Mort de Jane Birkin : "une artiste complète"

  • l’année dernière

Visitez notre site :
http://www.france24.com

Rejoignez nous sur Facebook
https://www.facebook.com/FRANCE24

Suivez nous sur Twitter
https://twitter.com/France24_fr#
Transcript
00:00 - On parle avec Sophie Rosemont, journaliste, réalisatrice,
00:03 autrice de "Girls Rock", également enseignante à la Sorbonne Nouvelle,
00:07 à Columbia University et à Paris Lanterre.
00:09 Merci d'être avec nous sur France 24.
00:11 Emmanuel Macron a rendu hommage aujourd'hui à une artiste complète.
00:15 C'est effectivement ce qui la caractérise.
00:17 - Oui, c'est sûr.
00:20 Jeanne Berkin a aussi bien exploré le territoire du cinéma,
00:24 que du théâtre, que de la musique, de l'écriture aussi,
00:27 en publiant ses journaux intimes, qui étaient assez magnifiques.
00:30 "Monkey Diaries" et "Postcriptum", publiés il y a quelques années.
00:34 Donc, oui, Jeanne Berkin, une artiste complète,
00:36 femme engagée aussi, notamment contre la peine de mort,
00:40 depuis l'enfance, elle manifestait déjà, petite, avec son père.
00:43 Donc oui, une artiste complète, c'est une bonne définition.
00:45 - Elle a chanté de nombreux textes, écrits par Serge Gainsbourg,
00:50 des textes aussi de sa propre plume,
00:51 des chansons en tout cas qui restent actuelles,
00:54 qui résonnent auprès des jeunes générations.
00:57 - Tout à fait.
00:58 Jeanne Berkin et Serge Gainsbourg, c'est un couple,
01:01 peut-être le couple le plus culte que la peuple française
01:03 n'ait jamais connu.
01:04 La chanson "La peuple", le territoire musical français.
01:07 Et puis, Jeanne Berkin avait quand même,
01:10 elle a toujours eu cette intemporalité très forte,
01:13 cet avant-gardisme au début de sa carrière, quelque part,
01:16 même si elle épousait le "Swinging London"
01:18 et ensuite les nuits festives du Paris, du Palace, etc.
01:22 Elle a toujours été très inscrite dans son époque
01:24 et en même temps, assez en avance.
01:25 Et puis, son allure qui reste très, très forte,
01:28 que ce soit les minijuques transparentes,
01:30 le jean, les t-shirts un peu louses.
01:33 Et puis, sa voix, sa voix extrêmement mélodique
01:36 qui peut se terminer par un souffle
01:39 et qui a encouragé beaucoup de chanteuses
01:42 à se lancer dans la musique,
01:43 même si elles n'avaient pas des voix de diva.
01:45 De toute façon, Serge Gainsbourg n'aimait pas
01:48 les artistes qui avaient des grandes voix
01:50 et elle a prouvé qu'on pouvait chanter
01:52 sans avoir une très, très grande voix
01:54 et pourtant, sa voix est inoubliable.
01:56 Un goût aussi pour la provocation et le scandale, parfois ?
02:00 Ah non, je crois qu'elle n'avait aucun goût
02:02 pour la provocation ou le scandale.
02:04 "Je t'aime, moi non plus", c'est vrai que j'imagine
02:06 que vous faites référence à cette chanson
02:08 qui, effectivement, a énormément choqué en 69,
02:11 surtout son pays d'origine, l'Angleterre,
02:14 qui ne comprenait pas comment sa petite fiancée, super mignonne,
02:16 bon, cela étant, "Blow Up" n'était pas pour les enfants de chœur,
02:18 donc le film qu'il avait révélé d'Antonioni.
02:21 Je crois que, non, il n'avait pas spécialement de goût pour la provoque.
02:24 En revanche, elle était extrêmement libre,
02:26 voulait se sentir libre et mener sa vie comme elle l'entendait
02:29 et choisir les projets qui lui semblaient intéressants.
02:31 Donc, "Je t'aime, moi non plus", elle se doutait bien
02:33 que ce n'était pas non plus une chanson
02:35 qui pouvait passer, entre guillemets, partout,
02:37 mais c'était aussi une chanson d'amour.
02:40 Elle était extrêmement amoureuse de Serge Gainsbourg,
02:42 ils l'ont été pendant très longtemps
02:44 et donc c'était une manière aussi de célébrer son amour.
02:46 Je ne dirais pas que tout ceci était très candide et très naïf,
02:48 mais il y avait l'innocence chez Jen Birkin
02:50 et il y en a eu d'ailleurs jusqu'à son décès.
02:52 Il est passé 70 ans, elle est gardée cette innocence.
02:55 - Elle a aussi réalisé une grande carrière dans le cinéma,
02:58 on l'oublie souvent,
03:00 mais elle est au générique de pas moins de 70 films,
03:03 muse également de son mari Jacques Doyon,
03:06 une actrice accomplie.
03:08 - Une actrice accomplie qui a commencé très tôt.
03:11 Il ne faut pas oublier que Jen Birkin était la fille
03:13 d'une comédienne très connue en Angleterre,
03:15 Judy Campbell.
03:16 - Et petite fille, également.
03:18 - Et petite fille, effectivement.
03:20 Elle est issue quand même de femmes artistes,
03:22 donc muse, mais plutôt, je dirais,
03:24 inspiratrice, car élevée dans un environnement
03:27 culturellement favorable.
03:29 Son premier rôle, c'était en 1964,
03:31 elle n'était pas du tout majeure,
03:33 c'est comme ça qu'elle rencontrait son premier époux,
03:35 le meilleur, John Berry.
03:37 Jen Birkin avait vraiment une excellente actrice
03:39 qui pouvait aussi bien participer de rôles
03:41 de gentilles filles, comme Pierre Richard,
03:43 que des petites, plus profondes,
03:46 plus dramatiques aussi.
03:48 Elle a vraiment fait tous les registres
03:50 avec un naturel déconcertant.
03:52 Ce n'est pas pour rien qu'elle a inspiré tant de grands réalisateurs,
03:54 d'ailleurs, qu'il lui a consacré un film.
03:56 - Elle est également la femme de plusieurs hommes.
04:00 Vous avez évoqué John Berry, Serge Gainsbourg,
04:02 Jacques Doyon, trois filles également,
04:05 donc de trois pères différents.
04:07 La mort de sa fille aînée, ça a été le drame de sa vie, évidemment.
04:10 - Oui, ça a été sans doute le drame de sa vie,
04:13 parmi d'autres drames, mais oui,
04:15 la mort de Kate,
04:17 c'est une mère qui perd un enfant,
04:20 c'est forcément une tragédie
04:22 dont elle ne s'est jamais relevée.
04:24 - Vous évoquiez également tout à l'heure une femme engagée,
04:26 alors récemment, on l'a vu,
04:28 pour les réfugiés, pour les migrants,
04:30 mais également du temps du siège de Sarah Yevo,
04:33 et plus récemment aussi pour la guerre en Ukraine.
04:36 - Oui, Jen Birkin était une personnalité
04:39 fondamentalement pacifiste
04:41 et qui ne comprenait pas qu'on ne puisse pas
04:43 partager ces convictions-là.
04:45 Donc elle a été élevée dans une famille aussi des progressistes,
04:49 elle était elle-même,
04:51 elle était d'une tolérance vraiment à toute épreuve,
04:53 et elle voulait partager, et effectivement,
04:55 c'était plusieurs fois, comment dire,
04:57 illustré par des propos dénonçant la guerre,
04:59 dénonçant les violences faites aux femmes,
05:01 aux enfants, aux civils.
05:03 C'était, oui, c'était une famille.
05:07 - La liaison est décidément un peu compliquée,
05:12 en tout cas merci infiniment, Sophie Rosemont,
05:15 pour votre intervention sur notre antenne
05:17 et d'être revenue pour nous sur la vie de Jen Birkin,
05:20 je vous le rappelle, décédée à l'âge de 76 ans.

Recommandée