surtout une question démographique,
01:04:05et donc, qui dit démographie, dit mélange,
01:04:07et dit migration, et c'est très bien.
01:04:09Merci.
01:04:11Merci beaucoup à tous les trois
01:04:13d'être venus nous raconter ces histoires.
01:04:15Ah, il y avait une question ici.
01:04:17Moi, j'ai une dernière question,
01:04:19mais plus pour le public, en fait.
01:04:21Je pense que parmi vous,
01:04:23il y a beaucoup de gens qui sont enseignants,
01:04:25ou alors on s'est trompé d'objectif.
01:04:27Est-ce que tout ça, ça vous inspire ?
01:04:29Est-ce que vous avez peut-être des témoignages
01:04:31de l'enthousiasme, ou pas, de vos élèves ?
01:04:33On a parlé beaucoup de science,
01:04:35mais peut-être dans des idées
01:04:37de projets pédagogiques en lettres,
01:04:39en arts plastiques,
01:04:41dont vous pourriez parler
01:04:43et nous faire bénéficier,
01:04:45puisqu'on est aussi là
01:04:47pour échanger sur tout ça.
01:04:53Bonjour.
01:04:55Je suis éducatrice
01:04:57en élémentaire,
01:04:59donc j'ai du CP au CM2 dans ma classe,
01:05:01et pour le coup, la curiosité des enfants,
01:05:03quand on parle d'histoire
01:05:05dans tous les domaines,
01:05:07c'est vraiment de se demander
01:05:09pourquoi, comment.
01:05:11Et justement, je suis venue aujourd'hui
01:05:13parce que c'est quelque chose que je voudrais essayer
01:05:15de développer un peu plus, et dont on manque
01:05:17de matériel et de possibilités.
01:05:19C'est le genre de choses
01:05:21qui intéresseraient beaucoup les enfants,
01:05:23au contraire.
01:05:25De pouvoir se poser des questions,
01:05:27de regarder comment font les chercheurs,
01:05:29de savoir comment est-ce qu'on a toutes ces informations-là,
01:05:31de pouvoir les transmettre aussi, les mettre en scène,
01:05:33ce genre de choses.
01:05:35C'est totalement ce qui intéresse les enfants.
01:05:37Vous allez venir à l'exposition avec eux, alors ?
01:05:39Avec grand plaisir.
01:05:41Ils vont manipuler.
01:05:43Un autre témoignage, peut-être ?
01:05:51Sinon, merci beaucoup, merci à tous
01:05:53pour votre attention, et donc merci
01:05:55à nos trois intervenants aujourd'hui.
01:05:57Je partagerai avec vous quelques ressources.
01:05:59Sur le site virtuel de la Grotte, je vous en ai parlé
01:06:01sur www.culture.gouv.fr,
01:06:03les ressources de la cité, donc le dossier enseignant,
01:06:05le dossier enseignant des ressources
01:06:07de l'exposition, et puis le dossier
01:06:09des liens avec les programmes scolaires,
01:06:11les ressources de la Fondation Laman à la Patte,
01:06:13bien sûr, et puis un ouvrage
01:06:15qui a été coordonné par
01:06:17vous-même, Georges-Agdelanois,
01:06:19et aussi Jean-Michel Genest,
01:06:21qui est l'Atlas de la Grotte Chauvet,
01:06:23qui est, je crois, un peu un ovni,
01:06:25un ouvrage magnifique, et que vous pourrez
01:06:27certainement voir dans les murs de la cité.
01:06:29Il est dans l'exposition à la fin,
01:06:31donc tout à la fin, il est
01:06:33posé sur une table. Alors, c'est un ovni
01:06:35parce que c'est, je ne sais même pas si on peut appeler ça un livre,
01:06:37parce qu'il est très grand,
01:06:39donc il y a des magnifiques images.
01:06:41Du coup, ce n'est pas vraiment un livre,
01:06:43on ne peut presque pas le tenir en main tellement il est lourd.
01:06:45Mais c'est génial,
01:06:47c'est magnifique, cet ouvrage.
01:06:49Il y a l'image de la Grotte Chauvet.
01:06:51Il y a l'image de la Grotte Chauvet, exactement.
01:06:53Sinon, l'Atlas de la Grotte Chauvet, pardon.
01:06:55Oui.
01:06:57Merci.
01:06:59Bonne visite.

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