Jean-Christophe Granger revient avec "Sans Soleil", un roman en deux tomes plongeant dans l'homosexualité des années 80, entre fête et sida. Un récit violent et captivant, mêlant meurtres et danse.
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00:00Rencontre ce matin avec le maître du polar, qui est de retour en librairie, Jean-Christophe
00:09Granger-Carton avec son nouveau roman, ça s'appelle « Sans soleil ». Mais pourquoi
00:13il y en a deux ? Il y a deux tomes. Il y a 800 pages. Ça, ça peut durer les deux semaines
00:18de vacances. Coup de cœur pour ces deux livres. On est plongé dans le pari homosexuel du
00:23début des années 80. C'est une période très particulière parce que l'homosexualité
00:28a été dépénalisée en 1982. Donc, on pourrait dire que l'heure est à la fête. Mais voilà
00:33qu'une maladie mystérieuse, le cancer gai, comme on l'appelle, touche la communauté.
00:38On est au tout début du sida quand les médecins n'ont pas encore cerné la maladie. Je vous
00:42lis un extrait. On est avec Ségur qui est un médecin qui ne comprend pas ce qui se
00:47passe justement. En Afrique, Ségur a affronté des maladies, malaria, choléra, diphtérie,
00:52hépatite. Mais celle qui se profile aujourd'hui à Paris et aussi à Los Angeles et New York
00:56est inédite. Pour une fois, le fléau ne frappe pas en priorité les pays en voie
00:59de développement, dont personne n'en a rien à foutre. Non, la maladie émerge dans
01:03les pays riches au cœur même du confort et de la civilisation, là où l'homme se
01:06croit invincible. Voilà pour les décors. Il fallait que j'en parle parce que le sida,
01:10c'est le décor. Et c'est dans ce contexte que des meurtres atroces ont lieu. Des hommes
01:14malades du sida, en fin de vie, retrouvés dépecés. On meurt du sida, mais on danse
01:19aussi. On est aussi dans le pari branché. On a rencontré Jean-Christophe Granger. Il
01:22a voulu parler de cette époque qu'il a bien connue. Il avait une vingtaine d'années.
01:26Je faisais comme Heidi, ne pouvant pas rentrer dans ces fameux bains douches où personne
01:31ne pouvait rentrer. Je me rabattais, disons, sur les boîtes homosexuelles qui étaient
01:36très branchées aussi et qui possèdent de la très bonne musique. Tous les hommes étaient
01:39très, très beaux. Ils dansaient comme des dingues. Et puis, il y avait ce disco, une
01:42fièvre vraiment. Et ça, j'ai voulu le décrire. Et puis, je voulais parler plus profondément
01:48de cette période de liesse, d'ouverture de l'homosexualité qui a été totalement
01:53fauchée quelques années après par la maladie, l'arrivée du fléau.
01:57Tout est formidable dans ce bouquin. La description de l'époque, les trois personnages, Swift,
02:03le flic dandy, beau gosse, le docteur Ségur dont je vous ai parlé, qui a fait du cancer
02:08gay vraiment une mission, et Heidi, la meilleure amie de la première victime. C'est un retour
02:13gagnant pour Jean-Christophe Granger. Tomes 1 et 2, je vous le disais, sortis il y a un
02:17mois, 800 pages quand même en tête des classements, sortis en grande pompe, tirage
02:22à 130 000 exemplaires. Il faut dire que Granger est une star des librairies, mais c'est un
02:26roman aussi très violent. Il a même eu droit, on l'a vu, à une bande-annonce.
02:31Comme au cinéma. Oui, et ça, c'est toujours dans les maisons
02:34d'édition, on fait des bandes-annonces pour les auteurs de best-sellers. Et c'est vrai
02:38que c'est violent, les victimes. Elles sont mutilées, torturées. C'est un roman qui
02:42cache. Ça sent le pavé parisien, ça sent la sueur, ça sent le sexe, ça sent le sang,
02:48ça sent la nuit et la maladie. Et on pourrait se dire, il a une fascination pour la violence,
02:53Jean-Christophe Granger, ce qui est toujours le cas dans ses romans. Il ne va pas du tout
02:55écouter le roman. En réalité, on écrit toujours sur ce qui
02:58vous pose un problème. Parfois, il y a un malentendu, on se dit, Granger, c'est complaisant,
03:03il aime la violence. Mais c'est le contraire. On écrit sur ce qu'on n'arrive pas à supporter,
03:08à tolérer. Et moi, depuis que je suis enfant, je n'ai pas pu digérer la cruauté humaine.
03:14Je raconte toujours l'histoire de tueurs qui ont subi des traumatismes. Et l'enquête
03:19est toujours une remontée vers ces traumatismes, vers une sorte d'explication tout de même
03:23de ce surgissement de violence.
03:25Jean-Christophe Granger, Jean-Marie Marchaud. Ces deux tomes se dévorent. C'est vraiment
03:31un coup de cœur et ça ferait une super série. Il s'est en habitué des adaptations
03:35de Jean-Christophe Granger. Je pense que ça ferait un film ou une série dans peu de temps.
03:38On verra. Merci beaucoup, Lorraine.