Un boulanger interpelle Olivier Véran sur la crise énergétique

  • l’année dernière
Cyril Hanouna recevra au cours d’une nouvelle émission les personnalités qui font l’actualité du moment. Leur vérités, leur promesses, les questions que se posent les Français, tout sera passé au crible pour ce moment de télé qui casse déjà les codes.


Pour cette grande première, le premier invité sera Éric Zemmour, journaliste et essayiste, presque candidat à l’élection présidentielle 2022.

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Transcript
00:00 Donc moi je suis Julien effectivement, donc ça fait 17 ans que je suis dans le métier de la boulangerie
00:04 et j'avais mon commerce durant 5 ans et comme mes confrères, j'ai fermé à la même période avant les fêtes
00:10 parce que c'était plus possible, l'enchaînement des matières premières, les charges et l'électricité
00:15 qui nous a complètement plombés quoi, donc au bout d'un moment on ne peut plus supporter de travailler 90 heures semaine.
00:21 – Julien, est-ce que vous pouvez rappeler à Monsieur le Ministre
00:24 quelle a été votre facture d'électricité ?
00:27 – J'ai fait x3 sur ma facture d'électricité, oui.
00:30 Donc au bout d'un moment on a essayé comme on a pu de renier sur les marges,
00:33 on a augmenté les prix, on a licencié, on a essayé de faire tout ce qu'on a pu pour garder le village sain
00:39 parce que voilà c'est comme mes collègues, j'étais le seul commerce du village, la seule boulangerie,
00:43 le seul lieu de rencontre en fait pour que les gens, les personnes de mobilité réduite,
00:47 les anciens du village se réunissent, donc du coup oui,
00:50 moi j'ai vraiment l'impression d'avoir laissé mourir mon village en fait.
00:54 – Les gens vous ont vu partir, vous avez eu du soutien au sein du village,
00:59 du soutien pour le coup des élus municipaux ?
01:01 – Énormément, énormément, les gens sont encore là d'ailleurs,
01:04 j'en reçois des courriers tous les jours et tout, j'ai un soutien phénoménal
01:07 et c'est très important le moral parce que,
01:09 voilà moi j'ai fait une petite dépression quand même après parce que voilà on est…
01:12 – Combien de temps vous avez tenu votre boulangerie ?
01:13 – 5 ans.
01:14 – 5 ans, c'était votre premier commerce ?
01:15 – C'était mon premier commerce, oui.
01:16 – Ok, est-ce que vous avez vu, donc vous c'est le coup de l'électricité
01:19 qui a été le coup de grâce finalement ?
01:20 – C'était le coup de grâce, voilà, j'ai eu ma facture, j'ai fermé,
01:23 mais c'était vraiment le coup de grâce en fait, on a essayé,
01:25 comme je vous dis, les matières premières depuis cet été,
01:27 les charges qui ont augmenté et puis l'électricité ça a mis le coup de massue en trop.
01:30 – Alors est-ce que vous avez vu, parce que vous avez fermé en décembre vous m'avez dit ?
01:32 – En décembre, oui c'est ça.
01:33 – Bon, vous avez vu que depuis le début d'année 2023, alors c'est tard pour vous,
01:37 à moins que vous aviez le projet de rouvrir, pourquoi pas ?
01:40 – Non, non, absolument pas.
01:41 – Vous voulez faire quoi ?
01:42 – Plus du tout de boulangerie, je vais me reconvertir dans un autre métier.
01:45 – Vous avez fait des formations comme boulangère ?
01:46 – Ah oui, CAP, bac pro, ça fait 17 ans que je suis dans le métier,
01:49 j'étais un grand passionné, j'ai fait des heures de partout,
01:51 j'ai voyagé dans la France pour m'enrichir, mais voilà, à l'heure actuelle, le bilan est là,
01:55 et moi j'ai plus du tout la passion, la foi, j'ai plus envie de ce métier quoi.
01:58 – Vous m'avez dit 90 heures par semaine ? – Oui.
02:00 – C'était quoi les horaires de vos journées ?
02:02 – Je commençais à 2h le matin, à 3h et je terminais vers 20h.
02:05 – À 20h, et vous étiez tout seul ?
02:07 – J'avais une vendeuse, oui.
02:08 – Une vendeuse, d'accord, qui a perdu son boulot aussi.
02:10 – Oui voilà, après au-delà de ça, on licencie, donc c'est toutes des familles,
02:15 moi j'avais qu'une salariée, mais quand j'entends des collègues
02:17 qui licencient 10 salariés, c'est 10 familles derrière,
02:21 avec les enfants, le mari ou la femme, c'est dramatique.
02:24 – Alors Julien, c'est ça ? – Oui c'est ça.
02:26 – Je ne sais pas si vous avez vu, mais les règles ont changé de l'accompagnement
02:29 par l'État, de la hausse du coût de l'énergie pour les artisans, les TPE,
02:34 il y a un million de TPE dans notre pays, donc les très petites entreprises,
02:37 c'est-à-dire moins de 10 salariés, et des TPE qu'on appelle énergivores,
02:41 c'est-à-dire des TPE qui ont une consommation électrique importante.
02:43 Alors moi je me suis rendu dans une boulangerie en région parisienne
02:46 il y a quelques semaines, je me suis essayé à la fabrique du pain,
02:49 ce n'était pas un succès, mais ce n'était pas pour ça que j'y étais,
02:51 mais pour discuter avec l'artisan boulanger qui effectivement fait face
02:54 à une hausse de ses factures parce que le four utilise beaucoup d'énergie,
02:58 la conservation aux frais aussi, en chambre froide, des produits,
03:01 tout ça est très énergivore.
03:03 Et donc ce qu'on a décidé comme règle, vous l'avez peut-être vu,
03:06 vous avez des boulangers qui ne sont pas soumis à la hausse du prix de l'énergie
03:10 parce qu'eux ont signé des contrats sur plusieurs années,
03:13 il y a un an ou il y a six mois, et donc ils ont signé un contrat
03:17 qui les engage à leurs fournisseurs d'énergie pendant deux ou trois ans,
03:20 et donc eux l'énergie augmente, mais comme ils sont liés par leur contrat,
03:23 ils sont protégés.
03:24 Et vous avez une partie des boulangers pour lesquels ce n'est pas le cas.
03:27 Il y a une partie des boulangers qui sont, je ne vais pas utiliser
03:30 des mots pénibles pour les gens de ce soir, mais des boulangers
03:33 qui sont soumis aux mêmes règles que les Français,
03:35 donc ils ont une hausse limitée à 15%, et il y en a d'autres qui devaient
03:38 justement signer leur contrat en fin d'année 2022, c'est peut-être votre cas.
03:41 – Moi j'ai signé un peu plus tôt.
03:43 – Et qui du coup ont vu un tarif extrêmement élevé.
03:45 Et bien ce qu'on a décidé avec Bruno Le Maire,
03:47 à la demande du président de la République, c'est de dire à ces entreprises,
03:50 toutes celles qui ont signé un contrat trop cher,
03:52 en fait vous allez pouvoir renégocier sans coût, sans frais,
03:55 votre contrat pour le plafonner à un tarif qui est d'environ 280 par MWh.
04:01 Ce qui veut dire qu'on absorbe une partie du coût et on demande
04:04 aux fournisseurs d'énergie de faire un effort pour réduire la facture,
04:07 justement pour pas que les boulangers soient obligés
04:09 de mettre la clé sous la porte.
04:10 Pourquoi je vous parle de ça ? Parce qu'il y a un million de TPE,
04:13 donc un million de très petites entreprises, des boulangers et d'autres,
04:16 des bouchers, qui peuvent bénéficier de ce dispositif,
04:19 et à l'heure à laquelle je vous parle, on a reçu 150 000 demandes.
04:22 – Alors justement… – C'est-à-dire qu'il faut le faire connaître.
04:24 – Justement, Monsieur le Ministre, Julien, s'il y avait eu ça avant,
04:28 est-ce que vous auriez fermé votre boulangerie ?
04:30 Est-ce que ça vous aurait sauvé ?
04:32 – Non, je ne sais pas de quoi il fait l'avenir, mais certainement que oui,
04:34 j'aurais pu rester au moins la fin de l'année,
04:36 histoire de voir ce qui se passait les mois prochains.
04:38 – Vous auriez pu gagner encore un peu de temps ?
04:40 – C'était la course contre le temps en fait.
04:42 Dans ma tête, avec la comptable, on cherchait la date butoir
04:45 à laquelle je devais fermer pour avoir le moins de…
04:48 – Aujourd'hui, quand on entend beaucoup de boulangers qui nous disent
04:51 "j'avais de la trésorerie, je suis obligé aujourd'hui
04:53 de la mettre pour payer l'électricité"…
04:55 – On a tous fait ça ?
04:56 – Est-ce qu'avec cette mesure-là, les boulangers qui sont encore en activité
05:02 vont pouvoir garder un petit peu de trésorerie,
05:04 vont pouvoir s'en sortir ou bien c'est…
05:08 – C'est toujours un pas qui est fait vers l'avant,
05:10 mais comme dit, il faut être plus réactif et plus engageant.
05:13 – Qu'est-ce qu'il faudrait aujourd'hui pour que…
05:17 – Revenir à des prix corrects ?
05:20 – Toutes les boulangeries puissent perdurer.
05:23 Parce qu'aujourd'hui, c'est vrai que ça ferme toutes les semaines,
05:25 il y a des boulangeries qui ferment.
05:26 – Oui, ce n'est pas un cas isolé, c'est loin de là.
05:28 – Donc là, aujourd'hui, ça, pour vous, c'est suffisant ou pas ?
05:31 – Non.
05:32 – Non ? Qu'est-ce qu'il faudrait ?
05:33 – Je ne sais pas, je ne suis pas ministre à l'heure actuelle, mais…
05:36 – Mais vous, il aurait fallu que vous me parliez justement.
05:38 – Pardon ?
05:39 – Vous pouvez me parler, vous pouvez me dire les choses.
05:41 – Déjà, le prix de l'énergie, en parlant de l'énergie,
05:43 de redevenir à un prix correct, je veux dire, on a fait x3,
05:47 certains ont fait x10, x12, il aurait fallu réagir plus tôt
05:49 pour pouvoir anticiper les choses, en fait, je pense, mieux.
05:52 – Juste, monsieur le ministre, parce que je pense que c'est la question
05:55 que se posent tous les Français qui nous regardent ce soir,
05:57 est-ce que les fournisseurs d'énergie, à l'heure où on parle, font des bénéfices ?
06:04 – Alors, ils ont fait beaucoup de bénéfices, certains notamment,
06:07 ont fait beaucoup de bénéfices, et en fait, on a récupéré tout ce qui était
06:10 du domaine du bénéfice réalisé à cause du contexte.
06:13 On a récupéré des milliards d'euros, en fait, dans le budget de la France,
06:16 qu'on a voté, que le Parlement a voté il n'y a pas longtemps,
06:18 on a récupéré beaucoup, beaucoup d'argent sur les énergéticiens,
06:21 ce qu'on appelle les super-profits, les sur-profits, liés à la crise qu'on traverse.
06:25 Après, il faut comprendre que la hausse du prix de l'énergie,
06:28 elle est très directement liée au conflit en Ukraine,
06:31 et donc il y a eu aussi des dérèglements des prix,
06:33 je ne rentre pas dans tous les mécanismes, mais nous, on a accumulé pas mal de choses,
06:37 des centrales qui étaient à l'arrêt, elles ont repris leur fonctionnement
06:40 quasi normal, en tout cas, ça va nettement mieux,
06:43 et puis on établit le prix de l'électricité à partir du prix du gaz,
06:45 et comme on a fait un embargo sur le gaz russe, ça a fait monter le prix du gaz, etc.
06:50 Ce qui ne fait pas vos affaires, j'entends bien, mais c'est pour expliquer un peu les raisons.
06:52 Ce ne sont pas des raisons de décision politique locale,
06:55 mais plutôt des raisons qu'on assume, en tout cas, on assume les motifs
06:59 pour lesquels on a décidé d'arrêter d'acheter du gaz aux Russes,
07:02 c'est qu'on veut protéger la population ukrainienne,
07:04 et éviter que le conflit ne s'enlise.
07:07 Donc, ce qu'on fait au niveau européen, et la France est très active là-dessus,
07:10 on a obtenu des avancées qui seront bientôt visibles concrètement,
07:13 c'est qu'on veut plafonner le prix du gaz et de l'électricité,
07:16 et qu'on veut enlever tous les mécanismes qui provoquent une forme de dérégulation
07:20 du rapport entre le gaz et l'électricité.
07:22 Là, c'est en cours, c'est en cours, des engagements qui ont été pris.
07:24 C'est vrai qu'il y a une urgence.
07:25 On voit déjà que le prix de l'électricité, Cyril, a baissé par rapport à ce qu'il était.
07:28 Vous avez raison de dire qu'il était monté à x7, x10.
07:31 Aujourd'hui, on est dans des horizons qui sont plutôt de l'ordre de x3,
07:35 et on s'attend à ce que ça baisse.
07:37 De la même manière, même si ce n'est pas pour les mêmes raisons
07:39 et pas les mêmes mécanismes, on s'attend à ce que le prix d'un certain nombre de matières premières
07:43 qui s'étaient envolées, je pense à l'huile, au beurre, etc., reviennent dans des eaux plus normales.
07:48 [Musique]

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