Xerfi Canal a reçu Emmanuel Kamdem, professeur émérite à l’ESSEC Douala, IME Business and Engineering School, pour parler de la valorisation des pratiques de GRH en contextes africains.
Une interview menée par Jean-Philippe Denis.
Une interview menée par Jean-Philippe Denis.
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00:00 Bonjour Emmanuel Kamdem.
00:10 Bonjour Jean-Philippe.
00:12 Emmanuel Kamdem, vous êtes professeur émérite à ESSEC Douala.
00:15 Vous êtes également professeur à IME Business and Engineering School.
00:20 Emmanuel Kamdem, vous venez de diriger, avec plusieurs co-auteurs,
00:27 la gestion des ressources humaines en Afrique subsaharienne et en Afrique du Nord,
00:31 presse de l'Université de Québec.
00:33 Emmanuel Kamdem, première question, finalement,
00:36 les pratiques africaines en matière de gestion des ressources humaines,
00:40 il faut les comprendre et il faut les valoriser.
00:43 C'est ça l'objectif de votre roi, c'est une somme, près de 500 pages.
00:46 C'est une somme.
00:48 Vous dites maintenant, ça suffit de faire de l'import en Afrique,
00:52 il est temps d'exporter les recettes africaines en matière de GRH,
00:56 les pratiques, on va dire recettes, à l'extérieur de l'Afrique.
00:59 C'est ça le projet de l'ouvrage ?
01:00 Absolument, c'est cela le but de l'ouvrage.
01:04 D'abord, mieux découvrir, mieux comprendre ce qui se fait dans les contextes africains
01:09 et voir comment ce qui se fait en matière de pratiques de GRH
01:13 pourrait être valorisé, pourrait être internationalisé.
01:17 Parce que nous sommes aujourd'hui dans un contexte d'internationalisation des affaires.
01:23 L'Afrique devient en quelque sorte le relais de la croissance économique mondiale.
01:27 Et il me semble important que ce qui se fait en Afrique en matière de management
01:31 et singulièrement en matière de management de ressources humaines
01:35 soit non seulement mieux connu en Afrique par les Africains,
01:38 mais soit également mieux connu en dehors de l'Afrique
01:41 par les personnes non africaines qui s'intéressent à ce qui se passe en Afrique.
01:46 Vous travaillez toutes les dimensions de la gestion des ressources humaines,
01:50 depuis le recrutement, l'influence du contexte sur les pratiques de ressources humaines,
01:55 les rémunérations, les salaires,
01:57 enfin voilà, tout, la formation, la gestion des compétences.
02:00 J'ai envie de vous poser une question assez large.
02:03 Plus de 30 ans de carrière à l'ESSEC Douala.
02:07 Quel regard vous portez précisément ?
02:10 Quel message vous avez à faire passer au monde
02:13 sur cette singularité des pratiques africaines ?
02:17 Le principal message serait de dire que l'Afrique, par le passé,
02:22 a produit des valeurs, a produit des recettes, a produit des solutions.
02:27 Bon, il se trouve que pour des raisons historiques,
02:31 ces solutions n'ont pas été suffisamment...
02:33 Ces solutions aux problèmes africains, je veux dire,
02:35 n'ont pas été suffisamment prises en compte, valorisées par les Africains
02:39 qui ont plutôt fait le choix d'importer des solutions venant de l'extérieur.
02:45 Et on se rend compte qu'aujourd'hui, il est important
02:49 de reconnaître ce qui se fait en Afrique.
02:51 Et tout ce que je dis là s'inscrit un peu dans la trajectoire des travaux
02:54 de Cheikh Anta Diop, ce grand historien africain
02:59 qui a montré l'importance des savoirs traditionnels africains.
03:04 Or, notre préoccupation aujourd'hui en tant que manager,
03:06 manager des ressources humaines, c'est de dire qu'est-ce qu'on peut tirer
03:10 de ces savoirs, de ces pratiques africaines
03:13 pour améliorer les pratiques contemporaines dans les entreprises ?
03:18 Évidemment, toute la question des communautés, par exemple,
03:20 devient critique pour toutes les entreprises.
03:23 On le voit bien et l'Afrique est aux avant-postes sur ces questions.
03:27 Tout à fait. Elle est aux avant-postes.
03:30 Autre point, un contexte géopolitique qui n'est quand même pas
03:33 tout à fait anodin aujourd'hui.
03:35 Absolument. Nous sommes dans un contexte géopolitique mondial
03:40 où l'Afrique attire de plus en plus d'investissements en direct étrangers,
03:45 où l'Afrique attire ses fils et ses filles qui sont partis
03:50 travailler, s'installer hors du continent
03:55 et qui aujourd'hui aspirent à retourner en Afrique.
03:58 Et donc, un ouvrage comme celui-là, c'est de leur montrer
04:02 qu'est-ce qu'il est possible de faire en matière notamment de gestion
04:05 des ressources humaines, c'est de leur faire redécouvrir
04:08 les réalités africaines et susciter ainsi des échanges
04:13 fertilisants entre différentes communautés épistémiques africaines.
04:18 Question politiquement incorrecte.
04:22 On en discutait en aparté en préparant cette émission.
04:25 L'Afrique, c'est aussi un passé colonial avec une relation
04:28 à la question francophone singulière.
04:31 Et aujourd'hui, les grands acteurs d'influence s'appellent la Chine,
04:35 s'appelle l'Inde.
04:37 Quel message, finalement, vous avez envie de faire passer
04:39 aux élites françaises dans leur relation à l'Afrique
04:41 et aux élites africaines dans leur relation ?
04:43 Le principal message de mon point de vue
04:46 est de dire au fond, aujourd'hui, c'est vrai, l'Afrique suscite des convoitises
04:51 diverses, donc il ne faudrait pas penser qu'aujourd'hui, l'Afrique
04:55 est le monopole de tel ou tel pays.
04:57 L'Afrique, aujourd'hui, attire les investisseurs et c'est ceux et celles
05:02 qui répondent aux besoins de l'Afrique,
05:04 qui sont susceptibles d'avoir leur place en Afrique.
05:07 Et l'autre volet de ce message est que celles et ceux qui arrivent en Afrique
05:13 doivent se dire qu'ils n'apportent, ou qu'ils n'ont pas vocation
05:17 ou qu'ils n'ont pas vocation à apporter des solutions toutes faites
05:20 aux problèmes africains.
05:22 Il faudrait qu'ils viennent pour se poser d'abord la question
05:26 qu'est-ce qui se fait pratiquement, concrètement sur les terrains africains
05:30 et comment ce qui se fait sur les terrains africains pourrait être mieux
05:34 connu, mieux valorisé, mieux mis en œuvre
05:37 pour créer un tremplin vers l'ouverture de l'Afrique à l'international.
05:43 C'est absolument passionnant parce que c'est une somme,
05:47 où enfin, on parle de l'Afrique depuis l'Afrique.
05:52 Merci Manel Kabilen.
05:53 Absolument.
05:53 Merci à vous.
05:55 Merci Jean-Philippe.
05:56 Merci à vous.
05:58 [Musique]