"Vous nous devez des excuses" lance un restaurateur en détresse à Olivier Véran

  • l’année dernière
Cyril Hanouna recevra au cours d’une nouvelle émission les personnalités qui font l’actualité du moment. Leur vérités, leur promesses, les questions que se posent les Français, tout sera passé au crible pour ce moment de télé qui casse déjà les codes.


Pour cette grande première, le premier invité sera Éric Zemmour, journaliste et essayiste, presque candidat à l’élection présidentielle 2022.

Transcript
00:00 J'ai galéré comme un fou pour essayer de remonter ma boîte.
00:03 Parce que vous imaginez bien, M. Véran, qu'à un moment donné,
00:05 quand vous investissez dans une nouvelle entreprise,
00:08 vous mettez ce que vous avez, et puis les économies que vous avez,
00:10 forcément, vous les mettez sur la table.
00:12 Moi, je n'avais plus rien.
00:13 Mais d'un petit peu d'aide, ce n'est pas de l'aide que je demandais.
00:15 Je demandais mon droit de travailler.
00:16 Une chose à 25 %, je n'aurais même pas eu besoin de vos aides.
00:19 Parce que si on calcule bien, dans l'absolu, à 25 millions par jour,
00:23 même sur 7 sur 7, ça ne me dérangeait pas de travailler.
00:25 Je continuais de payer mes charges, je continuais de payer mes employés,
00:28 je continuais de vivre et d'engranger la trésorerie,
00:31 ce qui paraît normal, on est d'accord.
00:33 Ça, vous ne m'avez pas laissé faire.
00:35 Vous ne m'avez pas laissé faire, vous m'avez dit que c'est tout le monde 10 000.
00:37 D'accord ? Même le mec qui n'en a pas besoin, il prend les 10 000.
00:40 Puis après, les PGE, c'était 25 % du PGE, d'accord ?
00:43 Que l'État a garanti.
00:44 Vous avez déposé quelque chose quelque part en termes de garantie ?
00:47 Parce que 90 000 € pour moi,
00:49 Cyril, ça fait 25 % de mon chiffre d'affaires de l'époque, bien sûr.
00:53 25 % de mon chiffre d'affaires de l'époque.
00:55 Aujourd'hui, vous avez mis sur la table 140 milliards d'euros.
00:59 Euh, de millions d'euros, pardon, excuse-moi.
01:01 Milliard d'euros, excusez-moi.
01:03 Milliard d'euros.
01:04 Ces milliards d'euros, aujourd'hui, ce sont nous, les Français, qui payons.
01:08 Aujourd'hui, il faut savoir qu'il y a 49 % de faillites supplémentaires en 2022
01:12 dans l'hôtellerie-restauration.
01:13 Ces PGE, là, qui va les payer ?
01:15 Ça, c'est ma première question.
01:16 Ma deuxième question, c'est quand est-ce que moi,
01:18 vous me remboursez sur ma perte personnelle ?
01:20 Parce que vous me demandez de rembourser un PGE
01:22 et des charges à ne plus savoir qu'en faire.
01:24 Je paye 30 % de ma tière en plus depuis 2019.
01:27 Vous connaissez le prix du litre du fioul, M. Véran,
01:30 en fioul domestique, pour se chauffer ?
01:32 - Allez-y.
01:33 - Bah, dites-moi.
01:34 - Allez-y, je code tous les chiffres en date.
01:35 - 2019, 0,64 centimes.
01:39 2022, 1,54.
01:41 Je mange 8 000 balles de fioul par an.
01:44 Je suis au gaz, M. Véran.
01:45 Combien je paye, à votre avis ?
01:46 Vous avez une idée du prix du gaz ?
01:48 Vous avez une idée de ce qu'on paye, nous, artisans ?
01:51 Artisans !
01:52 Mais putain de merde, je suis en train de faire 1 million d'euros,
01:55 je dégage 75 de marge brute,
01:57 42 % de ma salariale, il ne me reste rien.
01:59 Et quand il me reste, vous me prenez encore 25 %.
02:02 Je ne vois pas mes gosses pendant des mois,
02:05 parce que je travaille en cuisine.
02:06 Je suis comme un veau, mes employés sont là,
02:08 ils ne lâchent rien.
02:09 Merci à ma clientèle d'être là.
02:11 Franchement, merci.
02:11 Franchement, je trouve ça aberrant qu'aujourd'hui,
02:14 vous venez sans présenter d'excuses aux Français.
02:16 Je trouve ça lamentable.
02:18 - C'est bon ?
02:18 - Attendez, n'oubliez pas.
02:20 Ici, nous sommes les employeurs de l'État.
02:22 Vous travaillez pour nous.
02:23 Parce qu'avec mes charges...
02:25 Attendez, excusez-moi, je vous vois tous les jours à la télé, c'est bon.
02:27 Laissez-moi parler deux secondes.
02:29 - Je ne vous ai pas entendu.
02:30 - Oui, mais si vous ne me laissez pas parler, ça va.
02:31 - Allez, finissez, ce n'est pas important de m'entendre.
02:32 - À un moment donné, je vais expliquer qu'à un moment donné,
02:34 les choses doivent être dites.
02:35 Parce que toutes mes charges, vous en faites quoi ?
02:38 Toutes les charges que je paye sur les salaires,
02:41 sur les impôts indirects, qui est la TVA, d'accord ?
02:43 En 20 à 10 %, je donne 170 000 € de TVA par an.
02:47 J'ai donné 400 000 € de ma salariale.
02:50 Brut, bien sûr, Monsieur Véran.
02:52 Il ne me reste rien.
02:53 Vous nous prenez tout, tout le temps.
02:54 Puis après, on dit, il faut donner, le patron le veut mieux payer.
02:57 Vous savez combien on paye un plongeur chez nous, Monsieur Véran ?
02:59 Vous avez une idée ?
03:00 C'est 1 500 € nourri-logé.
03:02 Net, net.
03:04 Je vous garantis.
03:04 Ça, c'est pour la plonge.
03:06 Plus les heures supplémentaires.
03:07 Un serveur, c'est 2 000 €.
03:09 J'habite à Cusanze.
03:10 C'est un tout petit village de 70 habitants.
03:11 Je ne suis pas à Paris, moi, d'accord ?
03:13 Donc, on n'a pas forcément les moyens.
03:14 D'ailleurs, laissez-moi vous dire que Paris, c'est la capitale de la France
03:17 et ça ne représente pas toute la France.
03:19 Nous sommes des milliers, une multitude de communes,
03:21 une multitude d'artisans.
03:22 Donc, je ne parle que ce soir, que pour mon nom, Cyril.
03:24 Il n'y a pour le nom de personne.
03:25 - Vous parlez au nom de pas mal de gens qui nous regardent.
03:26 - Non, que pour moi, pour le coup.
03:27 Mais je voudrais vraiment vous dire,
03:29 ma colère contre l'État aujourd'hui,
03:31 qui va peut-être me mettre en faillite.
03:34 Pourquoi, Monsieur Véran ?
03:35 Parce qu'à un moment donné, j'ai travaillé, d'accord ?
03:37 Après la reprise du Covid, j'ai bossé.
03:39 On a travaillé une super année.
03:40 D'ailleurs, cette année, il y a fait beau, c'était top.
03:42 Je me suis, parce qu'on avait une pénurie de personnel,
03:44 j'ai créé une école avec Marie-Guy Duffey,
03:46 la présidente de région Bourgogne-Franche-Comté,
03:48 le Gréta Besançon, qui m'a super bien aidé
03:50 pour qu'on mette en place des gens pour les remettre au boulot,
03:54 des gens qui étaient sans emploi, sans formation, de 18 à 60 ans.
03:57 Donc, je me suis cassé la tête.
03:58 Je n'ai pas baissé les bras.
03:59 Aujourd'hui, je baisse les bras.
04:01 Quand j'aurai vendu ou si je ne l'ai quitté pas avant,
04:03 je prendrai l'argent que j'ai et j'irai le dépenser ailleurs.
04:06 Vous ne verrez plus un euro de ma poche.
04:09 Je continuerai de payer.
04:10 Il me reste trois ans à payer.
04:11 Dans trois ans, je quitte ce pays
04:12 parce que j'espère que tout le monde fera ça.
04:14 Parce qu'à un moment donné, ce pays...
04:16 Attendez, Nicolas Sarkozy a dit un jour,
04:18 "La France, quand tu ne l'aimes pas, tu la quittes."
04:20 C'est vrai ou pas ?
04:21 Moi, je dis que quand la France n'aime plus ses artisans,
04:23 ses artisans doivent quitter le pays.
04:25 Ça, c'est une vérité.
04:26 Ce n'est pas dangereux.
04:27 C'est vous, aujourd'hui, le cancer de ce pays.
04:29 Ce n'est pas nous.
04:29 Nous, on bosse.
04:31 Si vous vraiment, vous aimiez la France, M. Véran...
04:33 - Stéphane...
04:33 - Je t'amène tous les députés et tous les sénateurs
04:36 et tous les ministres, vous travailleriez au SMIC.
04:39 Au SMIC, pas un euro de plus.
04:41 Comme ça, vous comprendrez ce que ces gens-là,
04:42 tous, là, vivent.
04:43 Parce qu'avec 1300 balles aujourd'hui, tu ne veux pas.
04:45 Et moi, patron de 25 salariés...
04:49 - Comment vous avez gagné par mois, pour vous, Stéphane ?
04:51 - Ça fait six mois que je n'ai pas pris de salaire.
04:53 - Ouais. - Six mois.
04:53 Je n'ai pas pris un salaire.
04:54 Je vous montre mon compte bancaire.
04:55 Si j'avais mon téléphone, je vous le montrerais sur les yeux.
04:57 Je n'ai pas un euro.
04:58 Putain, j'ai travaillé comme à Força, il ne me reste rien.
05:01 Alors, ne me dites pas, ne me parlez pas de vos aides
05:03 au niveau de l'État par rapport à l'électricité.
05:06 Ça ne vaut rien.
05:06 Ça ne vaut rien parce que concrètement, vous vous appelez,
05:08 il n'y a personne au bout du fil.
05:09 D'accord ?
05:10 Si vous êtes à 49% d'augmentation, vous n'avez le droit à rien.
05:14 Vous n'avez le droit à rien.
05:15 Si vous faites plus d'un million de chiffre d'affaires, rien.
05:18 D'accord ?
05:18 Donc, des aides de quoi ?
05:20 On peut... Même les charges.
05:21 Vous savez que si vous reportez votre PG aujourd'hui...
05:23 Concrètement, j'ai appelé mon banquier
05:25 parce qu'on s'entend bien, c'est un mec super.
05:27 On s'appelle, il me dit "Steph, je suis désolé, je ne peux pas t'aider
05:29 parce que si je te reportais un petit coup de PG,
05:32 ne serait-ce qu'une année, vous voyez ce que je veux dire ?
05:33 Parce que maintenant, deux ans de Covid,
05:35 on a reporté les PGE qui devraient durer sur six ans.
05:37 Maintenant, ils disent que sur quatre,
05:38 on a commencé à enclencher les PGE, c'est une fortune.
05:40 Ça, pour moi, c'est 1800 balles par mois en plus.
05:42 Donc, c'est 18 000 euros quasiment par an.
05:45 Donc, ça me coûte une fortune.
05:46 À un moment donné, j'explique que...
05:48 Je n'ai pas la structure qui a 25 ans comme marque,
05:51 qui est imposée depuis des années.
05:53 Moi, il y a trois ans que j'ai acheté ce resto.
05:55 Mais on ne nous a pas laissé respirer,
05:57 ni pendant le Covid, ni après le Covid.
05:59 On a le PGE sur la tête, d'accord ?
06:01 On a la tête sous l'eau concrètement, avec tout inflambé.
06:06 Comment on fait pour s'en sortir, Monsieur Véran ?
06:07 Comment ?
06:07 - Justement, alors, je réponds, Stéphane.
06:10 Bon, d'abord, je vois que vous êtes en colère.
06:12 - Ah, vous savez à quel point je suis en colère.
06:13 - Non, mais je l'imagine, vous savez, j'en ai vu d'autres.
06:16 Et je vois que vous êtes en colère
06:17 et je ne critique pas les raisons de votre colère.
06:18 Et je pense que parmi ce que vous avez dit, il y a des trucs…
06:20 - Je vous respecte, Monsieur Véran, en tant que…
06:21 - Je ne suis pas sûr.
06:22 - Non, attendez, je respecte l'homme, je vous respecte,
06:24 je ne respecte pas la fonction que vous prenez en tête aujourd'hui.
06:26 - Non, non, traiter de quelqu'un de cancer, je ne le ferai jamais,
06:27 même à Empire Ennemi, d'accord ?
06:29 Donc, quand vous dites que je suis le cancer de machin, non.
06:31 - C'est une image, Monsieur Véran.
06:32 - Si vous respectez les gens, ça veut dire que vous apprenez aussi.
06:35 Je crois que je suis ici depuis une bonne heure, Cyril.
06:37 Je crois que je ne me défile pas derrière les questions.
06:39 Je n'ai pas sélectionné les gens qui viennent ici ce soir.
06:41 Je n'ai empêché personne de venir d'ailleurs ce soir sur ce plateau.
06:43 Et donc, je viens ici pour qu'on puisse débattre et discuter tranquillement.
06:46 Donc moi, je n'utiliserai jamais l'invective
06:48 et je n'utiliserai jamais des injures, ni merde, ni…
06:50 - Et bien, je vous le dis, vous travaillez dans ma cuisine
06:52 17 heures par jour sous 5 jours.
06:54 - Stéphane, il y a plein de raisons pour lesquelles vous avez le droit d'être en colère
06:57 et je ne remets pas en question ça.
06:58 Je vous dis juste pour qu'on puisse avoir une discussion.
07:00 Ça veut dire qu'une discussion, c'est à deux.
07:01 Je vous ai écouté.
07:02 Maintenant, je vais essayer de vous parler un peu.
07:04 Il y a des choses pour lesquelles vous vous êtes exprimé
07:06 ou je peux être d'accord sur le poids des charges
07:08 quand on ouvre un restaurant, sur le poids de la masse salariale,
07:13 les complexités administratives.
07:15 Vous pouvez vous retrouver la tête sous l'eau.
07:16 Je ne doute pas une seconde que vous soyez un bosseur, que vous dormiez pas…
07:20 - C'est le 15 de mars, je suis souverain. Attention.
07:22 - Je ne doute pas une seconde que la nuit, quand vous essayez de dormir,
07:24 vous pensez aux comptes et que ça vous empêche de dormir, etc.
07:26 - Je vais demander à ma femme.
07:27 - Non mais, donc je peux parfaitement comprendre ça
07:29 et le niveau de stress dans lequel vous êtes, je peux l'entendre.
07:31 D'accord ? OK.
07:32 Les trucs sur lesquels on ne tombera pas d'accord, mais on n'est pas là.
07:34 Ce n'est pas pour ça que vous m'interrogez ce soir sur la gestion de crise Covid.
07:37 Vous avez le droit, c'est votre opinion,
07:39 mais vous avez le devoir de respecter la loi et vous l'avez respectée
07:41 puisque vous avez fermé le restaurant.
07:43 Et l'État, en retour, là, c'est là où je ne suis pas d'accord.
07:46 Je vois beaucoup de restaurateurs, je vais dans beaucoup de restos,
07:48 dans beaucoup de bars, dans beaucoup de commerces,
07:50 où en général, les gens disent "ça a été compliqué, mais vous nous avez aidés".
07:53 "Vous nous avez aidés et vous avez été là".
07:54 Et de fait, Stéphane, il n'y a pas beaucoup de restaurants qui ont fermé
07:58 suite à l'épisode du Covid et à la fermeture imposée pour des raisons sanitaires.
08:01 C'est complètement faux ce que vous dites.
08:02 D'accord, alors...
08:04 Demandez les chiffres à l'UMI et à l'INSEE.
08:06 C'est très simple.
08:07 Stéphane, j'ai rencontré Thierry Marx,
08:09 qui est le nouveau patron de l'UMI, il y a trois semaines.
08:11 Donc on en a discuté ensemble, on a fait le point sur le nombre de restaurants
08:14 avant la crise, après la crise et les difficultés.
08:17 La grosse difficulté que doivent affronter aujourd'hui les restaurateurs,
08:21 vous l'avez un peu dit et vous avez une solution qui montre que vous êtes débrouillard,
08:24 c'est la capacité à recruter, c'est de trouver du personnel.
08:27 Vous l'avez dit vous-même, vous avez augmenté sans doute le salaire de votre plongeur,
08:30 vous avez augmenté les salaires de votre serveur.
08:32 On n'a pas le choix, nous on n'a personne.
08:33 Et alors, les serveurs, ils vous diront qu'ils n'ont pas le choix
08:35 que de demander une hausse de salaire parce que c'est compliqué pour eux,
08:38 parce qu'ils sont obligés de faire du travail haché, qu'ils partent très tard,
08:41 que ça leur coûte cher en transport, etc.
08:43 Donc, de fait, le marché a évolué et on a besoin aussi d'adapter la formation
08:48 des jeunes vers les métiers pour lesquels on peut recruter.
08:50 Et il se trouve que la restauration, c'est de fait un vrai métier en grosse tension
08:54 et que c'est la galère pour les restaurateurs.
08:56 Vous le savez, et je trouve ça très bien,
08:58 vous avez manifestement créé avec la région, vous avez cité Marie-Guy de Duffey,
09:01 une école de formation pour pouvoir former vos propres jeunes
09:04 qui pourront ensuite travailler dans vos restaurants
09:06 et les autres restaurants de la région, ce qui est très bien.
09:08 - Il manque 250 000 postes en intérieur de restauration aujourd'hui.
09:10 Donc moi, avec mes 8 cuisiniers, je ne vais pas aller loin.
09:13 - Mais vous les recruterez, c'est aussi pour ça que les salaires ont augmenté,
09:16 c'est pour ça aussi que vos charges ont augmenté.
09:17 - 16% de charges encore sur nos dos.
09:20 - Aujourd'hui, on ne paye plus un serveur au SMIC,
09:21 il faut en général augmenter le salaire,
09:23 surtout quand on est dans des territoires ruraux,
09:26 c'est difficile de trouver des jeunes qui peuvent venir bosser dans la restauration.
09:28 De fait, et donc on veut aussi accompagner,
09:30 à la fois en formant davantage de gens pour aller dans les métiers en tension
09:34 et à la fois continuer d'accompagner les commerçants, les restaurateurs
09:37 pour qu'ils ne soient pas obligés de mettre la clé sous la porte
09:40 parce qu'ils n'ont pas de personnel ou parce que ça leur coûte trop cher.
09:42 [Musique]

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