Après l'immense succès de son album avec Slimane, Vitaa est de retour en solo. Elle se confie sans tabou à Purecharts sur son nouvel album, son prénom Charlotte, ses débuts compliqués dans l'industrie, sa potentielle fin de carrière...
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MusiqueTranscription
00:00 Je me souviens de rendez-vous avec des patrons de maisons de disques qui me disaient
00:02 "il faudrait que tu sortes avec un rappeur"
00:04 et tu vois, ça pourrait marcher.
00:05 Ça fait bizarre, je crois que Simon l'a plus ressenti que moi
00:14 parce qu'il a vachement enchaîné.
00:15 J'ai eu quand même le temps de breker un petit peu,
00:17 même si j'ai pas l'impression d'avoir brequé très longtemps, très honnêtement.
00:20 Je suis assez excitée de revenir parce que c'est vrai que c'était prévu.
00:22 On avait prévu nos parcours comme ça
00:24 et à la fois je me suis mis beaucoup de pression pendant la création de ce disque,
00:27 mais là, je suis super contente d'y retourner, vraiment.
00:29 L'idée de la maison
00:31 Franchement, très honnêtement, c'était pas mon idée
00:33 et c'était l'idée de mon mari, de mon équipe.
00:36 Ils ont eu cette idée commune et c'était très dur pour moi au début de l'envisager même.
00:39 J'ai dit "non mais jamais de la vie, les gars, jamais en rêve"
00:42 parce que moi, j'ai vraiment mis ce point d'honneur à me créer
00:45 cette armure en fait derrière mon nom de scène,
00:47 qui est Vita, qui est mon deuxième prénom,
00:49 qui est le prénom de ma maman, qui est d'origine sicilienne.
00:50 Et Charlotte, c'était vraiment la maison, l'intimité,
00:53 ce besoin aussi de moi vraiment faire une séparation entre l'artiste et la femme.
00:57 Et puis je crois que les années passent et que plus ça va,
01:00 plus j'ai envie de tout dire et de tout montrer.
01:03 Je n'ai jamais été aussi prête à le faire.
01:04 Et du coup, je me suis posée, j'ai réfléchi et je me suis dit
01:07 peut-être qu'il faut faire tomber les dernières barrières maintenant, c'est le moment.
01:09 Mais je crois que je n'étais pas du tout prête à ça avant en fait.
01:12 Je n'aime pas mon prénom, toujours pas.
01:16 Du coup, là, je fais un peu comme une espèce de psychanalyse
01:18 en le mettant en avant parce que l'album va s'appeler Charlotte.
01:20 Je commence à l'accepter.
01:22 Il était temps.
01:23 C'est comme ça, on aime, on n'aime pas son prénom.
01:25 Moi, je n'aimais pas mon prénom.
01:26 Et puis après, c'est vraiment dans l'intimité.
01:27 C'est vrai que les gens m'appellent Cha, Charlotte, mais c'est vraiment dans l'intimité.
01:30 Et alors d'un coup, c'est-à-dire que ça appartient à tout le monde.
01:32 C'est encore un autre step.
01:34 Rien que de l'avoir vu sur toutes mes bannières, sur tous mes réseaux,
01:36 vraiment, je commence à l'accepter.
01:38 L'intro Charlotte, c'était vraiment une volonté de vider mon sac.
01:43 C'est un des derniers titres qu'on a fait sur cet album.
01:46 Je l'ai écrite et composée avec Dadjou et Say Say.
01:48 Dadjou, j'avais vraiment envie d'avoir sa plume incisible en fait
01:52 parce que je voulais beaucoup de punchlines.
01:54 Donc, je commençais à écrire mon couplet et à chaque fois,
01:55 il prenait une punchline et il me disait, "Ce n'est pas assez fort.
01:57 Il faut la transformer."
01:58 On l'a vraiment écrit comme ça, tous les deux en passe-passe.
02:00 Et je crois que c'est peut-être celui qui me connaît le mieux
02:02 dans cet amour que j'ai de la langue française et de la culture hip-hop
02:05 et du rap français.
02:06 En fait, il y a beaucoup de flow dans le morceau.
02:08 C'est chanté, mais j'avais envie vraiment de l'écrire comme ça,
02:10 comme un morceau trap en fait.
02:11 Donc, j'ai fait appel à Dadjou et je crois que c'est celui qui a su mettre l'accent
02:15 sur ce que j'avais envie de dire à ce moment-là.
02:16 Et c'était vraiment aussi une façon pour moi de faire table rase
02:19 et de dire, voilà tout ce que j'ai à dire depuis.
02:20 Parce que je parle de ma carrière, de tout ce qui s'est passé.
02:22 Je parle de ma vie de femme, je parle de mes craintes,
02:24 je parle de mes enfants.
02:25 J'avais envie de faire une remise à zéro et commencer l'album comme ça.
02:29 Et on s'est dit, est-ce que c'est l'intro ou est-ce que c'est l'outro ?
02:31 Et puis, tout le monde a trouvé le morceau hyper fort
02:33 et tout le monde m'a dit, "Non, mais ça va être l'intro de l'album."
02:35 Je n'aime pas me victimiser ou me mettre dans la position de,
02:39 oui, j'ai été victime de sexisme.
02:41 C'est plus le fait que c'est plus dur pour une femme dans ce métier
02:44 comme dans, je crois, la plupart des métiers.
02:46 D'autant plus il y a 15 ans, d'autant plus quand on fait cette musique-là.
02:48 C'est-à-dire que moi, je suis vraiment à mi-chemin
02:50 entre la variété française et la musique pop urbaine,
02:52 encore plus à mon début.
02:54 Et en fait, à ce moment-là, il n'y avait personne.
02:56 Il n'y avait pas de femme vraiment qui avait tout pété entre ces deux musiques-là.
02:59 Donc c'était très dur.
03:00 En France, on aime nous classer.
03:01 Moi, c'était un peu inclassable et on s'est pris des portes partout,
03:04 que ce soit pour signer en maison de disque,
03:05 que ce soit par la suite pour être diffusée en média,
03:08 parce que j'étais entre deux chaises.
03:09 Et vraiment, ça, je l'ai ressenti.
03:10 Et puis à mes débuts, avant même de signer en maison de disque,
03:13 je me souviens de rendez-vous avec des patrons de maison de disque qui me disaient
03:15 « Pourquoi tu sortes avec un rappeur ? »
03:17 Et tu vois, ça pourrait marcher.
03:18 Et je le connais très bien.
03:19 Par la suite, je lui ai redit, il était hyper gêné.
03:21 Mais c'est te dire à quel point on est dans un pays,
03:24 malheureusement, et dans une industrie où il faut faire tes preuves
03:27 trois fois plus quand tu es une femme.
03:28 Et c'est ce que j'ai dû faire.
03:30 Mais ce n'est pas grave parce que je m'en suis servi et c'est devenu un moteur.
03:32 Mais oui, j'avais besoin de le dire dans cette chanson.
03:34 Moi, j'ai senti qu'au début, on a essayé de me mettre dans une case
03:39 qui n'était pas la mienne et je ne me suis jamais laissée faire.
03:41 Et étant donné que je suis auteur-compositrice,
03:43 j'ai raconté mes histoires et vu que je racontais ma vie,
03:45 je leur ai tout de suite expliqué qu'en fait, ce n'est pas ça qu'on allait raconter,
03:48 que moi, c'était mon histoire, que je voulais raconter,
03:49 que c'était comme un journal intime et que c'était des histoires de femmes,
03:52 qu'elles allaient sûrement toucher les femmes,
03:53 mais que ce n'était en aucun cas une chanteuse bimbo.
03:55 Ce n'était pas ça que je voulais dégager et ce n'est pas ce que je savais faire.
03:58 Et oui, ça a été un combat au début.
04:00 Le fond plutôt que la forme et eux voulaient axer sur la forme.
04:04 Alors bien sûr que c'est un métier où l'image compte énormément
04:07 et je ne vais pas cracher dans la soupe.
04:09 Moi-même, je suis très coquette, j'aime jouer de mon image,
04:11 mais je ne voulais pas du tout aller dans le personnage sexy.
04:13 C'est quelque chose que je bannissais.
04:15 Je suis très touchée par les commentaires sur le clip de l'intro.
04:20 D'ailleurs, justement, moi, j'avais une vraie crainte en envoyant ce titre.
04:24 Donc, on précise bien que c'est l'intro de l'album et que ce n'est pas le premier single
04:26 parce que moi, j'ai conscience que c'est un morceau qui est dense,
04:29 qui n'est pas du tout dans un format single.
04:30 Je me dis peut-être que les gens ne s'attendent pas du tout à ça à ce moment-là,
04:33 mais c'est important pour moi de montrer que l'album a beaucoup de fond
04:36 et que j'ai des choses à dire.
04:37 Donc, on se dit, on va faire de l'image, on va le clipper et ça coûte cher,
04:39 mais je veux le faire, j'ai une idée de clip.
04:41 Et là, on a une idée, voilà, tous ensemble, de réaliser, en fait,
04:44 ces enterrements de Vita et c'est un peu la renaissance de Charlotte.
04:47 Parce que je trouvais ça symbolique, en fait, de montrer que derrière l'artiste,
04:50 ben, c'est Charlotte, avec ses failles, avec ses forces
04:53 et c'est ce que j'avais envie de raconter.
04:55 Et je trouvais que l'idée de l'enterrement était hyper forte, culottée.
04:58 D'ailleurs, ma mère m'a tuée.
05:00 Elle m'a dit "Pourquoi t'as fait ça ?"
05:01 Mais du coup, je me suis vraiment pris la tête pour pas que ce soit glauque
05:04 parce que je trouve quand même qu'il n'y a pas de connotation trop dark,
05:07 trop cimetière, justement, on ne l'a pas fait dans un cimetière.
05:09 Et je trouve qu'il y a une émotion, en fait, très forte dans le clip
05:12 et c'est ce que je voulais.
05:12 Ouais, il y a mon mari, il y a mes enfants, il y a Slimane, il y a Amel.
05:15 Donc, c'était important pour moi de la jouer plutôt comme ça,
05:18 sur l'émotion plutôt que sur le côté un peu glauque, quoi.
05:20 Ça aussi, ça a été une crainte parce que je me suis dit quand même,
05:24 on commence avec un morceau qui est dans...
05:26 Bon, voilà, qui raconte quelque chose de fort.
05:28 J'avais peur de ça, que les gens se disent "Mais en fait, c'est quoi l'annonce ?
05:31 La fin de carrière ?" En fait, c'était pas du tout ça, ma volonté.
05:33 Après, c'était vraiment justement de dire
05:35 "Voilà, je vais baisser les dernières barrières et vous montrer qu'est-ce qui se passe,
05:39 en fait, c'est quoi la source d'inspiration de Vita ?"
05:41 Bah, c'est Charlotte, c'est de ça que je voulais dire.
05:42 Mais le but, ce n'était pas de dire "Voilà, c'est la fin de carrière."
05:45 Cela dit, il est vrai qu'après 15 ans de carrière,
05:47 il y a d'expositions et de up and down et c'est un chemin qui est difficile.
05:51 Et moi, j'ai vécu des grands succès et j'ai vécu des échecs.
05:53 Et je crois que c'est ce qu'il y a de plus fort dans une carrière,
05:55 c'est de construire sur la longévité quelque chose.
05:57 Je crois que plus ça va, plus j'aime aussi, moi, être moins dans la lumière.
06:00 J'écris beaucoup pour d'autres.
06:01 Je prends énormément de plaisir à faire ça, à composer pour d'autres.
06:04 Je crois que plus le temps passe, plus je vais faire ça aussi.
06:06 Et peut-être qu'on me verra un petit peu moins dans les prochaines années.
06:09 Moi, je l'ai pensé comme ça.
06:12 D'ailleurs, c'est la première fois que je le dis en interview.
06:13 Très honnêtement, je l'ai construit comme si c'était le dernier,
06:16 dans le sens où je me suis dit, même dans le propos,
06:17 mon premier album, c'était vraiment un journal intime, quelque chose de très sincère.
06:21 Là aussi, on est sur quelque chose de très introspectif.
06:23 J'avais envie, moi, d'aller au fond des thèmes qui me chamboulent, qui me touchent.
06:27 Donc, je l'ai pensé comme ça.
06:28 Est-ce que c'est le dernier ? Sincèrement, j'en sais rien.
06:30 Mais je l'ai écrit comme si c'était le dernier et j'avance.
06:33 Moi, je ne suis pas carriériste, c'est-à-dire que je laisse vraiment le temps faire les choses.
06:35 Mais c'est vrai que j'ai envie de prendre plus de temps pour moi par la suite.
06:38 Franchement, ce n'est même pas ce qu'à place.
06:42 Ça fait vraiment plusieurs années que j'y pense.
06:44 C'est vrai que j'ai eu un petit bébé, une fille, je l'ai emmené en tournée.
06:47 Moi, j'ai le sentiment de courir un peu partout depuis quand même pas mal d'années.
06:50 C'est un métier où on ne s'arrête jamais vraiment,
06:51 parce que même quand on break, quand on est auteur-compos, on est en créa tout le temps.
06:55 On réfléchit tout le temps à si je faisais une chanson de ça, à ce thème, à ce truc.
06:59 Le studio, c'est quelque chose qui prend énormément de temps.
07:01 Moi, c'est ce que j'aime le plus dans ce métier avec la scène.
07:04 Mais c'est des nuits et des nuits en studio à créer, à écrire, à faire des choses,
07:07 à pas garder, à faire le point.
07:09 En plus de ce que je fais aussi pour d'autres, ça prend beaucoup de temps.
07:12 Et à un moment donné, cumuler à ça, tu as la promo quand tu repars, les tournées,
07:15 le fait d'être tout le temps en déplacement et de me dire, bon, voilà,
07:18 c'est les années de mes enfants, c'est peut-être les plus belles années.
07:21 Est-ce que je ne suis pas en train aussi de rater des choses ?
07:23 Donc, j'essaie moi de me découper en quatre et de tout faire, mais ce n'est pas évident.
07:26 Donc, je crois qu'il y a vraiment tout ça cumulé.
07:27 C'est plus le fait de construire ma vie de famille en même temps
07:30 et puis de vieillir et de me dire, est-ce que j'ai encore envie d'être tout le temps dans la lumière ?
07:34 C'est plus ça que je me suis posé comme question.
07:36 Moi, je me suis mis la pression vraiment en studio.
07:40 Je ne vais pas faire la mytho. Non, c'est facile.
07:41 C'est très dur d'ailleurs de revenir après un gros succès comme Versus
07:44 dans une industrie qui est en crise, où les chiffres ne sont que baissés.
07:47 On ne va pas se mentir.
07:47 Moi, en plus, je ne fais pas ce métier pour les chiffres, je l'ai toujours dit,
07:50 mais tu es attendu au tournant quand tu es quelqu'un qui a beaucoup vendu,
07:53 quand tu sors de quelque chose comme ça.
07:55 Et puis au-delà de ça, moi, artistiquement, j'essaye vraiment à chaque album de me renouveler,
07:59 de ne pas refaire la même chose.
08:00 Et justement, ça a été le grand débat de cet album,
08:02 parce qu'on a beaucoup de titres qui sont mes préférés.
08:06 Et puis dans l'équipe, c'était vraiment le débat.
08:08 Certains voulaient revenir avec celui-là, certains avec d'autres.
08:10 Et je pense qu'il faut savoir se renouveler et peut-être surprendre un peu,
08:14 surtout quand on est comme moi, on est là depuis un moment
08:16 et que les gens te connaissent et les gens ne t'attendent pas forcément.
08:18 Pour moi, recréer un engouement, c'est aussi surprendre.
08:21 C'est ce que j'ai essayé de faire avec ce premier single qui s'appelle "Les choses qu'on fait".
08:23 Il y a une espèce de couleur de nostalgie, de mélancolie.
08:28 Pour moi, ça parle de l'être humain, en fait, qui se construit à travers ce qu'il a été
08:31 et puis qui refait souvent les mêmes erreurs.
08:33 Puis ça parle de résilience.
08:34 Donc c'est très humain comme thème.
08:38 Je crois que je me suis quand même beaucoup livrée.
08:40 C'est vrai, je ne suis pas une artiste qui me suis cachée derrière un personnage,
08:44 même si je me suis cachée derrière mon nom de scène.
08:45 Je crois que c'est vraiment aller au bout de ce processus d'introspection
08:49 et de me raconter moi, où j'en suis aujourd'hui, à mes 40 ans,
08:52 en tant que femme, en tant que maman.
08:54 Aller plus loin encore là-dedans et puis faire tomber les dernières barrières,
08:57 celles que j'osais peut-être pas faire tomber.
08:59 C'est ce que je dis un petit peu dans l'intro.
09:00 Parler du fait que oui, je pense à arrêter.
09:02 Parler du fait que j'ai peur que mes enfants ne réussissent pas dans la vie.
09:05 Enfin vraiment, je parle de tout ça dans l'album.
09:07 Oui, il y a des feats, il y a des feats.
09:08 Des gros feats.
09:09 Je ne peux vraiment pas en parler pour le moment.
09:11 Moi, tant que ce n'est pas masterisé, je n'y crois pas.
09:13 Mais il y aura de très belles collaborations, très surprenantes.
09:15 Non, on ne retrouvera pas Sliman sur l'album.
09:19 Il faut savoir que Sliman, il est avec moi dans cet album,
09:22 dans le sens où je lui fais tout valider.
09:24 Je crois qu'il a tous les titres depuis six mois.
09:25 Que ce soit même mes visuels télé, il vient m'aider.
09:28 Ah ouais, vraiment, moi j'ai besoin de sa m'aide.
09:30 En fait, on est vraiment des amis.
09:33 On est comme un binôme.
09:34 C'est-à-dire que j'ai du mal à prendre des décisions parfois sans le concerter.
09:36 Que ce soit à la pochette de l'album, parfois même dans une chanson.
09:39 Même s'il n'a pas travaillé sur la chanson, je lui envoie, je lui dis
09:41 "Tu préfères ça, le couplet ? Tu préfères ça ?"
09:42 D'ailleurs, on a des images parce que je prépare un documentaire.
09:45 Et il est très présent dans cet album sans être dans l'album.
09:47 Mais j'ai écrit trois ou quatre chansons avec Sliman dans cet album.
09:50 Sous-titres réalisés para la communauté d'Amara.org
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