L'Ukraine a repoussé l'idée évoquée par Donald Trump ce jeudi d'une réunion à Munich entre des responsables russe, ukrainien et américain, estimant notamment que "l'Europe doit participer à toute discussion sérieuse pour une paix".
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00:00On en parle avec Ulrich Buna, bonjour, vous êtes analyste géopolitique et spécialiste de l'Europe centrale et orientale, merci d'être avec nous face à Patrick Sauss et Anne Lorbanz
00:10qui est l'envoyée spéciale de BFMTV à Munich pour suivre ce sommet qui va se tenir aujourd'hui à Munich et en marge duquel il y aura tout à l'heure cette rencontre entre le vice-président américain
00:20J.Devins et le président ukrainien Volodymyr Zelensky. Anne Lor, est-ce qu'on peut considérer qu'on est là à la première phase de négociation de paix qui pourrait commencer ?
00:33En tous les cas, les gros moyens ont été envoyés par les Américains. Toute la diplomatie américaine est arrivée à la conférence de Munich sur la sécurité avec son émissaire principal
00:43J.Devins, vice-président des Etats-Unis qui est bien présent pour porter la voix de Donald Trump qui, lui, est déterminé à ouvrir et surtout à presser les discussions sur la mise en place d'un plan de paix pour l'Ukraine.
00:56Vous le disiez Adeline, ce dernier a annoncé Donald Trump une réunion entre des hauts responsables dans la capitale bavaroise, des hauts responsables américains, russes et ukrainiens.
01:06C.F. s'est empressée de dire qu'elle ne participerait pas à ces pourparlers. En revanche, le président ukrainien Volodymyr Zelensky va s'entretenir avec J.Devins pour parler des contours de ce plan de paix qui, sous le prisme ukrainien pour l'instant, ressemble plutôt à une capitulation.
01:22Cette discussion intervient en effet après l'ombre de choc du coup de fil passé entre Donald Trump et Vladimir Poutine qui remet le président russe dans une relation d'égal à égal avec les Etats-Unis.
01:35Le camp ukrainien va donc devoir jouer son va-tout pour se faire entendre alors que Donald Trump a vraisemblablement complètement bousculé l'ordre international et les négociations de paix.
01:45Alors justement, effectivement, il y a beaucoup de choses à partir de tout ce que vient de nous dire l'envoyé spécial de BFM TV à Norvance.
01:51On va commencer par Trump. Trump passe une heure et demie au téléphone avec le président russe. C'est quoi le plan de Trump pour l'Ukraine ?
01:58On l'a bien compris, une heure et demie avec Vladimir Poutine, puis sans doute un quart d'heure pour écrire son tweet.
02:03Puis ensuite, semble-t-il, un très court appel à Volodymyr Zelensky, ne serait-ce qu'avec ce timing.
02:09Ça a au moins le mérite de mettre les choses sur la table.
02:12On le comprend lorsqu'on discute avec des diplomates ou alors avec des hauts grades et militaires, y compris français, c'est qu'au moins les problèmes sont posés.
02:21Il y a une vraie amertume vis-à-vis de l'administration Biden, je dis bien Biden, qui pendant trois ans a essayé de naviguer, voire louvoyer, après une première erreur stratégique.
02:31C'est lorsque Biden, au bout de trois jours, dit de toute façon, aucun soldat américain ne posera le pied en Ukraine. Vladimir Poutine avait déjà tout compris.
02:37Mais allons dans le concret. C'est quoi le plan Trump une nouvelle fois ? C'est quoi le plan Trump pour l'Ukraine ?
02:42Alors vous prenez les objectifs de guerre de Vladimir Poutine du 24 février 2022 et puis vous les cochez un par un.
02:49Poutine voulait la dénazification du régime. Ça veut dire quoi ? Ça veut dire enlever le nazi juif. J'utilise vraiment ça jusqu'au bout.
02:57Vladimir Zelensky, qu'a dit le nouveau secrétaire à la défense américain ? Il a dit il faut absolument une présidentielle pour l'Ukraine.
03:06Grosso modo, on dégage Zelensky. Il faut pour Vladimir Poutine défendre les territoires séparatistes qui voulaient dans un grand élan démocratique rejoindre la Russie.
03:15Le même secrétaire à la défense a dit c'est totalement irréaliste de revenir aux frontières d'avant 2014.
03:21Il voulait aussi une continuité géographique jusqu'à l'accrimé Poutine. Il l'a et enfin les américains ont dit jamais au grand jamais l'Ukraine ne rentrera dans l'OTAN.
03:29Vous avez tous les objectifs de guerre qui sont remplis.
03:32Il faut-il comprendre qu'en quelque sorte à travers les grandes lignes de ce plan, le président américain valide les conquêtes de Poutine ?
03:40Complètement. En plus de ça, il redonne un certificat de respectabilité à Vladimir Poutine en le recontactant et probablement en le rencontrant dans les prochaines semaines en Arabie saoudite.
03:52Finalement, la seule chose qui pourrait éviter à l'Ukraine une capitulation totale, ce serait des garanties de sécurité avec un déploiement de troupes occidentales,
03:59sans doute européennes, certainement pas américaines, sur le sol pour éviter que cette guerre reprenne un peu plus tard une fois que Vladimir Poutine aura reconstitué ses forces.
04:06Mais ça rappelle 1938 quand les accords de Munich avaient abouti à l'annexion d'une partie de la Tchécoslovaquie par Hitler.
04:13Il y a un peu de ça. La seule subtilité, je dirais, c'est qu'il est probable que si jamais il y a un accord de paix,
04:18enfin en tous les cas un cessez-le-feu ce sera courté, mais qu'il n'y aura pas de reconnaissance légale de l'annexion par la Russie des territoires.
04:24En tout cas, ce ne sera jamais reconnu probablement par les Ukrainiens et les Européens.
04:27Mais effectivement, de facto, ça aboutirait à une partition en tous les cas de l'Ukraine avec la Russie qui conserverait tous les territoires qu'elle occupe.
04:34Et tout ça en quelque sorte dans le dos de l'Ukraine et dans le dos des Européens.
04:38Écoutez ce que disait hier soir sur BFMTV le ministre des Armées Sébastien Lecornu.
04:42Un cessez-le-feu bâclé, c'est potentiellement le retour d'une guerre plus importante et qui peut nous concerner à moyen et long terme.
04:50Donc c'est pour ça aussi que nous mobilisons avec le ministre des Affaires étrangères sous l'autorité du président de la République
04:55parce qu'il n'est pas question de se faire avoir.
04:57Il est évident que l'Ukraine n'acceptera jamais ça, on est d'accord Ulrich ?
05:00Alors l'Ukraine a quand même déjà fait beaucoup de concessions.
05:02Quand on remonte un peu le temps pour justement essayer d'abadouir Donald Trump,
05:06l'Ukraine a de facto renoncé à récupérer ses territoires de façon en tout cas courte ou moyen terme.
05:11Elle a grosso modo accepté qu'il y aurait des élections, comme ça a été dit.
05:14Elle a accepté beaucoup de choses.
05:15La seule chose à laquelle elle s'accroche c'est justement ces fameuses garanties de sécurité
05:19pour éviter que Vladimir Poutine reprenne sa guerre un peu plus tard.
05:22Les garanties de sécurité, ça veut dire des troupes européennes en Ukraine ?
05:24Exactement.
05:25En tous les cas, c'est comme ça que l'envisage les Ukrainiens.
05:28D'ailleurs, ils espèreraient que les Américains y participent.
05:30Sans adhésion à l'OTAN ?
05:31Sans adhésion à l'OTAN, parce que là aussi, les Ukrainiens ont compris qu'ils n'entreraient pas dans l'OTAN.
05:35Mais d'ailleurs, je précise juste que pour déployer des forces européennes,
05:38il faudra probablement un soutien logistique américain.
05:40Donc c'est aussi un peu ça qui se joue je pense.
05:42Mais donc effectivement, on est dans une situation où les Européens et les Ukrainiens
05:48qui espéraient probablement profiter du forum de Munich pour revenir dans le jeu,
05:52avant même que le forum commence, sont déjà remis de côté et ça va être compliqué de revenir dans le jeu.
05:57Mais en vous écoutant, on se dit un, que ça peut passer,
06:00et deux, que la méthode Trump qui est décriée évidemment par tout le monde,
06:04ça n'a peut-être pas que du mauvais.
06:07Pour geler une guerre, peut-être.
06:09Pour faire la paix, sans doute pas.
06:11Et c'est la même chose au Proche-Orient.
06:13Pour l'instant, le jour d'après n'est absolument pas évoqué,
06:15sauf de façon totalement, je dirais, folle.
06:19Il n'y a pas d'autre mot, c'est-à-dire on dégage les Gazaouis de Gaza.
06:23Pour mettre les problèmes, poser les problèmes,
06:26sans doute que les diplomates, notamment lorsqu'on sort d'Europe,
06:30pour avoir discuté avec quelques diplomates dans les pays du Golfe,
06:33on est plutôt content d'avoir quelqu'un qui au moins joue franc jeu.
06:36Même si les cartes sont parfois déstabilisantes, au moins elles sont posées.
06:41Il y a une vraie, encore une fois, une vraie amertume vis-à-vis de Joe Biden
06:45et vis-à-vis aussi de certaines décisions européennes.
06:48Encore une fois, ceux qui attendaient que l'économie russe s'écroule
06:52vont devoir revoir cette économie qui revient dans le jeu.
06:57Et donc, on sent qu'on n'est pas allé assez loin, qu'on a laissé faire,
07:01on a quelque part laissé tomber l'Ukraine.
07:04C'est sans doute ce que vont penser les Ukrainiens,
07:06alors même qu'ils sont épuisés, qu'on l'a vu il y a quelques minutes,
07:08ils cherchent à échapper à la guerre.
07:10Zelensky, il arrive à Munich le couteau entre les dents
07:13pour essayer d'empêcher ce rapprochement Trump-Poutine ?
07:16Avec quels moyens ? Au-delà même du physique, c'est-à-dire ce petit homme
07:22au milieu du géant JD Vance et des Américains qui vont rouler des mécaniques,
07:27qui vont lui dire, écoute mon grand, c'est comme ça, il n'y a pas d'autre choix.
07:31Donc, il n'a absolument aucun moyen, hormis un petit deal économique
07:35sur des terres rares qui, rappelons-le,
07:38chevauchent les limites du Donbass ukrainien et du Donbass
07:42à crainer par les Russes et que convoite Donald Trump.
07:46Et donc, très très peu de moyens.
07:48Les terres rares, c'est les terres où il y a des minéraux intéressants.
07:50Oui, c'est ça. Donc, la seule idée, c'est d'avoir un petit strapontin pour les Européens.
07:53Mais comme l'a dit Ulrich, ils vont ramasser les miettes et simplement maintenir la paix.
07:57Merci à tous les deux.