Mali : un projet de constitution "clivant"
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00:00 Bonjour, sur le continent africain, on en vient maintenant à ce projet de nouvelle constitution au Mali.
00:04 La nouvelle loi fondamentale proposée par Hassimi Goïta, elle sera soumise au vote le 18 juin prochain.
00:09 Référendum trois mois après la date prévue initialement. On en parle avec Gauthier Iwinski.
00:13 Bonjour Gauthier. Ce texte divise le pays. Que prévoit ce projet de nouvelle constitution ?
00:20 Alors, trois choses essentielles. La première, c'est finalement le président.
00:24 C'est un renforcement des pouvoirs du président, devant lequel le gouvernement sera responsable
00:29 et plus devant le parlement. C'est une manière aussi de donner au pouvoir et notamment au président
00:35 la libre interprétation de la situation pour imposer un état d'urgence éventuellement.
00:43 Et c'est aussi, alors là quelque chose qui clive encore plus, c'est l'abandon de ce qui était stipulé
00:50 dans la charte de transition. La charte de transition disait qu'il ne fallait pas du coup
00:55 que les militaires puissent se représenter. Or, ce qui est prévu maintenant, c'est que tout citoyen malien
01:01 puisse, ce qui a priori est logique, puisse se présenter à la présidence de la République.
01:06 Et donc, ce que craignent les opposants, c'est que l'armée en profite pour récupérer au fond,
01:11 au terme de ce processus de transition, le pouvoir par rapport aux civils.
01:16 Donc il y a, si vous voulez, quantité de choses qui sont clivantes.
01:22 Est-ce que la majorité de la population qui est derrière la junte va suivre sur un certain nombre de choses
01:29 qui sont précisément, qui sont porteuses peut-être de dangers pour une démocratie qui est appelée
01:36 de ses voeux, de leurs voeux par les citoyens maliens ?
01:41 Ça n'est pas certain. En tout cas, c'est la raison pour laquelle ça clive beaucoup.
01:45 Parce qu'au fond, on a le sentiment, certains ont le sentiment que ce texte ne respecte plus ce qui avait fait
01:53 la spécificité de constitution précédente du Mali, qui certes n'avait pas été forcément respectée,
02:00 mais qui représentait une forme de référence, malgré tout, pour un certain nombre de citoyens maliens.
02:05 - Alors, quoi de la transition justement dans le pays ?
02:08 - Alors, cette transition justement, elle est fonction de ce qui se passera d'abord le 18 juin, référendum sur ce projet constitutionnel.
02:18 Et puis là encore, il y a un certain nombre de zones d'ombre et qui seront déterminantes pour la suite,
02:24 non seulement de cette transition, le retour au pouvoir civil et surtout ce que le Mali entend être
02:29 dans le cas où les choses se passeraient bien.
02:32 Deux points par exemple. Les rebelles indépendantistes, notamment issus des mouvements Touareg,
02:37 craignent que finalement, ce qui avait été prévu en 2015 dans ce qu'on avait appelé les accords d'Alger pour pacifier la situation,
02:46 ils n'en soient pas tenus compte dans ce texte.
02:49 Et puis, il y a une deuxième chose qui fait beaucoup préoccupation, qui crée beaucoup de malaise,
02:54 c'est la question de la réaffirmation de la laïcité.
02:58 Et là, vous avez quantité, une volée de bois vert de la part de beaucoup de religieux,
03:04 qui ont, si on les met bout à bout, ont une réelle influence sur la société malienne.
03:10 Et là, ça suscite vraiment quelque chose de très fort.
03:13 J'ose dire, mais c'est une interprétation que précisément, et là on revient dans la problématique habituelle,
03:19 que pour un certain nombre de religieux, cette notion de laïcité est la marque d'une présence,
03:24 on va dire culturelle ou intellectuelle française encore,
03:28 et qu'il s'agit d'éradiquer ou de changer ou d'évacuer de la vie politique malienne
03:33 avec ce détail aussi qui est important, c'est la langue française qui n'est plus langue culturelle,
03:38 langue des champs, mais qui est reléguée au rang de langue de travail.
03:44 Merci beaucoup Gautier pour cet éclairage sur ce projet.
03:46 Nouvelle constitution au Mali, référendum, donc je vous le rappelle, le 18 juin prochain.