L'ancien Premier ministre Dominique de Villepin, le 20 janvier 2025 sur franceinfo.
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00:00On change de continent. Vous pensez, Dominique de Villepin, comme le ministre de l'Intérieur, Bruno Rotaillot, et l'extrême droite, que l'Algérie a humilié la France ?
00:08Vous savez, je suis diplomate de formation. Et s'il y a un sentiment dont il faut se méfier en matière de diplomatie, c'est l'humiliation.
00:20Humiliation de qui ? De quoi ? Rappelez-vous la dépêche d'Aims. Là aussi, la France était humiliée. On est partis en guerre pour cela, parce qu'on a jugé qu'on était humiliés.
00:32C'était en fait une manipulation. Rappelez-vous le coup d'éventail du dé d'Alger, il y a presque 200 ans. Là aussi, la guerre a suivi. Donc on ne va pas rejouer une nouvelle guerre d'Algérie.
00:46Est-ce qu'on est en train de vivre la crise la plus grave entre les deux pays ?
00:49Certainement. Et c'est pour cela qu'il faut faire preuve de beaucoup de sang-froid. Et il faut ne pas oublier qu'entre nous et l'Algérie, il y a des millions d'Algériens de France,
01:02des millions de Franco-Algériens, et plus largement que ça, des millions de Français issus du Maghreb, qui tous voient avec beaucoup d'inquiétude ces fluctuations, ces évolutions
01:16qui ont affecté hier le Maroc, qui affectent aujourd'hui l'Algérie. Nous avons un devoir vis-à-vis de l'histoire et vis-à-vis de nos peuples. C'est celui d'être capables de répondre à ces difficultés.
01:31Et c'est vrai qu'il y a des difficultés qui existent. De l'autre part, beaucoup de fermeté, là encore, sur nos valeurs.
01:36Boulême Sansalle, nous devons être fermes sur nos principes. Mais nous devons aussi être capables de trouver le chemin, de trouver la voie. Et il y a, entre la France et l'Algérie...
01:47Mais vous entendez ceux qui disent « on a essayé, on a essayé pendant de nombreuses années ». Là, aujourd'hui, Bruno Retailleau et d'autres politiques de tous bords disent aujourd'hui « il faut faire pression sur l'Algérie ».
01:57Il y a un malentendu depuis le départ de ministres de l'Intérieur qui veulent régler des questions qui ne se règlent que par la diplomatie, à la place du ministre des Affaires étrangères et de la diplomatie.
02:16Mesurons bien. Si l'Italie a en grande partie réglé son problème migratoire, c'est parce que Mme Mélanie a su user de la diplomatie. Et ce n'est jamais dans l'escalade, ce n'est jamais dans la surengère.
02:31Si ça ne marche pas, c'est peut-être qu'on n'a pas forcément utilisé suffisamment les bons moyens ou pas suffisamment au bon niveau. Il faut persévérer.
02:39Nous n'avons pas le droit de baisser les bras et nous n'avons pas le droit de rentrer dans la logique d'une politique du pire dont nous savons qu'elle sera sans effet et bien pire. Elle conduira à des surenchères.
02:51Mais sur cette question précise des accords de 68 qui octroient un statut particulier aux Algériens en matière de droit à la circulation, de séjour et d'emploi en France, est-ce qu'il faut les remettre en cause aujourd'hui ?
03:02Nous les avons déjà remis en cause à plusieurs reprises, à de nombreuses reprises. Si nous souhaitons rediscuter de ces accords, parlons-en avec les Algériens.
03:11Est-ce qu'on est obligé d'adopter une position punitive ? S'agit-il à travers la dénonciation de ces accords de punir ? Sortons de ces logiques.
03:23Une fois de plus, j'ai eu à gérer dans ma carrière beaucoup de crises et des crises très difficiles. Je sais que ce n'est pas comme ça que l'on peut aboutir.
03:32Vous observez une perte de sang-froid là.
03:35Ce que j'observe, c'est qu'il y a la tentation de se laisser aller à régler des comptes. Nous ne sommes pas aujourd'hui, compte tenu de la gravité des choses, nous ne sommes pas aujourd'hui à devoir nous faire plaisir en réglant des comptes quels qu'ils soient.
03:50Et même si certains peuvent considérer qu'ils sont parfaitement fondés aujourd'hui à vouloir donner des coups, ce n'est pas l'esprit de la relation entre la France et l'Algérie.
04:02Nous avons payé à travers l'histoire suffisamment cher pour apprendre qu'il n'y a qu'un chemin, c'est celui de l'amitié, c'est celui du respect, et je l'espère très fortement, de la réconciliation parce que nos peuples le méritent.
04:18Dans un entretien à Mediapart ce week-end, Dominique de Villepin vous évoquait 2027 en ces termes.
04:24« Je ne peux pas ne pas être aux avant-postes », question directe, donc est-ce que vous envisagez d'être candidat à la présidentielle ?
04:30Sonia Braquière.
04:32C'est mon deuxième prénom, Sonia, mais c'est bien Salia.
04:36On a évoqué un certain nombre de grands sujets. Ce n'est ni le sujet, ni le moment.
04:44Ma conviction, il y a des défis formidables à relever, mais ce n'est pas seulement les miens, c'est ceux de tous les Français, de tous les Européens, et la contribution la plus utile que je puisse apporter aujourd'hui, c'est celle justement d'éclairer l'importance de ces défis et de montrer qu'il y a un chemin qui n'est pas un chemin de confrontation, mais qui est un chemin de prise de conscience et d'action.
05:07Je vous pose la question parce que plusieurs personnalités politiques sont déjà sur la ligne de départ, notamment un droit de votre famille politique d'origine, David Lissnard, Laurent Wauquiez, Édouard Philippe, vous pourriez soutenir l'un de ces candidats ?
05:21Tout est possible, mais laissons passer les plus pressés.
05:27C'est la grande règle à laquelle il ne faut jamais déroger. S'il y a des ambitions, qu'elles s'expriment, je n'ai pas d'ambition de ce type.