Anne Brassié reçoit Sylvain de Mullenheim et présente le premier livre de la nouvelle maison d'édition, La Onzième Heure, "Les prophètes du passé de Barbey d'Aurevilly". Récusation violente de la Révolution et de ses conséquences à travers le portrait de 4 grands écrivains, Xavier de Maistre, Louis de Bonald, Chateaubriand et La Mennais. Et en prime ceux de Taine, de Rivarol et Donoso Cortés. Pour Barbey et ses héros, la vérité politique n'est qu'une simple déduction de la vérité religieuse. "La Révolution a commencé par la Déclaration des droits de l'homme, elle ne sera finie que par la déclaration des droits de Dieu". On n'en rend pas le chemin. Ces pages, antilibérales brillantissimes, conviennent parfaitement à notre pauvre temps.
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00:00– Chers amis de TV Liberté, bonjour, je viens partager avec vous ce matin un trésor,
00:30un livre qui est en train de paraître et qui s'appelle Les Prophètes du passé.
00:36Pour en parler, bonjour Sylvain de Moulenaïm.
00:40– Bonjour madame.
00:41– Vous participez à cette équipe de cette nouvelle édition, La Onzième Heure.
00:46Alors, qu'est-ce que c'est que cette équipe de La Onzième Heure
00:50et pourquoi ce titre ? J'ai une petite idée.
00:52– Alors, nous sommes quatre, Jacques de Guilbon, Rémi Carleux, Nicolas Pina et moi,
00:58et nous nous sommes dit que nous n'étions pas obligés de rester coincés
01:03en matière économique entre l'ultra-capitalisme ou le communisme
01:06et qu'entre les deux, il y avait ce que Jean-Paul a appelé une voie elle-même,
01:10qui est le catholicisme social.
01:13Et les ouvriers de La Onzième Heure, parce qu'on s'y prend un peu au dernier moment,
01:19et puis parce que les ouvriers de La Onzième Heure,
01:21ils sont rétribués de la même façon par le père que les autres.
01:24– Exactement.
01:25– Et donc, on espère que ça serve, que ce soit utile,
01:29que les gens puissent se replonger dans ces textes de ces auteurs fantastiques
01:32et puissent en faire leur plus grand profit.
01:35– Alors, le titre déjà est fantastique, mais c'est une agression.
01:41C'était une agression pour un certain nombre d'écrivains de ce temps-là,
01:46de leurs ennemis, auxquels Barbédorevini répond tranquillement,
01:54les prophètes du passé sont nécessaires pour les nations usées physiologiquement par le temps
02:01et spirituellement par l'amour de l'erreur et l'abus de l'intelligence.
02:07Je trouve que c'est une définition de notre époque parfaite.
02:10– Il est remarquable en ce sens, et puis lui, il n'a pas peur de se battre.
02:14On ne l'a pas appelé le connétable des lettres pour rien.
02:17– Non.
02:17– Et oui, il va au combat et il est persuadé que le monde se divise entre deux philosophies,
02:21ceux qui partent de Dieu pour aller à l'homme et à la société,
02:23et puis ceux qui font l'inverse, qui partent de l'homme pour aller à rien.
02:27Et il pense que ces deux philosophies ne peuvent pas cohabiter l'une avec l'autre,
02:32donc elles doivent se faire la guerre et l'une doit avoir raison de l'autre.
02:35– Oui, et que l'une mène à une nation et une société équilibrées,
02:40heureuses et prospères, et l'autre arrive à la catastrophe et à la guerre.
02:44Lire ce texte, je ne l'avais pas lu quand j'ai étudié un peu Barbès,
02:51mais lire ce texte aujourd'hui est un plaisir de roi, ça je dois le dire.
02:57– Ah oui, il annonce le monde dans lequel nous sommes de façon complètement prophétique
03:01puisqu'il est finalement lui-même, grâce à sa conclusion, un prophète.
03:06Il s'ajoute à la liste.
03:08– Il s'agit, alors, qu'est-ce qu'un prophète ?
03:11Et pouvons-nous décortiquer cette notion, prophète du passé,
03:16c'est totalement contradictoire.
03:18– Oui, Barbès de Rivigny a relevé une injure qui avait été faite à l'un de ceux-là,
03:24il considère qu'un homme normal ne peut se définir
03:27que par les injures que lui adressent ses ennemis.
03:30Donc il relève prophète du passé en disant, oui, ces gens-là le sont,
03:35et les prophètes du passé sont des gens qui sont des catholiques,
03:39qui voient le monde au travers de la doctrine et de la foi,
03:44et qui n'en débordent pas, et qui annoncent le futur, justement,
03:49par le fait que les gens qui font le présent de Barbès,
03:55et qui feront le futur de Barbès, sont dépourvus, justement, de cette vision-là.
03:59– Alors, quel est le temps du présent de Barbès ? C'est 1800…
04:02– Alors, le prophète du passé a trois dates,
04:05la première c'est qu'il publie la première version en 1851,
04:08donc juste après la révolution de 1848,
04:12il aura une édition, il augmentera son édition en 1860,
04:15et puis une troisième fois en 1879, où là vraiment il clôt le chapitre,
04:21et donc on est sur la deuxième moitié du 19ème,
04:24et il voit, il assiste à l'émergence du socialisme,
04:27il assiste aussi à l'émergence de l'ultra-capitalisme,
04:30qui le fait par contre-coup aller chercher Blanc de Saint-Bonnet
04:34pour avoir enfin une vision économique un peu plus catholique,
04:38c'est le moment où sont en train de germer les arbres
04:41sous lesquels nous sommes, enfin à l'ombre desquels nous sommes aujourd'hui.
04:44– À l'ombre, vous êtes une ombre bénéfique, c'est…
04:47– Ah non, c'est là où il nous cache le soleil.
04:50– Oui, j'aime bien cette vision-là, oui.
04:52Ce qui est de très intéressant, c'est qu'il est extrêmement clair
05:01dans son énoncé, il a vu l'échec de la restauration,
05:05et il est très accusatoire pour les rois de France.
05:10– Pour les rois de France, oui.
05:12– Et les royalistes.
05:13– Et les royalistes.
05:14– Pourquoi ?
05:15– Il pense que, alors la charte pour lui c'est l'abomination de la désolation,
05:20il pense qu'en fait les rois n'ont plus osé être rois.
05:23– Voilà.
05:24– Les rois se sont cachés d'être rois, les rois ne voulaient plus assumer
05:26le fait qu'ils tenaient leur pouvoir de Dieu et surtout pas du peuple.
05:31Donc il a des mots assez durs sur Louis XVI, il a des mots assez durs sur Louis-Philippe,
05:36il est plus bienveillant envers Charles X.
05:43– Oui.
05:44– Donc les derniers rois, vraiment il les assomme,
05:47et il assomme aussi certains prophètes du passé, Chateaubriand par exemple.
05:51– Oui, on va y venir, ce que je trouve étonnant c'est l'idée
05:59que la monarchie constitutionnelle est nuisible, c'est ça qui est amusant.
06:04– Mais c'est un radical.
06:05– C'est un radical, oui.
06:06– C'est un radical, pour lui l'idée que…
06:08– Cela dit, on le voit bien aujourd'hui, les monarchies constitutionnelles ne servent à rien.
06:13– Oui, et puis elles s'auto-sabotent, on a un roi d'Angleterre qui a dit
06:17il n'y a pas très longtemps que pour supprimer les pères héréditaires,
06:20qu'en fait l'hérédité n'avait pas de sens.
06:22– Oui, oui absolument, et peut-être qu'il a des raisons de penser
06:25que son hérédité n'est pas juste.
06:27– Mais non, il vient de commencer le Ramadan avec les musulmans,
06:31là il y a quand même… – Oui c'est vrai.
06:33– On ne voit pas un roi de France commencer le Ramadan, c'est tout à fait étonnant.
06:40Alors, quatre portraits pour ces prophètes du passé,
06:45Xavier de Maistre, Bonnard, Chateaubriand et Lamenay.
06:53Alors, le peloton de tête, c'est des gens que notre Barbet de Réveilly aime beaucoup,
07:01admire parfaitement, les deux autres, ils ont fauté parce que…
07:08ils ont eu un début en force, clair, net, et puis après ils ont péché en déraillant,
07:16disons-le clairement, en déraillant.
07:19On n'a pas parlé de ce qui s'est passé dans la vie de Barbet,
07:23parce que Barbet est ce dandy fantastique qui brûle la vie par tous les bouts,
07:30qui est un grand noceur, et tout d'un coup, que se passe-t-il ?
07:35Son petit frère devient prêtre, et là, je crois que la vérité divine
07:42lui tombe sur la tête, et il comprend mille choses,
07:46c'est assez beau comme histoire.
07:47– Oui, oui, il s'auto-appelait le roi des ribots
07:50pendant sa première période parisienne.
07:53– Le roi des ribots. – Des ribots, voilà.
07:55Il n'a eu de cesse plus tard de décrire à quel point il était tombé bas
07:59et à quel point il avait été un jouisseur.
08:02Et après, quand son frère devient prêtre,
08:08il entame un parcours qui est assez rapide, qui le mène à la conversion.
08:12Il va s'isoler quand même à la campagne, pendant de longs mois,
08:15pour quitter Paris, vraiment se couper de toute son ancienne vie,
08:19et il est revenu converti de ce séjour à la campagne.
08:22Et à partir de là, il devient très sérieux,
08:26très sérieux sur ce qu'est la vérité, comment se conformer à la vérité,
08:30et il n'y a pas tant de solution, on est dans la vérité ou pas.
08:33Il n'y a pas de zone grise, il a la chance d'être très clair,
08:37comme vous l'avez dit, limpide, il a une vision qui est extraordinairement limpide,
08:41et donc il n'a pas de mots assez chaleureux pour Bonald et Joseph de Maistre.
08:49En revanche, vous avez raison, Chateaubriand et Lamnes se font éreinter sur la moitié du...
08:54– Éreinter, c'est très intéressant, on parle d'eux après,
08:58mais Xavier de Maistre alors, l'homme de foi,
09:02l'homme de foi qui prend les faits historiques devant lesquels
09:09il n'a pas tant l'effet palpable comme l'effet physique,
09:14et la philosophie n'a plus qu'à baisser ses yeux de taupe
09:17et son orgueil encore plus aveugle que ses yeux.
09:20C'est quand même fantastique, la philosophie aveugle,
09:23c'est sa grande ennemie la philosophie.
09:25– Oui, oui, il n'aime pas, c'est l'autre versant, pour lui il y a deux philosophies,
09:30celle qui descend d'eux et celle qui essaie d'y remonter,
09:32et forcément elle ne marche pas.
09:34Donc pour Joseph de Maistre, il ne cesse de dire que c'est le prophète de l'aperçu,
09:39pour lui Joseph de Maistre est un visionnaire,
09:42il voit les choses et il décrit ensuite ce qu'il voit.
09:46– Oui, un peu comme Thènes. – Un peu comme Thènes, absolument.
09:49– Thènes qui n'a rien d'un grand chrétien,
09:55qui va faire ce livre sur la révolution,
09:59et qui en bon scribe va noter tous les faits
10:03et puis la vérité va lui éclater au nez
10:06et il va le devenir le pire contempteur de la révolution.
10:11– Oui, et donc c'est assez amusant de lire Barbès
10:15qui éreinte l'amené d'un côté qui est un abbé,
10:18pour ensuite dire beaucoup de biens de Thènes
10:20qui n'a rien à voir avec le catholicisme.
10:23Mais pour revenir à Joseph de Maistre,
10:26il y a cette vision chez Barbès qu'il y a deux types d'intelligence,
10:31l'intelligence instinctive, celle de l'instinct,
10:33et celle du rationnel et vraiment imprivilégié d'instinct.
10:36– Oui, ce qui atténue la notion du prophète,
10:40parce que chez des rationalistes comme aujourd'hui,
10:43le mot prophète c'est quand même…
10:46on est quand même très éloigné de l'Ancien Testament
10:49où on révérait les prophètes,
10:50mais aujourd'hui, prophète est très mal considéré.
10:53Mais en fait ces gens sont des gens très précis.
10:55– Ah oui, ils sont très précis, le fait d'être instinctif
10:58ne veut pas dire que ce qu'on dit n'est pas logique.
11:00D'ailleurs il règle son compte à André Comte justement,
11:03il se déplace sur le positivisme.
11:06Ils sont traités de jeux d'enfants, qui ne sont pas sérieux,
11:11ça n'a aucune consistance.
11:14Il règle son compte à justement ce rationalo-rationalisme.
11:19– Alors, Bonald, lui, est un antidémocrate primaire,
11:23secondaire et tertiaire.
11:25Il y a des mots sur la démocratie, fabuleux, mais fabuleux.
11:29La démocratie qui… je vais le retrouver, je vais le retrouver.
11:36Bonald, lui, pose les fondements de la société,
11:42de toute société respectable et respectée qui fonctionne.
11:46C'est la famille, la propriété, le sol sur lequel on est né.
11:52Et la loi sur le droit des naisses lui semble une absurdité totale.
12:01– Ah oui, oui, c'est ce qui se passe sur le royaume,
12:05les grandes propriétés sont scindées entre les enfants.
12:07– Mais s'il y avait que les grandes propriétés,
12:08mais il y a les grands groupes industriels.
12:09– Les grands groupes industriels. – C'est la même chose.
12:11– Et c'est ce dont la France a souvert sous les Mérovingiens,
12:14avec le fait que régulièrement, chaque fois qu'un roi mourait,
12:17le royaume était scindé entre tous les enfants.
12:20– Tout était éclaté.
12:21– Et qu'en plus de ça, ils se battaient.
12:23Ils se battaient les uns les autres, ils se tuaient les uns les autres
12:27et ils tuaient la descendance, on le voit avec la descendance de Charlemagne,
12:31ils tuaient les enfants, c'était horrible.
12:34Alors il a des propos très clairs,
12:37la révolution a commencé par la déclaration des droits de l'homme
12:42et elle ne sera finie que par la déclaration des droits de Dieu.
12:46Donc on continue, on est en pleine révolution finalement.
12:49– Oui, alors il y a un passage qui est assez amusant,
12:51où Barbet discute, est-ce que vraiment Bonald doit rester au top de ma liste,
12:56parce que Bonald, il aime bien finalement la monarchie constitutionnelle anglaise.
13:01Donc est-ce qu'il doit rester dans ma liste ?
13:03Et il pardonne à Bonald parce que Bonald dit,
13:07non mais j'accepte la monarchie constitutionnelle anglaise
13:09parce que d'abord il y a très peu de choses écrites
13:11et elle fonctionne, cette démocratie, elle fonctionne de façon monarchique.
13:15Donc on l'accepte, mais c'est limite.
13:17– Heureusement qu'il n'a pas vécu jusqu'au XXème siècle.
13:20Mais le mépris du passé que nous vivons aujourd'hui,
13:28prenons seulement l'exemple du mépris du Moyen-Âge,
13:31l'obscur Moyen-Âge, qui est une bêtise absolue du XXème siècle
13:36contre lequel une femme s'est élevée, la grande Régine Pernoud.
13:40– Entre autres. – Entre autres.
13:42Et ça, le mépris outrageant du passé, c'est quelque chose qui le sidère
13:51puisque le passé nous a fabriqués.
13:53– Oui, oui, oui.
13:55– Et alors, donc deux personnages qui écrivent très bien en plus,
14:02on les lit avec beaucoup de plaisir,
14:06arrive donc Chateaubriand et son Génie du christianisme.
14:13Et c'est vrai que le Génie du christianisme, c'est fantastique,
14:17je ne l'avais pas lu, parce qu'on nous lit toujours quand on est en classe,
14:23quand on était en classe, dans ces petits extraits de Lagarde et Michard
14:28qui ne signifiaient rien.
14:30Moi j'étais passée complètement à côté du Génie du christianisme.
14:32Puis un jour, on m'a envoyé une version abrégée du christianisme,
14:37probablement pour les enfants.
14:39Eh bien, ça m'a été très utile parce que j'ai dévoré le texte
14:42et j'ai compris ce que voulait dire Chateaubriand.
14:45– Bien sûr.
14:47– Et c'est quand même, c'est très très symptomatique
14:51que ce soit un texte qui ne soit pas éduqué et donné.
14:54– Et oui, et Barbet n'a que des mots longeurs pour Chateaubriand,
15:00juste pour le Génie du christianisme.
15:02– Oui.
15:03– Ensuite, il passe le reste de son portrait à le mettre plus bac terre.
15:06– Oui.
15:07– Mais il faut imaginer ce qu'est à l'époque cette bombe
15:11qu'est le Génie du christianisme quand il sort juste après les grands massacres
15:14de la révolution, l'Europe à feu et à sang partout,
15:19où Dieu est jeté le plus bac terre, ses prêtres jetés dans les fleuves, etc.
15:25Il lui sort ça, et ça a un succès gigantesque.
15:28– Oui, il a une expression, Barbet a une expression extraordinaire,
15:31vérité que Chateaubriand proclame à la face d'une société
15:37fatiguée de guillotine et de néant, c'est fantastique,
15:41l'association des mots guillotine et néant, c'est très très fort.
15:47Et si vous voulez, sa description des sociétés est très très amusante,
15:57les sociétés comme les filles séduites payent avec des larmes
16:04et quelquefois avec du sang leurs erreurs.
16:08C'est quand même mal, les sociétés comme des filles séduites.
16:11Et c'est vrai que la société a été séduite par la révolution,
16:14après par la monarchie constitutionnelle, mais tout ça s'est terminé tragiquement.
16:19– Séduite et violée quand même, une partie de la société était contre.
16:22– Oui, violée absolument.
16:25Mais je trouve que cette réapparition de Chateaubriand
16:34nous fait du bien, absolument.
16:36Mais alors qu'est-ce qui s'est passé avec Chateaubriand ?
16:38Il a voulu être à la mode.
16:40– Il a voulu, au bout d'un moment, il a fini par,
16:42en fait c'est ce que lui reproche Barbet,
16:44Barbet lui reproche d'avoir eu un égo qui a grossi considérablement,
16:48il lui reproche d'avoir voulu prendre les rênes opérationnels,
16:50se mêler du pouvoir. – Oui, être élu.
16:53– Être élu, il a voulu être aimé par les masses,
16:57et donc il a commencé à affadir son discours,
17:01en enlever des morceaux, à accepter des choses
17:03pour lesquelles Barbet est impossible, les élections, etc.
17:08Et donc Barbet les reinte, Chateaubriand a déraillé.
17:13Est-il encore royaliste ? On ne sait pas trop.
17:16Et donc il a des phrases sur…
17:20Oui, il lui reproche notamment d'avoir été l'inventeur
17:24de cette phrase atroce qui est de ceux qui sont plus royalistes que le roi.
17:28C'est Chateaubriand qui a accusé à un moment
17:30les royalistes d'être plus royalistes que le roi.
17:32Et ça Barbet, vraiment ça, il lui reproche tout au long du portrait
17:35d'avoir osé dire une chose pareille.
17:37À un moment où les rois n'osent plus être rois,
17:39les royalistes sont plus royalistes que le roi.
17:41– D'ailleurs c'est une injure qui marche toujours.
17:43C'est une injure qui marche toujours alors qu'en fait c'était une…
17:47Il faut toujours être plus royaliste que le roi,
17:50ne serait-ce que pour arriver à son but.
17:52– Il y a ce général Vendée qui disait, si je recule, tu es mort.
17:56– Absolument, absolument.
17:58Et alors, cette inclination vers le libéralisme,
18:03c'est le péché absolu pour Barbet.
18:05– Oui, cette inclination qui fait que l'ordre est renversé
18:11et que des considérations uniquement de profits ou de surprofits économiques
18:16peuvent passer au-dessus de la bienveillance,
18:19de la destination universelle des biens, etc.
18:22Et donc pour Barbet, c'est pour ça qu'il va chercher un moment Blanc de Sabonnet.
18:27Et pour Barbet, ce n'est pas possible.
18:29C'est une lâcheté, c'est une trahison, c'est inique.
18:32Enfin après c'est avec sa langue qui est bien plus belle que la mienne.
18:35– Qui est très très forte.
18:36Et puis en plus de ça, le but non avoué du libéralisme,
18:38c'est l'exclusion du capitalisme.
18:41– C'est sa destruction.
18:43– L'exclusion du paysage et donc à terme, évidemment, la destruction.
18:47Ça c'est quand même passionnant parce que deux siècles après, on y est.
18:50– Oui, il écrit en toutes lettres que le capitalisme,
18:52à un moment, va avoir besoin de détruire les corporations,
18:55ce qui était le cas, les familles.
18:57– Les familles, pour cause de hiérarchie.
18:59– Pour cause de hiérarchie et pour cause de protection.
19:02Et à la fin, jusqu'au rapport entre les individus.
19:05Barbet a vu tout ça arriver. – Il a vu tout ça.
19:07– Avec un siècle d'avance.
19:09La fin de la propriété privée, etc.
19:14– On ne crée pas trois pouvoirs qui vont se détruire les uns les autres.
19:18On arrive à une équation d'anarchie.
19:21C'est fabuleux, on y est encore. – Et il dit ça en 15 mots.
19:27– Oui, en 15 mots. – En 15 mots, enfin c'est…
19:31Barbet, il prenait une torche en fait, on a l'impression que c'est Barbet,
19:35il enflamme.
19:38– Et il termine ce portrait de Chateaubriand,
19:44il est devenu un homme de son temps, hélas, dit Barbet.
19:50Parce qu'il y a toujours cette idée qu'on doit être en dehors de son temps,
19:56on ne doit pas épouser son temps.
19:59Épouser son temps, c'est le péché parfait.
20:01– Le juste milieu pour Barbet, c'est l'ennui absolu.
20:02– Non, pas le péché, la faute parfaite, l'idiotie parfaite.
20:06– Quelque chose comme le « en même temps » pour Barbet, c'est impensable.
20:13Bon, j'extrapole un peu, mais pour un Barbet, un Chateaubriand,
20:18il est peut-être quelque part, il est peut-être macronien, quoi.
20:21Il est dans le juste milieu, en même temps, faire les concessions, etc.
20:24– Alors, notre Lamenay, qui était quand même prêtre,
20:28une figure hiératique, en noir, un visage assez fin,
20:32Lamenay a très bien commencé, tout de même.
20:35– Ah oui, oui, oui.
20:37– Très bien commencé, je cite cette phrase,
20:40« À chaque jour qui passe, les prophètes de l'avenir,
20:43les rêveurs qui insultent l'histoire, reçoivent de terribles démentis,
20:48soit de la nature humaine qui répond par son train ordinaire,
20:53comme le train des globes de l'espace, soit de l'expérience et des faits.
20:58» Ça, c'est quand même fabuleux.
21:00Les prophètes de l'avenir reçoivent toujours leur prophétie dans la tête,
21:04en retour.
21:07Et alors, ça c'est drôle aussi, « Démocrate isolé,
21:13momie sans arôme et sans bandelette, d'un républicanisme pourri
21:18qui croule en déliquescence et flu de toute part autour de nous,
21:23il n'est dangereux qu'à la manière de l'infection. »
21:26C'est quand même rude.
21:28Et alors, qu'est-ce qui se passe ?
21:30Eh bien Barbet, l'amené va en effet rentrer dans le monde.
21:35– Il devient député.
21:36– Il devient député, et alors là, c'est la fin de tout.
21:40– Et là, il rentre dans le juste milieu, les concessions,
21:43et parfois il va contre des choses qu'il a dites.
21:45Il écrit quand même, donc il fait son essai sur la différence entre les régions,
21:49entre le 1717 et le 1823 en plusieurs vols, en plusieurs tomes.
21:54Et il explique quand même que la guerre contre…
21:57enfin que les démocrates ont commencé par mener une guerre contre l'Église,
22:01et que maintenant que l'Église est vaincue,
22:03ils livrent la guerre à la société, puisque la société finalement,
22:05celle qui existe, a été créée par l'Église.
22:07Et donc ils détruisent petit à petit la société l'une après l'autre.
22:10Et l'amené décrit en quoi, morceau par morceau de la société,
22:13ils sont soit déjà attaqués, soit vont l'être.
22:16Ça pour Barbet, c'est une prophétie, c'est ce qu'ils ont vu aujourd'hui.
22:19Mais l'amené ensuite, une fois député, vote des lois,
22:24soutient, vote parfois avec des démocrates, ce qui est impensable.
22:28Non mais là aussi, la caricature de notre temps.
22:31L'amené, qui était quand même prêtre, a dit,
22:35a défini quand même ce que c'est que le progrès.
22:38Et ça c'est très très important.
22:40On n'a pas progressé parce qu'on a vieilli,
22:42on a progressé parce qu'on a élevé son sens moral.
22:47Donc le progrès défend chacun d'entre nous.
22:50Et ce n'est pas un gouvernement politique qui va nous l'imposer.
22:54C'est ça, c'est fantastique. C'est tellement vrai en plus.
22:57Oui, l'amené fait partie des gens qui considèrent
23:00que la forme d'un État dépend de l'État, de la société.
23:06Si la société est morale, si la société est catholique,
23:09alors mécaniquement, on va faire un État socialiste.
23:11Pardon, l'inverse, catholique.
23:13Si en revanche, la morale est détruite, l'Église est détruite, etc.,
23:17on va se retrouver avec un État pourri.
23:20CQFD.
23:22Alors après, vous avez mis des articles
23:26que Barbès a consacrés à certains personnages qu'il aimait.
23:32Oui.
23:34Et là aussi, c'est très très intéressant.
23:36Ce sont des articles puissants.
23:39Eh bien, il y a un article sur Rivarol que Burke appelait le tacite.
23:45Il l'apprécie assez. C'est incroyable ça.
23:48Oui, et Barbès fait part de l'admiration qu'il a.
23:53Il est le seul auteur pour lequel il manifeste cette admiration.
23:58Rivarol était un causeur de génie
24:00qui a ébloui des milliers de gens au cours de sa vie.
24:03Et Barbès regrette qu'il n'ait jamais utilisé ce génie
24:08pour en sortir un livre, enfin en tout cas une œuvre,
24:12à la mesure du génie de Rivarol.
24:13Dise-t-il cette nostalgie et ce regret
24:17tout au long du portrait ?
24:19Ces phrases Rivarol à propos des journées du 5 et 6 octobre,
24:25quand la royauté s'arrache d'elle-même
24:29aux injonctions d'une canaille devenue la reine de France.
24:33Cette canaille, c'est l'opinion publique.
24:35C'est vrai que c'est quand même...
24:37Et puis bon, les réflexions de Rivarol sur le nombre.
24:40La loi du nombre qui évidemment empêche
24:45les meilleurs et les plus intelligents
24:48et les plus efficaces et les plus nobles et les plus purs.
24:52Et puis surtout qu'il n'a rien à voir avec la vérité.
24:54Et qu'il n'a rien à voir avec la vérité.
24:56En quoi est-ce qu'une addition de voix produit une vérité ?
25:00Alors on a parlé de Thènes avec les origines de la France contemporaine.
25:07Ce sont des témoignages irrécusables, vivants et saignants de toute la France.
25:14Pas seulement de Paris, pas seulement de Paris.
25:16Et ça c'est très important.
25:19Et alors ce constat, le premier mobile de la Révolution c'est le vol.
25:25Là, ça remet les choses à la juste hauteur.
25:31C'est qu'en fait, c'est vrai que la Révolution c'est une histoire de vol.
25:35On ne le dit jamais assez.
25:37Vol des propriétés nobilières, vol des propriétés de l'Église,
25:41vol de… assez faramineux et qui dure encore aujourd'hui.
25:48– C'est toujours un sujet d'argent quelque part.
25:50– Et vous savez que, petite parenthèse,
25:53à Metz il y a failli avoir un concert totalement inapproprié,
25:58dirons-nous très doucement, de musique qui n'avait rien à voir
26:02avec l'adoration de Dieu, ni avec la beauté.
26:08Et comme la beauté est un pas vers Dieu,
26:10c'est évidemment pourquoi ils éliminent la beauté.
26:14Et il y a une élue locale absolument furieuse de cette interdiction,
26:19qui est tout de même arrivée, elle dit,
26:21mais enfin ces gens-là sont extraordinaires,
26:24ils estiment que la cathédrale est leur propriété.
26:30Mais oui, les églises et les cathédrales appartiennent aux catholiques,
26:35de même que les mosquées appartiennent aux musulmans,
26:38de même que les temples appartiennent aux protestants
26:44et la synagogue aux juifs.
26:47C'est quand même tout à fait étonnant,
26:49on n'en viendrait pas à douter de la propriété
26:52de tous ces lieux de culte aux autres religions,
26:55mais les catholiques, eux, n'ont pas le droit d'avoir
26:57ce sentiment d'appartenance à leur cathédrale.
26:59– Vous voyez, parce que techniquement parlant…
27:01– Ah oui, oui, non mais la technique…
27:03– Juridiquement parlant, ils n'appartiennent pas aux catholiques,
27:05ça appartient à l'État.
27:06– On est bien d'accord, mais ces lois proviennent de ce vol.
27:09Donc si vous voulez, on s'assoit sur ces lois.
27:12Ce n'est pas possible d'imaginer que la cathédrale appartient
27:17à la république qui, par ailleurs, crache tous les matins sur l'église
27:21et qui expulse les congrégations et qui, encore une fois aujourd'hui,
27:26bataille tous les matins pour supprimer les écoles catholiques
27:32et maintenant les écoles hors contrat qu'ils ont juré de fermer.
27:37Donc c'est très amusant parce que ce n'est pas un délire
27:42de gens attachés au passé qui dit ça, c'est l'élu local encore aujourd'hui.
27:48Elle nous joue la révolution tous les matins.
27:51C'est quand même épuisant.
27:53Alors, et puis il y a une allusion à Donoso Cortes.
27:58– En plus qu'une allusion, il fait son portrait.
28:00– Et c'est fantastique ça aussi parce que Donoso Cortes,
28:03c'est quelqu'un de très important.
28:05– C'est pour ça qu'on s'est dit qu'on pouvait le rajouter.
28:07Alors ces huit portraits qu'on rajoute ne sont pas dans l'édition originale de Barret.
28:10– Non, c'est à la suite.
28:11– Ils ont été écrits, parce qu'il était journaliste aussi.
28:14Donc ils ont été publiés dans des journaux et nous avons recensé, récupéré.
28:18Puis ceux qui faisaient du sens, soit parce que la cravache de Barbet
28:25était le portrait d'Auguste Comte et il faut les reprendre dans sa vie.
28:29Parce que vraiment, il leur met une place très, très basse.
28:33Et en expliquant d'ailleurs en quoi ce monsieur est devenu,
28:36l'humanisme d'Auguste Comte et le positivisme d'Auguste Comte
28:41sont devenus la colonne vertébrale des valeurs de la République.
28:44Mais de l'autre côté, il a dit beaucoup de bien à Donoso Cortes.
28:48Il a dit beaucoup de bien à Pascal.
28:50Donc c'est des portraits qui s'inscrivent.
28:52On trouvait que ça s'inscrivait bien dans les premiers prophètes du passé.
28:58– Ce qu'il y a de très joli, encore une fois, c'est cette phrase,
29:01Dieu a gardé l'avenir en donnant le présent à l'homme.
29:05C'est quand même une idée, une image extraordinaire.
29:11C'est vrai que personne ne peut prévoir l'avenir.
29:15– Mais il n'est pas exclu que tous ces gens aient été inspirés
29:19comme l'étaient les prophètes. – Oui, oui.
29:22– Ils écrivent tellement bien. – Absolument.
29:24Et la mise en valeur du pouvoir des Jacobins.
29:27Alors les Jacobins, on les connaît pendant la période révolutionnaire.
29:31Le problème, c'est qu'ils sont toujours là.
29:34Et cette France contemporaine, et ça c'est dans Thènes,
29:39cette France contemporaine, au sujet de Thènes,
29:43c'est pas le texte de Thènes, cette France contemporaine
29:46qui ne croit plus à rien de ce qu'elle croyait autrefois,
29:49Dieu en a puni en la faisant croire bêtement aux politiques,
29:53au gouvernement des majorités, à ce gouvernement par les masses.
29:58Cette immense menterie qui aboutit toujours au gouvernement oppresseur
30:04des minorités sédicieuses. On y est là. – Oui, complètement.
30:09– On y est. – Et Thènes, il n'arrive pas du tout de ce bord-là.
30:11Et il a été, ses alliés naturels n'ont pas compris pourquoi il a été menacé.
30:17C'est quelqu'un qui a pris des coups pour écrire ce qu'il disait,
30:21qui était l'inverse de ce d'où il venait.
30:24– Thènes a prouvé que partout où il y avait des révolutionnaires,
30:27il y avait des Jacobins, c'est-à-dire des minorités triomphantes,
30:31qui, sortis du nombre, répudient et oppriment le nombre,
30:35fient des majorités qui tuent leurs maires.
30:40Et au fait, c'est si bien là une loi de la lâche nature humaine
30:45que la majorité se laisse toujours tuer, même sans se défendre,
30:49et qu'elle tend toujours passivement la gorge au bourreau qui va l'égorger.
30:53Elle devient un veau d'abattoir. Nous ne parlerons pas du grand Charles.
30:58En tout cas, merci beaucoup d'avoir publié ce texte,
31:02Les prophètes du Paris passé, c'est exactement ce dont nous avions besoin.
31:07Je trouve qu'il y a des livres qui répondent à un besoin.
31:10– Ah, celui-là, oui.
31:12– Vous êtes allé le chercher, et c'est tout de même un baume
31:16sur nos esprits un peu traumatisés ces derniers temps.
31:20– Ce sera un beau livre, parce qu'on le fait imprimer dans la Nièvre,
31:24dans une Scorche, une imprimerie, la Bellery, qui appartient à ses ouvriers.
31:28– Ah oui ? – Et on choisit un beau papier.
31:31C'est un bel ouvrage, on est attaché à cette qualité du livre.
31:35– Vous le trouvez sur Internet, pour l'instant sous le titre
31:40La Onzième Heure, qui est la maison d'édition. – C'est ça.
31:43– Donc vous pouvez l'acheter, et puis après vous le trouverez sur Amazon et partout.
31:48– Non, pas sur Amazon. – Pas sur Amazon.
31:50– Amazon, non. – Mais directement sur La Onzième Heure.
31:53– Directement sur La Onzième Heure, ensuite dans beaucoup de librairies.
31:56– D'accord, oui, bien sûr. – La Procure, la FNAC, etc.
31:59Mais non, Amazon n'appartient pas à nos valeurs.
32:03– Bon, bravo. Je voudrais terminer cette émission,
32:08Sylvain de Molenheim, vous ne m'en voudrez pas,
32:12parce que je trouve que ça complétait parfaitement.
32:15C'est un livre publié par Via Romana, ce petit format à l'italienne,
32:21Au lieu de chrétienté, de la Terre Sainte aux confins de l'Occident.
32:27Et c'est une liste de présentations, de petits tableaux,
32:35des grandes églises et des grandes cathédrales de notre monde chrétien.
32:39Et nous allons de Jérusalem à Annecy-le-Vieux, de Rome à Pontigny.
32:46Alors, il y a des dessins extra…
32:51Alors, le texte est magnifique parce que nous avons, bien sûr,
32:54des explications de l'origine de ces églises,
33:00des prières au sein de ces églises et des très, très jolis dessins.
33:10Alors, ces textes ont été faits par De Fenente Genolini.
33:15C'est un nom, évidemment, d'emprunt.
33:17C'est un homme discret, mais c'est un travail…
33:21Je peux dire que c'est un prêtre.
33:23C'est un texte absolument merveilleux.
33:28Et les dessins qui sont à côté sont très, très beaux.
33:35Et c'est une promenade à travers l'Europe absolument magique.
33:42J'avoue que c'est un très, très beau livre.
33:46Via Romana, vous le trouvez sur le site de Via Romana.
33:50Voilà, merci beaucoup Sylvain de Moulin à la Rime d'être venu ce matin.
33:59Dernière citation de Chateaubriand tout de même.
34:02Le monde futur appartient à la démocratie et c'est vrai.
34:05Elle est à présent déchaînée et déchaînée par ceux-là même
34:08qui devaient la contenir.
34:10C'est un beau portrait de notre triste temps.
34:15Merci beaucoup.
34:16– Merci Romana, à bientôt.
34:17– Mes amis de TV Liberté, à très vite.
34:29Chers amis de TV Liberté, nous continuons cette émission littéraire
34:33par une invitation au concert.
34:35Nous avons la joie de recevoir deux chanteurs,
34:41un chanteur et un chef d'orchestre, le Dr Michel Lefebvre
34:46de l'ensemble jubilaté de Versailles
34:49et le jeune ténor Cyril Seccaldi de l'ensemble séquentier.
34:55Et tous les deux vont nous parler de leur prochain concert,
35:00le Requiem de Gilles pour les funérailles de Rameau
35:07pour Michel Lefebvre et le Stabat Mater de Dvorak
35:11pour Cyril Seccaldi.
35:13Alors, nous vous écoutons, Michel Lefebvre,
35:18sur ce Requiem de Gilles qui n'a pas été entendu depuis très longtemps.
35:23– Alors, en tout cas, merci Anne de me recevoir,
35:26ça devient maintenant un rendez-vous annuel,
35:28je suis ravi de vous rencontrer une fois de plus
35:31et de pouvoir présenter aux téléspectateurs de TV Liberté
35:35un programme que j'espère original et que l'on essaie de faire habituellement.
35:40Donc là, nous donnons une version qui est peu connue
35:43du Requiem de Jean-Gilles, Gilles dit de Tarascon,
35:47qui est un compositeur contemporain de Canpra.
35:49– Oui, quel siècle ?
35:51– C'est le XVIIe siècle, XVIIe, XVIIIe, enfin c'est plutôt le XVIIIe d'ailleurs
35:56parce qu'il est né à la fin du XVIIe et il est mort très jeune,
35:59Jean-Gilles est mort à 36 ans.
36:01En fait, c'est un tube du XVIIIe siècle, le Requiem de Gilles
36:05a été donné à de très nombreuses reprises pendant tout le XVIIIe siècle.
36:10En particulier, l'histoire est très amusante
36:12parce que c'était deux familles du Parlement de Toulouse
36:17qui avaient commandé pour leur père un Requiem que Jean-Gilles a composé
36:21et quand les deux commanditaires se sont rendus compte que ça coûtait très cher,
36:25ils ont refusé de faire jouer cette œuvre et donc Gilles, un peu vexé,
36:29leur a dit, il a dit, c'est terminé ce Requiem,
36:32on ne le donnera que pour ma mort.
36:33Il est mort 2-3 ans après, à l'âge de 36 ans.
36:37Et ce Requiem a été donné pour le Duc de la Force,
36:40pour lui-même, Rameau, pour Maria Lexinska et pour Louis XV,
36:47après la mort de Louis XV, en particulier une fois
36:50à Notre-Dame de Versailles et à l'Oratoire à Paris.
36:53Mais en 1764, les deux co-directeurs du concert spirituel,
36:57François Franqueur et François Rebelle, ont, évidemment,
37:00c'était l'œuvre la plus réputée pour les polyrequiem à cette époque
37:04et ils ont réécrit ce Requiem pour les obsèques de Jean-Philippe Rameau en 1764.
37:10Et c'est donc cette version de 1764 qu'on va donner
37:13qui est, de fait, très très peu connue et qui est très originale.
37:16– Quel est votre air préféré Michel Lefebvre ?
37:19– Alors, le Requiem de Gilles, je le connais depuis que j'ai 17 ou 18 ans,
37:23ma femme le connaît depuis qu'elle a 2 ans,
37:25elle le chantait avant de savoir chanter Au clair de la lune.
37:26– Il faut dire que la famille Lefebvre, de père en fils,
37:33ce sont des musiciens et Michel Lefebvre a chanté très très jeune,
37:39ses frères aussi, son frère en tout cas.
37:43– Oui, mes deux frères ont chanté.
37:45– Et les enfants de Gabriel commencent une carrière de chanteur tout à fait magique.
37:54Moi, j'aime beaucoup leur voix, c'est Gaëlle Lefebvre et Blanche Gaëlle.
38:00– Qui chanteront à ce concert.
38:02– Qui chanteront à ce concert.
38:04Alors, donnons tout de suite les coordonnées, ils vont apparaître sur l'écran,
38:09mais c'est un concert qui sera donné le 24 mars à Versailles,
38:15à Saint-Jean d'Arc et le 27 mars à Paris, à l'église Saint-Roch.
38:23Alors, quel est votre…
38:25– Tout est beau, je réponds finalement à votre question,
38:28tout est beau dans ce Requiem, on ne saurait pas quoi dire de mieux.
38:33Le Kyrie, parce qu'il est très symptomatique du fait que cette œuvre a été réarrangée,
38:38donc le début de ce Kyrie est vraiment de la main de Jean-Gilles
38:42et on passe au milieu de ce Kyrie à une composition qui a été faite
38:49par François Fancœur et François Rebelle, qui reste dans la même tonalité
38:53et qui donne un caractère solennel et on sent déjà l'influence
38:58de la fin du 18ème siècle.
39:00Dans la version qu'on va donner, je rajoute quelques pièces de Rameau
39:04qui aussi permettent d'être dans le contexte de cette mort de Rameau
39:09et en fait c'est un hommage à Rameau et il y a un moment très particulier
39:13qui paraît presque, comme on dit maintenant de nos jours, lunaire,
39:16c'est l'élévation qui a été complètement rajoutée et qui est totalement mozartienne,
39:21c'est-à-dire qu'on passe d'une atmosphère complètement baignée de lumière
39:25et pleine de sérénité et d'espérance, dans le reste de ce Requiem,
39:30à une élévation où on passe de 1705, où ça a été écrit, à 1764,
39:36donc on passe en 5 minutes du début du 18ème à l'ère mozartienne
39:41et donc en 35 minutes on fait un panorama de l'évolution de la musique française
39:45et européenne, d'ailleurs, pendant le 18ème siècle, ce qui est très étonnant.
39:49Et après on retourne dans la composition de Gilles et on termine par un Requiem,
39:53une communion qui est absolument paisible, superbe et qui se termine par
39:56ethlox perpétoire, comme toutes les œuvres du 18ème où on est à peine morts,
40:01qu'on a déjà la lumière du ciel.
40:03– Oui, merci de nous rappeler que la lumière nous attend,
40:08la lumière divine nous attend, ça aussi c'est bien oublié.
40:12C'est un beau message, bravo.
40:14– Voilà, en fait on aime toujours, l'ensemble s'appelle Iubilate,
40:17il faut toujours que ça se finisse par de la joie et on finit par la joie du ciel.
40:21– Mais de toutes les façons, écouter un concert, c'est un don de la joie, toujours.
40:28– On espère, et donc l'autre œuvre c'est l'Inexito Israel de Mondonville,
40:32qui est, comme tous les motets de Mondonville, quelque chose de très très descriptif,
40:36extrêmement exubérant, on a le passage de la mer rouge,
40:40on a l'impression d'y être. – On est mouillé.
40:43– Non justement, on passe à sec.
40:47– Merci beaucoup Michel de nous avoir invités à ce concert,
40:52on peut acheter son billet sur place.
40:54– Oui, alors on peut acheter sur place et on peut aller sur www.billetweb.fr
40:59ou alors aller sur le site de l'ensemble Iubilate de Versailles,
41:02le site c'est ensemble-iubilate.versailles.fr.
41:07– Très bien.
41:08– Et là aussi on peut directement prendre les places.
41:10– Et les places sont à ?
41:11– Je ne sais pas, je ne suis pas très très fort en chiffres.
41:14– Vous êtes un pur esprit.
41:15– Ça doit être 21 euros je crois.
41:16– Bon, très bien, très très bien.
41:18Alors, tournons-nous vers vous Cyril Seccaldi,
41:21alors vous êtes un chanteur, ça y est, un chanteur professionnel.
41:26– Exactement.
41:27– Vous êtes très jeune, je sais bien que la valeur n'attend pas le nombre des années,
41:30mais vous êtes un ténor et vous poursuivez des études de droit.
41:34– Exactement.
41:35– Et comment vous êtes tombé dans la musique ?
41:37– Alors, j'ai commencé la musique vers 9-10 ans
41:41avec la maîtrise des Petits Chanteurs de Saint-Dominique,
41:43dirigée par Mathieu Bonin qui est aussi le directeur artistique et chef d'orchestre.
41:48– L'école Saint-Dominique du PAC ?
41:50– Exactement, ça fait bientôt 10 ans que je chante avec lui.
41:54Et j'ai récemment passé une audition semi-professionnelle en janvier
41:59et j'ai été pris, donc c'est merveilleux.
42:02– Bien.
42:03– J'ai 19 ans donc c'est…
42:04– C'est bien.
42:05– Un grand enjeu et une grande avancée dans mon développement.
42:09– Un grand pas en avant.
42:10– Exactement.
42:11– Et alors qu'est-ce que vous aimez dans ce Stabat Mater ?
42:15– Alors moi j'aime beaucoup, déjà l'œuvre dans son ensemble
42:18parce que c'est une œuvre qui est magnifique, qui est très poignante.
42:22Voilà, c'est la mère de douleur qui est au pied de la croix.
42:27Donc c'est quelque chose de très évocateur, surtout en cette période de carême.
42:31Et moi ce qui me plaît particulièrement,
42:34vous allez me dire que c'est un point de vue de ténor,
42:37mais j'aime beaucoup le Fac Mévéré, qui est le mouvement numéro 6.
42:40– D'accord.
42:41– Où un ténor solo fait une prière à la Vierge et à Dieu
42:48en demandant de pardonner les péchés des hommes
42:51qui ont conduit à la mort de son fils.
42:53Et j'aime beaucoup aussi le premier mouvement
42:56qui est une célébrissime ouverture d'orchestre
43:00avec ensuite un peu les ténèbres de la mort de Jésus,
43:06les ténors qui rentrent et qui sont solos pendant plusieurs mesures.
43:10– Et l'ensemble séquentier, quelle est son histoire ?
43:14– Alors l'ensemble séquentier est né en 2013,
43:17mais l'association est officialisée en 2014-2015,
43:20donc cette année nous fêtons nos 10 ans.
43:22Et c'est pour ça qu'à cette occasion,
43:24nous avons décidé de chanter ce Stabat Mater à la salle Graveau.
43:28Donc à l'origine, c'était un ensemble amateur
43:30créé par Mathieu Bonin dont je vous ai parlé,
43:32composé de 8 chanteurs et qui chantaient a cappella,
43:35sauf pour les productions qui nécessitaient un orchestre,
43:38et dans ce cas des musiciens extérieurs venaient se greffer sur le chœur.
43:42La première production a lieu en avril 2015,
43:45c'était le Requiem de Brahms.
43:47Moi à l'époque, évidemment je n'en faisais pas partie
43:50puisque j'avais 10 ans, mais voilà, et petit à petit,
43:55Mathieu Bonin qui était à l'époque au conservatoire de Bierwegen et Bruxelles,
44:01donc était en voie de professionnalisation,
44:03et l'objectif à plus ou moins long terme était
44:06de faire de cet ensemble un ensemble professionnel.
44:09– Très bien. – Voilà, donc il y a eu…
44:12– Et vous y êtes. – C'est ça, moi je suis rentré…
44:15– Vous y êtes, c'est un ensemble maintenant professionnel.
44:18– C'est ça, c'est un ensemble professionnel,
44:20mais a été créé l'année dernière ce qu'on appelle l'académie séquentier,
44:23qui est une sorte de chœur-école qui intègre des chanteurs amateurs
44:29de bon niveau à l'ensemble professionnel,
44:32dans le but de les faire progresser et un jour peut-être devenir professionnels.
44:36C'est comme ça que moi… – Vous y êtes, oui.
44:38– Je suis rentré à l'académie séquentier et au bout d'un an,
44:41je suis également au conservatoire de Versailles à côté,
44:43j'ai pu intégrer l'ensemble en tant que chanteur professionnel.
44:48– Ces deux projets me semblent absolument enchanteurs,
44:52donc je rappelle, à Paris, 3 avril, Salgavau à 20h30,
45:02c'est une très belle salle Salgavau, et le Requiem de Gilles,
45:10le 24 mars à Versailles, à Sainte-Jeanne d'Arc, à quelle heure ?
45:16– 20h45, et je peux rajouter que ces deux concert nous les donnons
45:20à l'occasion des dix ans de l'école Charles de Foucault à Versailles,
45:23et au bénéfice, et pour célébrer les dix ans de cette école
45:27qui a été créée à Versailles. – Donc c'est deux anniversaires.
45:31– Voilà, nous avons dix ans. – Je ne peux pas m'empêcher
45:35de souligner la grande richesse de ces écoles catholiques
45:40qui ont des éléments brillants et qui n'apprennent pas seulement à compter,
45:48ni à lire, ni à écrire, mais aussi à chanter.
45:52– D'ailleurs, si je peux juste rajouter quelque chose,
45:54plusieurs chanteurs de l'Académie Séquentier,
45:56donc chantants en tant qu'amateurs à Séquentier,
45:58viennent de l'école Saint-Dominique. – Viennent de l'école Saint-Dominique.
46:02Voilà, le chant est absolument partie prenante de l'éducation.
46:07Merci à tous les deux de nous le rappeler,
46:10et nous serons présents, bien évidemment, à ces deux concerts,
46:14et j'espère beaucoup de téléspectateurs aussi.
46:16Merci beaucoup d'être venus jusqu'à nous. – Merci beaucoup, merci Anne.
46:20– Chers amis de TV Liberté, nous filons au cinéma avec Renaud de Bourleuf.
46:34Bonjour Renaud. – Bonjour Anne.
46:36– Alors vous êtes allé à toutes les cérémonies, César, Oscars,
46:40vous avez été comblé je crois. – Je n'y suis pas allé en personne.
46:43Bon, les Césars à Paris, c'était pas loin,
46:45mais les Oscars à Los Angeles, c'était un peu plus compliqué, voilà.
46:49Alors, la cérémonie de César, la cinquantième cérémonie de César,
46:53c'est un bel anniversaire, sauf que là nous ne sommes plus
46:56autant de Jean Gabin et de Romy Schneider, évidemment.
46:59Autrefois, la première cérémonie en 76, c'était Jean Gabin
47:02qui remettait le César, la meilleure actrice, à Romy Schneider.
47:05Autrefois, c'était le prestige du cinéma français qui était récompensé.
47:08Aujourd'hui, on ne sait plus trop ce que c'est,
47:10parce que comme vous l'avez constaté, lors de cette cérémonie
47:13le vendredi 28 février… – Je n'ai pas regardé,
47:15je me suis évitée, c'est le problème.
47:17– Eh bien, les films que les Français ont aimés ont été tout simplement snobés
47:22par l'élite culturelle de l'Académie des Césars.
47:25Donc, je parle d'un petit truc en plus, aucune récompense.
47:28En fanfare, aucune récompense.
47:31Et le Comte de Montecristo, deux récompenses seulement,
47:36meilleur décor et meilleur costume.
47:38Et j'en oublie un, Monsieur Aznavour, aucune récompense non plus.
47:42Le Comte de Montecristo, notons-le, a obtenu quand même le César des lycéens,
47:49qui est une catégorie à part, elle n'existe que depuis 2019.
47:53Cette catégorie, elle est donnée plus par, justement,
47:55des personnes qui ne sont pas dans le milieu, on va dire, du 7ème arc,
47:59qui ne sont pas dans le milieu culturel intérieur.
48:02– C'est un bon signe de réaction de la jeunesse.
48:04– Exactement, la jeunesse a apprécié cette œuvre,
48:07inspirée d'un des grands chefs-d'œuvre de la littérature.
48:09– Il faut dire que c'était un beau livre, c'était un beau film.
48:12– Voilà, c'est un film qui est librement inspiré d'un grand classique.
48:16Bon, l'adaptation, elle est ce qu'elle est, mais le film est réussi, voilà.
48:19– Oui, oui, enfin, c'était très bien cerné, c'était très bien construit.
48:23– C'était bien joué, il y avait de beaux décors, beau costume.
48:25– Il y avait un message, il y avait…
48:27– Ah, le message, c'est pas le même que celui du roman, c'est dommage.
48:30– Il y a une partie du message du roman qui l'y est tout de même, cher Renaud.
48:34Ne soyez pas trop, trop exigeants, parce que là,
48:37vous allez vivre mal ces prochaines années.
48:39– Oui.
48:40– Il faut prendre le bonheur quand il…
48:42– Ça faisait partie de ce qu'on avait de mieux dans les dernières années, c'est vrai.
48:46– Mais les personnages étaient beaux et voilà.
48:50– Les personnages féminins, c'est vrai qu'ils avaient pris effectivement de belles actrices.
48:53– Très beaux.
48:54– Ou de beaux acteurs, c'est selon les points de vue, évidemment.
48:56– Moi aussi, mais j'aime bien Pierre Nineche, je trouve qu'il était très bon.
48:59Non, mais pour moi, le cinéma, si vous voulez,
49:02c'est quand même de belles images et de beaux acteurs.
49:04Quand il n'y a pas l'un ou l'autre, je suis malheureuse.
49:07Alors, Le César a été remporté par…
49:08– Le César du meilleur film a été remporté, sans surprise, par Emilia Pérez.
49:14– Alors, racontez-nous un peu le sujet.
49:16– Alors, Emilia Pérez qui a obtenu cette récompense.
49:18Emilia Pérez se passe dans le milieu du narcotrafic.
49:20– Mexicain.
49:21– Voilà, mexicain.
49:22C'est l'histoire d'un narcotrafiquant qui, pour échapper à ses rivaux, va devenir une femme.
49:27– Oui.
49:28– Le rôle principal est joué par un certain Carlos Gascón,
49:31qui se fait appeler Carla Sofia Gascón.
49:33Donc, dans la vraie vie, en dehors du tournage,
49:37cette personne est une femme transgenre.
49:41Je cherche les mots parce que c'est un peu compliqué avec leur histoire d'homme transgenre, femme transgenre.
49:44Alors, traduction, en français courant, une femme transgenre,
49:47c'est un homme qui décide d'être une femme.
49:49– C'est ça.
49:50– Parce qu'on pourrait penser que c'est l'inverse, on s'embrouille un petit peu.
49:52– Ce qui est donc le cas du héros.
49:54– Comme dans le personnage principal du film.
49:56Oui, exactement.
49:57En fait, l'acteur qu'ils ont choisi est à l'image du personnage principal.
50:00– C'est un film fait par une femme ?
50:02– Non, par un homme.
50:03Le réalisateur, c'est un certain Jacques Audiard.
50:05– Ah oui, Jacques Audiard.
50:06– Le fils de Michel Audiard.
50:07Vous vous rendez compte, Michel Audiard, ses acteurs, c'était Jean Gabin,
50:10c'était Lino Ventura, c'était Jean-Paul Belmondo.
50:12Ses actrices, c'était Mireille Dark, c'était Jeanne Moreau aussi, je crois.
50:16C'étaient des acteurs et des actrices.
50:18Son fils, il met en scène un homme ou une femme, on ne sait pas trop.
50:22Ah si, on sait que c'est un homme, mais bon.
50:24– Mais c'est au goût du jour.
50:26– C'est au goût du jour.
50:27– Et ça a marché, puisque il aime César.
50:29– La cérémonie remporte.
50:30– On passe vite.
50:31– César donne récompense à l'idéologie,
50:35il ne récompense même plus, l'académie méprise les goûts du public.
50:40Alors, si on peut conclure sur une note positive dans cette cérémonie de César,
50:44c'est que l'acteur Carlos Gascón,
50:49connu sous le nom d'artiste de Carla Sofía Gascón, était,
50:53notons ce scandale, nominé pour le César de la meilleure actrice.
50:57– Bien sûr.
50:58– Pas du meilleur acteur, de la meilleure actrice.
50:59Finalement, c'est quand même une femme qui l'a eue.
51:01Voilà, tout va bien.
51:02C'est quand même une femme qui a eue ce César.
51:04Et ensuite, transition, nous allons passer outre-Atlantique
51:09chez nos amis américains.
51:12La cérémonie des Oscars a eu lieu deux jours plus tard, le dimanche 2 mars,
51:16et Emilia Pérez était à l'honneur.
51:18– Bien sûr.
51:19– 13 nominations.
51:21Il faut quand même songer que c'est un chiffre très important.
51:25Le record du nombre de nominations, c'est 14 nominations.
51:29Un record détenu par Titanic et par La La Land.
51:33Le plus grand nombre d'obtentions d'Oscars, c'est 11.
51:39Donc c'est Bénure, Titanic et Le Seigneur des Anneaux,
51:42le troisième tome du Seigneur des Anneaux.
51:44Donc avec 13 nominations, Emilia Pérez était vraiment mise à l'honneur.
51:47C'était exceptionnel pour un film non anglophone,
51:50puisque la cérémonie des Oscars récompense traditionnellement
51:54les films anglo-saxons.
51:55– Charité bien ordonnée commence par soi-même.
51:58– Ils n'ont eu que… – C'est la devise américaine.
52:01– Ils n'ont eu que deux récompenses et pas l'Oscar de la meilleure actrice.
52:05Parce que ce monsieur Carlos Gascón était nominé aussi
52:08pour l'Oscar de la meilleure actrice. Mais il ne l'a pas eu.
52:11– Et qui a remporté l'Oscar ?
52:13– C'est une actrice du nom de Mickey Madison qui est relativement peu connue.
52:18Elle n'a que 25 ans. Elle a remporté cet Oscar pour Anora.
52:22Anora, c'est le film qui a été primé à Cannes aussi.
52:25On en a beaucoup parlé.
52:26C'est un peu le grand gagnant de la cérémonie des Oscars.
52:28C'est un film qui met en scène des mafios russes à New York et à Las Vegas.
52:32– C'est ça, pour montrer combien ils sont horribles.
52:34– Pour montrer comment les Russes sont des affreux méchants.
52:37Ça, ça plaît toujours aux Américains et c'est terriblement d'actualité.
52:41– Parce qu'il n'y a pas d'oligarque américain, jamais.
52:44Il n'y a pas d'oligarque ukrainien.
52:46Il y a juste les oligarques russes, vilains, vilains.
52:49Continuons.
52:50– Alors voilà, que peut-on dire de plus ?
52:54Les Oscars, il faut le reconnaître,
52:57récompensent encore la qualité cinématographique,
53:02à part cette aberration de nominer M. Carlos Gascón
53:05pour l'Oscar de la meilleure actrice.
53:07Mais finalement, ils ne lui ont pas donné la récompense.
53:09Mais il y avait quand même cette sélection officielle.
53:11Tandis que les Césars, ça ne récompense plus malheureusement que l'idéologie.
53:14On pourrait y voir un signe positif si les Césars
53:18permettaient de rattraper les oublis du public.
53:21Je m'explique.
53:22Il y a des films de qualité que le public ne remarque pas,
53:27qu'il passe inaperçu.
53:28On a eu, à la fin de l'année dernière,
53:31Prodigieuse, qui a été oublié par le public.
53:33– L'histoire de ses deux sœurs pianistes.
53:35– Et un autre exemple aussi, c'est Syntex.
53:38On en avait beaucoup parlé dans notre émission du mois de décembre.
53:41C'était un très bon film et qui était un peu oublié.
53:43– Oui, il présentait quand même des qualités de cinéma certaines.
53:46– Les Césars pourraient justement compenser ces oublis.
53:50Mais ce n'est même pas le cas.
53:52Ils ne récompensent que des films idéologiques.
53:54Emilia Pérez, l'histoire d'un homme qui se prend pour une femme.
53:57L'histoire de Souleymane,
53:59les aventures d'un clandestin guinéen sous OQTF,
54:03dont l'acteur principal a tourné alors qu'il était sous OQTF.
54:07Maintenant, il a son titre et il est récompensé.
54:10– C'est bien.
54:12– On n'est que dans des œuvres de propagande.
54:15Et on a l'impression que les goûts du public et la qualité artistique…
54:21– On ne lui traite pas de laurier.
54:23– Mais voilà, c'est les mœurs du temps.
54:27En tout cas, ces bons films que nous avions aimés
54:31vont passer à la télévision.
54:33Et qui ont été choisis par le public,
54:35ils vont passer un de ces quatre matins à la télévision et ça sera bien.
54:38– Et après, ils sont toujours plébiscités par le public.
54:41Parce qu'il ne faut pas oublier que cette cérémonie des Césars
54:44et celle des Oscars, elles ont un prestige indéniable.
54:47Aux États-Unis, les Oscars, c'est presque un titre de noblesse.
54:50Quand on parle par exemple de Titanic, on dit le film aux 11 Oscars.
54:55Mais en fait, c'est juste un surplus de notoriété, vous voyez.
54:58La vraie reconnaissance, elle est celle du public.
55:01Si je prends l'exemple des Oscars,
55:03il y a des figures majeures du cinéma américain qui n'ont jamais été récompensées.
55:07Alfred Hitchcock n'a jamais remporté l'Oscar du meilleur réalisateur.
55:10Kirk Douglas n'a jamais remporté l'Oscar du meilleur acteur.
55:12On ne prend que les exemples vraiment les plus typiques.
55:14Alors que ce sont évidemment des monstres sacrés.
55:17La vraie reconnaissance, elle est du public.
55:19Et le public ne s'y trompe pas.
55:20Je vais prendre un exemple très simple.
55:21En 2005, c'était il y a 20 ans déjà.
55:25C'était la première fois que je regardais une cérémonie des Césars avec intérêt.
55:30J'avais que 12 ans.
55:31Et donc, le suspense autour de cette cérémonie, c'était
55:35quel film va remporter le César du meilleur film ?
55:39Est-ce que ce sera l'Écoriste ou Un long dimanche de fiançailles ?
55:42C'est quand même deux grands films.
55:44Les deux gros succès de l'année.
55:45Je ne l'avais pas encore vu, Un long dimanche de fiançailles.
55:47Je l'ai vu un peu plus tard.
55:49Surprise, le film récompensé, ça a été L'esquive.
55:52Un film que tout le monde...
55:54Un film qui se passe dans les cités, dans les banlieues sympathiques.
55:58Bien sûr, déjà.
56:00Un film qui avait été ignoré par le public.
56:02Le public a découvert l'existence.
56:05Et qu'aujourd'hui, tout le monde a oublié, tout le monde a esquivé.
56:08Alors que l'Écoriste et Un long dimanche de fiançailles,
56:10à chaque fois que ça repasse à la télé, le public est toujours au rendez-vous.
56:13Bien sûr.
56:13En fait, là, on sait où est la vraie reconnaissance.
56:15Cette cérémonie s'enfonce dans le ridicule, évidemment.
56:18Il y a un film qui est passé sur M6.
56:23C'est un film en trois parties.
56:26Vous tapez M6 replay,
56:30mémoire vive.
56:32Et c'est un très joli petit film.
56:36L'actrice principale, c'est Clémentine Sélarier.
56:39Bon actrice.
56:40Qui est une bonne actrice.
56:42Qui est à la fin de sa carrière.
56:47Mais qui joue les vieilles dames avec un humour extraordinaire.
56:52Et on rit, on rit, on rit beaucoup.
56:54Et pourtant, le sujet n'est pas drôle.
56:57C'est une femme qui a exercé la profession de greffière
57:01dans une petite ville sur l'océan Atlantique, en France.
57:05Et sa retraite a sonné.
57:11Et malheureusement, elle constate
57:14qu'un début d'Alzheimer se déclare.
57:18Et le médecin, pour lui redonner le moral, lui dit
57:22« Mais vous n'avez pas, chère madame, un projet qui vous tient à cœur depuis longtemps ? »
57:27Et elle ne répond pas.
57:29Elle rentre chez elle et elle sait qu'elle a un projet.
57:32Parce qu'elle a été témoin, en tant que greffière,
57:36de l'injustice patente de la justice.
57:39C'est-à-dire, sept individus,
57:44sept mauvais bougres ont échappé à la justice
57:49parce qu'ils étaient protégés par les élites locales.
57:54Ils faisaient partie de l'élite locale.
57:57Et donc, il n'était pas question qu'ils soient condamnés.
58:00Et elle va décider de les éliminer un par un.
58:06Je n'en dis pas plus parce que je veux laisser le plaisir de la découverte.
58:11Mais c'est quand même très, très rigolo.
58:14D'abord, ça a une fonction de catharsis, vous savez.
58:18Cette façon que le théâtre et le cinéma ont
58:22de vous présenter ce que vous auriez envie de faire.
58:26Parce que quand la justice ne rend pas la justice,
58:29certains ont envie de passer à l'acte.
58:32Il ne faut surtout pas.
58:34Alors là, vous voyez quelqu'un qui passe à l'acte.
58:38Et cette vieille dame ne se prend jamais au sérieux.
58:42À son troisième cadavre, elle veut quitter les lieux,
58:46mais elle a oublié de mettre de l'essence dans la voiture.
58:49Normal, puisqu'elle a ce début d'Alzheimer.
58:51Alors elle se balade avec son petit carnet.
58:55Parallèlement, dans ce film qui s'appelle
58:58Mémoire vive, M6, il y a une jeune femme
59:02qui est une policière et qui, elle,
59:05a perdu la mémoire de sa jeunesse.
59:08Je n'en dis pas plus.
59:10Je vous laisse le bonheur de cette vision.
59:14Et j'ai vraiment pris un grand plaisir à le regarder.
59:18Voilà ma quête du jour.
59:21– Il faut regarder à la télé puisqu'effectivement au cinéma,
59:24dans les scènes, il n'y a pas grand-chose.
59:26– Il faut chercher beaucoup sur la télévision.
59:29Mais quand on cherche, on finit par trouver.
59:30Et en étant patient.
59:31Sinon, les autres jours, on prend un livre.
59:34Merci beaucoup Renaud de Bourlof.
59:37– C'est moi qui vous remercie, Anne.
59:39– À très vite, au mois prochain.