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L’histoire de l’Espagne au XXème siècle se résume trop souvent à la Guerre civile et à la période franquiste qui s’ensuivit. Cette histoire, dans l’entre-deux-guerres, est pourtant mouvementée et instable politiquement. Il y eut cependant une courte période de 7 ans assez méconnue en France qui aurait pu permettre à l’Espagne de redresser la barre après des années de fiasco politiques, économiques et sociaux. Cette période fut celle du régime de Miguel Primo de Rivera entre 1923 et 1930. En 7 ans, il rétablit l’ordre public, réussit la pacification du Maroc. Il impulsa d’importants travaux publics, de nombreuses réformes économiques et tenta un changement institutionnel qu’il ne put mener à terme. Pour évoquer cette période méconnue, Guillaume Fiquet reçoit Michel Festivi qui vient de publier une biographie de Miguel Primo de Rivera aux éditions Dualpha.

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00:00 *Musique épique*
00:02 *Musique épique*
00:04 *Musique épique*
00:06 *Musique épique*
00:36 Bonjour et bienvenue dans "Passez présent", l'émission historique de TVL,
00:40 émission présentée en partenariat avec la revue d'Histoire Européenne.
00:44 L'histoire de l'Espagne au XXe siècle se résume trop souvent à la guerre civile
00:50 et à la période franquiste qui s'en suivit.
00:52 Cette histoire dans l'entre-deux-guerres est pourtant mouvementée et instable politiquement.
00:57 Il y eut cependant une courte période de 7 ans, assez méconnue en France,
01:01 qui aurait pu permettre à l'Espagne de redresser la barre après des années de fiascos politiques, économiques et sociaux.
01:07 Cette période fut celle du régime de Miguel Primo de Rivera entre 1923 et 1930.
01:14 Nous allons voir avec notre invité que ce régime ne fut ni une dictature sanglante, ni un fascisme de plus.
01:20 *Musique épique*
01:29 Michel Festivi, bonjour.
01:31 Bonjour M. Fiquet.
01:32 En 2021, vous aviez sorti "Les trahisons des gauches espagnoles"
01:37 qui relatait le fiasco de la Seconde République,
01:40 puis "L'Espagne ensanglantée" publié en 2022
01:44 et qui passait en revue l'ensemble des violences politiques des milices anarchistes et révolutionnaires dans les années 30.
01:51 Et là, vous venez de publier aux éditions du Alphard, comme les deux précédents,
01:55 dans la collection "Vérité sur l'histoire", votre troisième livre,
01:59 c'est une trédogie mais dans le désordre, sur l'histoire contemporaine de l'Espagne,
02:05 intitulé "Miguel Primo de Rivera, un dictateur éclairé pour régénérer l'Espagne 1923-1930".
02:14 Un livre préfacé par Arnaud Imatz.
02:17 Alors, avant toute chose, il est bon de se reponger dans le contexte de l'Espagne des années 20,
02:24 quelle est la situation politique, économique et sociale en 1920-1923 ?
02:31 Très mauvaise. L'Espagne est dans une situation dramatique pour de multiples raisons.
02:36 Tout d'abord, la violence politique, vous l'avez évoqué,
02:39 et mon précédent livre sur les violences anarchistes en parle énormément,
02:43 puisque spécifiquement, l'Espagne était dominée par la violence politique anarchiste.
02:48 Puisqu'il faut savoir que trois présidents du conseil ont été tués par des anarchistes entre 1897 et 1921,
02:56 et le dernier en 1921, Dato, c'était d'ailleurs trois présidents du conseil de très haut niveau,
03:04 de très très bons présidents du conseil.
03:06 Donc, violence politique considérable, et puis l'anarchie résultant également du séparatisme catalan.
03:12 Et puis enfin, troisième chose, le Maroc. Le Maroc où des batailles sanglantes avaient lieu,
03:21 et où l'Espagne n'arrivait pas à pacifier, on en reparlera sûrement, cette région du Rif,
03:27 qui avait été concédée à l'Espagne par la France dans le cadre des accords au niveau du concert des nations.
03:33 Donc très très mauvaise situation.
03:35 On est dans quel régime politique ? C'est une monarchie ?
03:37 C'est une monarchie constitutionnelle. Le roi c'est Alphonse XIII. C'est une monarchie constitutionnelle.
03:42 Au niveau des institutions, l'Espagne est plutôt un pays moderne, mais n'arrive absolument pas à...
03:49 Il y a eu 34 gouvernements en une dizaine ou une vingtaine d'années.
03:53 Quasiment tous les six mois il y a une crise politique.
03:55 On est dans un système très particulier du bipartisme qu'on a appelé le tournisme ou le turno pacifico,
04:03 qui faisait en sorte que seuls deux partis pouvaient gouverner,
04:06 le parti libéral et le parti conservateur, qui alternaient au pouvoir.
04:10 On était en bout de course. Ce système politique qui avait commencé en 1875,
04:16 au moment de la restauration bourbonienne, était complètement bout de course.
04:21 D'accord. Alors Miguel Primo de Rivera, qui est-il ? C'est un militaire de haut niveau ?
04:27 Oui, c'est un militaire de haut niveau. Juste avant sa prise de fonction comme chef du gouvernement,
04:35 on y reviendra, il était capitaine général, ce qui était le plus haut grade de l'armée espagnole.
04:39 Capitaine général, il a des pouvoirs civils et militaires très importants.
04:43 C'est un peu une sorte de maréchal en France, mais avec des pouvoirs plénipotentiaires très importants.
04:48 Fils de militaire, petit-fils de militaire, arrière-petit-fils de militaire.
04:52 Il a un ancêtre qui a participé à la bataille de Rocroi. Il a un ancêtre général qui a combattu
05:00 les armées napoléoniennes en 1808-1814. Il a un oncle aussi très important, Fernando.
05:06 Son père était colonel, mais Fernando était capitaine général des Philippines,
05:10 ministre de l'intérieur à plusieurs reprises. Il va avoir un rôle considérable.
05:14 D'accord, donc, grande famille. Et il sort du lot de quel station ?
05:17 Il sort du lot parce que c'est un militaire, un officier brillant et courageux.
05:22 Il est envoyé où ?
05:24 Dans les Philippines, à Cuba, au Maroc. Il va se battre sur tous les champs de bataille de l'Espagne de l'époque.
05:31 D'accord. Et qu'est-ce qu'il motive ?
05:35 On racontera comment il le prend.
05:37 Il est complètement écœuré par l'anarchie généralisée qui règne en Espagne.
05:41 Il est complètement écœuré par la violence des anarchistes.
05:45 Il est écœuré également par l'armée. Il n'est pas très aimé dans le milieu des militaires.
05:50 Pourquoi ?
05:51 Parce que l'armée est assez corrompue. Il y a des problèmes entre les africanistes,
05:55 c'est-à-dire les militaires qui combattent au Maroc,
05:57 et les péninsulaires qui sont encasernés dans la péninsule et qui ne font pas grand-chose.
06:02 L'armée est… Il y a 200 000 militaires à peu près en 1920.
06:08 Beaucoup trop d'officiers. Il veut réformer tout ça. Il est mal vu des militaires aussi.
06:14 Mais finalement, tout ça va le motiver pour prendre le pouvoir, entre guillemets,
06:19 parce qu'on va voir que ce n'est pas une prise de pouvoir tout à fait en espion.
06:22 Oui, on va en parler. Comment déjà arrive-t-il au pouvoir ?
06:26 On parle de Pouch. J'imagine qu'il n'est pas arrivé tout seul.
06:31 Pas du tout.
06:32 Est-ce que c'est préparé de longue haleine ?
06:35 J'ai oublié de dire aussi qu'il y a un problème très important au niveau du Maroc.
06:39 C'est qu'en 1921, deux ans avant sa prise de fonction,
06:42 l'Espagne connaît une défaite considérable à Anual,
06:46 où 3 000 combattants rifains sont venus à bout de 9 000 militaires espagnols.
06:51 Ils les ont complètement laminés. Il y a eu des morts considérables,
06:55 des blessés, du matériel qui a été pris, etc.
06:58 Donc, ça a traumatisé le pays.
07:00 Et puis, on vit toujours sur le traumatisme de la fameuse génération 1898,
07:06 la fameuse année 1898, où l'Espagne a perdu ses dernières colonies,
07:11 où l'Espagne, en 1898, a perdu Cuba et les Philippines.
07:14 C'était un traumatisme considérable. J'en parle tout au long du livre.
07:18 Et ça aussi, c'est rémanent, si vous voulez. Ça perdure.
07:22 Et en 1923, c'est toujours d'actualité.
07:25 – Alors, est-ce que Primo de Rivera, dont je vous disais, il n'est pas tout seul,
07:29 de qui est-il entouré ? Est-ce qu'il y a des partis politiques derrière ?
07:32 Est-ce qu'il met longtemps à préparer son… ?
07:35 – Non. Alors, en 1922, en septembre 1922, un an avant jour pour jour,
07:39 il est nommé capitaine général de Catalogne, avec la mission impérative
07:43 de rétablir l'ordre en Catalogne, qui emploie des troubles considérables.
07:48 D'ailleurs, Pio Moa, le grand écrivain de la guerre d'Espagne, a dit
07:51 "L'Espagne, à ce moment-là, elle a deux problèmes,
07:53 le cancer du terrorisme et du Maroc."
07:56 Et donc, très rapidement, il s'aperçoit que ce n'est pas possible
07:59 de rétablir l'ordre en Catalogne s'il n'y a pas un changement complet
08:02 au niveau gouvernemental, puisqu'on est dans un régime politique
08:05 qui ne fait plus rien. Le parlementarisme n'existe plus.
08:08 Un auteur a dit que Miguel Primo de Rivera avait mis à bas
08:14 un parlement inexistant. Donc, conscient de ça, il se dit
08:19 "Il n'y a qu'une solution, c'est que je prenne le pouvoir,
08:21 et qu'on me donne le pouvoir, et que j'ai les coups des franches
08:24 pour faire des réformes indispensables."
08:27 Et puis donc, dans la nuit du 12 au 13 septembre 1923,
08:31 il fait une proclamation que je cite dans mon livre,
08:33 qui est un peu grandiloquente, qui est un peu…
08:35 Il est andalou Miguel Primo de Rivera, donc il est débonnaire, grandiloquent,
08:38 il n'est pas du tout comme Franco. Franco c'était un galicien,
08:41 quelqu'un de froid, de calme. Miguel de Primo de Rivera,
08:44 ce n'est pas du tout ce personnage-là.
08:46 Et donc, il fait une proclamation alarmée aux rois et au peuple,
08:48 en disant "Voilà, donnez-moi le pouvoir pour telle et telle raison."
08:51 Tout ce que je viens de résumer. Il l'a fait publier le lendemain
08:54 dans le journal catalan La Vanguardia, et puis il soulève la garnison
08:59 de Barcelone, et il pensait que les autres garnisons allaient suivre.
09:02 À part Saragosse et Bilbao, aucune garnison ne suit.
09:05 Les militaires ne bougent pas, ils ne font rien, ils restent attentistes.
09:10 C'est d'ailleurs un phénomène qu'on retrouvera bien souvent en Espagne,
09:13 notamment en 1936, où contrairement à ce qu'on peut penser,
09:15 beaucoup de haut-gradés militaires ont été très attentistes
09:18 et n'ont pas bougé tout de suite, dont Franco d'ailleurs.
09:21 Et puis finalement, le roi Alfonso XIII, qui est un mauvais monarque,
09:25 un roi qui tergiverse, qui n'a pas de caractère,
09:28 qui est vraiment quelqu'un de... de jamais décidé vraiment,
09:32 finalement se dit "non, ce coup-là, il faut y aller,
09:35 parce qu'on n'en peut plus", donc il le nomme Premier ministre.
09:37 - D'accord, mais il n'y a pas... parce qu'on parle de putsch,
09:40 mais finalement, il n'y a pas d'occupation du gouvernement ?
09:42 - Rien du tout ! Le gouvernement...
09:44 - Il n'y a pas de pression physique ?
09:46 - Non, le gouvernement, bien sûr, n'est pas d'accord,
09:50 mais laisse faire le roi. C'est Manuel García Prieto,
09:54 à ce moment-là, qui est chef du gouvernement,
09:56 il démissionne, le gouvernement démissionne.
09:58 - Donc il n'y a zéro mort ?
09:59 - Zéro mort, sauf un déraillement de train fait par les anarchistes,
10:03 c'est tout, il n'y a zéro mort.
10:04 Et on peut dire, c'est ce que je dis d'ailleurs dans mon livre,
10:07 paraphrasant la phrase d'un grand...
10:09 enfin le titre d'un bouquin de Henri Amouroux,
10:11 "40 millions", en 1940, vous savez, "40 millions de pétainistes",
10:14 je dis en 1923, "21 millions de primos riveristes",
10:18 puisqu'il y a 21 millions d'habitants à peu près en Espagne à ce moment-là.
10:21 - La façon dont il prend le pouvoir ressemble un peu à ce qu'a fait Mussolini.
10:24 - Exactement, c'est exactement pareil, c'est-à-dire qu'il y a un phénomène,
10:28 il se montre, il fait un pronunciamento,
10:32 c'est-à-dire qu'il se prononce pour un changement de politique,
10:36 et le roi le nomme chef du gouvernement.
10:38 Alors, bien sûr, il avait soulevé la garnison de Barcelone,
10:40 mais comme personne n'a suivi, finalement,
10:42 c'est un peu comme la marche sur Rome,
10:44 où finalement le roi appelle Mussolini au pouvoir.
10:46 C'est exactement pareil.
10:47 - Donc il est nommé Premier ministre,
10:49 - Chef du gouvernement.
10:50 - Il y a des élections qui suivent.
10:52 - Non pas du tout.
10:54 Alors, immédiatement, il va créer ce qu'on appelle un directoire militaire,
10:59 c'est-à-dire qu'il va proclamer l'état de guerre, l'état de siège,
11:04 il va suspendre la constitution de 1875,
11:07 qui est une constitution très en avance pour l'époque,
11:10 puisqu'il y a des élections, notamment,
11:12 tous les Espagnols votent à partir de 25 ans, depuis 1890.
11:16 Le suffrage masculin, bien sûr, mais c'est universel.
11:20 Il suspend les cortèges, il suspend le Sénat,
11:25 les deux chambres qui existaient à l'époque,
11:27 et il nomme 9 personnes qui sont son directoire militaire,
11:33 mais il est le seul ministre, il est le seul représentant du roi,
11:37 il n'y a que lui qui peut voir le roi, il n'y a que lui qui peut lui proposer des réformes.
11:41 Et les réformes vont immédiatement commencer, ça ne va pas traîner du tout.
11:44 Alors, notamment, il va également supprimer tous les statuts d'autonomie,
11:47 notamment celui de la Catalogne.
11:49 – Voilà.
11:51 – Alors, quelle est la réaction populaire ?
11:53 Est-ce qu'on sent une certaine légitimité ?
11:55 Vous dites que 20 millions, 21 millions de…
11:57 – De primo-rivéristes.
11:59 – De primo-rivéristes, ça veut dire qu'il n'y a pas de soulèvement,
12:02 il n'y a pas des luttes ?
12:03 – Il n'y a aucun soulèvement, il n'y a aucune…
12:05 quelques grognes, mais très épars, c'est tout se calme très très vite,
12:08 et le pays était à bout, le pays sentait très bien
12:12 qu'il fallait absolument qu'on change de politique de manière radicale.
12:16 – Donc, il arrive au pouvoir, mais est-ce qu'on sait sa pensée politique,
12:22 par qui, par quoi est-il inspiré, des lectures, économiquement parlant,
12:26 socialement, vous employez le terme de régénérationnisme.
12:30 – Oui, alors, effectivement, à plusieurs reprises, dans plusieurs chapitres,
12:34 le régénérationnisme, c'est un système métapolitique,
12:38 notamment qui a été représenté par un homme très important en Espagne
12:42 qui s'appelait Joaquim Costa, qui est mort en 1901,
12:46 mais qui a écrit un nombre considérable de livres,
12:48 et qui a dit notamment "l'Espagne c'est l'électricité plus l'irrigation",
12:54 voilà, un peu comme Lénine avait dit "les soviets t'aident l'électricité",
12:58 il avait dit, Joaquim Costa et tout le mouvement régénérationniste
13:02 voulaient changer complètement de politique,
13:04 voulaient ancrer l'Espagne dans la modernité,
13:07 donc au niveau de l'électricité, au niveau de l'irrigation,
13:10 au niveau de la scolarité, voulaient changer le système colère
13:14 qui était totalement inefficace, contre l'oligarchie,
13:18 contre le système politique du bipartisme
13:21 qui était déjà à bout de souffle à cette époque-là,
13:23 voilà, donc il s'est beaucoup inspiré du régénérationnisme
13:26 de Joaquim Costa et de ceux qui ont…
13:28 parce que Joaquim Costa avait créé une sorte de parti politique
13:31 qui ressemblera beaucoup à l'union patriotique
13:33 que créera Miguel Primo de Irivera,
13:36 en s'appuyant sur la société civile,
13:39 et sur les métiers, sur les corporations, sur… voilà.
13:42 – Donc finalement ce n'est pas un dogmatique, c'est plutôt un pragmatique.
13:46 – Complètement, absolument pas un dogmatique.
13:48 – Donc nous allons voir maintenant les grandes lignes de son action,
13:52 d'abord les grandes réformes économiques qu'il a mises en place.
13:56 – Alors elles sont considérables, d'abord, premièrement…
13:58 – Vous pouvez les lister, puis on…
14:00 – Oui, on peut les lister très vite, si vous voulez…
14:02 – En développement sur celles qui vous paraissent les plus importantes.
14:04 – Oui, alors l'infrastructure routière,
14:07 l'Espagne n'avait quasiment pas de routes dignes de ce nom,
14:11 donc il crée les routes nationales, c'est Primo de Irivera qui va les créer.
14:14 Et tous les touristes, notamment français, qui vont aller en Espagne
14:18 après la deuxième guerre, parce qu'un peu avant c'était compliqué,
14:21 mais à partir de 1950 jusqu'en 1980,
14:24 ils vont rouler sur les routes nationales
14:27 qu'avait à créer pratiquement ex-Nihilo Primo de Irivera,
14:31 ça c'est très très important.
14:33 L'idrographie, le système hydraulique,
14:36 l'Espagne avait des fleuves qui étaient mal canalisés,
14:39 il y avait déjà des ingénieurs qui par le passé avaient fait des études, etc.
14:42 L'une des caractéristiques de Miguel Primo de Irivera,
14:46 c'est qu'il va prendre dans les cartons des ministères et des administrations
14:50 ce qui n'avait pas été fait depuis 20 ou 30 ans,
14:53 et grâce à son volontarisme, il va les mettre en œuvre,
14:57 il va réussir à les mettre en œuvre.
14:59 Donc on va canaliser l'Ebre par exemple,
15:01 c'est un fleuve d'Espagne qui va permettre de l'irrigation,
15:04 qui va permettre de l'électricité.
15:06 L'électricité va arriver dans tous les villages espagnols à ce moment-là,
15:10 c'est considérable.
15:11 Il va créer la Telefonica, qui existe toujours,
15:14 qui est une très grande entreprise espagnole,
15:16 bien sûr qui a changé de statut depuis,
15:18 mais la Telefonica c'est Miguel Primo de Irivera.
15:21 L'industrie automobile, l'automobile va avoir un essor considérable.
15:25 La Camsa, c'est une société de pétrole
15:28 que tous ceux qui ont fréquenté l'Espagne ont connue,
15:31 elle existait encore il y a 10 ou 20 ans,
15:33 bon après elle a changé de statut aussi.
15:35 La Camsa, plein de choses comme ça,
15:38 il va vraiment avoir au niveau économique des réformes considérables
15:42 et la croissance économique va atteindre,
15:44 certaines années, près de 8%.
15:46 – Donc ça a fonctionné, c'est-à-dire que vraiment les réformes sont mises en place.
15:49 – Oui, il va aussi donner des fonds, il va réformer aussi le ferroviaire,
15:53 les bateaux, etc.
15:55 Il va vraiment avoir une activité économique considérable.
15:58 – D'accord, donc le pays se transforme.
16:00 – Oui, complètement, parce que le pays avait raté la révolution industrielle
16:03 que la France, l'Angleterre et l'Allemagne avaient réussi au milieu du 19ème siècle,
16:08 l'Espagne était complètement passée à côté.
16:10 Et donc c'est à ce moment-là que vraiment la révolution industrielle arrive en Espagne,
16:15 avec 50 ans ou plus de 50 ans de retard.
16:18 – Plus de 50 ans de retard.
16:20 Et je parlais tout à l'heure de légitimité populaire.
16:23 – Iberia aussi, Iberia va être créée par Miguel Primo de Rivera en 1927,
16:27 enfin voilà, plein de choses comme ça.
16:29 – Comment réagissent les syndicats ?
16:33 On sait qu'il y a des syndicats assez puissants en Espagne, notamment l'UGT.
16:37 – Alors, les syndicats, ils réagissent très positivement.
16:41 – Des syndicats qui sont des syndicats de gauche ?
16:44 – L'UGT est la courroie de transmission du Parti Socialiste Ouvrier Espagnol.
16:48 Donc c'est vraiment un syndicat de gauche qui est dirigé par un homme
16:51 qui aura un avenir funeste au moment de la guerre civile,
16:58 qui est Largo Caballero, qui à l'époque est le patron de l'UGT,
17:03 et qui collabore avec le régime.
17:05 Mais ils vont collaborer avec le régime grâce aux lois sociales que parallèlement,
17:09 parce qu'il y a deux volets essentiels si vous voulez.
17:11 – Oui, on va parler des lois sociales.
17:12 – Grâce aux lois sociales que Miguel Primo de Rivera et ses hommes,
17:15 ses ministres vont mettre en place des lois sociales considérables,
17:20 et là l'UGT va collaborer.
17:23 Elle va collaborer parce qu'elle trouve que c'est très bien.
17:26 Déjà, ils avaient un peu commencé à collaborer
17:28 avec les gouvernements précédents dans les années 1920,
17:30 et là ils vont vraiment collaborer.
17:32 Largo Caballero va être nommé conseiller d'État,
17:35 donc il va avoir des fonctions officielles,
17:38 et l'UGT va suivre le régime au moins jusqu'en 1929.
17:42 À partir de la crise économique, ça va changer un peu,
17:45 après elle va s'opposer,
17:47 et d'autant plus que l'UGT a comme rival important la CNT,
17:52 le syndicat anarchiste, qui est peut-être plus puissant que l'UGT.
17:56 Et comme Miguel Primo de Rivera va mettre le paquet
18:00 pour contrer la CNT et faire en sorte de réduire sa violence,
18:05 l'UGT n'y trouvera que des avantages.
18:08 – Bien, et donc matière sociale, vous dites qu'il suit,
18:11 parce qu'il y a un volet social qui suit le développement économique.
18:14 – Complètement, oui.
18:15 – Avec un homme très important, un ministre,
18:18 parce que Miguel Primo de Rivera va beaucoup s'appuyer sur des ministres…
18:22 – Vous le dites au début, il est tout seul,
18:24 mais j'imagine qu'il forme un gouvernement.
18:26 – Par exemple, Calvo Sotelo, qui est son ministre du budget,
18:30 et le ministre qui s'occupe de tout le social, c'est Eduardo Onos,
18:34 qui est un homme très important dans cette phase de l'histoire,
18:39 qui vient du christianisme social,
18:43 qui est un historien qui a beaucoup étudié les métiers,
18:48 les corporations, tout ça, et qui va organiser avec, bien sûr,
18:51 toute son équipe, des corporations de manière verticale,
18:56 en partant du bas et remontant vers le haut,
18:58 pour faire en sorte que patrons et ouvriers se parlent, s'entendent,
19:01 créer des structures permettant de régler les conflits du travail,
19:06 de gérer la durée du travail, voilà tout ça,
19:10 et ils vont créer des lois sociales,
19:14 ou s'occuper de lois sociales qui avaient été créées un petit peu avant,
19:17 mais qui n'étaient pas appliquées, comme la journée de 8h, par exemple.
19:20 – Les grandes lois sociales.
19:21 – Alors, journée de 8h…
19:23 – Journée de 8h, donc c'est très novateur par rapport à ce qui se fait.
19:26 – Oui, complètement, oui, congés maternités,
19:29 réduction du travail pour les femmes, pour les enfants, etc.,
19:32 augmentation des salaires, oui…
19:34 – Pas de congés payés encore ?
19:36 – Non, les congés payés, je ne sais pas,
19:38 mais voilà, des lois sociales d'importance.
19:40 On crée également des lois qui vont permettre aux ouvriers,
19:43 aux hommes modestes d'acheter des maisons,
19:45 ce qu'on va appeler la loi sur les "casas baratas",
19:48 les maisons à bon marché, toute une série de lois comme cela
19:52 qui vont avoir l'accord de l'UGT.
19:54 – Donc qui sont très populaires.
19:55 – Très populaires, oui.
19:56 – Et est-ce que c'est sanctionné, enfin on parlera après des institutions politiques,
20:00 on va venir, on va plutôt parler du Maroc, dont vous aviez parlé au début,
20:04 donc c'est vrai que c'est une question très épineuse pour l'Espagne,
20:08 donc est-ce qu'il parvient à régler le problème marocain ?
20:10 – Oui, justement, à la fin du 19e siècle, au début du 20e siècle,
20:15 l'Espagne s'est fait concéder par la France,
20:17 alors j'explique tout cela, c'est très complexe au niveau des relations…
20:20 – Le livre est bien documenté.
20:22 – Au niveau des relations internationales, mais pour aller à l'essentiel,
20:24 l'Espagne obtient une sorte de sous-protectorat dans le Rif,
20:28 qui est la zone côtière, mais qui est très compliquée,
20:31 très difficile d'accès, avec des ravins, avec des zones montagneuses,
20:35 et surtout avec des berbères qui sont de redoutables guerriers,
20:38 et qui ne s'en laissent pas compter, et qui refusent que le roi du Maroc
20:43 ait abandonné ainsi son pays à la France et à l'Espagne,
20:47 ils vont être très violents, et voilà, donc l'Espagne n'arrive pas
20:52 à pénétrer ce Rif, à dominer ce Rif, en 1909 notamment,
20:57 il y a des tueries considérables qui vont avoir lieu,
20:59 des soldats espagnols vont être… – Massacrés.
21:02 – Massacrés, exactement, en 1909, et puis on arrive à la fin
21:06 de la première guerre mondiale, l'Espagne est neutre
21:08 pendant la première guerre mondiale, et en 1920, la France dit à l'Espagne
21:11 "maintenant il faut y aller, sinon on va mettre quelqu'un d'autre
21:13 à votre place, parce que nous, absolument que le Rif soit pris en charge
21:17 par une puissance européenne", donc là l'Espagne, voilà,
21:21 mais seulement son armée est très mal commandée, très mal équipée,
21:25 en plus, voilà, avec d'énormes difficultés, d'ailleurs Primo de Rivera
21:30 fera beaucoup de choses pour l'armée ensuite, et en 1921,
21:34 donc il y a cette défaite d'Anual, et quand en 1923,
21:37 Miguel Primo de Rivera prend le pouvoir, il comprend que pour pacifier le Rif,
21:41 il faut que la France l'aide, et comme la France également
21:44 a des batailles très importantes dans le Rif, dans les années 1920-1925,
21:48 avec l'aide de la France, il va arriver à pacifier le Rif,
21:51 il va y avoir un débarquement très important en 1927 qui va avoir lieu,
21:56 et là, des généraux vont se faire remarquer, comme notamment Franco
22:01 qui fait sa carrière au Maroc, et l'armée espagnole va réussir,
22:07 grâce à Miguel Primo de Rivera, grâce à sa politique militaire,
22:11 à pacifier le Rif.
22:13 – Bien, dans ce Maroc espagnol, il y a aussi beaucoup de Juifs,
22:19 les Juifs séfarades, et chose très méconnue,
22:22 il va leur donner un statut particulier.
22:24 – Oui, alors ça c'est très important, et j'ai tout un chapitre là-dessus,
22:28 et je demande aux téléspectateurs, s'ils m'écoutent, de bien noter ça,
22:33 parce que ça c'est totalement inconnu, c'est-à-dire que Miguel Primo de Rivera
22:37 va octroyer aux Juifs séfarades, c'est-à-dire aux descendants des Juifs
22:41 qui avaient été expulsés d'Espagne en 1492 par les rois catholiques
22:45 et qui a été éparpillé en Afrique du Nord, dans les Balkans, un peu partout,
22:51 du côté de la Turquie, etc., il va leur octroyer un statut légal en 1924,
22:56 un décret qui va être signé par Miguel Primo de Rivera et par le roi,
22:59 qui octroie aux Juifs séfarades, sur simple demande, la nationalité espagnole.
23:03 Et ça c'est très important, parce qu'en Espagne, il y avait tout un mouvement
23:06 en faveur des Juifs séfarades, depuis déjà plusieurs années,
23:09 j'explique tout ça dans mon livre, et ce statut des Juifs séfarades,
23:13 qui normalement s'est terminé en 1930, puisque cette loi n'avait qu'une durée de 6 ans,
23:17 mais il n'empêche que, néanmoins, Franco, dans les années noires,
23:22 quand il est au pouvoir en 1940, puisqu'il gagne la guerre civile en 1939,
23:27 va continuer cette politique, et grâce à ses diplomates et à ses consuls,
23:32 ils vont octroyer la nationalité espagnole à énormément de Juifs séfarades,
23:38 et ces Juifs séfarades vont être sauvés des griffes des nazis,
23:42 ça c'est très important, et il y a environ 50 à 60 000 Juifs qui vont être sauvés,
23:47 et surtout, une chose très importante, c'est que tous les Juifs qui arrivaient en Espagne,
23:51 aucun ne sera refoulé, alors que dans tous les pays autres pays,
23:55 ils étaient refoulés, notamment en Suisse, notamment les États-Unis refusaient de les prendre,
23:59 l'Angleterre refusait de les prendre, Franco les a acceptés,
24:03 ils ont pu traverser l'Espagne, ils ont pu rester en Espagne,
24:06 ou traverser l'Espagne et être sauvés ainsi.
24:08 Et ça c'est très très important, parce que cette politique philosémite,
24:11 elle est complètement méconnue, et ce sont des militaires,
24:14 des militaires conservateurs, des militaires de droite,
24:16 Miguel Primo de Rivera, puis Franco ensuite, qui vont sauver l'honneur, je dirais, de l'Europe,
24:22 en sauvant ces milliers de Juifs pendant la deuxième guerre mondiale.
24:26 – Il fallait que ça soit dit, et c'est dit dans votre livre.
24:30 Pour les institutions politiques, vous avez dit au début,
24:33 il crée un directoire militaire.
24:36 – En 1925, à la fin 1925, il va créer un directoire civil,
24:40 c'est-à-dire que la censure va être assouplie,
24:42 on n'est plus sous le régime de l'état de siège, de l'état de guerre,
24:46 là il aura des ministres, des vrais ministres.
24:49 – Est-ce qu'il y a des élections quand même ?
24:51 – Non, il n'y a pas d'élections. – Il n'y a pas d'élections ?
24:53 – Non, il n'y a pas d'élections. – Il n'y a plus de parti politique ?
24:55 – Si, alors il crée un parti politique qui s'appelle l'Union Patriotique, l'UP,
24:59 mais en fait ça va être un échec, tout le côté institutionnel va être un échec,
25:03 il va essayer de faire une nouvelle constitution corporatiste,
25:06 avec l'élection notamment, les femmes pouvaient être élues et étaient électrices.
25:11 – Donc il donne le droit d'votre femme, mais il n'y a pas d'élection, je ne comprends pas.
25:16 – Oui mais elles étaient prévues. – Ah d'accord.
25:20 – Elles étaient prévues en 1930, mais la constitution…
25:23 – Donc il y a un projet de constitution.
25:25 – Un projet de constitution qui était complètement écrit,
25:27 avec une assemblée corporatiste, avec des gens élus et des gens nommés,
25:32 notamment donc les femmes pouvaient être élues, les femmes étaient électrices,
25:35 ce qui est une première quasiment mondiale à l'époque,
25:39 à part la Turquie je crois en 1923, et peut-être d'autres pays,
25:45 mais bon c'était très rare en tout cas, mais ce système politique
25:50 qui était bien pensé notamment par ces ministres etc.,
25:56 il y a eu deux plébiscites, il y a eu deux plébiscites en 1926,
26:00 en septembre et en décembre, où les gens allaient dans les mairies
26:03 et pouvaient signer des registres pour dire s'ils approuvaient
26:06 ou désapprouvaient cette constitution, ces plébiscites ont eu du succès,
26:10 mais on n'est pas allé plus loin si vous voulez,
26:12 parce qu'ensuite bon, le régime a…
26:14 – Mais il y a des élections locales quand même qui se déroulent,
26:16 au moins au niveau des municipalités ? – Non, non.
26:18 – Non plus, tout plus ? – Non, non.
26:20 – Donc tous les maires au niveau des…
26:23 – Si vous voulez les municipalités sont gérées par des personnes
26:27 nommées par le pouvoir. – Par le pouvoir.
26:29 – Et alors ce système tient combien de temps finalement ?
26:35 Il prévoit cette constitution qui était prévue pour…
26:40 – La constitution était prévue, elle aurait dû être approuvée
26:43 par plébiscite en 1930, mais à la fin du mois de janvier,
26:46 Miguel Primo de Rivera démissionne, donc tout ça est remis en cause.
26:49 Et on reviendra après à la constitution de 1876
26:53 qui avait été suspendue pendant ces six années et demie de régime.
26:57 – Alors cette période de l'Espagne 1923-1930,
27:03 en France, dans le reste de l'Europe, ce sont ce qu'on appelle les années folles.
27:07 Ça peut se justifier pour des pays qui ont fait la première guerre mondiale,
27:12 l'Espagne non, elle était neutre, mais il y a quand même une période très faste.
27:16 – J'ai tout un chapitre dédié dans mon livre effectivement,
27:18 parce que cette période des années 20, on va l'appeler l'âge d'argent.
27:22 Le 16e et le 17e siècle avaient été l'âge d'or,
27:25 et au niveau des arts espagnols, notamment de la littérature,
27:28 de la poésie surtout, du cinéma, de la peinture, de la musique,
27:32 ça va être extraordinaire avec de multiples artistes,
27:35 Federico Garcia Lorca, Manuel de Falla, le grand musicien,
27:39 Luis Cernuda des poètes, Alto Aguirre et plein d'autres.
27:45 Ça va être flamboyant.
27:47 – Flamboyant, mais encouragé par le pouvoir ?
27:50 – Je ne sais pas si c'est encouragé par le pouvoir,
27:53 mais en tout cas, ils avaient toute l'attitude pour faire tout ce qu'ils voulaient.
27:56 J'ai retrouvé dans le livre d'Arnaud Imatz, sur José Antonio Primo de Rivera,
28:02 le fils, la biographie très considérable d'Arnaud Imatz, mon préfacier,
28:07 j'ai retrouvé une photo de 1929, où on voit Miguel Primo de Rivera
28:12 avec son fils et avec les deux grands poètes espagnols de cette époque,
28:16 les frères Machado.
28:18 Un deviendra communiste, un autre deviendra franquiste,
28:22 et donc, rien n'était interdit, le régime n'a rien interdit, aucun art officiel.
28:28 – Il n'y a pas de censure aussi, la presse ?
28:31 – Il y a eu une censure de la presse, mais très légère,
28:33 d'ailleurs je fais une citation dans mon livre d'un futur révolutionnaire
28:37 du Front Populaire qui dira "on a combattu ce régime par la presse,
28:42 preuve que la censure n'était pas très forte".
28:46 – On le qualifie comment ? On le qualifie de dictateur ?
28:50 – Alors, écoutez, je peux faire un… – Allez-y, allez-y.
28:54 – Dans mon chapitre 17, je fais une mise en perspective
28:57 entre le régime de Miguel Primo de Rivera et ce qui va se passer en Espagne
29:00 dans les années 30, 36, 37, c'est-à-dire dans la zone révolutionnaire
29:04 où les hommes de Staline et le NKVD vont complètement prendre en main
29:07 cette partie de l'Espagne, et là ce sera sanglant.
29:10 Et voilà les termes que j'ai trouvés chez les historiens,
29:13 dictature douce, dictature clémente, dictature modérée,
29:17 dictature civilisée, dictature libérale, respectueuse, paternaliste.
29:21 Voilà comment les historiens ont qualifié ce régime.
29:25 C'est-à-dire qu'ils disaient "c'est un dictateur"
29:27 mais immédiatement ils accolaient à ce terme un édulcorant.
29:31 – Ça tenait à sa personnalité, vous pensez ?
29:33 – Oui, mais vous savez, il y a une historienne qui est très connue
29:36 qui s'appelle André Bachou qui a écrit une superbe biographie de Franco,
29:41 qui a dit "ce régime, il embarrasse les historiens".
29:45 Parce que les historiens n'arrivent pas à le caser dans des cases,
29:50 c'est impossible, parce que c'est pas un fascisme.
29:53 J'ai tout un chapitre sur ce terme de fascisme
29:56 où j'explique avec des auteurs, des grands auteurs à l'appui,
30:00 ce que c'est le fascisme, et on voit très bien que c'est absolument pas
30:03 le régime de Miguel Primo de Rivera, parce qu'il n'y a pas d'homme nouveau,
30:07 il n'y a pas de volonté de transformer la société,
30:11 le parti unique, mais c'est pas un parti, je vous l'ai dit, c'est un conglomère.
30:17 – Il n'y a pas d'embrigadement de la jeunesse.
30:19 – Il n'y a pas d'embrigadement de la jeunesse, c'est un simple parti de notable.
30:22 Or les partis fascistes, c'était l'embrigadement de la jeunesse en premier lieu.
30:26 Le nazisme et le fascisme ont été anti-chrétiens.
30:30 Là, Primo de Rivera, il n'est pas du tout anti-chrétien, etc.
30:34 On peut comme ça développer…
30:35 – C'est pas non plus un national catholique à la Salazar ou à la Franco.
30:38 – Pas du tout. Il est hispanique, il est pour l'Espagne.
30:41 – Est-ce qu'on peut le rapprocher de Perón un peu, la façon…
30:43 – Par certains côtés, oui.
30:45 Ce volontarisme politique, économique, social, oui, un peu.
30:50 – Quel homme était-il ? Vous dites, c'était un andalou, il est exubérant.
30:54 – Il est exubérant, débonnaire.
30:56 – Je crois que Arnaud Imaz, dans sa préface, dit que c'était un coureur de jupons.
31:00 – Oui, parce qu'il est malheureusement tombé veuve très jeune, avec 5 enfants en bas âge.
31:06 Donc il a confié la garde de ses enfants à sa sœur, qui aimait beaucoup les enfants.
31:11 Les enfants étaient très proches de leur tante.
31:13 Et c'est un militaire, donc il est allé sur tous les champs opérationnels d'Espagne.
31:17 Effectivement, c'était un coureur de jupons.
31:19 Il était bel homme, il était flamboyant, il aimait beaucoup les femmes.
31:23 – Un fêtard aussi ?
31:24 – Sans doute, oui.
31:25 – Je dis un fêtard.
31:26 – Alors, il travaillait énormément, c'est ce que disent d'ailleurs plusieurs historiens.
31:30 Il travaillait énormément pendant plusieurs semaines,
31:32 et puis après, pendant un jour ou deux, il faisait la fête dans les bordels d'Espagne.
31:38 Bon, mais voilà, c'était comme ça.
31:40 – Et il était aimé de la population ? Qu'est-ce qu'on a comme source ?
31:44 – Oui, il était aimé, notamment il a pris partie pour une femme qui s'appelait la Kaoba,
31:50 qui était une espèce d'intrigante.
31:52 Elle a été condamnée pour des affaires un peu stupéfiants ou de proxénétisme.
31:58 Et il a muté les juges qui l'avaient condamnée.
32:04 Par exemple, un jour, il est rentré dans un théâtre, je crois,
32:07 et il s'était marqué l'interdiction de fumer.
32:09 Il avait un gros cigare à la bouche.
32:10 Et il a dit, on lui a fait remarquer, il a dit "Aujourd'hui, on peut fumer".
32:14 – Aujourd'hui.
32:15 – Alors, dans ce livre, vous faites la chasse à de nombreuses contre-vérités également.
32:20 – Oui.
32:21 – Vous pouvez nous en citer quelques-unes ?
32:24 – Écoutez, essentiellement, le fait que certains historiens disent
32:30 qu'il n'a pas fait grand-chose.
32:32 C'est un señorito.
32:34 Alors qu'on voit tout ce qu'il a fait au niveau économique, au niveau social,
32:37 il y a des choses très importantes qui restent à corps actuellement.
32:41 – C'est là où je voulais en dire, son héritage.
32:43 – Oui, au niveau de l'international.
32:45 C'est-à-dire qu'il a fait deux grandes expositions universelles
32:49 qui ont eu un succès considérable.
32:51 Celle de Barcelone et celle de Séville, en 1929.
32:55 Ces expositions qui étaient prévues de longue date
32:57 et que personne n'arrivait à faire, il les a faites.
32:59 Ça a transformé complètement Barcelone et ça a transformé complètement Séville.
33:03 Les touristes qui vont à Séville, qui vont en place d'Espagne aujourd'hui à Séville,
33:07 c'est cette exposition universelle qu'il a créée.
33:10 Le parc Maria Luisa, etc.
33:12 Et il a créé les Paradors, c'est-à-dire il a rénové…
33:15 – Les Paradors, c'est un des premiers.
33:17 – Oui, les Paradors, c'est sous Miguel Primadonna que ça s'est fait.
33:20 Il a fait une politique de rénovation considérable des monuments historiques
33:25 pour en faire des hôtels de luxe, pour attirer les touristes étrangers.
33:28 Donc à l'international également, il a développé considérablement l'Espagne,
33:31 notamment ses relations avec les anciens pays hispaniques,
33:35 avec toute l'Amérique du Sud et du Centre
33:38 qui ont participé à cette exposition de Séville en 1929-1930
33:42 qui a été une exposition superbe.
33:44 – Mais contre-vérité, quand je disais contre-vérité,
33:48 c'est-à-dire est-ce que dans les années après Franco,
33:52 est-ce qu'il a été démonté ? Est-ce qu'il y a eu des…
33:56 – En fait, on n'en a pas parlé.
33:58 – Il n'a pas parlé, il était le frère Frangl.
34:00 – Le grand historien espagnol Piomoa que j'ai interviewé à Madrid,
34:04 dont d'ailleurs l'interview est passée dans la revue d'Histoire européenne
34:07 du mois de février-avril 2002, et que je cite d'ailleurs dans mon livre,
34:11 m'a dit "même en Espagne, il n'est pas connu".
34:14 Alors en France, il est inconnu,
34:16 mais en Espagne, il n'est pas très connu.
34:18 – Il est connu en France comme le père de José Antonio.
34:20 – Oui, c'est tout. Et par un hasard un peu, mais que je n'ai pas voulu,
34:24 c'est 1923-2023, on est cette année dans le centième anniversaire
34:30 de sa prise de pouvoir.
34:32 – Et pendant la période franquise, Franco, lui, ne le met pas à l'honneur,
34:35 il n'y a pas de… – Pas plus que ça, parce que Franco…
34:38 – Il se connaissait, il s'y met bien.
34:40 – Oui, il s'y met beaucoup, parce que notamment,
34:42 Miguel Primo de Rivera va créer quelque chose de très important,
34:45 c'est une académie militaire générale qui n'existait plus en Espagne,
34:50 il n'y avait que des académies spécialisées,
34:52 et il a voulu faire en sorte que le corps des officiers soit cohérent,
34:56 et pour que le corps des officiers soit cohérent,
34:58 il a créé une académie générale qui était obligatoire pendant deux ans
35:01 avant que chaque officier aille dans une académie spécialisée.
35:04 Et c'est Franco qui en a été le directeur,
35:06 cette académie a été créée à Saragosse,
35:09 et elle va être supprimée par la Deuxième République en 1931,
35:13 c'était une académie brillantissime,
35:15 et d'ailleurs je cite notamment les militaires français,
35:17 les militaires étrangers qui sont venus visiter cette académie,
35:20 ont dit "elle est absolument fabuleuse".
35:22 – Donc aujourd'hui finalement, l'histoire espagnole est un peu oubliée,
35:27 quelques historiens comme Pio Maï, si votre livre est traduit, pourquoi pas,
35:31 pourront le faire connaître, je sais qu'il y a encore une statue de lui.
35:34 – Oui, à Jerez de la Frontera dans sa ville natale,
35:36 puisqu'il est andalou, et il est né à Jerez de la Frontera,
35:39 à tout près de la frontière portugaise.
35:41 – Donc elle n'a pas été, elle, cette statue,
35:43 – Elle a été maculée de peinture, pour l'instant.
35:45 – Mais n'a pas été déboulonnée, visiblement, le pouvoir espagnol ne s'intéresse pas.
35:49 – C'est-à-dire que ça, Miguel Prion de Rivera, c'est avant la guerre civile.
35:53 – C'est avant Franco, oui.
35:55 Michel Festivi, merci infiniment, c'était très intéressant effectivement,
35:59 un personnage méconnu, puisque c'est quand même 7 ans de l'Espagne,
36:04 est-ce que ça a donné quand même, enfin je veux dire, il a été oublié,
36:09 il reste des choses au niveau architectural, etc.
36:12 Vous pensez que, sans faire du chrony, si ça avait perduré,
36:15 on aurait évité toutes les catastrophes ?
36:17 – Je pense complètement, et d'ailleurs, la croissance économique que l'Espagne a connue
36:21 pendant ces 7 années, elle ne la connaîtra de nouveau
36:24 que sous le franquisme à la fin des années 50.
36:28 Et toute la période antérieure, la croissance économique espagnole
36:32 était quasiment nulle.
36:33 – Alors, je renvoie à votre livre, Miguel Primo de Rivera,
36:37 aux éditions Dualpha, et on a également "L'Espagne ensanglantée,
36:42 les anarchistes, milices, socialistes, communistes et révolutionnaires
36:44 entre 1880 et 1939", toujours chez Dualpha.
36:50 Vous allez retrouver maintenant la petite histoire de Christopher Lanne,
36:54 mais n'oubliez pas de cliquer sur le pouce levé sous la vidéo
36:57 et de vous abonner à notre chaîne YouTube.
37:00 Merci et à bientôt.
37:01 [Générique]
37:11 Le 2 janvier 1492, la ville de Grenade, qui est le dernier bastion musulman en Espagne,
37:16 est livrée au roi Ferdinand d'Aragon et à la reine Isabelle de Castille
37:21 après des mois de siège.
37:23 La prise de la ville va mettre fin à plus de 7 siècles de présence musulmane
37:27 en province ibérique ainsi qu'à la Reconquista,
37:31 faisant de cette année 1492, ça vous dit sans doute quelque chose comme ça instinctivement,
37:36 une année glorieuse marquant les débuts du siècle d'or espagnol.
37:40 Retour sur un épisode crucial, décisif de l'histoire européenne.
37:45 [Générique]
38:00 Grossièrement, l'Espagne a été christianisée sous l'Empire romain,
38:04 ensuite les Visigoths se sont installés dans la péninsule,
38:07 et ensuite, à partir du début du 8e siècle,
38:11 la conquête musulmane très rapide a conquis l'ensemble du territoire.
38:16 Les chrétiens ont par la suite repris la main, dont Charlemagne d'ailleurs,
38:20 sur le nord de l'Espagne, mais à la suite de la découverte des reliques
38:25 de Saint-Jacques le Majeur en Galicie,
38:28 la ville de Compostelle va devenir à partir du 10e siècle
38:32 le plus grand pèlerinage d'Occident.
38:34 C'est ainsi que les chrétiens, les espagnols, vont reprendre conscience
38:39 de leur identité, de leurs racines, et vont commencer à trouver
38:42 pas si normal que ça que ce sont les musulmans qui occupent leur territoire.
38:46 Compostelle va devenir le plus grand pèlerinage d'Occident,
38:50 ça va attirer les foules, on va donc construire des routes, des ponts,
38:53 des églises, des monastères un peu partout.
38:55 C'est une foi chrétienne qui renaît véritablement dans le nord de l'Espagne à ce moment-là.
39:00 Le 10 août 997, le djihad est déclaré par Almanzor,
39:05 qui veut dire "le victorieux" en arabe.
39:07 Et ce Almanzor, il va rien trouver de mieux à faire que de fondre avec ses troupes
39:11 sur Compostelle au nom de la guerre sainte, il va ravager tout le pays
39:15 et faire incendier la Basilique.
39:16 A partir de là, évidemment, c'est toute la chrétienté qui s'en émeut,
39:20 les rois de Castille, des Asturies, d'Aragon, du Portugal,
39:24 vont alors appeler à l'aide les seigneurs de France
39:27 pour combattre l'islam dans une croisade.
39:30 Les chrétiens vont progressivement reprendre pied sur le territoire espagnol,
39:34 en 1212, la prise de Las Navas de Tolosa va ouvrir la vallée du Guadalquivir aux chrétiens,
39:42 ensuite c'est la ville de Cordoue qui tombe en 1236,
39:46 puis Séville en 1248.
39:48 Au final, il ne restera plus dans la péninsule ibérique
39:51 qu'un dernier bastion musulman tout au sud, l'émirat de Grenade,
39:56 qui est situé autour de la ville de Grenade sur le territoire de l'Andalousie.
40:00 C'est un émirat très prospère culturellement, économiquement,
40:04 mais qui contrôle l'accès et le commerce avec la Méditerranée et les pays méditerranéens.
40:10 A partir de là, ça ne va pas durer bien longtemps.
40:12 La reconquête de Grenade va avoir lieu grâce à l'unification de deux royaumes
40:17 qui étaient auparavant des rivaux, les royaumes d'Aragon et de Castille.
40:21 Ce sera une union politique, mais aussi surtout une union matrimoniale,
40:25 puisque c'est le mariage d'Isabelle de Castille et de Ferdinand d'Aragon,
40:29 qui va unifier ces deux royaumes et les projeter contre les musulmans du sud de l'Espagne.
40:35 Cette union va d'ailleurs perdurer jusqu'à nos jours, c'est les débuts de l'union des royaumes en Espagne.
40:40 C'est un prêtre, tout d'abord l'archevêque de Toled,
40:43 qui va convaincre le couple royal de parachever l'unité de la péninsule
40:47 en détruisant le dernier royaume musulman qui persiste et qui comprend Grenade.
40:53 Le 26 avril 1491, Isabelle fait même le servant de ne se laver ni de changer de linge
41:00 tant que la ville de Grenade ne sera pas rendue aux chrétiens.
41:04 Ben, pourquoi pas ?
41:06 Ferdinand va donc renforcer son autorité, sa monarchie,
41:09 après avoir conquis Malaga, il va rassembler une armée forte,
41:13 nous litons de 10 000 cavaliers et de 40 000 fantassins,
41:16 aux côtés d'Isabelle pour entreprendre le siège de la capitale de l'Andalousie, Grenade.
41:22 Mais ça n'est pas une mince affaire puisque la cité de Grenade est puissamment fortifiée,
41:26 elle est dirigée par l'émir Boabdil, qui est le dernier rejeton de la dynastie Nasride,
41:32 il va donc falloir organiser un siège.
41:35 Mais heureusement les espagnols ont une puissante artillerie,
41:38 c'est ainsi qu'ils vont commencer à entamer les murailles de la cité
41:41 et à interdire aux assiégés toute sortie.
41:44 L'émir Boabdil va tout d'abord réussir à obtenir une trêve de 4 mois,
41:49 ce qu'il attendait lui c'est de l'aide venue du royaume zianide du Maghreb.
41:54 Mais au bout de 4 mois, avec la famine et l'hiver qui s'installent,
41:58 ne voyant pas de renforts arriver, il va enfin consentir à remettre les clés de la ville.
42:03 La capitulation a lieu le 2 janvier 1492,
42:08 Boabdil a eu une capitulation très généreuse en plus,
42:11 qui accorde la vie sauve à ses hommes,
42:13 et une légende nous dit que sur le chemin de l'exil,
42:16 il se serait retourné vers sa chère cité de Grenade,
42:21 au lieu dit qu'on appelle aujourd'hui le dernier soupir du mort,
42:24 et il se serait effondré en pleurs,
42:27 et à ce moment-là sa mère lui aurait lancé
42:29 "Pleure comme une femme ce que tu n'as pas su défendre comme un homme".
42:33 La mère Boabdil rigolait pas trop.
42:35 Avec la prise de Grenade, l'unité de la péninsule est désormais complète,
42:39 à l'exception du Portugal évidemment,
42:41 et cette reconquête met fin à la Reconquista,
42:44 mais aussi à 780 années de présence musulmane dans la péninsule.
42:49 C'est quand même un événement.
42:50 Cette victoire va valoir à Isabelle et à Ferdinand
42:53 de recevoir du pape Alexandre VI, qui est un espagnol,
42:57 le titre émérite de roi catholique.
42:59 C'est pour ça qu'on ne dit plus Isabelle de Castille,
43:02 mais Isabelle la catholique.
43:04 Je l'ai dit, Boabdil a réussi à obtenir de ses vainqueurs
43:06 une généreuse capitulation,
43:08 avec notamment le droit pour ces sujets
43:10 de conserver leur religion, leurs armes,
43:13 et leurs droits.
43:14 Mais ça ne va pas durer longtemps.
43:16 Tout d'abord, les souverains espagnols vont ordonner
43:18 l'expulsion de tous les juifs de leur royaume,
43:21 à moins qu'ils ne se convertissent avec sincérité
43:23 au catholicisme.
43:25 Ça prend effet le 31 mars 1492,
43:30 et c'était un engagement trahi qui était inscrit
43:34 dans le traité conclu avec Boabdil.
43:36 Ainsi, 160 000 juifs vont quitter précipitamment l'Espagne,
43:40 ils vont trouver refuge en Afrique du Nord
43:42 auprès du sultan ottoman,
43:44 et ces juifs sont connus sous le nom de séfarades.
43:47 C'est de là que vient le nom séfarades,
43:49 puisque séfarades en hébreu,
43:51 c'est le nom donné à l'Espagne,
43:53 dans la langue hébreuse.
43:54 Donc, il y a eu expulsion des juifs,
43:56 et ensuite c'est au tour des musulmans.
43:59 A partir de 1499,
44:01 les musulmans vont être sommés
44:03 de se convertir ou de quitter le royaume.
44:06 D'ailleurs, à ce moment-là, les habitants de Grenade
44:08 vont être rassemblés en masse sur la place publique
44:11 et vont être aspergés d'eau bénite.
44:13 Ils vont dès lors être considérés tous comme baptisés.
44:16 Et puis ceux qui refusent,
44:18 les musulmans qui refusent,
44:19 eh bien, ils sont expulsés du pays.
44:21 Il y a aussi ceux qui vont décider de rester sur place
44:24 et de pratiquer leur foi en secret,
44:26 donc des faux convertis.
44:27 Côté musulmans, on les appelle les maurisques,
44:30 ils vont être expulsés un siècle plus tard,
44:33 en 1609,
44:34 et les juifs, qui faisaient également de même,
44:37 c'est-à-dire qui continuaient à pratiquer leur foi en secret,
44:40 eh bien, on les appelle des marranes.
44:42 C'est sans doute le passage le plus controversé
44:44 parmi les historiens bien-pensants
44:46 de l'histoire espagnole,
44:48 puisque c'est l'Inquisition qui va être chargée
44:50 de traquer ces faux convertis,
44:52 et on remet de la morale moderne dans cette histoire,
44:55 alors que tout ce que voulaient les souverains espagnols
44:58 à ce moment-là,
44:59 comme le voulaient tous les royaumes du monde,
45:02 c'est de terminer l'unité territoriale et religieuse du pays,
45:06 tout simplement.
45:07 Bon voilà, ça, on en a déjà parlé plusieurs fois,
45:09 c'est de la morale moderne dans l'histoire,
45:12 ça n'a aucun sens.
45:13 Mais le pire, c'est que partout,
45:15 quand on lit des choses sur cet épisode,
45:17 on nous refait le coup qu'on nous a fait également,
45:20 et j'en parle dans mon cours sur Louis XIV,
45:22 par rapport à l'expulsion des protestants
45:24 et à la révocation de l'Église de Nantes,
45:26 on nous dit que ça a privé le pays d'éléments dynamiques,
45:29 et le pire, on nous dit que ça l'a entraîné
45:32 dans un irrépressible déclin.
45:34 Moi, ce que je vois surtout,
45:36 c'est que cette année 1492,
45:38 c'est la découverte de l'Amérique,
45:40 puisque Isabelle, une fois qu'elle a parachevé
45:43 l'unité territoriale et religieuse du pays,
45:45 elle va pouvoir se concentrer sur de nouvelles conquêtes,
45:47 donc sur l'Amérique,
45:49 donc il y a Christophe Colomb, etc.
45:51 Cette année 1492,
45:53 avec la découverte de l'Amérique et la prise de Grenade,
45:56 c'est ce qu'on appelle en Espagne l'année cruciale,
45:58 et c'est exactement l'année qui vient commencer
46:01 le siècle d'or espagnol.
46:04 Ensuite, il y a eu Charles Quint,
46:06 l'Espagne première puissance mondiale,
46:08 donc bon, il y a pire comme déclin, je crois.
46:12 Bref, voilà pour cette petite parenthèse de morale,
46:15 je termine en vous précisant que la ville de Grenade,
46:18 parce qu'on n'a pas fini avec la morale,
46:20 la ville de Grenade continue de célébrer chaque année,
46:22 donc chaque 2 janvier,
46:24 et bien ce 2 janvier 1492,
46:27 donc chaque année, il y a des célébrations,
46:29 même si pour Libération,
46:31 comme pour la gauche espagnole,
46:33 cet anniversaire aujourd'hui, c'est un scandale.
46:35 Ça n'est qu'une résonance belliqueuse
46:38 et un hommage à l'islamophobie.
46:41 Bon, on va s'arrêter là.
46:44 J'espère que cet épisode vous a plu,
46:46 merci de votre attention,
46:47 je vous retrouve la semaine prochaine,
46:49 comme toutes les semaines,
46:50 pour un nouvel épisode de La Petite Histoire,
46:52 sur TV Liberté.
46:53 A bientôt.
46:54 [Musique]
46:59 [Générique]
47:04 [SILENCE]

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