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Rencontre avec Noémie Merlant lors du festival de film de Gand. Elle revient avec nous sur son nouveau film, "Les femmes au balcon", une œuvre forte, drôle, crue et engagée qui évoque les violences sexistes et sexuelles et où la libération des femmes et de leurs corps est le fil rouge.

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Transcription
00:00Ce film, oui c'est un exutoire, c'est un film cathartique, mais c'est aussi un film qui pour moi raconte des choses qui me semblent universelles et qui ne sont pas très racontées.
00:13La métier entre femmes, qui a une place énorme dans ma vie, et puis le côté genre, le côté violence associé à des femmes, qui pareil ce n'est pas beaucoup raconté.
00:33Mais dans ce film c'est de la violence humoristique, on va dire que c'est de la violence de défense aussi, qui n'est pas la même je pense.
00:41Dès le début, dès que j'ai eu envie de raconter cette histoire qui parle de choses très réelles, c'est un film qui parle quand même des agressions sexistes et sexuelles.
00:51Quand j'ai commencé à en parler de ces traumatismes avec mes amis, je me suis rendu compte qu'on en parlait toujours avec de l'humour.
00:59Parce que je pense que ça nous permet d'avancer, ça nous permet de mettre à distance, ça nous permet de se moquer aussi, c'est une arme très forte.
01:09Et c'est essentiel que le film soit raconté par le biais de l'humour. Malheureusement il y a cette banalité des violences sexistes et sexuelles.
01:21Et donc je voulais associer l'humour avec aussi la violence et le gore, parce que la violence, comme je disais tout à l'heure, c'est pas quelque chose...
01:29D'ailleurs Virginie Despentes le dit, si les hommes avaient un peu plus peur de se faire la serrer la bite, peut-être qu'ils se contrôleraient plus.
01:35Donc du coup j'avais envie d'autoriser ces femmes à être violentes, à être dans la défense.
01:42C'est assez quotidien, et pour en parler avec pas mal de femmes autour de moi, souvent c'est même pas que toutes, on a presque toutes subi des agressions,
01:50c'est qu'on a toutes subi plusieurs, que ce soit de la main aux fesses dans le métro, ou le petit copain qui insiste trop jusqu'à aller au viol conjugal.
02:00D'ailleurs j'en ai parlé autant à ma grand-mère, ma tante, qui ont vécu ces choses-là, que ma cousine de 18 ans avec son petit copain.
02:07Donc c'est quelque chose qui est partout, et que si on ne prend pas le truc de manière globale, et qu'on ne s'intéresse qu'aux viols qu'on a beaucoup représentés,
02:20aux viols avec violence, qui sont assez clairs et définis dans la tête des gens aujourd'hui je pense,
02:28mais tout le reste fait aussi partie de cette culture du viol, ou de cette oppression patriarcale et sexiste,
02:38qui fait que c'est difficile d'avancer, d'avoir un espace égalitaire et respectueux pour les femmes.
02:47Quand j'ai fait Portrait, ma rencontre avec Céline, avec Adèle, avec ce film, ça a non seulement changé ma carrière,
02:54mais ça a aussi changé mon rapport à moi en tant que femme, à aussi l'importance dans la création,
03:04si on parle de Portrait de la jeune fille en feu, du fait qu'on aille plus loin dans l'art quand on est en collaboration les uns les autres,
03:15et quand on est dans un environnement sain et safe.
03:18Au contraire, ça permet beaucoup plus de choses, parce qu'avant on était un peu dans un culte du réalisateur tirant,
03:25ou de l'artiste tirant qui allait pousser ses muses pour aller tirer, et ça j'y crois plus aujourd'hui, et ça c'est merci à Céline.
03:35En fait, quand j'ai commencé à vivre avec Sanda et entre femmes, je me suis rendue compte, mais vraiment de l'intérieur,
03:42à quel point nos corps étaient détendus et relâchés, et qu'en fait, même dans mon couple, et dans la société, et dehors, mon corps n'était jamais détendu.
03:53Moi, ce que j'ai envie de raconter, c'est aussi le fait qu'il peut toujours y avoir du jeu, il peut y avoir toujours du désir,
03:59mais il y a un endroit où on le garde pour nous et on ne l'impose pas en face. C'est ça que je voulais raconter aussi dans le film.
04:05Donc j'ai trouvé le moyen de filmer ces corps en ne faisant pas attention à la lumière, ni aux positions qu'on a.
04:14Je trouve en tant qu'artiste que le corps raconte énormément de choses, autant qu'un regard, autant qu'une voix et un dialogue.
04:24Et c'est quelque chose de très beau. Et même parler de sexe ou d'une scène sexuelle m'intéresse, surtout en tant que femme,
04:33puisque ça n'a pas été assez exploré de notre point de vue. Donc à partir du moment où je vais être avec quelqu'un de respectueux et qui est vraiment dans le travail
04:42et dont on cherchait à représenter les choses différemment, je ne vais pas du tout avoir de problème, au contraire.
04:53C'est ça que je voulais raconter.

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