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Depuis le 30 mars, Foued et ses collègues éboueurs sont en grève dans l'Essonne. Ils se battent pour une hausse des salaires et contre la réforme des retraites. Piquet de grève, manif' devant la mairie et réveil aux aurores, StreetPress a suivi Foued une journée.

La vraie vie de, c'est un nouveau format qu'on a créé pour raconter des galères quotidiennes. On vous proposera plein des vidéos comme celles-ci dans les prochains mois. Si vous voulez témoigner de votre quotidien, de vos galères, n'hésitez pas à nous écrire à lavraieviede@streetpress.com.

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Transcription
00:00 On veut travailler, parce que beaucoup de gens aussi critiquent les grévistes,
00:04 disent qu'ils ne veulent rien faire, qu'ils retournent au boulot.
00:07 Mais si on fait grève, on ne fait pas grève pour le plaisir.
00:08 On sort le matin pour travailler, c'est pour avoir un salaire à la fin du mois.
00:12 Si le salaire ne suffit pas, on ne peut pas l'accepter.
00:14 Là, il est 5 heures et là, on va s'apprêter à aller au piqué de grève aujourd'hui.
00:26 On est là aux horaires de travail, on marque le coup.
00:30 On essaie de motiver les collègues à nous rejoindre.
00:33 Moi, je suis ripper, chauffeur, éboueur.
00:38 Je suis derrière la benne, le camion.
00:41 Ça fait plus de 10 ans maintenant.
00:44 C'est un métier difficile.
00:45 Au niveau horaire, on se lève quand même tôt.
00:47 On commence la prise de poste à 5h30 du matin.
00:50 Les poubelles sont lourdes, parfois ça pue.
00:52 On a des douleurs au niveau des genoux.
00:54 À force de monter et de descendre du marchepied,
00:56 j'ai des douleurs au niveau du coude, la tendinite.
01:00 Des fois, je suis chez moi assis, ça me lance.
01:03 Dès que je me lève, j'ai du mal à me lever.
01:04 Je me lève comme un vieux alors que j'ai 30 ans.
01:07 Parfois, il pleut, il fait froid.
01:09 Mais parfois, on se fait insulter.
01:10 "Dépêchez-vous, mettez-vous sur le côté."
01:12 Alors qu'on fait le maximum pour éviter de bloquer la circulation.
01:15 Mais ça, les gens, ils ne s'en rendent pas compte.
01:17 Ils sont pressés, donc il faut qu'ils passent.
01:19 Il faut aller au milieu, là.
01:25 - Par le bord ?
01:26 - C'est pas par le milieu ?
01:27 On est en train de mettre en place le barnum
01:29 pour être un petit peu à l'abri.
01:32 Et après, on va installer la table et les chaises.
01:35 C'est comme ça que ça commence la journée de grève.
01:38 Voilà, pour pouvoir accueillir les collègues
01:39 et les gens d'extérieur qui nous soutiennent.
01:42 Ah si, c'est vrai, il a plu, là.
01:45 Là, tu peux. Bah oui, là, tu peux.
01:47 Là, on est à Warrangercy.
01:48 On est devant le site du CIVAM.
01:50 C'est la gestion des déchets sur 15 communes,
01:53 partagées entre le 91, 94 et 77.
01:56 Là, les nouveaux embauchés depuis 2018,
02:09 ils sont entre 1200 et 1300 euros avec la prime.
02:13 La prime à salubrité.
02:15 Si tu enlèves la prime, il reste...
02:16 - C'est en plus technicité, on est à 1280, juste au-dessus.
02:20 - 1280.
02:21 Ah, c'est pas possible.
02:23 C'est pas possible.
02:24 On est obligés ou de gratter des heures supplémentaires
02:26 ou de faire un petit boulot à côté, sinon tu peux pas.
02:28 Je suis cuisiniste à côté.
02:30 Je fais des cuisines, ça me rapporte un petit plus.
02:33 J'arrive à en faire un par mois à peu près.
02:36 Et des combats de boxe, j'en ai tous les deux mois,
02:38 tous les trois mois.
02:40 Et ça me dégage un salaire de 1000 euros, 1500 euros.
02:44 Et ça me fait un salaire correct au mois pour survivre.
02:48 Parce que ma femme, elle travaille pas, j'ai un enfant,
02:52 j'ai pas d'aide de l'État.
02:55 J'ai jamais travaillé pour si peu de mal.
02:57 - Le mouvement aussi, il a joué, bien sûr, il a joué.
03:02 Il nous a motivés aussi.
03:05 Car on voit partout en France, les gens n'en peuvent plus.
03:09 Les manifestations sont partout.
03:11 Et on peut pas, de toute façon, tu peux pas faire ce travail-là
03:13 jusqu'à 64 ans, c'est pas possible.
03:15 On a des collègues qui sont partis à la retraite
03:18 même pas, franchement, deux, trois ans après, ils sont morts.
03:20 Ils ont pas tenu.
03:22 La fatigue, la fatigue, l'usure.
03:24 C'est un métier qui est pénible.
03:27 Attends, on va te présenter.
03:30 - Ça fait plus de 40 ans déjà, que je suis tenu de mes trimestres.
03:34 Ça fait longtemps que je travaille par la cibole.
03:35 J'ai plus tombé sur le pied que dans le travail.
03:38 - Tu imagines arriver jusqu'à 64 ans ?
03:40 - Eh ben, je ne parie pas du tout à ça, non.
03:42 Le travail est dur.
03:45 Il est dur de se prendre des mesures.
03:47 De remonter, de redescendre.
03:50 Après, ça a eu de la percée.
03:53 - Et t'as des douleurs autour ?
03:54 - J'ai des douleurs, des fois.
03:55 Ça se met au dos, ça se met partout dans les épaules.
03:58 - Si tu finis cassé comme Francis,
04:00 je pense pas qu'on va profiter de la rien.
04:02 Mais bon.
04:04 - Tu profites pas là, avec le prix, les salaires qui sont bas,
04:07 tu profites pas là pendant que t'es jeune.
04:09 Et t'as pas d'argent.
04:11 Et après, quand on va dire t'as un peu d'argent,
04:14 t'as plus la santé pour.
04:17 - Ça fait 10 jours.
04:18 - Ça fait combien de 10 jours ?
04:19 Ça fait presque 2 semaines que nous sommes en grève.
04:22 - 10 jours de travail en moins, ça fait énorme.
04:25 - Ça fait mal.
04:26 À l'honneur de la guerre, c'est l'argent.
04:28 Au bout d'un moment, si vous pouvez pas nourrir votre famille
04:30 et payer le loyer à la fin du mois, c'est compliqué.
04:32 - Tu comptes à peu près 800 balles ?
04:34 - Ouais, franchement, à peu près, 800 euros.
04:36 - Tu comptes 80 balles la journée.
04:38 C'est la moitié de la paye.
04:40 - C'est la moitié de la paye pour tout le monde.
04:42 Par exemple, pour un chauffeur qui touche 1000 fêtes,
04:45 pour un chauffeur qui touche 1700 euros,
04:47 comme moi par exemple, t'enlèves 800 euros.
04:50 - Il reste 1000.
04:51 - Il reste à peu près 1000 euros.
04:53 On a des caisses de grève.
04:54 - C'est ce qui nous motive.
04:55 - Actuellement, c'est ce qui nous motive.
04:56 Il y a beaucoup de solidarité de la part de la population
04:58 et de tous ceux qui font grève.
05:00 - Ça remplace pas les jours, ça rentabilise pas le...
05:04 Mais ça aide quand même.
05:06 - Non, ça aide.
05:07 - On perd pas tout, on va dire.
05:08 - Après, bon, on était conscient qu'une grève,
05:10 de toute façon, quand vous partez pour faire une grève,
05:13 vous perdez de l'argent, c'est sûr.
05:15 - Quand je vois la pluie et tout,
05:17 on devrait même pas, sans un, bloquer les camions.
05:19 Qu'ils sortent, le président travaille, ramasser les poubelles.
05:21 Il va voir sous la pluie, dans le froid, se faire insulter et tout.
05:24 Il va voir ce que c'est.
05:25 C'est une première grève, car avant, on faisait des grèves,
05:30 mais elles duraient quoi ?
05:31 Elles duraient 2 jours, 2-3 jours, grand max,
05:33 et les gens, ils retournaient bosser.
05:34 Avant, on n'avait pas de section syndicale.
05:36 On a beaucoup de gens de l'extérieur qui nous ont expliqués,
05:39 appris des choses, qui nous ont soutenus.
05:41 On la gagne la bataille, on la perd.
05:43 On a construit tout ce mouvement,
05:46 on a appris à faire les grèves, les caisses de grève,
05:49 on nous a rencontrés, on a découvert ce qu'on ne savait pas faire.
05:52 Maintenant, au bout de 15 jours, on a appris beaucoup de choses.
05:54 - Vous êtes trop forts, maintenant.
05:56 C'est vous qui êtes les nouveaux les belles sons,
05:58 la prochaine fois, je t'appelle, tu sais jamais.
06:00 Là, on va à la mairie d'Oyères.
06:07 On avait prévu d'aller là-bas à 10h pour manifester devant.
06:10 Pour être un peu plus visibles.
06:12 - Bonjour, ça va ?
06:20 - Bonjour, ça va ?
06:22 - Même depuis le début de la grève, ils nous mènent en bateau.
06:24 À un moment, ils envoient des messages en disant qu'ils vont faire des estimations.
06:28 C'est ça, hein ? - Ouais.
06:30 - Ils viennent avec aucun chiffre, rien du tout.
06:32 Le mouvement de grève a débuté jeudi.
06:34 Les représentants syndicaux, ils n'ont été reçus que mardi.
06:36 Il a été gentil, il est descendu nous voir.
06:38 Ça montre qu'on est écoutés, qu'on est soutenus.
06:41 Et qu'on ne parle pas dans le vide.
06:43 J'espère que ça va arriver à une victoire.
06:45 Avoir une augmentation de salaire.
06:47 Avoir été entendu sur nos revendications.
06:51 Et avoir au moins quelque chose, quoi.
06:54 Parce que là, jusqu'à aujourd'hui, il n'y a rien.
06:56 Oui, oui, je crois. C'est faisable.
06:58 - Jusqu'à quand tu seras là ?
07:00 - Ah, jusqu'à la fin. Moi, je serai là jusqu'à la fin.
07:03 - On ne lâchera rien !
07:05 - On ne lâchera rien !
07:07 OUAIS !
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