Echanges entre le public, Josef Schovanec et Marie Rabatel

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Echanges entre le public, Josef Schovanec et Marie Rabatel dans le cadre de la conférence "les bonheurs de ma vie d’autiste" du 17 juin 2023.

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00:00 Oui merci Joseph de proposer à Marie de revenir sur l'Estrade parce que c'était une question pour l'ensemble des intervenants aujourd'hui dont Marie en particulier.
00:10 Je suis très heureux pour vous parler de ce sujet de bonheur, du bonheur délicat parce que beaucoup dans cette salle ont traversé des moments difficiles
00:21 et j'ai eu le sentiment à vous entendre que souvent le bonheur était un peu un bonheur par défaut, c'est à dire quelque chose qui émergeait pendant les temps répits
00:34 entre grandes périodes où on est moins bien parce que soit on est comme ça soit parce qu'on a vécu des choses qui sont difficiles.
00:43 Et je voulais vous demander vous s'il n'y avait pas quelque chose de profondément rassurant à savoir, comme tu l'as dit Marie d'ailleurs,
00:54 Joseph vous l'a évoqué aussi, ces moments de bonheur sont plus que des parenthèses finalement, est-ce que c'est pas ça qui motive vraiment à se lever le matin,
01:05 et plus encore, est-ce qu'ils ne sont que par défaut ou est-ce que vraiment ils sont une substance de vie ?
01:12 C'est ça que je voulais ouvrir comme question et Marie plus spécifiquement, on se connaît bien et je sais que tu as pu dire dans d'autres interventions ces années précédentes
01:26 combien certaines expériences sensorielles profondes et très intimes étaient en soi des bonheurs et d'immenses bonheurs.
01:35 Et peut-être si tu le veux, si tu le souhaites, tu pourrais les décrire là pour nous montrer à quel point la diversité, la neurodiversité
01:45 est aussi peut-être une ouverture sur des bonheurs immenses.
02:05 C'est vrai qu'il y a une chose que je ne vous ai pas parlé tout à l'heure, je pense que vous vous en serez mis compte,
02:16 c'est quand même très compliqué pour moi de parler des bonheurs et c'est beaucoup plus facile pour moi de parler des violences sexuelles.
02:23 C'est comme ça, mais parce que les violences sexuelles font partie de ces choses qui m'animent au quotidien et qui me font finalement vivre des instants et des moments
02:36 de bonheur dans le sens où ça permet de donner son énergie pour que d'autres personnes ne vivent pas ce que vous avez vécu.
02:47 Et ça c'est quelque chose d'interne qui me donne beaucoup de bonheur.
02:56 De savoir que parce que vous êtes intervenu dans telle conférence et qu'il y a eu, je ne sais pas, je ne sais pas vous, des psychiatres,
03:04 et que vous faites une intervention sur le psychotraumatisme et les conséquences suite à des violences sexuelles,
03:09 et bien ça vous apporte un bonheur extrême, puisque vous savez que des personnes autistes par exemple,
03:15 et bien on sera en contact avec des professionnels qui auront une attention particulière sur le traumatisme que leur a laissé les violences qu'ils ont subies.
03:24 Mais il y a aussi une autre chose qui est très intime, qui m'instructe, Marie-Lama, avec l'environnement extérieur,
03:32 avec les actions qu'on peut faire, chacune ou chacune, alors que je n'ai pas parlé et pourtant qui m'anime quand même pas mal,
03:41 c'est cette notion de synesthésie, je ne sais pas si c'est un peu ça que Vincent voulait que j'exprime,
03:48 mais la synesthésie c'est quelque chose qu'on pourrait dire, c'est quelque chose de particulier, mais en fait non.
04:00 Je pense qu'il y a beaucoup de personnes qui sont synesthètes, donc moi j'ai la particularité, c'est de pouvoir composer des musiques, des mélodies,
04:10 sachant que je ne connais pas la musique, mais les sons me procurent des couleurs et des formes que je peux mettre sur un tableau,
04:23 et du fait de reproduire à l'infini une succession de musiques, de mélodies, de notes, sans connaître rien.
04:36 Et c'est vrai que quand on a terminé un tableau, moi j'appelle ça un tableau sonore,
04:43 quand on a terminé un tableau sonore qui permet de faire une mélodie, qui vient de l'intérieur, il n'y a rien qui vient de l'extérieur,
04:55 c'est des moments internes qui me permettent de vivre, alors je ne sais pas si c'est du bonheur ou pas du bonheur,
05:06 mais c'est quelque chose qui me permet de vivre l'instant, comme si j'avais été privé d'eau pendant 7 jours et qu'on me donne 3 gouttes d'eau.
05:23 Et c'est un moment extrême qui me fait vibrer à tout l'intérieur du corps et qui surtout me procure une sensation
05:41 que ce n'est pas parce qu'on a des particularités, des spécificités, qu'on est mauvais, qu'on est nul, qu'on ne sert à rien,
05:49 que toutes ces phrases négatives que des fois on s'entend nous-mêmes, qu'on se dit à soi-même,
05:56 ben non, en fait, on peut apporter des choses finalement pour l'humanité, et puis aussi on peut apporter des choses
06:06 et montrer qu'on est tous différents dans notre société et qu'on a besoin les uns des autres pour pouvoir vivre, en fait, voilà, juste vivre.
06:15 Et peut-être que c'est simplement, en fait, c'est de vivre, vivre, vivre tout simplement, en fait, voilà.
06:26 Merci, merci beaucoup Marie. En fait, il y a quelque chose qui peut-être me trouble ou qui m'arrêterait la discussion,
06:38 c'est la question de par défaut, quoi, vous voyez. En vérité, si par exemple votre esprit est occupé, je ne sais pas,
06:48 on va dire que ceci est un iPhone 23, c'est ça, le dernier, enfin quelque chose comme ça,
06:54 donc si votre esprit est occupé par cet éminent objet, peut-être que justement votre esprit n'est pas occupé par les choses importantes, quoi, vous voyez.
07:06 On pourra toujours dire que le sentiment de bonheur est par défaut d'iPhone 23, mais je ne suis pas sûr que ce soit plus qu'une pirouette, quoi,
07:16 c'est une pirouette rhétorique sans plus. Et donc peut-être, peut-être que la notion de par défaut, peut-être c'est justement ça qu'on devrait chercher, quoi,
07:30 qu'est-ce qui est réellement important. Quand on y réfléchit un peu dans nos vies, quels sont les moments réellement importants.
07:38 Quand je dis réellement important, c'est quelque chose qui sera toujours présent dans, mettons, 10 ans, et qui a des conséquences concrètes,
07:47 par exemple aussi sur d'autres personnes. Sous ces deux critères-là, finalement, il y a très peu de choses qui passent le bout de le filtre, quoi, vous voyez.
07:56 Donc peut-être qu'il y a un système extraordinairement savant, savamment mis en œuvre pour nous écarter des choses qui sont, on va dire, importantes.
08:10 Pascal, de son temps, a appelé ça tout ce qui est le divertissement, c'est-à-dire ce qui nous divertit par rapport à ce qui est important, quoi, vous voyez, on pourrait le dire comme ça.
08:23 Alors un autre appel contemporain, quoi, qui aujourd'hui est un peu oublié, hein, mais je pense à Sergei Nitsine, quoi, avant 50 ans, ça datait un peu, quoi, hein.
08:34 Et ben Sergei Nitsine, et lorsque, donc, il était en URSS, et évidemment il était antisoviétique et tout ça, et lorsqu'il est arrivé en Amérique,
08:43 il a commencé à sentir et à décrire les mécanismes, on va dire, qui nous détournent les champs, on va dire, de ce qui compte, quoi, hein.
08:53 Alors il a fait une sorte d'étude sur, et vous connaissez certaines de ses phrases très connues, sur par exemple, il est bien plus facile de soumettre un peuple par la pornographie que par les blindés, quoi, vous voyez, hein, et c'est profondément exact, quoi, hein.
09:09 Et il a dit que, d'une certaine façon, tout le génie pernicieux, le mauvais génie, hein, de la culture d'extrême Occident avait été d'utiliser, on va dire, les tendances, les faiblesses humaines,
09:25 donc telle ou telle chose, pour, on va dire, se construire un succès en tant que société, ou anti-modèle, j'entends dire, et anti-modèle, je sais pas si vous comprenez ça, j'ai fait ça juste maintenant, hein.
09:39 Mais, en tout cas, je ne suis pas sûr, pour le dire plus simplement, plus concrètement, je ne suis pas sûr que les modèles, par exemple, consuméristes, créent, on va dire, une sensation de bonheur au-delà de trois secondes, quoi, hein.
09:57 Et c'est d'ailleurs pour ça que je vais essayer peut-être de lancer une première ligne, comme ça, mais tant pis, hein, quand bonheur arrive, je vais lancer, comme ça, les choses.
10:05 Je ne suis pas très favorable à la notion d'empowerment, vous voyez.
10:10 Donc, lorsque, lorsque on parle dans la ligne du handicap ou autre, notamment dans la ligne du handicap de culture américaine, de l'exclusion, etc.,
10:20 la seule et unique réponse que l'on vous donne, mais, voyez, la réponse est la "empowerment", voyez.
10:28 Lorsque vous serez "fully empowered", eh bien, vous n'aurez plus de difficultés, on va dire, d'exclusion.
10:36 Mais est-ce que réellement, le bonheur, ce sera pour vous d'atteindre un poste où vous donnerez des ordres à sa porte secrétaire ?
10:44 Oui ou non ? Voyez, on parle des inégalités salariales, elles sont exactes, parfaitement exactes.
10:52 Mais est-ce que réellement ce sera le nirvana, ce mouvement contre le salaire de 17% ?
10:58 Peut-être un jour, oui, mais pas au-delà d'un mois, voyez.
11:03 Donc, il y a, je dirais, une vraie problématique, est-ce qu'on n'est pas en train de faire miroiter un mirage ?
11:12 Est-ce que c'est l'empowerment qui est la clé du salut ?
11:17 Ça, c'est vaste débat. J'ai été provocateur par donner un tomate critique au moment de l'interview, mais c'était pas tout élu.
11:26 Alors, est-ce qu'il y en a qui avaient demandé le micro tout à l'heure ?
11:40 Ah, j'ai eu peur.
11:42 Alors, il y a des gens qui disent que les autistes sont bizarres, pas dans le bon sens.
12:02 Et bien, en fait, ce sont les gens qui disent ça, qui sont bizarres.
12:08 Je me suis dit ça quand même à un certain moment.
12:16 Alors, j'avais vu un post sur Instagram qui expliquait l'autisme, si on est bas, par exemple,
12:27 la faute de la mère, une sange réservante, une mode, etc.
12:32 Ça disait aussi, l'autisme c'est partout, ton prochain, etc.
12:41 Il ne faut pas croire que l'autisme, c'est pas normal, quoi.
12:51 J'ai l'impression de plus en plus de personnes qui sont diagnostiquées autistes, justement,
13:00 que la société va devoir s'y faire.
13:08 Moi, c'est vrai.
13:13 [Applaudissements]
13:20 Alors, juste, on va dire, vous parlez de normal, mais en fait, normal,
13:29 vous dites que dans la société, il y a plus de gens qui sont autistes que d'autistes,
13:33 mais regardez, par exemple, là, on est une communauté, finalement,
13:37 il y a plus d'autistes que d'autistes.
13:39 Donc la normalité, ça n'a aucun sens, en fait.
13:44 [Rires]
13:46 Non, non, mais c'est pas ça.
13:48 C'est qu'en fait, la norme, elle est en fonction de l'environnement.
13:55 La norme en France, c'est pas la même norme qu'en Afrique, c'est pas la même norme qu'en Asie.
14:00 Et pour moi, parler de normalité, c'est encore parler de mettre des gens dans des cases,
14:09 et comme si on avait besoin de mettre des gens dans des cases pour pouvoir vivre,
14:13 soi-disant, tous ensemble, mais comment on peut vivre tous ensemble si on a besoin d'un hôtel ?
14:18 Je pense qu'il faut apprendre à vivre avec ce qu'on a,
14:26 et avec ce qu'on a, avec ce qu'on a.
14:31 Merci beaucoup, merci beaucoup, Marie.
14:36 C'est exactement ça.
14:38 C'est un petit peu ce qu'on peut désigner comme étant la théorie du stigmate de Gauffman,
14:44 parce que l'on ne tente pas de prendre les détails.
14:46 Alors, imaginons, on peut faire un petit jeu rigolo,
14:49 pas plus ou moins rigolo, comme on dit, sans votre respect.
14:52 Dans cette salle, on ne vous l'a pas dit, mais il y a deux groupes.
14:57 Il y a un groupe vraiment pas sexy, c'est les gens ici,
15:01 et il y a les cool kids, les top sexy, c'est ici.
15:06 Vous voyez ? C'est comme ça, vous ne le saviez pas, mais c'est comme ça.
15:10 Alors, objectif pour rien ne distingue les gens assis ici des gens assis là.
15:16 Mais les cool kids, ce sont ceux d'ici.
15:19 Et c'est exactement comme ça que fonctionnent les groupes humains.
15:23 Il y a des dynamiques de groupe.
15:25 Vous pouvez l'observer chez les jeunes, c'est extrêmement impacteur chez les ados.
15:30 Les ados, disons, c'est exactement comme ça que ça fonctionne.
15:33 Donc il y a les cool kids, et chacun veut imiter la tenue vestimentaire des cool kids.
15:39 Et ceux qui font le critère du cool, en fait, il n'y a pas de critère.
15:44 Et ça change tous les trois mois.
15:46 Et tous les trois mois, ceux qui étaient vraiment le top du cool,
15:51 trop stylés comme on dit, voilà, trois mois plus tard, c'est un groupe de bourreurs.
15:56 Et c'est comme ça que fonctionnent toutes les sociétés humaines.
16:01 Si vous voulez, par exemple, être un grand savant dans le monde de l'autisme,
16:05 il y a 20 ans, il fallait dire, l'autisme est une maladie rare,
16:10 avec 1 sur 10 000, on était un grand savant.
16:14 Aujourd'hui, on peut savoir dire que l'autisme a une autre catalan,
16:18 c'est encore plus, c'est encore parfait.
16:21 Il y a dans toute société humaine des critères totalement arbitraires
16:26 pour distinguer ce qu'on appelle le normal et ce qu'on appelle le pathologique.
16:30 Le truc rigolo, c'est que ça change beaucoup.
16:34 Ceux qui sont aujourd'hui les cool kids, de l'âme, ne le seront plus nécessairement.
16:40 Et il y a des études qui ont montré que ceux qui sont les plus populaires
16:45 au collège et au lycée auront la suite de vie la plus difficile.
16:49 C'est pas un motif de réjouissance, mais peut-être il vaut mieux se dire
16:54 par anticipation qu'il vaut mieux être top ringard aujourd'hui.
16:58 Ça me prouve que je crois qu'on peut presque un calcul comme ça.
17:03 Il faut être plus ringard aussi, c'est un truc de chance que ça.
17:07 Les blagues, mises à part, franchement, il y a 20 ans, 30 ans,
17:11 l'autisme était totalement inconnu.
17:13 Et s'engager dans le mythe autiste sur l'autisme, c'était le truc le plus ringard,
17:18 le plus idiot qu'il soit.
17:20 Il y a 20 ans, 30 ans.
17:23 Le monde, qu'est-ce qu'il a changé quand on propose un événement sur l'autisme il y a 20 ans.
17:29 Dans le meilleur des cas, on était 3.
17:32 Ça c'était quand il arrive la présidente de l'État.
17:36 Je cherchais un peu, mais c'est quasiment ça.
17:39 Le monde change.
17:42 Pour le mieux, pour le pire, je l'ignore.
17:44 En tout cas, il ne faut surtout pas se fier aux critères de normalité actuelle.
17:50 Juste une dernière phrase, si je peux me permettre, je vais faire un peu ma psychanalyse.
17:55 Ça c'est pardonné.
17:57 Je prends ce compte carré.
17:59 Mon premier combat militant avait été les jeunes autistes.
18:06 À une époque, j'étais beaucoup moins à l'aise dans les interactions que présentement.
18:14 Un jour, je m'étais retrouvé à la DAS.
18:19 À une époque, ça existait encore.
18:22 Aujourd'hui, on parle de la RSA.
18:24 C'est pas exactement la même chose, mais c'est un peu comme...
18:27 J'avais essayé de présenter un petit brouillon de dossier de jeunes autistes.
18:34 J'avais été quand même plus ou moins poussé par Simon Weimer.
18:38 Mais bon, ça n'a pas beaucoup suffi.
18:40 Le monsieur à la DAS m'avait dit "Mais jeune homme, au lieu d'être aujourd'hui ici,
18:47 à me parler de jeunes autistes, vous devriez être au travail".
18:51 Un peu comme une théorie.
18:54 Objectivement, il avait raison.
18:57 C'est-à-dire qu'il fallait simplement pour ne pas aller bosser, gagner sa vie.
19:03 Mais d'une certaine façon, s'il n'y avait que des gens parfaitement rationnels et fonctionnels,
19:10 je pense que ça allait bien.
19:12 On va pas aller trouver diverses différentes questions.
19:15 [Applaudissements]
19:25 Une autre question.
19:27 Et après, je pense qu'on a un petit mot.
19:30 Président.
19:33 Oui, c'est président.
19:34 Non ?
19:35 [Propos inaudibles]
19:39 Alors en fait, c'était pas vraiment une question, mais plus une réflexion sur différentes choses.
19:43 Ce qui a été dit ici, ce qui a été dit j'ai vu tout à l'heure,
19:46 c'était sur le thème qui est très en vogue actuellement, l'inclusion.
19:50 Alors c'est vrai qu'actuellement, à l'école, il y a des grands progrès qui sont faits.
19:54 On peut discuter s'ils sont suffisants ou pas.
19:57 Mais quand même, sur tout ce qui est formation, sur tout le personnel enseignant,
20:01 pour essayer de prendre en compte justement les spécificités de chacun,
20:06 pour justement mieux vivre.
20:07 Mais je pense que là où l'effort est à faire, ça c'est une première étape,
20:11 mais l'effort est à pousser sur l'après, sur la vie d'adulte.
20:15 Parce que c'est vrai qu'une fois qu'on est formé, c'est bien, on est passé par l'école,
20:20 mais le problème c'est que dans le monde du travail, qu'est-ce qu'on en fait ?
20:23 Parce que dans le monde du travail, le nombre de barrières, le nombre d'obstacles qu'on rencontre,
20:29 parce qu'on ne peut pas être femme et homme, parce qu'effectivement,
20:31 tout ce qu'on pourrait apporter en termes de diversité, en termes de regard extérieur,
20:36 en termes de regard différent, il est complètement nié, il est complètement écarté,
20:41 en connaissance de cause ou pas.
20:43 Et je pense que le gros effort, il est vraiment à faire sur la partie professionnelle,
20:47 pour essayer de faire en sorte qu'on puisse tous vivre mieux, déjà, dans le monde du travail,
20:54 et aussi qu'on puisse profiter de tout ce que tout le monde peut apporter.
21:00 [Applaudissements]
21:05 Alors, moi, je dis toujours que tant qu'on utilise le mot inclusion, l'inclusion, elle n'est pas là.
21:17 Et puis, peut-être qu'on devrait un petit peu changer la manière de penser dans notre société,
21:24 c'est-à-dire qu'au lieu de toujours inclure ceux qui sont pas, comme on dit, dans la norme,
21:31 qui sont sous-côtés, eh bien, on a qu'à faire l'inverse, en fait.
21:35 Et puis, on s'apercevra que c'est beaucoup plus simple d'aller dans ce sens-là
21:43 que dans le sens où on est aujourd'hui, où on doit absolument inclure des gens.
21:50 Voilà. La société devrait...
21:55 L'individu, quand on parle de la société, c'est l'individu devrait accepter une personne,
22:02 qu'elle soit en situation de handicap ou non, qu'elle soit migrant ou non, qu'elle soit homosexuelle ou non,
22:08 qu'elle soit juif ou non, qu'elle soit musulmane ou non.
22:10 Le problème aujourd'hui, c'est qu'on n'accepte pas les gens tels qu'ils sont, mais comme nous, on aimerait qu'ils soient.
22:16 On voudrait que telle personne soit comme ça, et du coup, si elle ne nous ressemble pas,
22:21 eh bien, en fait, on n'accepte pas.
22:23 Et...
22:25 Par l'inclusion, on peut en parler pendant des années, des années, des années, des décennies, hein,
22:29 tant que notre société, en général, elle restera centrée sur "bah voilà, toi t'es pas comme moi, donc un peu plus loin, quoi".
22:40 En fait, on s'en sortira pas, et c'est pas comme ça que...
22:44 que une société peut grandir, s'épanouir.
22:47 Après, voilà, vous allez dans d'autres pays, enfin, voilà, Joseph peut en parler bien mieux que moi,
22:53 mais dans d'autres pays où le handicap n'a pas cette perception que nous on a en France, en fait.
23:01 La vie, et les vies des gens, sont beaucoup plus épanouies que chez nous.
23:09 Merci beaucoup, Marie, merci.
23:12 Est-ce que vous savez d'où vient le mot "inclusion", quoi, hein ?
23:18 Il y a quelques décennies, le top du top, c'était l'insertion, quoi.
23:22 Puis après, on a commencé à parler d'intégration.
23:25 Il y a vingt ans, il fallait faire de l'intégration, hein, ça c'était le top, quoi.
23:31 Maintenant, il faut faire de l'inclusion.
23:35 Je me confonds déjà dans les mots, quoi.
23:38 Le mot "inclusion", ça vient du mot "clé", quoi, vous voyez, alors ça a une histoire assez glauque,
23:44 ça remonte à une histoire du collège des cardinaux, quoi, hein,
23:49 le collège des cardinaux qui devait choisir un pape, hein, et qui prenait leur temps.
23:54 Alors, ils devaient, pourquoi ils prenaient leur temps ?
23:56 Parce que ne pas avoir de pape, eux, ça les arrange bien, c'est eux les chefs, quoi, hein.
24:00 Donc ils prenaient des années et des années, quoi, hein, parfois, voilà.
24:03 Et un jour, on a dit "passe ça", quoi, hein, donc on les a enfermés,
24:08 on conclave, d'où la notion de clé, et on les a mis au pain sec et à l'eau.
24:15 Et très curieusement, au bout de quelques heures, il y avait une élection qui a été réussie, quoi, hein,
24:19 voilà, ça c'est juste pour l'inconnus, hein, c'est là, ce terme, en plus, c'est un terme assez horrible à la base, hein,
24:25 donc, il inclut celui sur lequel s'est tournée la clé, quoi, hein, vous voyez,
24:31 et en russe, ce mot-là existe aussi, mais il désigne les détenus du goulag,
24:37 ce qu'un terme officiel, pour désigner les détenus du goulag,
24:41 "заключёный", hein, c'est celui sur lequel la clé s'est tournée, quoi, hein, voilà.
24:45 Donc, évidemment, on n'a plus ça en tête du tout, hein, donc aujourd'hui, c'est le top du top, hein,
24:51 puisque nous sommes à Lyon, peut-être qu'on peut quand même avoir une pensée plus que forte
24:59 pour celui qui a le plus popularisé en France la notion d'inclusion, à savoir Charles Gardot,
25:05 hein, que tout le monde connaît, je crois.
25:08 Donc, Charles Gardot, qui a beaucoup oeuvré pour ça, qui a fini par reconnaître publiquement,
25:15 et je lui en rends grâce, hein, qu'en fait, tout son combat avait été une raison, finalement, de papa, quoi,
25:23 hein, donc ce n'était pas juste un combat tellement abstrait, comme on l'avait cru pendant certaines années,
25:29 hein, et l'autre jour, j'espère ne pas trop craindre les choses,
25:33 l'autre jour, au cours d'un trajet en train, Charles m'avait avoué qu'au fond, aujourd'hui,
25:39 peut-être qu'avoir la foi ou l'inclusion, c'est un peu fort de craquer, quoi,
25:45 disons que la foi n'est plus forcément celle qu'on pouvait avoir il y a quelques années.
25:50 Notre terme d'usage répétitif, comme un mantra, ou comme un usage liturgique du terme inclusion,
25:57 ne va pas faire avancer la donne.
25:59 Vous avez des hommes politiques qui savent obtenir un discours extraordinairement bien construit avec le mot inclusion,
26:07 un discours qui vous fait vibrer, vous avez presque l'impression que l'esprit s'en passe dans la foule,
26:13 hein, c'est un côté protocotiste, parfois, c'est étonnant, dans certains discours sur l'inclusion.
26:18 Mais en fait, une fois le discours achevé, la photo prise, pour, on s'appelle Facebook ou autre,
26:25 ben, il n'y avait rien, quoi, hein, retour au ghetto, quoi, hein, c'est un peu ça l'ambiance, quoi, hein, vous voyez.
26:33 Et peut-être plutôt que de secouer un mot comme un enfant secoue un jouet,
26:40 peut-être qu'on devrait essayer de faire des choses, hein.
26:44 À titre personnel, pour me dire une phrase, je ne crois plus aux grandes lois, aux plans d'action, etc., tout ça.
26:54 Je pense plutôt qu'il y a des gens, des gens parmi nous, qui ont la capacité de créer des bulles métalliques d'inclusion, quoi.
27:03 Un peu comme il y a, alors pardonnez le parallèle, mais à l'extrémité gauche du spectre politique,
27:11 il y a la notion de ZAD, de zone à défendre, quoi, vous voyez.
27:15 Comme ça, l'idée qu'il peut y avoir une petite bulle où il n'y aurait pas l'intrinsic capitaliste, hein, que sais-je, hein, vous voyez.
27:22 Donc, on pourrait imaginer qu'il y ait des personnes, et ces personnes existent,
27:28 qu'il y ait des personnes qui, on va dire, savent créer autour d'elles une meilleure, une meilleure situation,
27:36 un meilleur temps d'inclusion, quoi.
27:38 Ces personnes-là existent et il y en a parmi nous aujourd'hui.
27:43 Et pouvoir mettre en avant ces personnes, savoir mettre ces personnes dans une situation d'action,
27:51 je crois que ça, ce serait déjà une fabuleuse première étape.
27:56 Quant au pays et au voyage, je vois mon temps censuré, je ne dois pas abuser de votre patience,
28:03 mais si vous, si la vie est très dure pour vous, si vraiment ça ne va pas, ne vous flinguez pas aujourd'hui, quoi.
28:11 Le monde est vaste, il y a des super-mieux dans le monde, il y a des gens super, hein,
28:17 il y a des très belles choses qu'on peut voir, de très belles choses qu'on peut visiter,
28:22 et il y a des lieux où la vie est possible, et même une très chouette vie pour les gens bizarres, quoi, hein, vous voyez.
28:30 Et d'ailleurs, on est constat rigolo, on pourrait presque faire une sorte de théorème potache,
28:36 quand vous êtes dans un coin totalement paumé, le genre de coin où vous êtes le seul occidental à 100 km à la ronde,
28:44 et le genre de coin où si Abraham débarquait subitement, il ne serait pas dépaysé, quoi,
28:49 ce sont les deux critères pour définir un lieu sympa, quoi, hein.
28:52 Donc lorsque vous êtes dans ce genre d'endroit, et que vous croisez un blanc, il est quasiment sûr qu'il soit autiste, quoi.
29:00 C'est pas une blague, ça me surprend pas.
29:05 (Applaudissements)

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