• il y a 11 mois
Xerfi Canal a reçu Jacques Igalens, professeur émérite à l’IAE Toulouse school of management, Directeur honoraire de Toulouse Business School et Président honoraire de l’association de gestion des ressources humaines (AGRH), pour parler des racines américaines de la RSE.
Une interview menée par Jean-Philippe Denis.

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Transcription
00:00 Bonjour, Jacqui Galins.
00:10 Bonjour, Jean-Philippe.
00:11 Jacqui Galins, grand plaisir de vous recevoir pour évoquer Splendeur et Misère de la RSE
00:16 Collection, j'allais dire Collection, le Collège de France de la gestion des grands
00:19 auteurs francophones, édition EMS.
00:22 Jacqui Galins, vous êtes professeur émérite à l'IEA, Toulouse School of Management,
00:27 vous êtes directeur honoraire de Toulouse Business School.
00:29 Vous êtes président honoraire de l'AGRH qui est l'association de référence de gestion
00:32 des ressources humaines, l'association scientifique.
00:35 Splendeur et misère de la RSE, alors c'est un ouvrage qu'il faut lire, il faut lire
00:41 intégralement, il faut faire lire parce qu'on sait que le gouvernement nous dit que tous
00:45 les jeunes doivent être formés à la question de la RSE et c'est le premier ouvrage qui
00:51 fait cette synthèse globale très critique de la RSE et c'est absolument passionnant.
00:57 Et alors, premier point qui rend votre ouvrage passionnant, c'est le travail généalogique,
01:01 c'est-à-dire comment la RSE, qui est aujourd'hui dans toutes les têtes, en fait nous vient
01:05 d'assez loin et j'ai envie de dire à traverser l'Atlantique et ça on le sait
01:09 rarement.
01:10 Tout à fait, effectivement, c'est un concept qui vient des États-Unis, des années 50,
01:16 d'un professeur d'université qui était un keynésien, un économiste, Howard Bowen,
01:22 et en plus c'est un ouvrage de commande puisqu'au départ il répond à une commande
01:27 et une commande des églises protestantes américaines qui cherchent, après le second
01:32 conflit mondial, à donner un petit peu de moralité aux affaires et à dire finalement
01:38 qu'elle doit être un petit peu l'éthique, la déontologie du chef d'entreprise.
01:42 Et Howard Bowen donc écrit un ouvrage, Social Responsibilities of the Businessmen, qui n'a
01:48 jamais été traduit en français et dans lequel pour la première fois il parle de
01:53 la responsabilité sociale.
01:55 Alors cette idée, dès le départ, va être contestée.
01:58 Dès le départ, cette idée va un petit peu prendre à rebours les idées libérales des
02:06 économistes américains.
02:07 L'école de Chicago, Friedman.
02:09 Absolument.
02:10 Et celui qui va avoir, c'est pas le seul, mais celui qui va avoir une critique assez
02:15 forte, effectivement c'est Friedman, qui va écrire cette responsabilité sociale.
02:20 En gros, non seulement c'est une ânerie, mais en plus c'est dangereux.
02:24 La seule responsabilité sociale des entreprises, c'est de faire le maximum de profit pour
02:31 les actionnaires, puisque les dirigeants ne sont que les mandataires des actionnaires.
02:35 Et on voit déjà la confusion qui arrive entre la propriété des actions et la propriété
02:42 de l'entreprise.
02:43 Friedman, n'est-ce pas, limite l'actionnaire, enfin plus exactement dit que l'actionnaire
02:48 est propriétaire de l'entreprise et que donc l'entreprise doit travailler exclusivement
02:53 pour lui.
02:54 Il n'empêche que l'idée est lancée et que d'autres auteurs vont reprendre l'idée
03:00 et la compléter.
03:01 Parce qu'il faut bien reconnaître que la définition est un peu floue, n'est-ce pas,
03:05 s'accorder aux idées, aux idéaux, aux us et coutumes de la société, c'est un peu
03:11 floue et donc certains vont essayer de préciser.
03:14 En particulier Keith Davis va écrire à peu près dans les années 60 également que l'ARSE
03:21 pour lui ce sont les décisions et les actions qui sont prises pour des raisons au-delà
03:28 de tout intérêt direct de l'entreprise.
03:30 Et il ajoute, ce qui me paraît intéressant, que la responsabilité sociale est justifiée
03:37 par des gains économiques dans le très long terme.
03:39 Pourquoi c'est intéressant ? Parce qu'on voit apparaître ce qui ensuite va devenir
03:44 le développement durable, c'est-à-dire le très long terme et pas simplement le court-termisme
03:50 des décisions économiques.
03:51 Deuxième personne qui est très importante puisqu'on l'a surnommée dans le milieu
03:58 un peu académique le fils spirituel de Bowen, c'est Carole, Archie pour les intimes, Archie
04:05 qui va proposer assez rapidement une pyramide de l'ARSE que tous les professeurs qui enseignent
04:12 l'ARSE reprennent, une pyramide de l'ARSE en disant il y a la base, la base ce sont
04:18 les attentes économiques de la société, puis un cran au-dessus il y a le droit, un
04:24 cran au-dessus il y a l'éthique et un cran au-dessus il y a ce qui est discrétionnaire.
04:30 Alors voilà, donc il y a durant ces années, ça va durer quand même tout ceci, va durer
04:34 à peu près 30 ans, il faut attendre donc les années 80 pour que, en gestionnaire que
04:41 nous sommes, on voit apparaître aux États-Unis d'abord le souci de l'opérationnalisation.
04:47 C'est bien beau d'avoir une définition mais comment on passe aux actes ? Je rappelle
04:52 que Bowen, lui, dès le départ il avait pensé à l'audit social, au bilan social,
04:57 mais c'est vrai que pendant 30 ans on se bat davantage sur la définition, sur la justification,
05:03 c'est-à-dire presque philosophique de la RSE, faut-il être responsable ou faut-il
05:10 simplement maximiser les profits ? Cette question effectivement est très importante et c'est
05:16 avec les années 80 qu'avec d'autres auteurs vont arriver les tentatives d'opérationnaliser
05:22 la RSE.
05:23 Splendeur et misère de la RSE, voilà pour les racines américaines de la RSE et c'est
05:29 absolument passionnant.
05:30 Édition EMS, merci Jacques Yalins.
05:33 Merci beaucoup.
05:34 [Musique]
05:39 [SILENCE]

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