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Chaque jour, Romain Desarbres et ses invités font un point complet sur l'actualité.
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Transcription
00:00 Voilà, enfin midi qui reprend après la pause publicitaire.
00:05 On accueille Jean-Baptiste Noyac. Bonjour.
00:08 Bonjour.
00:08 Bonjour Jean-Baptiste Noyac. Merci beaucoup d'être avec nous.
00:11 Vous êtes cofondateur du réseau Excellence Ruralité.
00:15 Et merci beaucoup d'être avec nous, puisque vous signez une tribune dans laquelle...
00:21 Allez, je vais résumer votre position.
00:25 Vous regrettez que les élèves des zones rurales soient moins bien traités que les élèves des quartiers difficiles.
00:31 Expliquez-nous.
00:32 Justement parce qu'il y a des quartiers difficiles en zone rurale.
00:35 En fait, je me suis aperçu que pour les enfants de milieux modestes ou en décrochage scolaire dans les zones rurales,
00:45 vous aviez deux fois moins de chances de bénéficier des fonds de la politique d'éducation prioritaire.
00:51 Donc les moyens supplémentaires qui sont mis là où il y a des urgences éducatives que quand vous êtes en zone urbaine.
00:58 Et donc il y a un certain nombre de critères d'affectation de ces moyens supplémentaires qui sont structurellement défavorables aux enfants des zones rurales.
01:06 Et notamment, il y en est un qui est qu'il faut appartenir à un quartier prioritaire de la politique de la ville.
01:11 Donc forcément, les jeunes ruraux sont mécaniquement exclus.
01:15 Alors il y a des exceptions, bien sûr, il y a des zones REP dans les zones rurales.
01:21 Réseau d'éducation prioritaire.
01:23 Exactement, mais ça reste des exceptions.
01:26 Alors, près de 30% des jeunes quittent le système éducatif sans qualification dans les 200 bourgs et petites villes les plus défavorisés sur le plan social et scolaire.
01:38 Tout à fait.
01:39 Et dans ces territoires-là, en fait, on est en dehors du radar.
01:42 30% ? Mais c'est énorme.
01:43 Oui, 28%.
01:44 Oui, bon, 1 sur 4.
01:45 Exactement.
01:46 Et dans ces territoires-là, on est en dehors du radar de la politique d'éducation prioritaire parce qu'il faut avoir au moins 10 000 habitants pour un quartier prioritaire de la politique de la ville.
01:55 Et on est en fait dans des villes qui sont de 2 à 8 000, c'est-à-dire en fait des villes qui ne sont pas comptabilisées comme les zones rurales.
02:03 Et donc, on est un peu dans un "no man's land".
02:08 Qu'est-ce qu'ils font, ces jeunes qui quittent le système scolaire sans qualification ?
02:13 Malheureusement, beaucoup après se retrouvent au minima sociaux, se retrouvent dans des situations difficiles ou dans une forme de débrouille de vie un peu parallèle.
02:24 En tout cas, ils ne peuvent pas déployer tout leur talent et tout l'enjeu pour nous, c'est d'arriver à créer des modèles éducatifs, des projets qui permettent à ces jeunes de se révéler, à ces jeunes de se déployer, à ces jeunes de pouvoir rentrer dans la vie active.
02:39 Alors, vous avez créé le réseau Excellence Ruralité. Il y a deux écoles. Il y en a une à l'Affaire d'Anlaine et une seconde qui a ouvert en septembre dernier.
02:49 En Charente, d'autres projets d'école sont à l'étude. Comment fonctionnent ces écoles ?
02:54 Ces écoles fonctionnent avec des professeurs qui s'engagent dans ces territoires-là, qui sont à la fois des professeurs mais aussi des éducateurs.
03:00 C'est très important pour nous parce que tous ces outils pédagogiques de qualité avec des petits effectifs, avec des professeurs éducateurs, avec un suivi individualisé de chaque enfant, avec une relation étroite entre les parents et l'école,
03:14 tous ces outils-là qui sont aujourd'hui généralement réservés aux enfants de milieux plutôt favorisés dans les grandes métropoles, bénéficient énormément à des enfants qui sont en situation de décrochage scolaire ou de prédécrochage scolaire.
03:26 Ce qu'on essaye c'est de les offrir à ces enfants-là grâce au financement de mécènes qui nous permettent d'ouvrir ces projets.
03:32 On va tisser une communauté éducative dans laquelle on va raccrocher les enfants bien sûr mais aussi on va raccrocher les parents, on va raccrocher les professeurs
03:41 parce que beaucoup ont besoin aussi de retrouver du sens dans leur métier et cette posture de professeur-éducateur qui permet de partager ce tisson est aussi un fort levier de motivation.
03:52 Ce qu'on a du mal à imaginer c'est que quand on connaît pas très bien la campagne, on se dit "bah y'a peut-être un petit peu moins d'élèves, y'a peut-être un petit peu moins de violence"
04:01 donc tout est apaisé et du coup les cours sont peut-être un petit peu plus efficaces qu'ailleurs, donc en clair que l'éducation nationale fonctionne mieux qu'ailleurs.
04:12 Exactement et c'est de ce cliché-là que bâtissent nos élèves, c'est-à-dire que ce que vous dites est vrai pour les écoles primaires mais c'est pas vrai au collège parce qu'il y a justement un phénomène de concentration puisqu'il faut des distances plus importantes
04:26 et puis surtout c'est vrai dans les petites communes rurales très peu denses et on réduit la ruralité à ça mais nous on intervient dans des territoires de 2 à 8000 habitants
04:37 et bien dans ces territoires-là en fait c'est déjà des petites villes et c'est toujours la ruralité, c'est toujours, vous voyez on est à Confolant, c'est une ville de 3000 habitants qui est à une heure en voiture de Poitiers, Angoulême et Limoges
04:47 si ça c'est pas une zone rurale, je sais pas ce qu'il est, vous voyez, et donc l'enjeu c'est de permettre à ces territoires-là d'être pris en compte comme les autres.
04:55 Pour vous donner juste un dernier exemple, des territoires de moins de 10 000 habitants, dans l'Aisne où je vis, vous avez 3 communes de moins de 10 000 habitants, de plus de 10 000 habitants pardon.
05:06 Et bien dans ces territoires-là, dans l'Aisne, c'est le territoire dans lequel vous avez plus de jeunes en difficulté de lecture. Et donc il y a manifestement un match qui ne se fait pas.
05:17 Dans l'Aisne, le chiffre dans l'Aisne, près de 18% des jeunes de 15 ans, donc 1 sur 5, 1 sur 5 a de grandes difficultés à lire un texte simple. 15 ans, on est pas un adolescent normalement.
05:33 Ce sont les chiffres de la JAPD. Oui. Cette proportion est de 11% en Seine-Saint-Denis. 18% qui ont des difficultés dans l'Aisne, 11% seulement, entre guillemets, en Seine-Saint-Denis, 5% dans la capitale.
05:47 Un dernier mot très rapide, pourquoi vous penchez sur ce problème ? Parce qu'en fait, il suffirait de pas grand chose pour que notre politique d'éducation prioritaire soit juste.
05:59 Ce serait de supprimer ce critère qui lie la politique d'éducation prioritaire mécaniquement au quartier de la politique de la ville, et puis de se baser sur des critères scolaires pour permettre de répondre plus directement aux urgences éducatives de notre pays.
06:11 Jean-Baptiste Noyac, merci beaucoup d'être venu sur Europe 1, cofondateur du réseau Excellence Ruralité.

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