La Forêt Dorée, au coin de Lorimier et Sainte-Catherine Est, héberge chaque semaine une scène ouverte à tous où convergent plus d’une quarantaine de personnes. Avec ses quatre locataires qui ont décidé de ne pas se soumettre aux normes habituelles d’habitation, le lieu est un hybride entre un cabaret, une résidence d’artistes et un appartement.
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00:00 Chaque semaine, des dizaines de Montréalais se rassemblent
00:02 pour performer ou pour apprécier les performances artistiques
00:05 des autres sur la scène ouverte à tous de la Forêt d'Orée.
00:08 Par contre, la Forêt d'Orée, ce n'est pas une salle de spectacle
00:11 ni un café. C'est plutôt l'appartement de quatre colocataires
00:14 qui ont décidé de faire de leur lieu de vie un lieu d'expérimentation
00:17 et de création artistique où tous sont les bienvenus,
00:20 sauf les jugements qui sont laissés à la porte.
00:22 ♪ ♪ ♪
00:28 La Forêt d'Orée, dans le fond, c'est un grand loft
00:30 qui est sur Sainte-Catherine, dans le quartier de Ville-Marie.
00:33 Les gens, quand ils passent devant, il y a des belles grandes vitrines
00:35 et il y a souvent des gens qui rentrent et qui sont comme
00:37 « est-ce que c'est un café? » Et là, nous, on leur dit non.
00:40 Peut-être que ça va l'être un jour, mais pour l'instant, c'est notre appartement.
00:45 On est quatre personnes qui vivent ici. Il y a les chambres qui sont en haut
00:47 sur les mezzanines et dans la salle principale, c'est une grande salle
00:52 et c'est là qu'on accueille les Open Mic.
00:55 C'est un lieu, en fait, qui a été bâti dans les années 1930.
01:00 Ça fait partie, selon moi, du patrimoine de Montréal
01:03 et il y a une autre fréquence énergétique qui fait en sorte
01:06 qu'il attire depuis une dizaine d'années, justement, des groupes d'artistes.
01:10 Ça avait déjà été le réacteur nucléaire, puis ensuite, ça avait été l'Univarium.
01:15 Puis là, maintenant, ça s'appelle la Forêt d'Orée.
01:17 Puis on est un autre groupe de jeunes motivés qui veulent juste créer
01:22 et s'approfondir dans l'art.
01:25 Chaque jeudi, on accueille des Open Mic.
01:28 C'est environ un bloc de quatre heures,
01:31 puis il y a environ 40 à 60 personnes qui viennent chaque semaine.
01:36 Il y a 12 personnes qui passent par soir pour présenter un acte
01:41 ou essayer de partager une partie d'eux-mêmes,
01:45 que ce soit du cirque, de la poésie, slam, musique, puis théâtre.
01:52 Tout est bienvenu, humour.
01:53 Ce qui est cool, je pense, vraiment, c'est qu'on est des personnes
01:58 qui sont sensibles, justement, à la poésie, puis à l'art.
02:02 Puis on peut tous se rassembler ici, puis après ça, ce qui est cool,
02:05 c'est la rencontre, parce qu'on rencontre vraiment des bonnes personnes.
02:11 Ce qui est venu vraiment inspirer une vision quand on est arrivé ici,
02:16 c'est surtout que maintenant on a l'espace de justement mettre l'art de l'avant.
02:25 Puis ce n'est pas comme dans un bar où on met l'art,
02:29 mais c'est juste pour attirer du monde, pour pouvoir vendre des bières.
02:34 Là, c'est vraiment un moment où on peut démocratiser la scène
02:39 puis faire comme être à tout le monde, puis se mettre de l'avant.
02:43 Ça permet l'expression.
02:44 C'est un peu comme une thérapie de groupe qu'on fait tout ensemble à être ici,
02:48 puis à se partager notre paysage émotionnel.
02:52 Je ne crois pas qu'il y ait des non-artistes.
02:55 Il y a juste des gens à qui on a tué l'artiste en eux,
02:58 puis on leur a fait croire qu'il n'était pas assez bon.
03:01 Puis ici, il n'y a pas de moins bon ou meilleur.
03:06 Notre but, c'est de mettre l'art de l'avant pour ce que c'est,
03:09 une recherche, un regard sur soi-même.
03:13 Ça apporte beaucoup de bien.
03:17 Il y a des gens qui pleurent ici, il y a des gens qui se découvrent ici.
03:22 Puis c'est pour ça qu'au début, on a juste lancé une graine,
03:26 puis ça a tellement germé que maintenant on est comme...
03:29 On suit le bateau.
03:30 Il y a juste beaucoup de potentiel ici.
03:33 On se laisse porter par ce que ça peut être, ce potentiel-là.
03:37 Je trouve ça cool d'avoir un espace de soi,
03:39 où même les enfants peuvent venir.
03:41 Où ce n'est pas comme un « trash »,
03:45 où c'est un lieu où on peut se rassembler.
03:47 C'est ça qui, pour moi, fortifie une communauté,
03:50 le fait qu'on puisse se parler.
03:52 On essaie de cultiver le fait qu'on peut « rely » sur les uns et les autres,
03:57 puis s'aider, être une communauté.
03:59 À Montréal, c'est ça la force, c'est la proximité,
04:04 comme on est prêts.
04:05 Ça devrait être une force, pas une faiblesse.
04:08 Pour l'instant, tout ce qu'on fait, on le fait bénévolement.
04:11 On met notre 110 % à ça,
04:14 mais on fait tout ça comme bénévolement.
04:16 Puis on a d'autres activités à côté.
04:18 Dans les débuts, on était comme « let's go, on va faire les lundis jazz,
04:23 les mardis théâtre, les mercredis café, les jeudis cinéma, pop-corn ».
04:30 Puis on est humain, il faut respecter notre énergie
04:33 et ce qu'on est capable de tenir.
04:35 Parce qu'en fait, quand les gens sont ici,
04:37 nous, on n'a pas de maison où se réfugier, d'endroit où se réfugier.
04:41 C'est ici notre maison.
04:42 Il y a eu le défi d'aller chercher cet équilibre-là.
04:46 Pour l'instant, on se concentre sur les « open mic »,
04:49 pensant que ça soit cool.
04:51 Puis peut-être que dans le futur, on va être comme
04:55 éligible à des subventions,
04:57 puis qu'on va pouvoir justement créer plus d'activités.
05:01 C'est comme la chambre des secrets dans Harry Potter,
05:04 qui est juste venue là pour nous aider à se donner les moyens.
05:07 Puis ici, ce qu'on fait, c'est qu'on se donne les moyens d'être sur scène
05:10 puis de se pratiquer à parler à 60 personnes
05:13 sans avoir le shake qui t'empêche d'être toi-même.
05:16 On invite les gens à se permettre d'être vulnérables.
05:19 Puis on crée ce cadre sécuritaire-là où ils peuvent.
05:21 On est un peu l'ordre du phénix qui milite contre un gouvernement
05:25 qui est répresseur, qui est archaïque,
05:27 qui construit un monde biblique,
05:29 puis gris, gris biblique,
05:32 dans lequel moi, j'asphyxie.
05:34 Je me sens comme claustrophobique dans ce monde-là.
05:37 Ici, c'est comme un espace où je peux respirer
05:39 et c'est ça un peu que j'ai envie de partager.
05:42 La Forêt de l'Orée commence à avoir trop de monde,
05:45 victime de sa popularité.
05:47 À un moment donné, on ne pourra pas juste continuer
05:49 de s'accumuler de même.
05:51 Puis ça, en fait, c'est correct.
05:53 Ce que ça apporte, c'est juste qu'il va en falloir
05:55 des nouvelles places comme ça. Il va en falloir plus.
05:57 Parce que peut-être que c'est là qu'on est rendus,
05:59 en tant que société, d'arrêter de juste construire
06:03 des infrastructures, des ponts en béton.
06:05 Peut-être qu'il faut construire des ponts dans nos consciences
06:09 puis peut-être entre nous.
06:11 Il y a beaucoup de monde qui nous ont dit,
06:13 ça m'a aidé à traverser l'hiver.
06:16 Je suis comme, voyons donc,
06:19 qu'il n'y a pas ça à chaque coin de rue.
06:21 Alors que c'est si facile, finalement,
06:23 il faut juste se réunir ensemble.
06:25 Parce que je pense que finalement, ce qui fait
06:27 la Forêt de l'Orée, ce n'est pas juste le lieu,
06:29 c'est le fait qu'on vienne ici.
06:31 C'est les gens qui viennent pour se rencontrer.
06:33 Puis qu'ils viennent et qu'ils font l'effort
06:35 d'apporter un peu leur « e » dans le non-jugement,
06:39 leur « e » vulnérable.
06:41 Ça permet vraiment, tu rencontres l'autre
06:43 aussi loin que tu te rencontres toi-même.
06:45 Là, on peut se rencontrer pour vrai.
06:47 [Musique]