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Virginie Efira et Melvil Poupaud partagent l'affiche de "L'Amour et les Forêts" de Valérie Donzelli, sélectionné à Cannes Première et actuellement en salle. Virginie Efira nous bouleverse dans la peau d'une victime de toutes les formes violences conjugales, sous l'emprise progressive de son époux (Melvil Poupaud, terrifiant).

Interview : Juliette Hochberg
Montage : Doriane Allain et Tom Blot
Transcription
00:00 Non, je n'en suis pas à ce stade-là, mais il a une plus grande expérience que moi.
00:04 Va te faire foutre, sale con.
00:13 Moi, je ne sais pas si je lui parlerais, je la prendrais déjà un peu dans mes bras.
00:17 Cette idée, en tout cas, de regard aimant venant d'autres femmes
00:27 et qui peuvent aider à enclencher quelque chose qui aura un rapport avec le réveil.
00:31 Et ça, c'est quelque chose que le personnage de Melville, Greg, a bien compris,
00:35 puisque une des premières étapes de cette toile qu'il tisse
00:39 est celle de l'isolement, en fait, celle où il n'y a plus d'amitié possible.
00:43 Tout est une menace pour lui.
00:45 M'engager, en tout cas, moi, je sais que
00:51 il y a des choses qui ont fait écho en moi pendant le tournage
00:54 et que dorénavant, j'essaierai de mettre de côté.
00:57 Les fameuses petites premières phrases qu'on balance et en espérant peut-être
01:01 que ça fera tel effet et qui sont déjà une manière de s'approprier les gens
01:04 qui est toxique.
01:06 Et moi, en fait, il y avait sur l'idée d'être engagée.
01:09 Je pense que j'avais déjà, par avécu propre, par certaines expériences de films,
01:14 une idée quand même de ce que je voudrais explorer de la condition féminine
01:18 aujourd'hui, qui était déjà en place.
01:21 Je me dis que l'idée, du coup, de pouvoir pouvoir transmettre quelque chose
01:25 par rapport à ça.
01:26 Oui, c'est une chance, ça.
01:27 C'est-à-dire de pouvoir en faire quelque chose à un titre intime déjà,
01:30 de pouvoir revenir, de pouvoir utiliser des éléments de son vécu
01:33 pour les agrandir, les amplifier, en faire quelque chose.
01:36 Du coup, de venir mettre quelque part.
01:39 C'est vachement intéressant.
01:41 Là, en plus, il y a quelque chose sur ce désordre là que je comprends
01:44 et que du coup, je peux peut-être rétribuer et être une des multiples
01:48 représentations et plus il y en a, mieux c'est, de quelque chose qu'on peut,
01:53 grâce à la représentation, identifier plus directement.
01:56 Malheureusement, non, j'étais en relation avec des témoignages
02:03 ou peut-être même que dans ma vie,
02:05 je n'ai pas fréquenté que des endroits de pure allégresse.
02:07 Non, je n'ai pas découvert en faisant le film le programme
02:11 absolument sans fin et chargé des violences possibles et imaginables
02:14 au sein du couple.
02:15 Peut-être aussi, en fait, dans la manière dont on découvre des choses,
02:17 c'est qu'on les joue, on les joue, on découvre des choses aussi
02:20 par le biais de quelque chose qui n'est pas analytique ou intellectuel,
02:23 qu'on découvre physiquement.
02:25 Je connais cette chose là, c'est peut-être pour ça que j'avais envie de le jouer aussi,
02:28 c'est-à-dire de se voir soi-même comme un personnage,
02:30 c'est-à-dire qu'on sait très bien qu'il y a la violence qui existe
02:32 et soi-même, on la vit.
02:33 Mais non, on ne la vit pas en fait, ça existe,
02:35 mais ce n'est pas ce que je suis en train de vivre.
02:36 Moi, ce que je suis en train de vivre, c'est autre chose.
02:38 C'est difficile de se mettre au cœur, de dire "attends, il y a des faits comme ça,
02:42 mais moi, je ne suis pas au centre de ça, c'est autre chose".
02:44 Non, c'est exactement ça.
02:46 Et pourtant, ce personnage ne peut s'en sortir qu'à partir du moment
02:49 où elle l'identifie comme telle.
02:51 Et donc, ce qui est formidable avec le film, c'est aussi le fait
02:55 que ce soit une représentation possible, d'écortiquer comment cette emprise se met en place.
02:59 Il y a eu plusieurs périodes.
03:04 Au début, quand j'ai commencé, j'avais un peu l'obsession du grand metteur en scène.
03:08 J'avais envie de tourner avec des maîtres,
03:10 enfin d'approcher cette histoire du cinéma un peu historique.
03:13 Et puis, petit à petit, j'ai changé.
03:16 Puis en ce moment, c'est presque plus le rôle qui me donne envie de faire un film,
03:20 parce que je sais que ça peut venir d'une série, tout à coup d'un premier film
03:23 ou d'un film dans une filmographie que je n'ai pas forcément vu ou que je n'ai pas admiré.
03:27 Un rôle qui me parle et j'ai l'impression que je peux en faire quelque chose.
03:30 C'est ça, c'est la curiosité du rôle.
03:33 Moi, je n'en suis pas à ce stade-là.
03:35 J'en suis... Mais il a une plus grande expérience que moi.
03:38 Beaucoup d'acteurs disent ça, moi, avant le rôle, c'est le réalisateur.
03:42 Mais c'est vrai en plus.
03:43 Vous savez, parfois, il y a des gens que vous ne connaissez pas bien dans la vie,
03:45 mais vous sentez qu'il y a une intimité souterraine.
03:47 C'était le cas avec Valérie Donzelli, dont je connaissais les films
03:50 et que je connaissais sans en connaître.
03:52 Et puis, on s'est retrouvés sur un film.
03:54 Toutes les deux a tourné ensemble comme actrice.
03:56 Il y a une intimité plus forte.
03:57 On sent quand il y a quelque chose.
03:59 Peut-être aussi que j'ai vécu une sorte d'harmonie comme ça
04:01 avec ma rencontre avec Justine Trier, que j'essaye de retrouver cette chose-là.
04:06 Donc, un rapport avec une autre femme d'espèce de...
04:09 Et que chaque fois, j'ai l'impression que ça se passe, en fait.
04:12 Mais bon, peut-être que c'est ça, oui.
04:13 Mon premier endroit, c'est une intimité finalement avec le metteur en scène,
04:17 la metteur en scène en l'occurrence,
04:18 pour discuter quelque chose de la manière la plus intime et large possible.
04:24 [musique]

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