«Terres d'urgence» : Guy Lagache est l'invité de Culture médias

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Dans son émission média, Philippe Vandel et sa bande reçoivent chaque jour un invité. Aujourd'hui, Guy Lagache, présentateur TV, pour "Terres d'urgence" sur Ushuaïa TV.

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Transcription
00:00 Et ces cultures médias que vous écoutez là où vous voulez avec Philippe Vandel et son invité.
00:05 Évidemment, bonjour Guy Lagache.
00:06 Bonjour Philippe.
00:07 Journaliste, une sacrée carrière. Avant de vous recevoir, je faisais des contes 16 ans passés sur
00:11 MCI, vous avez créé là-bas premier magazine d'investigation d'MCI, Secrets d'actualité,
00:15 puis vous avez présenté Capital, vous étiez le rédac chef, vous partez ensuite dans le groupe
00:18 Canal+, vous y restez 6 ans avant d'être nommé directeur des antennes et de la stratégie de
00:22 Radio France, ça n'a pas duré longtemps. Vous revenez à la télé via des entretiens sur LCP,
00:25 la chaîne parlementaire où vous réalisez ce documentaire très remarqué en immersion avec
00:30 Emmanuel Macron au moment où se déclenche la guerre en Ukraine, 6 mois de tournage.
00:34 Votre actualité, c'est ce documentaire "Congo, menaces sur la forêt tropicale".
00:38 Ça passe ce soir à 20h45, c'est important de le dire, sur Ushuaïa TV, dans une nouvelle
00:43 collection Terre d'urgence, une collection imaginée par vous. Quel est l'angle au moment où il y a
00:48 de plus en plus d'émissions qui se lancent sur ce créneau ?
00:52 L'angle c'est très simple, c'est qu'il y a des années, j'avais raconté l'impact de l'activité
00:57 humaine sur la planète et comment en gros on contribue par notre style de vie, consommation,
01:01 production, distribution, à réchauffer la planète, c'était capital Terre, et des années plus tard,
01:08 il me semble que l'urgence elle est ailleurs, les solutions on ne les a pas encore. En revanche,
01:13 on voit bien, le climat s'impose à nous, nous ici en France, problématique de l'eau, sécheresse,
01:20 montée des océans, incendie, la question c'est comment on s'adapte ? Or, dans le monde, il y a des
01:26 gens qui vivent aux avant-postes de l'impact climatique, des extrêmes climatiques, et ce qui
01:31 m'intéresse c'est de comprendre comment ces communautés humaines s'adaptent au quotidien,
01:37 face à la montée des océans ici, à la déforestation là, à la fonte des glaces, qu'est-ce que ça veut
01:44 dire de vivre avec un climat qui se dérègle et qui se déchaîne ? - Alors justement, quand on parle
01:50 de déforestation, on pense en premier lieu à la forêt amazonienne, et beaucoup moins de la forêt
01:55 tropicale du Congo, qui ne fait pas les gros titres, et qui est pourtant le deuxième poumon de la
01:59 planète, 314 millions d'hectares, et certains en disparition, pourquoi on en parle moins ? - Écoutez,
02:05 ça c'est difficile de répondre à cette question... - Parce que c'est moins grave, ou parce que c'est
02:09 comme ça, il y a un tropisme journalistique, et que c'est plus facile de taper sur Bolsonaro ? - Je pense
02:13 pas que ce soit ça, je pense que d'abord le Congo, la République démocratique du Congo, c'est un pays
02:19 qui est très complexe, qui est à la fois très riche et très pauvre, très riche parce qu'il
02:26 recèle d'un nombre absolument incalculable de ressources naturelles, les minerais, le pétrole,
02:33 l'argent, des éléments absolument essentiels pour faire fonctionner nos appareils électroniques,
02:40 et la forêt. Or, par ailleurs, c'est un pays d'une extrême pauvreté, et effectivement ce qu'on sait
02:47 peu, c'est que la forêt est en train de vivre une décimation absolument spectaculaire, sachez que
02:54 tous les ans, plus d'un million d'hectares de forêt disparaissent au Congo. - 1 250 000 hectares, ce
03:02 qui est phénoménal, j'ai repassé la bande, enfin c'est pas une bande, mais j'ai repassé le fichier
03:06 pour être certain que ce soit le bon chiffre. - Mais vous savez Philippe, moi j'étais allé au Kivu,
03:09 puisque c'est une région très particulière, juste à côté du Rwanda, pour enquêter à l'époque avec mes
03:16 camarades de Capital sur les mines, les minerais qu'on utilise pour nos téléphones portables,
03:22 et j'y suis retourné donc dix ans après, c'est-à-dire là il y a quelques semaines, et j'ai
03:27 été frappé parce qu'il y a des choses que je n'ai pas reconnues, c'est-à-dire que j'ai vu des forêts
03:34 qui avaient disparu réellement. - Les forêts sont devenues des terrains vagues, c'est une sorte de
03:39 steppe, donc dedans, je le passe évidemment, mais il n'y a plus de gorilles, il n'y a plus de grands
03:43 singes, il y a beaucoup d'animaux qui ne peuvent plus vivre. - Un impact absolument considérable sur la
03:46 biodiversité. - Alors c'est assez extraordinaire, des images dingues, vous avez rejoint une communauté
03:52 isolée, des pygmées qui vivent à 2000 mètres d'altitude, il y a 17 familles, il ne faut plus dire
03:56 pygmées, il faut dire comment ? - Batwa. - Oui enfin, Batwa, j'aime beaucoup ce mot. - C'est une communauté au
04:01 sein de la communauté des pygmées qui est une communauté qui est discriminée, qui est opprimée,
04:07 là où ces peuples se trouvent et sont des peuples qui vivent de la forêt. Sans la forêt, ils ne
04:13 peuvent pas vivre. - Vous partez en forêt avec l'un de ses membres, des Batwa, il y a ses arbres et c'est
04:18 un peu comme une pharmacie à ciel ouvert, il y a un arbre par exemple qui peut faire passer le mal de tête.
04:23 - Ça c'est un médicament contre les maux de tête. - C'est comme de l'aspirine ? - Oui, il suffit de piler l'écorce
04:37 dans un mortier, ensuite tu presses le jus directement dans les narines, devant le soleil,
04:44 après tu te couches dans sa direction, tu vas éternuer comme ça, et après ton mal de tête diminue.
04:54 - C'est absolument magnifique et savoureux, ça marche ? - Ça marche, absolument. - Il reste combien d'arbres ?
05:01 - Un seul, dans cette forêt là, il en reste un seul et le problème c'est que Maïcha, qui est donc la
05:10 personne qu'on suivait, c'est un peu le médecin du village. - Je vous interromps parce que je
05:16 voudrais qu'on raconte pourquoi ces arbres sont déforestés, qu'est-ce qu'ils en font, parce que
05:19 c'est une sorte de carburant dont le mot m'échappe à l'instant, le makala.
05:25 - En gros le makala, en swahili ça veut dire le charbon de bois,
05:30 et ce qui se passe, en fait tout ça est un problème qu'on connaît très bien ici, et nous c'est l'énergie.
05:36 En République démocratique du Congo, 95% de la population n'a pas accès à l'électricité,
05:44 donc il n'y a pas d'énergie. Sans énergie on ne peut pas vivre, donc qu'est-ce qui se passe ?
05:49 Il y a des trafiquants de bois qui coupent des forêts entières pour carboniser ce bois qui est
05:56 très souvent très précieux et le transformer en charbon de bois, et ainsi permettre aux populations
06:02 de pouvoir chauffer leurs aliments, avoir de l'eau chaude, bref de l'énergie nécessaire à la vie quotidienne.
06:10 - Vendu dans des sacs, une image dingue, c'est l'autoroute du Nord qui vous y a des sacs de makala
06:14 qui sont chargés sur des camions des hauteurs impensables en Europe, sur des motos.
06:17 La mobilette elle peut emporter une dizaine de sacs de 30 kg, ça lui fait 2 m d'envergure de chaque côté,
06:23 c'est complètement saisissant, et vous avez rencontré un caïd qui a la tête d'une petite équipe,
06:28 il fait abattre et brûler des arbres dans la forêt, ça lui rapporte 500 euros par mois, on va se dire c'est peu,
06:33 non, c'est 10 fois le salaire moyen au Congo. Comment avez-vous réussi à le convaincre de vous parler ?
06:37 Il a l'air tranquille lui. - C'était compliqué, ça fait partie des deux.
06:41 - Ça mélange les deux. Mais il n'a pas l'impression de faire quelque chose de mal.
06:45 Il sait que c'est illégal, il ne pense pas faire le mal.
06:49 - Il faut savoir qu'on est dans un des pays les plus pauvres de la planète, un des pays les plus chauds de la planète
06:53 parce qu'il y a une guerre civile, que cet individu fait partie des rebelles, des groupes armés,
06:59 vous savez c'est vraiment Joseph Conrad, c'est au cœur des ténèbres,
07:04 et en gros il a la possibilité de faire ça parce qu'il est protégé par des groupes armés
07:10 qui se battent contre l'armée congolaise. Pourquoi ?
07:13 Parce que toute l'idée c'est d'avoir une forme de prédation sur les ressources naturelles.
07:17 Et la forêt en fait partie. Et donc c'est en parlementant des heures, des jours durant,
07:22 avec lui et ses chefs de guerre, qu'on a réussi avec Guillaume Viard
07:26 à aller in fine pouvoir le suivre dans son activité.
07:31 - Mais là où c'est vraiment incroyable c'est qu'on a l'impression qu'il vous parle comme un ami.
07:35 Tout d'un coup il est en confiance.
07:36 - C'est le temps long qui permet ça.
07:38 - Exactement. C'est ce que j'allais dire, et justement ce que le temps long le temps file,
07:42 c'est pas la moindre des qualités de ce reportage.
07:44 Il y a mille choses que je voulais évoquer, je voulais parler aussi des gardes forestiers,
07:47 je voulais aussi parler du retour des hippopotames,
07:49 je voulais parler d'une solution où on arrive à se chauffer avec de l'argile.
07:52 J'y crois même pas, mais évidemment ça marche, sinon ça serait pas dans le sujet.
07:55 Je vous remercie Guilla Ga, je rappelle ce doc "Congo, menaces sur la forêt tropicale"
07:59 c'est à voir ce soir à 20h45 pas 21h sur Ushuaïa TV,
08:03 et dans une nouvelle collection qui s'appelle "Terre d'urgence".
08:05 Merci d'avoir été avec nous. - Merci infiniment.
08:07 en direct sur Off1.

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