Rafaël Amselem : «L'antisémitisme en France n'est pas mort»
Rafaël Amselem, chargé d'études Génération Libre, à propos des tags antisémites qui ont été découverts, ce samedi 19 août, à Levallois-Perret, sur la devanture d’un restaurant casher : «L'antisémitisme en France n'est pas mort».
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00:00 Je pense qu'il y a deux remarques à avoir sur la faire en l'espèce
00:03 et le contexte général de Medine que nous sommes en train de vivre.
00:06 D'abord, je le dis avec d'autant plus de gravité
00:09 que je me sens personnellement touché par ce fait divers.
00:13 Et l'antisémitisme en France n'est évidemment pas mort.
00:16 Et il faut rappeler des réalités simples, à savoir que les Juifs
00:19 constituent la minorité en France qui est la moins nombreuse
00:22 et qui pourtant subit le plus d'attaques directes aux personnes
00:27 et que c'est une réalité qui est difficile à vivre,
00:29 qui ne fait pas que la vie est impossible en France,
00:31 mais qui, par exemple, moi, parler de mon cas personnel,
00:33 y compris dans des quartiers qui sont objectivement des quartiers en sécurité.
00:37 Je ne me sens pas libre, par exemple, de porter la kippa.
00:40 Nous sommes en 2023.
00:42 Il y a un problème de garantie des droits dans ce pays.
00:44 Et c'est toujours difficile de répondre sur les solutions
00:48 parce qu'on peut difficilement prévenir à l'avance les crimes.
00:51 Mais il y a effectivement un problème sécuritaire.
00:54 En revanche, il y a un deuxième point qui concerne aussi cette affaire
00:57 et qui me semble important à souligner.
00:59 C'est le traitement politique de l'antisémitisme en France.
01:04 La façon avec laquelle la classe politique souhaite réagir
01:07 et prendre en compte la question de l'antisémitisme.
01:10 Et il y a un problème qui concerne autant la droite que la gauche.
01:14 Pour le coup, personne n'est exemple de ça.
01:16 C'est que les Juifs, au fond, sont les jouets,
01:19 sont les instruments de lutte partisane, de lutte personnelle politique.
01:24 Ou au fond, la question, c'est de dire l'antisémitisme,
01:27 c'est toujours l'autre, c'est jamais soi.
01:29 On l'a avec cette affaire l'exemple, puisque ce matin,
01:31 on a eu un tweet d'Aurélien Taché qui disait, je cite, en parlant de ce fait,
01:38 je cite l'antisémitisme, trois petits points, le vrai.
01:42 Et quand même assez symbolique d'une forme de lâcheté.
01:44 De lâcheté parce que la gauche, sans aller jusqu'à dire qu'elle est antisémite,
01:49 a un traitement problématique de l'antisémitisme.
01:52 Sur Jean-Luc Mélenchon, on a eu tout un tas de déclarations
01:56 expliquant par exemple que les idées d'extrême droite de M. Zemmour
01:59 étaient liées à sa judéité, expliquant que M. Corbyn n'a pas perdu
02:04 à cause de ses déboires en matière de lutte contre l'antisémitisme,
02:08 dénoncée par un organisme de l'ONU.
02:11 Mais c'est parce qu'il y a eu un rassemblement
02:13 entre le grand rabbin d'Angleterre et le Likoud.
02:15 Puis on peut aussi parler, les Juifs qui ont placé Jésus sur la croix,
02:19 qui l'a placé dans une interview, enfin bref.
02:21 Donc la gauche n'est absolument pas exempte.
02:23 Et il serait peut-être temps pour rejoindre ce que vous disiez sur Médine,
02:25 que elle revienne à ses principes fondamentaux, à savoir l'antiracisme.
02:30 Mais la droite, je terminerai sur ça très rapidement,
02:32 la droite n'est pas non plus une exemple.
02:33 Et c'est très important parce qu'on ne peut pas comprendre
02:36 le sentiment des Juifs si on ne traite pas de tous les problèmes
02:38 et de toutes les formes d'antisémitisme, y compris celles qui ne sont que verbales.
02:42 C'est par exemple Marine Le Pen qui, parmi ses proches,
02:45 dans son micro-parti notamment, a deux anciens membres du GUD,
02:48 a aussi des personnes qui sont accusées d'antisémitisme.
02:51 C'est l'affaire Civitas qu'on a eue récemment avec le président
02:55 ou je ne sais plus quel responsable de cette association,
02:57 qui a expliqué qu'au fond, tout le problème de la République,
03:00 c'est depuis qu'on a naturalisé les Juifs, qu'on leur a accordé la citoyenneté.
03:03 Donc il est temps de dire à l'ensemble de la classe politique,
03:06 de gauche comme de droite,
03:07 que l'antisémitisme doit être traité dans toutes ses facettes,
03:10 y compris celles qui ne font pas plaisir,
03:12 y compris celles qui contredisent ses propres convictions.
03:15 Et sans cela, on n'arrivera jamais à aller au bout de ce mal profond.
03:19 [Musique]
03:22 [Sous-titres réalisés para la communauté d'Amara.org]