Flore a vécu trois fausses couches, des deuils qu'elle a dû faire en silence. Pour elle, l'accompagnement médical et psychologique en France n'est pas suffisant, pour les femmes comme pour les hommes. Elle témoigne.
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00:00Je trouve que le sujet de la fausse couche est encore trop tabou
00:03parce que je trouve qu'il y a un sentiment, en tout cas qui est partagé
00:07des lectrices que j'ai eues, des témoignages
00:09de honte.
00:10Et d'ailleurs la plupart des femmes m'ont dit je ne peux pas écrire
00:13publiquement sur Facebook ou machin, je suis obligée
00:16de passer par le privé parce que j'ai pas envie qu'on sache.
00:19Donc oui c'est complètement encore pour moi tabou qu'il y a encore un
00:22sentiment de honte et il y a un sentiment d'échec.
00:25D'échec de maternité.
00:28Et alors c'est difficile parce que moi j'avais déjà un enfant
00:30donc j'ai entendu plus d'une fois, au pire t'en as un quoi.
00:35Mais excusez-moi mais au pire ça veut dire quoi ?
00:37C'est extrêmement solitaire et c'est dommage parce qu'en fait
00:40il y a un vrai travail à faire sur ce sujet.
00:45On en parle de plus en plus, je vois bien que la parole se libère
00:48et c'est super parce que
00:49même moi à l'époque où j'ai fait mes premières fausses couches
00:53j'ai cherché sur internet des témoignages
00:55et en fait les seuls trucs qui existent à l'époque c'était les forums.
01:00Et vraiment c'était triste en fait, c'était des histoires affreuses.
01:05On sait bien qu'il ne faut pas regarder sur internet ce genre de trucs.
01:08C'est pas du tout encourageant, ça démoralise encore plus.
01:10Et voilà on a besoin d'en parler, on a besoin que ça se sache,
01:15on a besoin de savoir que ça arrive oui mais que ça fait mal.
01:20Et moi j'ai eu besoin qu'on légitime ma douleur tout simplement.
01:25Je trouve qu'on n'en parle pas suffisamment encore,
01:28même dans le milieu du travail, de vivre les trois mois de grossesse
01:32sous silence, de ne pas en parler à son employeur.
01:35Alors je comprends, il y a un réseau de fausses couches.
01:38Mais c'est tellement imprégné dans notre société
01:41que les trois premiers mois de grossesse ne doivent pas être...
01:44On ne doit pas annoncer sa grossesse parce qu'il y a un risque de fausse couche.
01:47C'est tellement imprégné dans notre société
01:50que les trois premiers mois de grossesse ne doivent pas être...
01:53On ne doit pas annoncer sa grossesse parce qu'il y a un risque de fausse couche.
01:56Mais en fait, pourquoi pas ?
01:58Dans ce cas-là, on vit non seulement les trois premiers mois
02:01qui sont extrêmement difficiles physiquement en silence,
02:04et puis en plus si ça se passe mal, on vit la fausse couche en silence.
02:07Et voilà, je trouve qu'il y a un travail à faire
02:10sur l'accompagnement médical dans les fausses couches
02:15parce que je trouve qu'il y a un problème un peu humain.
02:18Dans un de nos pays voisins, ils ont des structures
02:21où ils accompagnent les femmes qui font des fausses couches
02:24psychologiquement, médicalement, où il y a des échographies proposées
02:27aussi régulièrement qu'elles le souhaitent.
02:30Il y a un psychologue qui est là.
02:33Je trouve qu'il y a un défaut d'accompagnement de ce côté-là
02:36et aussi sur la prise en charge médicale parce que moi,
02:39ça m'a vraiment déstabilisé d'aller faire un curtage dans une maternité
02:44au milieu des femmes enceintes.
02:48Alors que moi, c'est fini.
02:51Je ne sais pas ce qu'il faudrait, mais peut-être avoir un endroit un peu...
02:55Moi, je pense que ça m'aurait plus soulagée d'être avec des femmes
02:58qui allaient faire des curtages.
03:01On peut se comprendre d'un clin d'œil que oui, c'est douloureux pour tout le monde.
03:05Plutôt de croiser un couple comme ça.
03:08Les hommes sont aussi touchés que les femmes.
03:11C'est différemment parce qu'il y a une notion de corps
03:16où on les porte et on saigne, on souffre.
03:19C'est nous sur la table d'opération.
03:21Mais les hommes sont extrêmement touchés.
03:24Ils mériteraient aussi d'avoir un petit temps d'arrêt pour faire ce deuil-là correctement.
03:28Si c'est si fréquent et si banal que ça, au moins qu'on l'encadre un tout petit peu.
03:32Qu'on ait une petite implante, savoir ce qu'on peut faire.
03:36Et avoir un soutien psychologique qu'en fait, souvent, on ne fait pas par nous-mêmes.
03:41Parce que c'est une démarche qui est personnelle et qui n'est pas facile à faire.
03:45Du coup, très souvent, les femmes le gardent sous silence.