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Tous les matins après le journal de 8h30, Emmanuelle Ducros dévoile aux auditeurs son «Voyage en absurdie», du lundi au jeudi.
Retrouvez "Voyage en absurdie" sur : http://www.europe1.fr/emissions/chronique-en-absurdie

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Transcription
00:00 Emmanuel Ducrox du journal "L'Opinion c'est à vous", un ouvrage tombe à point en ces temps de débat sur les retraites,
00:04 mais aussi du rapport au travail, on en parle énormément ce matin, le temps libre c'est l'envers du travail si je puis dire.
00:11 C'est l'ouvrage de l'essayiste Olivier Babaut, le président de Sinkton Sapiens, qui retient votre attention.
00:16 Ce livre s'appelle "La tyrannie du divertissement", il sort aujourd'hui, il est sous-titré "Ne laissez pas les loisirs gâcher votre vie", c'est un peu provocateur quand même.
00:24 Pas tant que ça en a l'air, il faut suivre le raisonnement d'Olivier Babaut pour comprendre ce qui se cache dans cette phrase "Ne laissez pas les loisirs gâcher votre vie".
00:33 Mais que raconte ce livre ?
00:34 Il raconte l'évolution du rapport de l'homme au travail et donc au temps libre.
00:39 Alors il y a eu des hauts et des bas, Olivier Babaut raconte, et c'est passionnant, que le temps pour soi tel que nous le connaissons actuellement, c'est une invention très récente.
00:46 Le temps libre, les hommes en avaient quand ils étaient chasseurs-cueilleurs, mais ils le consacraient au groupe.
00:52 Et puis plus du tout au néolithique avec l'invention de l'agriculture, là le travail s'est confondu avec la vie, ça ne s'arrêtait jamais.
00:58 Au Moyen-Âge, et ça c'est une idée qu'on n'avait pas vraiment, il y avait 130 jours fériés par an.
01:02 - Ah oui 130 jours ? - Oui, 5 semaines de congés, ça correspond à ça.
01:07 On travaillait finalement assez peu, enfin pas autant qu'on le pensait.
01:11 La révolution industrielle a sonné le glas du temps libre revenu dans nos vies après la première guerre mondiale.
01:16 - Oui mais avant quand même, ça, Léon Blum, 36, c'est très très important, il avait tout un discours justement sur les vertus démocratiques du temps libre, très très intéressant.
01:23 En tout cas, Olivier Babaut nous apporte des chiffres qui décoiffent.
01:26 - Oui, pendant la révolution industrielle, on travaillait 4000 heures par an, aujourd'hui c'est 1400 heures.
01:33 Au XIXe siècle, le travail représentait 70% du temps éveillé, aujourd'hui en prenant en compte les 35 heures, la durée des carrières, l'espérance de vie,
01:40 nous travaillons 12% de notre temps éveillé, on n'a finalement jamais aussi peu travaillé qu'en France, dans l'histoire de l'humanité.
01:48 - Et donc jamais eu autant de temps libre, de temps pour soi, de temps pour nous.
01:52 - Et oui, et le drame, le drame de l'homme, c'est que nous ne sommes pas préparés, et c'est un piège pour des pans entiers de la société.
01:57 Alors Olivier Babaut décrit un phénomène vraiment intéressant, le travail est de moins en moins central dans nos vies,
02:02 on lui trouve de moins en moins de sens, on le voit bien avec cette espèce de désaffection pour le travail,
02:08 mais cette perte de sens, elle contamine aussi notre temps de loisir, le travail a laissé un vide que beaucoup d'humains n'ont pas appris à combler.
02:15 Le temps libre, on le gaspille donc en ce qu'Olivier Babaut appelle les divertissements, TikTok, réseaux sociaux, Netflix,
02:21 c'est bien joli tout ça, mais ça ne remplit pas une vie, c'est pauvre, ça participe même au désenchantement, à la perte de sens, à l'apathie.
02:27 Vous voyez, les loisirs qui tyrannisent, qui gâchent la vie, ce sont ceux-là, des loisirs qui ne construisent rien.
02:33 Et Olivier Babaut les distingue des loisirs, les loisirs qui vous laissent vide, et ceux qui vous transforment,
02:38 la musique, la peinture, le sport, la vie associative, que sais-je, ce qu'il appelle les plaisirs de qualité,
02:42 alors ça pourrait apparaître snob, ça ne l'est pas du tout, et il faut pour les obtenir, faire usage de la seule inégalité que nous pouvons régler,
02:51 celle de l'effort personnel.
02:52 - Oui, ce goût de l'effort du travail, ça, tout le monde ne le possède pas.
02:56 - Eh bien oui, Olivier Babaut explique qu'il faut inciter les enfants de l'école à apprendre le plaisir, le plaisir de la connaissance,
03:03 la libido sienn di, comme il l'appelle, le désir de savoir.
03:06 - Il aime bien les latinismes, Olivier Babaut. - Oui, voilà, c'est son charme.
03:09 Le travail sur soi, c'est le meilleur service qu'on puisse se rendre à soi-même, celui qui fait qu'on ne travaille jamais vraiment,
03:14 puisque dans le travail, il y a en fait le plaisir.
03:16 - Bon, et la retraite, dans tout ça, elle en parle ?
03:18 - Eh bien oui, elle est vue comme un nouveau paradis, débarrassée des dernières contraintes du travail, le début d'une deuxième vie très attendue,
03:24 mais pour un nombre de personnes qui n'ont pas trouvé plus de sens dans les loisirs que dans le travail, eh bien c'est vain.
03:30 Ils vont peut-être quitter un boulot très dur, Usain, mais pour quoi faire ?
03:33 - Bah, président d'association, par exemple. - Ouais, bah voilà, mais ça, c'est un loisir qui est construit.
03:37 Apprendre à profiter des loisirs plutôt que simplement se divertir pour oublier l'ennui, c'est du travail, et c'est le travail de toute une vie, finalement.
03:44 Le livre est publié chez Buche et Chastel et je vous le recommande.
03:47 - La tyrannie du divertissement, signé donc Olivier Babaut.
03:51 Merci de nous en avoir parlé, Emmanuel Ducroix.
03:53 de dernière minute on apprend que...