• l’année dernière
Jeudi 4 mai 2023, SMART BOURSE reçoit Nadia Gharbi (Économiste, Pictet Wealth Management)

Category

🗞
News
Transcription
00:00 (Générique)
00:10 Mais d'abord, le débrief de la séquence politique-monétaire.
00:13 On est entre deux décisions, celle de la BCE à suivre en début d'après-midi
00:17 et celle de la Fed qui a été rendue publique hier soir.
00:19 Nadia Garbi est avec nous en visioconférence, économiste chez Piquet, Welsman Admon.
00:23 Bonjour et bienvenue Nadia.
00:24 Merci beaucoup d'être avec nous pour la Fed.
00:27 Il semble que l'heure de la pause soit venue.
00:30 C'est en tout cas comme ça que le marché semble avoir compris le discours,
00:34 la conférence de presse de Jerome Powell,
00:38 qui n'a pas voulu s'enfermer non plus dans l'idée d'une pause à ce stade.
00:42 On reste sur quelque chose de flexible du point de vue de la Réserve fédérale américaine.
00:47 Tout à fait. Alors c'est vrai qu'il indique que la Réserve fédérale est prête à faire une pause.
00:53 Maintenant, il a souligné le fait que l'inflation reste relativement élevée,
00:58 devrait baisser, mais devrait aussi rester à un niveau très élevé.
01:03 C'est la raison pour laquelle, à mon avis, je pense qu'il garde un peu la porte ouverte.
01:07 C'est qu'on a tout de même un contexte un peu d'incertitude
01:10 où on voit, c'est vrai, un ralentissement du marché du travail,
01:14 mais un marché du travail qui reste relativement encore résilient aux États-Unis.
01:19 Même le resserrement des conditions du crédit bancaire aux États-Unis
01:26 ou de la distribution même de crédit.
01:28 On sait que la Fed avait en sa possession le dernier sondage réalisé
01:33 auprès des senior loan officers américains.
01:36 Ce sondage sera rendu public en début de semaine prochaine.
01:39 Même l'intensification, on va dire, du durcissement des conditions de crédit
01:43 ne sera peut-être pas suffisant pour accélérer le phénomène de désinflation aux États-Unis, Nadia ?
01:49 Oui, alors je dirais que ces données confirment que la politique monétaire restrictive
01:54 de la Réserve fédérale se transmet à l'économie réelle,
01:58 ce qui, en quelque sorte, réduit les risques sur les perspectives d'inflation.
02:03 Maintenant, il est vrai qu'on a un peu d'incertitude sur la vitesse de transmission
02:07 de cette politique monétaire sur les économies réelles.
02:11 On sait qu'il y a certains facteurs structurels qui ont changé.
02:15 Donc je dirais que la Réserve fédérale garde quand même toutes les portes ouvertes
02:21 pour ne pas éviter de, au fond, se corneriser en quelque sorte
02:26 et de voir un peu ou perdre un peu sa crédibilité.
02:29 Donc gardons les portes un peu ouvertes dans ce contexte un peu d'incertitude.
02:33 Oui, ne pas se lier les mains sur les prochaines décisions à prendre.
02:39 Comment est-ce qu'on explique, et cette question revient régulièrement, Nadia,
02:42 comment on explique ces anticipations de marché qui voient peut-être même un début
02:47 d'une première baisse de taux dès le mois de juin aux États-Unis,
02:51 c'est-à-dire lors du prochain meeting dans six semaines ?
02:54 Ça paraît extrêmement rapide.
02:57 Oui, alors pour nous, c'est purement trop prématuré.
03:00 Du moins, si on se base sur les indicateurs économiques,
03:04 une baisse de taux en juin est pour nous trop prématurée.
03:08 Alors au fond, si la Réserve fédérale baisse ses taux en juin,
03:12 on pourrait aussi l'interpréter comme un signe de, au fond,
03:15 est-ce que la Réserve fédérale sait quelque chose que nous ne savons pas ?
03:19 Maintenant, je pense qu'à mon avis,
03:21 Powell a aussi été clair là-dessus en insistant sur le fait que l'inflation va baisser,
03:26 mais pas si rapidement que cela.
03:28 Et il a aussi ajouté que sa mesure phare,
03:32 ce super corps service hors immobilier, reste tout de même très persistant.
03:38 Donc c'est la raison pour laquelle, en tout cas,
03:40 nous, on juge une baisse de taux en juin très prématurée.
03:44 Et d'ailleurs, dans notre scénario, on n'a aucune baisse de taux pour 2023.
03:49 Bon, ces anticipations, ce pricing de marché, effectivement,
03:51 c'est une moyenne agrégée de plein d'opinions
03:55 et plein d'avis différents de la part des investisseurs.
03:58 Néanmoins, il existe.
03:59 Est-ce qu'on peut relier ce pricing de baisse de taux aux États-Unis, Nadia ?
04:04 Alors, à la situation du système bancaire,
04:07 avec un effet ou un jeu de domino qui semble engagé désormais,
04:12 est-ce qu'on peut le relier également à la question du plafond de la dette,
04:15 qui est là un folklore récurrent dans la vie politique américaine,
04:19 mais qui semble-t-il est pris un peu plus au sérieux cette fois-ci,
04:22 avec une date X qui a été fixée au 1er juin par la secrétaire du Trésor, Janet Yellen.
04:30 Oui, je pense que ces deux éléments font que le marché est un peu plus pessimiste,
04:34 peut-être, que certains économistes.
04:36 Au fond, je dirais que c'est vrai qu'on a ce stress bancaire,
04:41 avec déjà trois faillites bancaires,
04:43 et à cela s'ajoute, c'est vrai, cette incertitude sur la politique fiscale,
04:47 sur ce debt si ligne qui n'arrange pas les choses.
04:52 Donc oui, je pense que vraiment ces deux éléments participent à ce pricing de marché.
04:57 Du côté de la Banque Centrale Européenne, la décision est en train d'être prise,
05:02 elle a même peut-être déjà été prise au moment où on se parle, Nadia,
05:05 elle sera rendue publique en début d'après-midi avec la conférence de presse de Christine Lagarde.
05:11 On a eu beaucoup de données économiques,
05:14 de données en provenance également de l'industrie bancaire,
05:17 avec le Bank Lending Survey qui a été publié ces derniers jours,
05:20 et qui couvre le premier trimestre, et notamment la période du mois de mars,
05:24 qui a été le pic du stress bancaire aux États-Unis,
05:27 et en Europe, qu'est-ce que ces données sur le front de la croissance, de l'inflation,
05:31 des conditions et de la distribution de crédits en zone euro,
05:34 qu'est-ce que ces données doivent apporter comme informations à la BCE pour sa prise de décision selon vous ?
05:41 Je dirais que la première conclusion qu'on peut tirer de ces données,
05:44 c'est que la transmission de la politique monétaire fonctionne dans l'économie réelle,
05:50 ce qui réduit les risques sur les perspectives d'inflation.
05:53 Quand on regarde cette enquête de la BCE sur les prêts bancaires,
05:58 on s'aperçoit tout d'abord que les conditions d'octroi de crédit se resserrent assez fortement pour les entreprises,
06:04 mais surtout ce qu'on constate, c'est la demande de prêts qui diminue fortement pour les entreprises
06:10 et qui s'effondre pour les ménages, notamment le segment crédit immobilier,
06:16 où la baisse est plus forte que lors de la crise financière.
06:20 Donc je dirais que ces données sont cohérentes avec une politique monétaire qui se transmet à l'économie réelle.
06:27 Maintenant, c'est vrai que si on regarde le dernier rapport d'inflation, l'inflation du mois d'avril,
06:32 ce qu'on constate, c'est toujours cette inflation sous-jacente très persistante,
06:37 avec notamment cette inflation service qui reste très élevée.
06:41 Donc je dirais que pour nous, un bon compromis serait une hausse de 25 points de base aujourd'hui,
06:47 mais au fond, on pourrait avoir aussi des arguments qui poussent la BCE à faire 50 points de base,
06:53 notamment cette inflation sous-jacente très persistante, mais aussi la forte croissance des salaires nominaux.
07:00 Mais je dirais que voilà, un bon compromis serait 25 points de base.
07:03 Et si on regarde ce que les HAUK, certains membres de la BCE, ont dit ces dernières semaines,
07:10 on s'aperçoit qu'ils sont devenus un peu plus pragmatiques
07:14 avec l'idée qu'on doit maintenant agir de manière plus prudente,
07:18 étant donné que tout l'impact de ce resserrement n'a pas encore été vu sur l'économie réelle.
07:24 Entre les données sur le crédit bancaire, là, qui montrent effectivement cet affaiblissement
07:28 de la demande de crédit bancaire en provenance des entreprises et des ménages, Nadia,
07:34 quand on met en parallèle également les enseignements, peut-être, des premières estimations de croissance
07:38 qu'on a pu voir pour différents pays de la zone euro au premier trimestre,
07:42 notamment avec des dépenses de consommation sous pression dans de nombreux pays en Europe,
07:48 pour ne pas dire dans l'ensemble de la zone euro.
07:50 Nadia, est-ce qu'on a un réel problème avec la demande privée finale aujourd'hui en Europe ?
07:55 C'est une bonne question. Je dirais qu'on n'a pas vraiment de réel problème.
08:00 C'est vrai que quand on regarde le détail du produit intérieur brut de certains pays,
08:05 c'est vrai qu'on constate que la consommation privée, notamment, est en contraction,
08:10 principalement due à la forte hausse des prix.
08:14 Maintenant, je dirais que d'un autre côté, on a d'autres secteurs de l'économie qui fonctionnent plutôt bien,
08:19 je pense notamment au tourisme qui supporte l'activité dans certains pays périphériques.
08:25 On a aussi la politique fiscale qui soutient l'activité en zone euro.
08:29 Donc, je dirais que globalement, c'est vrai qu'on a une demande domestique sous pression,
08:35 mais globalement, si on combine tous ces éléments, c'est-à-dire les données de crédit, la demande finale,
08:42 en principe, sur les perspectives d'inflation, on devrait être moins inquiet.
08:46 Et c'est peut-être le constat que va faire cet après-midi la Banque centrale européenne.
08:50 Cette réunion, cette conférence de presse de Christine Lagarde,
08:53 ce sera l'occasion aussi de faire un tout premier bilan d'étape de la réduction passive
08:58 du bilan de la Banque centrale européenne, puisque ça y est, on y est.
09:02 Depuis deux mois, le bilan de la Banque centrale européenne se réduit.
09:06 En tout cas, la partie du programme de quantitativisme traditionnel est en train d'être réduite.
09:13 Nadia, est-ce que la BCE aura envie d'aller plus loin encore dans la gestion de la réduction de son bilan ?
09:22 Et qu'est-ce qu'on peut dire également de la partie de la liquidité qui peut être apportée aux banques européennes
09:28 dans un contexte où la question de la liquidité en général se pose de manière assez prégnante ?
09:34 Sur le bilan, c'est vrai que dans un contexte où on cherche un peu des compromis entre les hauques et les dauves,
09:42 c'est vrai que certains hauques pourraient pousser pour une accélération du rythme de réduction du bilan.
09:49 Maintenant, je dirais qu'on a tout de même une limite, on ne peut pas réduire de manière très rapide ce bilan.
09:58 Et je dirais que sur les liquidités, c'est vrai que d'ici à fin juin, 500 milliards de TLTRO vont être remboursés.
10:08 Donc la BCE va monitorer de très près peut-être quelques banques un peu vulnérables pour éviter un peu un cas idiosyncratique.
10:16 Donc on pourrait potentiellement voir une banque centrale européenne qui propose un outil un peu ad hoc de bridge LTRO
10:25 pour éviter un stress ces prochains mois.
10:29 Dans le contexte actuel, oui, ce serait intéressant pour la BCE d'apporter un instrument en prévention d'un éventuel risque idiosyncratique
10:39 spécifique sur une ou quelques banques européennes.
10:43 Voilà, vous voulez éviter en quelque sorte un peu un cas similaire à ce qui se passe aux Etats-Unis,
10:50 où on a quelques banques qui sont un peu plus faibles ou plus vulnérables dans ce contexte actuel.
10:57 Donc effectivement, la BCE n'a pas envie de se retrouver dans ce cas de figure où le marché potentiellement commence à scruter de plus près
11:05 quelles sont les banques les plus vulnérables. Donc c'est la raison pour laquelle, voilà.
11:09 On est tout de même dans un contexte où on a beaucoup de liquidités.
11:12 Donc la liquidité n'est pas vraiment un problème.
11:15 Mais c'est vrai que c'est tout de même assez conséquent de voir 500 milliards de remboursements.
11:20 Donc voilà, je pense qu'à mon avis, la Gare de toute façon aura quelques questions sur ce sujet.
11:27 On suivra ça avec attention, effectivement.
11:30 Une réunion encore assez ouverte pour la Banque centrale européenne.
11:33 La première information sera de savoir si la BCE montera de 25 ou 50 points de base.
11:39 C'est tôt, directeur, réponse en début d'après-midi.
11:42 Et on reviendra bien sûr sur cette réunion et cette conférence de presse de Christine Lagarde ce soir à 17h dans l'émission.
11:47 Merci beaucoup Nadia.
11:48 Nadia Garbi qui était avec nous en visioconférence depuis Genève, économiste chez Pictet Wealth Management.
11:53 de la France.

Recommandations