• il y a 2 ans
Cédric Groulier, maître de conférence en droit public à Sciences Po Toulouse

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Transcription
00:00 - Exact, à la radio, à la télé, sur France 3 Occitanie.
00:02 Nous sommes le jeudi 13 avril, 8h moins le quart.
00:04 Est-ce la manif de la dernière chance contre cette réforme des retraites ?
00:07 Est-ce que vous avez envie de passer à autre chose ?
00:09 05 34 43 31 31, on fait de la pédagogie ce matin avec notre invité
00:13 qui peut aussi répondre à vos questions.
00:15 Vous n'hésitez pas, on est avec un spécialiste du droit public à Sciences Po Toulouse.
00:19 - Bonjour Cédric Groulier. - Bonjour.
00:21 - Le Conseil constitutionnel se prononce donc demain sur la conformité du texte sur la réforme des retraites.
00:27 Y a-t-il franchement, Cédric Groulier, beaucoup de suspense ?
00:31 - Je vais peut-être vous décevoir, mais rappelez, il y a quelque chose qui est très attendu.
00:35 C'est qu'effectivement, il y a peu de suspense.
00:37 On ne s'attend pas à une censure totale du texte.
00:42 Les spécialistes de droit constitutionnel s'attendent plutôt à une censure partielle
00:48 sur des dispositions qui ne seraient pas fondamentales dans le projet de retraite.
00:52 Notamment, on a beaucoup parlé il y a quelques semaines déjà
00:57 du risque de la présence de cavaliers sociaux dans ce texte.
01:00 C'est-à-dire des dispositions qui n'ont pas directement de lien avec le financement de la sécurité sociale
01:05 et qui pour cette raison n'auraient pas leur place dans un texte tel que celui qui a été voté.
01:13 Donc ça pourrait être un motif d'inconstitutionnalité, mais partiel seulement,
01:17 qui n'invaliderait pas la totalité du texte.
01:19 Et ça irait, ça, aux deux camps, à la fois à la Macronie, au gouvernement et à Emmanuel Macron,
01:24 parce que ça ne le mettrait pas trop en porte-à-faux, et peut-être aussi à la fois aux syndicats ?
01:29 Alors c'est une manière pour le Conseil constitutionnel d'éviter de désavouer politiquement
01:35 le président de la République, et le gouvernement aussi.
01:38 Et c'est une manière, quelque part, de ne pas vraiment trancher.
01:43 Je ne suis pas sûr que, dans la mesure où ne serait pas remise en cause le cœur de cette réforme
01:48 qui est bien sûr le recul de l'âge de départ à la retraite,
01:52 je ne suis pas sûr que cette décision soit de nature à apaiser le mouvement social.
01:58 Oui, parce que ce qu'il faut bien expliquer, c'est que le Conseil constitutionnel,
02:00 il s'exprime sur la procédure, la conformité, mais pas la légitimité de ce texte-là.
02:06 Alors, le Conseil constitutionnel, il va délivrer une interprétation au terme d'une analyse juridique.
02:13 Alors c'est une analyse qui est souvent présentée comme très juridique, avec des arguments de droit,
02:19 mais évidemment, ces décisions ont des impacts politiques,
02:23 et derrière ces arguments de droit se cachent aussi des positionnements qui sont nécessairement politiques.
02:30 Ah oui, alors que le Conseil constitutionnel est censé être une institution, on va dire, neutre,
02:35 ce sera forcément une décision politique ? C'est ce que vous nous dites ?
02:38 Parce que la matière qu'il a à juger, la loi, c'est fondamentalement politique.
02:43 Donc il ne peut pas s'extraire de cette condition.
02:46 Et le fait qu'une partie des membres du Conseil constitutionnel aient été choisis par Emmanuel Macron,
02:50 ou ses proches, et qu'ils soient, on va dire, en majorité de centre droit, là aussi ça joue ?
02:56 Alors, un ancien président du Conseil constitutionnel, Robert Banninter,
03:00 disait que les membres avaient un devoir d'ingratitude,
03:03 ils devaient oublier qui les avait nommés pour exercer leur fonction en toute indépendance,
03:07 qui faisait partie du statut des magistrats, des membres du Conseil constitutionnel,
03:11 pas magistrats justement, mais donc on peut espérer qu'ils oublient leur affiliation politique antérieure,
03:21 mais évidemment c'est plus compliqué que ça dans la réalité de mise en œuvre de leur office.
03:28 Il va rarement d'autre manière à l'encontre frontale du pouvoir, le Conseil constitutionnel ?
03:33 C'est rare, c'est rare, il n'y a quasiment pas d'exemple de censure avec une telle portée.
03:40 C'est une décision vraiment historique, demain ?
03:44 Alors, tout dépendra du contenu de la décision, alors on sait qu'il y aura deux décisions,
03:48 il y aura une décision sur la constitutionnalité de la loi de réforme des retraites,
03:51 il pourrait censurer l'utilisation de l'article 47.1, c'est-à-dire la loi de financement de la sécurité sociale rectificative,
03:57 qui est considérée comme un véhicule législatif inapproprié pour porter une réforme d'une telle ampleur,
04:02 il pourrait censurer un débat parlementaire qui aurait manqué de clarté et de sincérité,
04:07 parce que l'utilisation combinée de tous les dispositifs permettant d'accélérer le débat
04:12 a porté atteinte à la sérénité de ce débat.
04:15 Donc ça peut, effectivement, s'il y a une censure sur ce terrain-là, être une décision historique,
04:19 mais ça pourrait aussi ne pas en être une, et puis on attend la décision aussi, parallèlement,
04:23 sur le référendum d'initiative partagée, qui pourrait avoir lieu.
04:28 On peut peut-être...
04:29 C'est quoi le calendrier d'ailleurs sur ce référendum ?
04:31 Le référendum d'initiative partagée, si effectivement le feu vert est donné par le Conseil constitutionnel,
04:35 qui ne voit pas d'objection à cette procédure prospère,
04:39 le calendrier, c'est 9 mois pour recueillir les soutiens populaires,
04:42 donc c'est 4,78 millions de signatures,
04:46 et une fois ces 9 mois passés, et ces signatures obtenues,
04:49 ce qui est très compliqué, on ne l'a jamais obtenue pour l'instant,
04:52 c'est un délai de 6 mois pendant lequel les assemblées ne doivent pas s'emparer du texte,
04:57 ne pas mettre le texte en discussion,
04:59 pour qu'au terme des 6 mois, un référendum soit organisé par le Président de la République.
05:03 Donc on est très très loin de l'organisation d'un référendum.
05:06 Ça pourrait être une pause, mais on voit bien qu'il y a encore des outils aux mains des syndicats,
05:11 ou des antides la gauche, de l'extrême droite aussi,
05:14 pour mobiliser les gens dans la rue, peut-être au début de l'année prochaine,
05:18 si je compte +9 mois.
05:19 Peut-être, peut-être que c'est la suite de ce mouvement.
05:22 En tout cas, le Conseil constitutionnel pourrait essayer de tempérer
05:27 la portée de sa décision, qui risque de décevoir sur la réforme des retraites en elle-même,
05:33 par justement la perspective qu'il ouvrirait sur le référendum d'initiative partagée.
05:37 Tout ça, c'est avec beaucoup de si.
05:39 On verra ça de toute manière demain après-midi, autour de 14h-15h, hein Clémence ?
05:43 C'est ça l'heure du constitutionnel ?
05:46 Oui, c'est d'annoncer à 15h, après j'espère que ce sera aussi en fin de journée.
05:49 Bon, demain, entre le début d'après-midi et la fin de journée.
05:51 Merci Cédric Roulier, maître de conférences, endroit Publications Potoulouse.
05:55 Bonne journée.

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