L'Arabie saoudite poursuit sa conquête du football mondial

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Transcript
00:00 Cette agitation comme chaque été ou presque au Paris Saint-Germain et surtout l'Arabie Saoudite.
00:04 On va en parler tout de suite avec notre invité. Bonjour Naïm Monyo.
00:06 Bonjour Antoine.
00:07 Vous êtes journaliste à Eurosport, à consultant également en radio foot.
00:10 On vous connaît bien ici à France 24. Merci d'être avec nous.
00:13 Je le disais, Neymar devrait donc quitter le Paris Saint-Germain pour visiblement le club d'Alilal en Arabie Saoudite.
00:20 Pour les supporters parisiens, on a envie de dire presque enfin finalement Neymar et surtout pour le club d'une certaine manière.
00:25 Oui, surtout pour le club parce que ça fait quelques années qu'ils essayent de s'en débarrasser.
00:30 Lui-même avait d'ailleurs voulu à une époque racheter son contrat.
00:32 Ça ne s'était pas fait pour diverses raisons. Il ne salue plus le public depuis deux ans.
00:36 La rupture est consommée depuis très longtemps même si sur certains matchs, certains gestes, certains buts, les gens vont l'applaudir.
00:42 Ça fait un moment que la rupture est consommée. Elle est consommée également avec Kylian Mbappé, la star de ce club, la vraie star de ce club.
00:49 Le PSG a trouvé une porte de sortie qui finalement était la plus logique parce que au regard du salaire qu'il a, du transfert que ça représente
00:57 et du peu de sérieux du joueur, aucun club en Europe ne pouvait le prendre.
01:00 Donc il va partir en Arabie Saoudite. Il va trouver un club qui va lui permettre un peu de s'entretenir physiquement.
01:04 Il va gagner beaucoup d'argent. Le club va récupérer 90 millions d'euros plus le salaire. On estime 36 millions d'euros net par an.
01:10 Donc le contrat courait jusqu'au 2025. Il avait une prolongation possible jusqu'au 2027.
01:15 Donc il y a une économie qui est formidable. Mbappé a les clés du camion. Lui va aller jouer un peu au foot et puis faire autre chose de sa vie.
01:20 C'est du win-win.
01:21 C'est du win-win pour Neymar et pour le Paris Saint-Germain. On l'aura compris.
01:25 Plus largement, Naïm, l'Arabie Saoudite devient ces derniers mois en tout cas une destination de choix pour des footballeurs et pas que en forme de carrière.
01:32 Il y a eu Ronaldo évidemment mais aussi Benzema, Kanté, N'Golo Kanté et Fofana notamment de Lens qui était premier à Bel-Avenir.
01:38 Comment expliquer que l'Arabie Saoudite soit devenue une forme d'attraction pour les footballeurs à ce point-là ?
01:44 Quand vous connaissez les salaires qu'ils versent, ça paraît évident.
01:47 L'immense majorité des joueurs qui vont en Arabie Saoudite, et pour les noms que vous avez donnés, on y va pour l'argent.
01:52 Exclusivement le championnat footballistique.
01:54 On va me faire la comparaison avec le Qatar. Oui mais le Qatar part de zéro.
01:57 Donc évidemment que c'est mis en Arabie Saoudite mais c'est un championnat de 3ème, 4ème zone.
02:00 Par contre, il y a des salaires très confortables.
02:02 La vie est plutôt pas mal pour l'essentiel des joueurs. En tout cas pour une partie d'entre eux que vous m'avez cité, c'est des musulmans.
02:07 C'est quand même le pays de la Mecque.
02:09 C'est une destination qui est devenue privilégiée parce qu'elle permet aux joueurs de rester actifs, de gagner énormément d'argent pour eux et pour leur succession.
02:16 De pouvoir participer à la Ligue des Champions Asiatiques, de continuer à être internationaux.
02:21 Parce que pour beaucoup de ces pays-là, Cristiano Ronaldo n'est pas fait d'exemple.
02:24 Il jouait avec le Portugal, Cristiano Ronaldo.
02:26 Donc voilà, c'est un bon compromis. Le niveau sportif n'est pas terrible.
02:29 Mais financièrement, c'est quand même un Eldorado nettement supérieur à ce que représentait le Qatar, la Chine ou même les Etats-Unis.
02:35 Est-ce qu'il n'y a pas une nouvelle donne ? Parce que l'Arabie Saoudite, c'était une destination exotique à l'époque.
02:40 Les footballeurs y allaient surtout pour gagner de l'argent, comme la Chine par exemple.
02:43 Mais on a l'impression que ces derniers mois, il y a une forme d'accélération.
02:46 Les Saoudiens arrivent à attirer des joueurs qui ne sont pas nécessairement en fin de carrière.
02:50 Non, qui ne sont pas nécessairement en fin de carrière. On pense notamment à Seiko Fofana qui a 29 ans.
02:54 Moi, j'ai quand même beaucoup de mal à imaginer que ces joueurs-là vont continuer à progresser dans un championnat aussi faible.
02:59 Par contre, le fait de faire venir des joueurs qui parlent aux jeunes, parce qu'en fait c'est un changement politique.
03:03 L'arrivée du prince Mohammed bin Salman a considérablement redessiné un petit peu le projet politique saoudien.
03:09 Il y a eu une ouverture sur l'extérieur. On va ramener finalement les jeunes au accès à Internet.
03:13 Pour les plus riches d'entre eux, ils vont faire leurs études dans le monde occidental. Ils reviennent avec cette culture.
03:17 Donc on va ramener l'extérieur à domicile. On va prendre des joueurs qui parlent.
03:20 Les plus jeunes avec des salaires qui sont très confortables, qui permettent de jouer au foot à un niveau moyen, mais en tout cas d'être internationaux.
03:26 Donc on peut y aller, j'ai envie de dire, presque à tout âge.
03:28 Ce qui aurait été inquiétant, c'est si Bappé y avait été. Si Arling Halland y avait été.
03:32 On aurait pu s'inquiéter. Je vois les joueurs qui y vont.
03:34 Évidemment, un garçon comme Sekou Fofana, qui aurait pu jouer à la Ligue des Champions et Clans, c'est dommageable.
03:38 Mais à la rigueur, bon, je me dis, il va continuer à être international, ivoirien, en tout cas quand il est sélectionné.
03:44 Il va pouvoir garder un niveau correct. Mais ça reste un championnat, pour l'instant, au balbutiement.
03:49 Peut-être que dans 2-3 ans, si la mayonnaise prend, des joueurs beaucoup plus jeunes iront encore.
03:53 Mais il faut bien comprendre quelque chose, c'est que le football en Arabie Saoudite n'est pas un outil de soft power.
03:59 Quand on est le pays de l'Amec et qu'il y a un cinquième de la population musulmane du monde qui est musulmane,
04:04 le soft power, il est religieux. Par contre, le football, c'est du sport cleaner.
04:07 On va se servir du football pour nettoyer son image à l'international,
04:10 parce qu'on est dans le conflit avec le Yémen, parce qu'on finance le terrorisme international,
04:14 parce qu'on est un pays très rigoriste, que les femmes et les minorités sont quand même très compliquées,
04:18 qu'accessoirement on fait disparaître des journalistes dans des ambassades.
04:21 Donc de pouvoir, à travers le sport et notamment le football, qui parle à tout le monde,
04:24 aux plus jeunes, 70% de la population saoudienne à moins de 35 ans.
04:27 Donc on va permettre de ramener l'extérieur à domicile, de nettoyer son image à l'international.
04:32 De la politique intérieure, Neymar, c'est les fans qui l'ont voulu.
04:35 Neymar, on voulait Messi, on ne l'a pas eu, on voulait Mbappé, on ne l'a pas eu,
04:38 mais on a pris Neymar, on a réussi à l'avoir.
04:40 Donc on va ramener des joueurs qui vont permettre de contenter la population locale, notamment les plus jeunes.
04:45 Et puis c'est aussi quelque chose qui va permettre d'un point de vue sanitaire,
04:48 d'encourager les plus jeunes à faire du sport, parce que le problème de l'Arabie Saoudite aujourd'hui,
04:52 c'est qu'il y a 59% de la population qui est touchée par l'obésité.
04:54 Donc les joueurs viennent "prendre de l'argent", jouer au foot, servir d'ambassadeur.
04:59 Ça sert évidemment le projet saoudien, et notamment Mohamed Bin Salmane,
05:03 qui va régner sur les 35-40 ans peut-être qui arrivent.
05:06 - Oui, c'est nouveau ça, d'une certaine manière c'est assez nouveau ça.
05:08 L'ouverture, un outil de soft power nouveau, finalement,
05:11 vous me disiez c'est une manière de nettoyer un peu l'image de l'Arabie Saoudite,
05:14 avec un nouvel axe d'une certaine manière.
05:16 - Bien sûr, c'est une ouverture sur l'extérieur, mais vous savez Antoine,
05:18 quand vous faites venir Neymar dans le pays, vous faites venir un type qui boit beaucoup d'alcool,
05:22 qui mange du porc, qui fait des paris en ligne et qui aime beaucoup les femmes.
05:25 C'est quand même pas trop la tendance en Arabie Saoudite,
05:27 donc vous faites une ouverture qui est quand même monstrueuse sur l'extérieur,
05:29 vous infléchissez votre politique.
05:31 Donc il y a un effort qui est fait de la part du régime saoudien, à travers le football.
05:36 Les joueurs en ont conscience, moyennement conscience, pas conscience, j'en sais rien.
05:39 Eux ils viennent prendre beaucoup d'argent, jouer au foot.
05:41 C'est une destination qui est à la mode, comme le Qatar l'a été, comme la Chine l'a été.
05:44 Il ne faut pas oublier que la Chine, il y a quelques années, il fallait absolument y aller.
05:47 Les Etats-Unis, un degré moindre. Aujourd'hui c'est l'Arabie Saoudite.
05:50 La question n'est plus de savoir si ça va marcher ou pas marcher, la réalité c'est que ça marche déjà.
05:54 La question c'est de savoir si c'est pérenne sur du moyen terme, comme le Qatar et les Etats-Unis,
05:58 sur du plus court terme, comme la Chine, ou est-ce qu'on va assister à quelque chose
06:01 de nettement plus important qui va s'étirer dans le temps.
06:03 Et là, j'ai envie de dire que ça va prendre des proportions nettement plus importantes,
06:06 parce que des plus jeunes joueurs iront encore.
06:08 Là ils y vont, ils ont 28-29 ans, mais peut-être que dans 3-4 ans, ils auront 22-23 ans.
06:12 Et puis on va peut-être assister, pourquoi pas la FIFA, monsieur Infantino qui n'a jamais eu une idée,
06:17 toujours des idées plus mauvaises les unes que les autres, il va dire "on va peut-être faire une compétition
06:20 qui va mêler les clubs européens et les clubs saoudiens, puis les clubs sud-américains ensemble".
06:24 Ça peut redessiner la géographie du foot mondial à terme.
06:27 Donc le monde est fixé sur l'Arabie Saoudite, sur ce qui se passe actuellement.
06:30 On en est au balbutiement du projet, ça marche quand même très fort parce qu'il y a beaucoup d'argent
06:33 qui est investi, on va voir ce que ça donne.
06:35 Oui, un dernier mot, ce que je voulais dire avec vous, est-ce qu'à terme, vous le disiez,
06:38 on est au balbutiement, mais est-ce que ça peut menacer la suprématie sur le football des clubs européens ?
06:41 Je ne pense pas, parce que le niveau reste quand même absolument, nettement supérieur.
06:46 Il y a la formation, il y a l'histoire, il y a les structures, les compétitions sont d'un meilleur niveau.
06:50 On a également les compétitions internationales qui permettent aux clubs d'être plus fortes.
06:54 Par contre, on est passé d'une Coupe du Monde des clubs, de 7 clubs à 32 clubs.
06:58 Il n'y a rien qui interdit la FIFA de se dire "on va faire une espèce de Ligue des Champions mondiale
07:04 avec des clubs sud-américains, européens, saoudiens, et là, on aura une confrontation
07:08 et peut-être qu'à force de côtoyer les clubs européens, le foot saoudien prendra du niveau".
07:12 Mais comme je vous le disais en début de dialogue, le niveau saoudien aujourd'hui reste moyen,
07:18 pour ne pas dire faible, et les clubs européens ont évidemment nettement la suprématie.
07:21 Merci beaucoup Naïm pour tout cet éclairage.
07:24 Naïm Mognol, notre journaliste à Eurosport et consultant à Radio Foot.
07:27 Merci beaucoup Naïm.

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