NonSco'llectif est engagé dans la défense de la liberté d'instruction. Autrement dit, il s'agit de parents qui réclament de pouvoir choisir librement le mode d'instruction de leurs enfants et qui dénoncent la dernière loi en la matière, beaucoup plus restrictive que la précédente. Un système désormais basé sur une autorisation académique, plutôt que sur une simple déclaration avec contrôles à la clé. Jalil, porte parole du collectif, est l'invité du 6/9 de France Bleu Hérault.
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00:00 Le collectif 11 collectifs, collectif de défense de la liberté d'instruction, mène actuellement des campagnes d'affichage
00:06 pour dénoncer un acharnement contre les familles qui font le choix de faire l'école à la maison.
00:10 Bertrand Cunotte, notre invité ce matin, c'est le porte-parole du collectif dans l'Académie de Montpellier.
00:15 Oui, collectif national de défense donc pour la liberté d'instruction. Bonjour Jalil.
00:20 Bonjour.
00:22 On est passé l'an dernier d'un système de déclaration, c'était le cas jusque là, à un système d'autorisation académique.
00:29 En quoi Jalil, est-ce que ça constitue pour vous, pour votre collectif, une atteinte à votre liberté ?
00:35 Sur plusieurs stades, sur plusieurs plans. D'abord, premièrement, c'est toujours embêtant d'avoir à demander une autorisation
00:43 pour quelque chose qui est une liberté et qui l'a toujours été en France, puisque depuis déjà les lois Ferry,
00:50 l'instruction famille est reconnue comme l'une des modalités de l'instruction obligatoire.
00:55 Donc l'école n'a jamais été obligatoire en France. Ça, c'est le premier point.
01:00 Et puis ensuite, dans les détails, la façon dont on installe une autorisation est très importante.
01:05 Et là, on est face à quelque chose qui permet simplement à l'administration de décider de manière absolument autoritaire et arbitraire,
01:13 qui peut et qui ne peut pas.
01:15 Vous avez l'impression que les décisions, les refus, les autorisations sont très aléatoires d'une académie à une autre aujourd'hui,
01:23 depuis cette nouvelle loi ?
01:25 Alors, ce n'est pas une impression. Là, on est sur le domaine du factuel.
01:29 Ça a été reconnu par le ministre Papennaille lui-même.
01:31 On a les chiffres qu'on a, puisqu'on n'arrive pas justement à les demander,
01:35 mais on voit bien une énorme disparité, à la fois entre les territoires, entre académies, entre départements,
01:41 également des disparités d'une année sur l'autre, d'une famille à l'autre,
01:46 et en plus de ça, des disparités à l'intérieur d'une même famille,
01:50 puisqu'on va retrouver des enfants qui ont autorisé dans une famille sous le principe d'une dérogation,
01:54 et d'autres à qui on va dire "bah non, c'est pas possible".
01:57 Le ministre Papennaille, justement, de l'éducation, affirme pourtant qu'il ne s'agit pas d'interdire sans discernement
02:03 tous les dispositifs d'instruction dans la famille et de porter atteinte aux pratiques positives.
02:06 La réalité, elle est tout autre depuis le passage de la loi.
02:10 Oui, absolument, et on peut même dire que son prédécesseur était allé encore plus loin dans ses déclarations,
02:15 puisqu'il disait carrément que cet article-là protégeait les familles,
02:19 que toutes les familles qui le feraient bien n'auraient pas de problème avec cette loi,
02:23 qu'elles perdaient leur énergie à se battre contre cette loi, etc.
02:27 On a eu beaucoup et beaucoup de déclarations.
02:29 Aujourd'hui encore, effectivement, devant la commission éducation de l'Assemblée nationale,
02:34 on continue d'affirmer qu'il n'y a pas de problème.
02:37 Néanmoins, on voudrait comprendre pourquoi est-ce qu'à côté de ça,
02:40 le ministère de l'Intérieur, lui, se targue d'avoir 30% de réductions à la rentrée dernière d'instruction en famille,
02:46 quand bien même on était censé être protégé.
02:48 Puisqu'on a 98% d'enfants qui sont contrôlés chaque année,
02:52 puisque je rappelle que l'instruction en famille était contrôlée jusqu'à présent,
02:55 chaque année par l'éducation nationale,
02:57 et cette même éducation nationale considérait qu'il y avait 98% des contrôles qui se passaient bien.
03:02 Pourquoi on n'a pas au moins 98% d'autorisation ?
03:05 - Alors une famille qui est suée en refus aujourd'hui, Jalil,
03:08 elle peut malgré tout le contester, n'est-ce pas ?
03:11 - Non, très difficilement.
03:13 Le principe de la contestation, ça va passer par ce qu'on appelle un rapport,
03:17 un recours administratif préalable obligatoire, comme son nom l'indique,
03:22 qui va être repris par l'académie elle-même,
03:25 qui est censée faire une commission pour réévaluer.
03:28 C'est assez rare d'avoir des retournements d'une petite fois que l'arc G,
03:31 et ensuite derrière, c'est tribunal administratif pour remettre en cause cette décision.
03:37 Alors autant on a eu, je dirais, des décisions très aléatoires depuis le mois de septembre,
03:41 autant là, c'est en train de se caler sur une vision très stricte de la loi
03:47 portée par le Conseil d'État en décembre dernier,
03:50 qui a affirmé que finalement c'est à l'académie de décider
03:54 si oui ou non il y a un intérêt supérieur pour l'enfant,
03:58 si c'est mieux pour lui d'être entre les familles par rapport à l'école.
04:03 Et c'est l'académie qui, elle, est évidemment responsable de l'école,
04:06 a décidé si on fait mieux qu'elle.
04:08 Donc évidemment, ça ferme beaucoup les portes,
04:10 et l'harmonisation promise par BAPENDIA,
04:13 il commence à arriver, mais commence à arriver dans le sens des académies les plus strictes,
04:17 à savoir que non, on ne peut faire sans famille que si on y est obligé,
04:23 que si vraiment on peut démontrer que l'enfant ne serait pas bien à l'école.
04:27 C'est pas ça qui a été promis, allez-y.
04:30 - Non, j'allais dire, c'est là que vous sentez, vous, qu'il y a une véritable dérive à vos yeux aujourd'hui.
04:34 L'école à la maison, ce sont 30 000 enfants, en gros, en France, c'est ça ?
04:39 - 54 000 selon les chiffres d'éducation nationale à la rentrée dernière.
04:43 - Et selon une étude rapportée par le journal La Croix l'an dernier,
04:46 28% des enfants en âge d'être scolarisés souffriraient de phobies scolaires au cours de leur parcours.
04:51 Est-ce que c'est là la principale motivation des parents, comme vous,
04:55 quand ils décident de reprendre la main le mal-être des enfants ?
04:59 - Déjà, il faut bien comprendre que l'idée n'est pas forcément d'avoir des enfants qui vont en IEF
05:04 et des enfants qui vont à l'école.
05:06 L'idée, c'est que jusqu'à présent, on avait une perméabilité qui est importante,
05:10 puisqu'on pouvait avoir des enfants qui commençaient par aller à l'école,
05:13 et qui, parce qu'effectivement, ils pouvaient avoir une période de phobie scolaire,
05:17 mais ça peut également toucher les questions de harcèlement.
05:20 Je rappelle qu'on a 800 000 enfants chaque année qui sont harcelés.
05:24 On a le sénat, l'enquête parlementaire, l'enquête du sénat,
05:28 qui nous a fait part du fait qu'il y a entre 800 000 et 1 million d'élèves
05:32 qui sont victimes chaque année du harcèlement scolaire.
05:35 On a 1,6 million d'enfants en détresse psychique en France,
05:38 toujours selon la Cour des comptes, cette fois-ci.
05:41 Et donc, c'est des enfants qui testaient avant,
05:44 puisque l'Association Famille était jusqu'à présent concernée des enfants
05:47 qui, pour la moitié d'entre eux, le faisaient pour moins d'un an.
05:51 Et ensuite, il y a effectivement des enfants qui le font pour plus longtemps que ça,
05:56 parce que simplement, soit ils viennent par hasard,
05:58 et puis ils y restent parce que ça leur convient,
06:00 et qu'ils n'ont pas envie de retourner à l'école,
06:02 soit parce qu'ils n'ont jamais été à l'école et que ça leur convient aussi.
06:05 Et cela dit, tous les enfants qui, enfin, beaucoup d'enfants qui font l'Association Famille
06:09 finissent par retourner à l'école à un moment, à un autre, temporairement ou définitivement.
06:13 Et cette terminabilité, elle était riche.
06:16 Elle était riche pour les enfants qui sont en Association Famille,
06:18 elle était aussi riche pour l'école,
06:19 puisque c'est comme ça qu'on a permis d'apporter aussi des pratiques à l'école.
06:23 Les pédagogies, certaines pédagogies, comme celle de Singapour par exemple,
06:27 elles ont été apportées par le milieu de l'IUF à l'école,
06:30 dans les échanges qu'on avait avec l'institution, avec l'académie.
06:34 Et donc on avait un échange également pédagogique,
06:37 ce qui fait que, voilà, c'était riche pour tout le monde.
06:39 - Jalil, vous le savez cependant, les opposants à l'école à la maison
06:43 disaient craindre il y a quelques années un conditionnement psychique, idéologique ou religieux.
06:47 Les dérives sectaires ou la radicalisation sont aussi désormais des arguments qui ont pesé dans le débat.
06:53 Est-ce que vous concédez que ça existe, ou pour vous,
06:57 est-ce que c'est trop minoritaire pour aujourd'hui apporter comme réponse une restriction ?
07:03 - Alors c'est une question beaucoup trop importante et beaucoup trop sérieuse
07:07 pour vous répondre largement, sans être précis, sans des chiffres précis.
07:12 Donc je ne vais pas vous donner mon avis à moi, je vous donne celui du ministère.
07:15 Le ministère de l'éducation nationale, il fait des rapports chaque année,
07:18 la DGESCO, dans lesquels il indique qu'il n'y a aucun problème de séparatisme chez nous.
07:23 Les cas de radicalisation sont, dans leurs propres mots, extrêmement...
07:29 du coup je ne trouve plus le mot, mais... - Minoritaire.
07:32 - Exceptionnel. Ce n'est pas minoritaire, c'est exceptionnel.
07:35 Ce n'est pas nous qui le disons, c'est l'éducation nationale.
07:37 Donc le ministère de l'éducation nationale, le président de la République,
07:40 le ministère de l'intérieur et tout un tas de députés ont pu affirmer haut et fort
07:45 qu'il y avait plein de filles qui étaient voilées dans des caves, sans fenêtres,
07:48 à réciter des prières tous les jours.
07:50 La réalité de leur propre rapport, c'est que ça n'existe pas.
07:53 Et quand même que ça existerait, on parlerait de quelques dizaines de personnes.
07:58 - Et c'est la raison pour laquelle... - Et on parle, je vous reprends sur votre chiffre,
08:02 on est à 54 000 enfants concernés à la dernière rentrée.
08:06 Donc de quoi on parle.
08:08 - Et c'est la raison pour laquelle, du coup, avec le nonce collectif,
08:11 vous luttez contre le durcissement du cadre législatif,
08:14 donc dans ce débat autour de l'école à la maison.
08:17 Merci beaucoup, Jalil, d'avoir été avec nous ce matin.
08:19 - Merci de m'avoir reçu.
08:21 Vous pouvez réécouter ces interviews en allant sur francebleu.fr