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00:00Il est 7h12 sur Europe 1. Dimitri Pavlenko, vous recevez ce matin l'expert en question de sécurité, Driss Haït Youssef.
00:06Bonjour Driss Haït Youssef.
00:08Bonjour.
00:09Bienvenue sur Europe 1. Il y a donc un djihadiste assigné à résidence à Lure, en Haute-Saône, Karim Mohamed Haggad.
00:15C'est son nom, frère d'un des terroristes du Bataclan.
00:18Sa présence, évidemment, suscite l'émoi parmi les habitants, mais combien sont-ils comme lui aujourd'hui en France, Driss Haït Youssef ?
00:25Est-ce qu'on sait combien d'islamistes, de vétérans du djihad radicalisées sortant de prison,
00:30les services de police et de renseignement gardent sous la main comme ce Karim Mohamed Haggad ? Est-ce qu'on le sait ?
00:37Alors non, on ne connaît pas le chiffre. Et puis, en plus, c'est un chiffre qui évolue régulièrement,
00:40puisque je rappelle que c'est une mesure individuelle de contrôle administratif et de surveillance qui est valable trois mois au renouvelable.
00:46Et donc, voilà. Donc, lorsqu'on a eu les Jeux Olympiques et Paralympiques,
00:51l'autorité administrative, en l'occurrence le préfet et le ministre de l'Intérieur, ont prononcé plusieurs mesures.
00:56On en comptait à peu près 155 pendant les JO à l'été 2024. On pense qu'il y en avait beaucoup plus.
01:05Bon, après, je n'ai pas de chiffres précis, mais ils sont, en tout cas, plusieurs centaines à faire l'objet d'une micasse.
01:10Mais ces chiffres évoluent.
01:12Alors, justement, vous parlez de micasse, c'est le régime sous lequel est toujours Karim Mohamed Haggad.
01:17C'est quoi une micasse, exactement, Driss Haït Youssef ?
01:20Alors, une micasse, c'est une mesure individuelle de contrôle administratif et de surveillance.
01:27Donc, c'est une mesure de police administrative qui est prononcée par soit le préfet, soit le ministre de l'Intérieur
01:33contre une personne contre laquelle il existe des raisons possibles qu'elle participe à une organisation
01:39qui est une organisation, je ne dis pas terroriste, mais illégale.
01:43Et donc, ça peut être une mesure à la fois d'assignation à résidence, c'est l'autre terme pour dire assignation à résidence.
01:50Ça peut être également d'une mesure de visite domiciliaire, c'est ce qu'on appelle ces perquisitions administratives.
01:56Et donc, ce sont tout un tas d'outils à la disposition du préfet, justement, pour agir en prévention d'un acte terroriste.
02:04Alors, cette affaire de Lure, elle met en lumière, Driss Haït Youssef, une préoccupation majeure à nos services de sécurité et de renseignement.
02:12Que faire de tous ces terroristes islamistes qui ont purgé leur peine, mais qui sortent de prison et se retrouvent donc dans la nature ?
02:19Alors, qu'est-ce qu'on fait d'eux ?
02:20Alors, d'abord, ils sont à peu près 80, entre 70 et 80 par an.
02:24Donc, il y a un dispositif qui est mis en place, à la fois en fonction de la dangerosité de l'individu, il y a une évaluation.
02:31Bon, après, le principe, c'est quand l'individu a purgé sa peine, il faut le libérer.
02:36Il n'y a pas de dispositif aujourd'hui qui permet de les garder beaucoup plus longtemps qu'à l'issue de sa peine.
02:41Et puis ensuite, après, vous avez soit une mesure de police administrative qui, en l'occurrence, peut être une mesure individuelle de contrôle administratif.
02:51Et puis après, vous avez des services de renseignement qui, en fonction de la dangerosité, vont prendre le relais pour surveiller les activités de l'individu.
02:59Ce qu'on sait aujourd'hui, c'est qu'on a à peu près 5 000 individus qui font l'objet d'un suivi particulier au titre de la radicalisation à caractère islamiste.
03:06Donc ça, on le sait.
03:07Maintenant, ils ne sont pas forcément tous dangereux, mais ils font tous l'objet d'un suivi, en tout cas d'une veille active.
03:14Maintenant, on ne sait pas ce qu'ils ont dans la tête. Pour un certain nombre d'entre eux, c'est uniquement de la radicalisation.
03:20Donc, il n'y a pas de projet d'attentat. Et pour d'autres, ils présentent des caractéristiques beaucoup plus problématiques.
03:25Et dans ce cas-là, on a régulièrement des services antiterroristes sous l'impulsion, la coordination du parquet national antiterroriste
03:33qui procèdent à des interpellations et à de la judiciarisation pour les mettre en prison.
03:38Mais malgré tout, est-ce que les plus dangereux sont vraiment bien surveillés ?
03:43Je vous donne quelques exemples.
03:44Jean-Baptiste Martil, rappelé à l'instant dans le journal, il y a quelques minutes, sur Europe 1.
03:47L'exemple de Djamel Begal, qui était assigné à résidence dans le Cantal en 2009 et qui, un jour, a reçu la visite de Chérif Kouachi et Hamedi Koulibaly, les terroristes de janvier 2015.
03:57Chérif Kouachi, qui ensuite est parti s'entraîner au Yémen, alors qu'il était sous contrôle judiciaire.
04:02On a enfin l'exemple d'Adèle Kermiche, l'un des assassins du Père Hamel, qui portait un bracelet électronique.
04:08Et tous ont agi alors qu'on les surveillait, Driss Haït-Youcef.
04:11Le bracelet d'Adèle Kermiche, c'est un bracelet électronique qui ne faisait pas forcément l'objet d'un suivi par les services de renseignement, mais d'une mesure judiciaire.
04:22Et c'est tout le problème.
04:23C'est-à-dire que la mesure individuelle de contrôle, c'est-à-dire cette assignation à résidence, le type, parfaitement, au lieu d'aller pointer au commissariat, allait commettre un attentat.
04:31Et ça, malheureusement, le risque zéro n'existe pas.
04:34Ensuite, les individus peuvent très bien, comme ça a été le cas et comme on l'a vu à plusieurs reprises,
04:39faire soit une diversion et puis quitter le territoire par la voie terrestre, par véhicule, et ensuite se rendre dans un théâtre d'opération terroriste extérieur.
04:47Donc ça, la menace, le risque zéro n'existe pas.
04:50Mais est-ce que la législation de surveillance après la prison, donc, pour ces profils djihadistes, est-ce qu'elle vous semble suffisante ?
04:57Il y a eu effectivement une proposition de loi visant justement à mettre en place ce qu'on appelle une mesure de sûreté,
05:04conserver les individus en prison après une évaluation qui démontre une forme de dangerosité de l'individu.
05:11Le conseil constitutionnel, me semble-t-il, est passé par là.
05:13Donc il faut, pourquoi pas, envisager d'autres dispositifs.
05:16Malheureusement, ces individus sont français, je le dis malheureusement, donc ils ne sont pas expulsables.
05:22Ils n'ont qu'une seule nationalité, c'est la société française.
05:25Et d'enfermer ces individus, ou en tout cas continuer à les enfermer sans aucun motif,
05:30ou en tout cas sans aucune forme à la fois de procès, ça me paraît compliqué.
05:36Heureusement, il n'y a pas d'autre choix, mais ce n'est pas parce que ces gens-là sont remis en liberté qu'ils ne font pas l'objet d'une surveillance.
05:41Donc là encore, les services de renseignement sont très mobilisés,
05:45que ce soit en prison ou à l'extérieur, pour vérifier que ces individus n'ont pas pour projet de commettre un attentat.
05:52Merci Driss Haït Youssef, je rappelle que vous êtes expert en question de sécurité intérieure.
05:57Merci à vous, bonne journée.

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