• il y a 2 ans
Jean Boucault et Johnny Rasse, chanteurs d’oiseaux, auteurs du livres “Chanteurs d’oiseaux” (Les Arènes) sont les invités du grand entretien de 8h20 ce vendredi.

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Transcription
00:00 C'est vrai, je vous assure que c'est vrai. Les invités du grand entretien de France Inter ce matin sont un goéland argenté
00:06 *sifflement*
00:09 et un merle noir
00:10 *sifflement*
00:13 Je vous rassure, il parle aussi notre langue. Le goéland argenté s'appelle Jean Boucaud, bonjour.
00:19 Bonjour.
00:19 Le merle noir, Johnny Rass.
00:21 Bonjour.
00:21 Vous êtes chanteur d'oiseaux, c'est comme ça que vous vous appelez et c'est le titre de votre livre d'ailleurs.
00:26 Vous produisez en spectacle partout en France, aussi au Japon, au Pérou, en Pologne.
00:32 Vous intervenez dans les écoles, vous organisez des sorties en forêt pour sensibiliser
00:36 et vous avez sorti aussi un album, "La Symphonie des oiseaux", c'était en 2017.
00:41 Amis auditeurs, vous nous appelez au 01 45 24 7000, vous nous écrivez sur l'appli France Inter,
00:47 vous ouvrez vos fenêtres, vous nous faites entendre vos oiseaux, pourquoi pas vos plus belles imitations.
00:51 Dites-nous d'ailleurs si les oiseaux répondent à l'écoute de France Inter, tiens, pourquoi pas.
00:56 Commençons par le commencement, puisque vous racontez tous les deux l'histoire dans votre livre.
01:00 Vous grandissez dans un petit village, dans la baie de Somme, des oiseaux, il y en a énormément évidemment dans ce coin-là.
01:05 Un jour, Jean, vous rentrez de l'école et vous vous mettez, sans trop savoir pourquoi,
01:10 à imiter les goélands argentés qui tournent autour de vous et vous dites qu'ils vous répondent.
01:15 C'est ça, c'est l'image inaugurale, c'est la première fois où un oiseau me répond
01:19 et qu'il y a un lien qui est tissé entre moi et cet oiseau dans le ciel.
01:22 Et grâce à ce chant justement qui fait ce lien, et la démarche que je vais avoir à partir de ce moment-là,
01:27 c'est d'imiter le plus possible, de m'améliorer sans cesse pour retisser ce lien original.
01:32 Mais vous avez une dizaine d'années, comment vous pouvez savoir qu'il vous répond ?
01:35 Alors on le voit tout à fait dans le comportement.
01:37 C'est-à-dire que dans notre enfance, en observant les oiseaux, on voit tout à fait ce qui se passe
01:41 comme réaction à ce que l'on va imiter ou chanter.
01:45 Dès que j'ai fait ce chant-là, je vois la tête qui se tourne dans le vol, le vol qui se détourne, qui vous tourne autour.
01:50 Donc vous voyez très bien que vous avez une interaction et une influence sur l'oiseau, sur l'animal.
01:54 Qu'est-ce qui vous pousse ? Quelle force intérieure vous pousse à ce moment-là à essayer d'imiter les goélands ?
01:59 Je pense que c'est un attrait vers le ciel, un attrait vers celui qu'on ne connaît pas,
02:04 qu'on a envie d'être aussi.
02:06 C'est-à-dire qu'un oiseau qui vole, ça nous attire, ça nous emmène vers le ciel.
02:10 Et c'est pour ça, c'est grâce aussi à ce chant que tu peux réussir à atteindre ce niveau.
02:17 A partir de ce jour, vous ne baissez plus les yeux, vous devenez obsédé, il faut le dire, par les oiseaux.
02:23 Passionné, fou des oiseaux.
02:26 Et vous n'avez qu'une idée en tête, c'est d'apprendre tous les chants possibles.
02:30 Et vous vous dites, tiens, il y a le monsieur là, qui est ouvrier agricole, qui est berger en fait, c'est votre père Johnny.
02:35 Et vous vous dites, vous, Jean, je vais aller le voir.
02:37 Parce que lui, il passe sa vie dans la baie de Somme avec ses animaux, il connaît tous les oiseaux, il va m'apprendre à siffler.
02:41 Et vous, Johnny, vous voyez débarquer le fils du pharmacien, qui est assis en face de vous aujourd'hui.
02:46 Et vous vous dites, ça ne va pas se passer comme ça.
02:47 Non, pas du tout.
02:49 D'ailleurs, Jean, c'était très impressionnant, parce qu'il ne sifflait pas du tout, il criait.
02:53 Donc, il criait comme un goéland, comme une miole, on appelle ça en Picard une miole.
02:56 C'est ce qu'on écrit dans le livre et c'est extraordinaire, parce qu'on le voyait, enfant, du haut de ses 9 ans,
03:01 et de pousser des cris, mais c'était d'une puissance.
03:04 Ça arrêtait le temps dans la maison.
03:06 Nous, on était avec les frères et sœurs en train de jouer et d'un coup, un goéland était rentré dans la cuisine.
03:10 Sauf que vous, vous êtes jaloux.
03:12 Ah bien bien sûr, à un moment donné, il a fallu que l'oiseau parte, parce que mon père était accaparé par cet enfant
03:18 qui lui demandait tous les jours des cours.
03:20 Il rentrait avec ses bottes en caoutchouc, parce qu'il avait toujours des bottes aux pieds.
03:23 Il se promenait dans les marais et dans les alentours avec ses bottes.
03:26 Et il rentrait dans la maison tous les jours, tous les jours, il demandait son cours.
03:30 Et tous les jours, il demandait comment sifflait le cours Lysandré, le chevalier Gambette, le chevalier aboyeur.
03:35 Voilà, toute la cartographie.
03:37 C'est lequel celui-là ?
03:38 Ça, c'est le cours Lysandré.
03:39 C'est le premier oiseau que Jean a sifflé avec énormément de mal.
03:43 Et vous, le premier Johnny que vous avez sifflé, chanté, pour essayer de reconquérir votre père, c'était lequel ?
03:51 C'est le merle noir.
03:52 Parce que c'était l'oiseau préféré de mon père.
03:54 Et c'est un oiseau très virtuose.
03:56 J'ai mis un an à pouvoir essayer d'imiter le merle noir, en cachette, bien sûr, pour l'offrir ensuite à mon père.
04:03 Et enfin, récupérer ce père que j'avais perdu.
04:06 Parce qu'avant cela, il y avait le canard. Il y en avait beaucoup dans le jardin de votre grand-père, je crois, qui étaient chasseurs.
04:11 Le canard, vous dites, ce n'est pas le plus beau des chants d'oiseaux ?
04:13 Non, c'est souvent... En fait, le canard, c'est le canard colvert, surtout.
04:17 C'est la canne colvert.
04:18 Et oui, à l'enfant, il est vrai que j'avais beaucoup d'oiseaux autour de moi.
04:22 J'avais mes oncles aussi qui pouvaient siffler, qui rentraient avec un merle un peu dans la bouche, comme ça.
04:28 C'était juste des émanations d'oiseaux.
04:30 Mais par contre, les mélodies, elles restaient en tête.
04:32 Notre enfance a été baignée par les chants d'oiseaux.
04:35 C'est-à-dire que toutes les cours de ferme, tous les cours de jardin avaient des poules, des canards, des dindes, des pintades, des oies.
04:41 Et puis aussi, au-dessus de nous, il y avait un peu plus d'oiseaux.
04:43 Ce qui fait qu'on a été baigné dans une marmite de chants d'oiseaux.
04:47 Alors, je le disais, il y a la rivalité autour de la figure du père.
04:50 Votre père, Johnny, qui est accaparé pendant un temps par Jean parce qu'il lui apprend ses chants d'oiseaux.
04:56 Toute votre adolescence, vous commencez à concourir dans tous les concours de chants d'oiseaux qui existent.
05:02 Vous les gagnez tous, quasiment.
05:03 Vous écrasez la concurrence et vous devenez vraiment rivaux.
05:06 Ça fait comment, deux oisillons qui se chamaillent ?
05:09 (Oiseaux qui chantent)
05:18 Là, ils sont vraiment très fâchés.
05:19 (Oiseaux qui chantent)
05:21 Ok, et cette rivalité, elle va durer toute votre adolescence ?
05:24 Toute notre adolescence.
05:25 Et surtout, plus le livre avance, plus l'histoire avance.
05:29 Et plus Jean devient le fils Boucaud, le fils du pharmacien, et moins il a de noms.
05:35 Et plus le village va se séparer en deux.
05:37 Il est pro-pharmacien, il est pro-bourrier.
05:40 Et en fait, il y a une dissension.
05:42 C'est aussi une fable un peu sociale dans le village.
05:44 Il y a vraiment une séparation.
05:46 Et finalement, on n'a pas tellement de haine entre nous.
05:48 C'est plutôt la haine des gens qui supportent l'un envers les autres.
05:52 Et nous, on se respectait plutôt.
05:53 Moi, j'aimais bien être en joute face à quelqu'un d'un certain niveau.
05:57 Parce que ça me forçait justement à travailler et d'être justement à ce niveau-là.
06:01 Effectivement, c'est très beau.
06:02 Cette histoire d'amitié, cette histoire sociale aussi.
06:05 La famille du pharmacien, qui n'est pas originaire de la Baie de Somme, et la vôtre,
06:08 Johnny, votre papa qui est ouvrier agricole.
06:10 On parle picard à la maison.
06:12 Tout à fait.
06:13 Ce sont les oiseaux qui vont se réunir alors que rien ne vous prédestinait à devenir
06:19 proche au départ.
06:20 C'est complètement ça.
06:21 Et je crois que c'est aussi le regard d'un enfant sur la nature.
06:23 C'est-à-dire qu'enfant, le premier geste, c'était de lever les yeux et de voir cette
06:28 virtuosité qui était abordable.
06:30 Cette musique gratuite, cette musique du ciel qu'on a pu imiter.
06:33 Voilà, ça c'est une alouette des chants.
06:36 C'est extraordinaire.
06:37 Le nombre de notes qu'il peut y avoir pendant 8 minutes.
06:39 Donc, enfant, c'est sûr que ça nous fait lever les yeux.
06:42 Et le premier rapport, c'est essayer de tisser un lien, en effet, et d'avoir ce fil tendu
06:47 et de le garder.
06:48 Une baguette magique, en fait.
06:49 Depuis ces premiers chants, vous avez passé des milliers et des milliers d'heures dans
06:52 la nature à observer, à écouter les oiseaux.
06:54 On rencontre au fil de votre livre le courlis cendré, vous en avez parlé, le chevalier
06:58 gambette, le fuligule miloin, le rossignol philomel.
07:02 C'est très poétique aussi.
07:03 Le plus fascinant, vous dites peut-être, c'est les tourneaux.
07:08 Pourquoi ?
07:09 Parce qu'il a un chant de base qui n'est pas très virtuose, mais qu'il intègre dans
07:12 son chant d'énormes imitations.
07:14 Donc, son chant de base, c'est…
07:16 *Chant de basse*
07:18 C'est assez simple.
07:20 Et dedans, il va imiter tous les oiseaux, tout ce qui l'entoure.
07:23 A la fois des limicoles, si c'est un tourneau qui est né au bord de mer.
07:26 Donc, il va imiter des chevaliers, des guignettes, chevalier guignette.
07:29 Et s'il est né en ville, il va intégrer des sons de voitures, des sons d'alarme,
07:33 des choses assez étranges.
07:34 *Chant de basse*
07:39 Désolé si vous vous réveillez, mais ça c'est les tourneaux.
07:41 Il imitait quoi là ?
07:42 Une alarme, un son tropique.
07:45 C'est ça qui est incroyable, c'est qu'il va prendre l'univers sonore dans lequel il
07:48 est né.
07:49 Le plus disgracieux, ça vous le racontez dans le livre, c'est la gorge bleue.
07:53 Johnny, pourquoi disgracieux ?
07:55 Alors moi je parle de problèmes avec les gorges bleues, mais en fait il est disgracieux,
08:00 il n'est pas disgracieux.
08:01 C'est un chant très beau.
08:02 Mais c'est là où on va retrouver d'ailleurs notre différence.
08:08 C'est que Jean va l'imiter, il va imiter la gorge bleue lors d'un concours.
08:11 Pour plaire aux ornithologues quand même.
08:13 Et pour se dire, c'est le graal de l'ornithologie.
08:16 La gorge bleue c'est très difficile à voir, à observer, c'est très furtif.
08:20 C'est un oiseau qu'on peut imiter, mais qui est très difficile parce que c'est un gazouillis.
08:24 Et Jean l'a imité lors d'un concours.
08:27 Et pour moi, ce n'était pas un oiseau virtuose, qui rayonnait, qui avait une puissance.
08:33 C'est en ça que c'est disgracieux.
08:34 Ça fait comment ?
08:35 Juste en trois secondes ?
08:36 Oui, c'est pas le plus joli peut-être.
08:41 Ça vaut pas un rossignol qui vit dans le même territoire.
08:44 En effet, je suis d'accord avec vous.
08:51 On va aller retrouver Sandra, au standard.
08:54 Bonjour Sandra.
08:55 Bonjour.
08:56 Merci d'être avec nous, on vous écoute.
08:57 Oui, je suis hyper heureuse de parler au vrai Goéland et au vrai Merlenoir.
09:02 Parce que j'ai lu votre livre et je l'ai trouvé vraiment formidable.
09:06 J'ai trouvé que cette histoire était incroyable.
09:08 Donc j'ai deux questions.
09:11 La première, c'est est-ce que vous pensez qu'il y aura un film tiré de cette histoire ?
09:14 Parce que très clairement, ça pourrait faire un très grand film.
09:18 Et la seconde, c'est comment ont réagi vos parents quand vous leur avez dit « moi,
09:22 je vais être chanteur d'oiseaux ». Voilà, ça sera un métier.
09:25 Et qu'est-ce que vous diriez à des enfants qui ont des rêves un peu fous comme les vôtres,
09:30 qu'est-ce qu'on peut faire ? Parce que votre réussite est… c'est super.
09:34 Justement, alors pour les enfants qui rêvent en nous écoutant, vous écoutant ce matin,
09:38 je crois que justement, c'est le secret du livre.
09:39 C'est qu'il faut croire en son rêve et que même si on était décrié dans notre
09:43 enfance par un des gamins à 13 ans qui pensent plus aux oiseaux qu'au reste de la vie et
09:47 la vie en société, ils paraissent incongrus.
09:49 Mais finalement, notre temps vient.
09:51 Et que même des fois, on peut être rejeté à un moment, mais à un moment, notre temps
09:55 vient.
09:56 Et c'est ce qui se passe là.
09:57 Vous voyez, même ce matin, de colporter cette histoire de gamin qui s'ennuyait, qui était
10:00 juste devant la nature et qui trouvait dans cette nature cette pulsion de vie.
10:05 Et à un moment, on peut la sortir et l'exprimer.
10:08 Un film ?
10:09 Oui, c'est assez drôle de parler des films.
10:11 D'ailleurs, les gens nous font souvent la référence.
10:12 Ils pensent à Billy Elliot en lisant le livre.
10:14 Ils nous racontent ça.
10:15 Le jeune danseur.
10:16 Oui, le jeune danseur.
10:17 Et qui ne devait pas être prédestiné à ça.
10:20 Pas du tout.
10:21 Et en effet, il a rêvé.
10:22 Il a rêvé de voler, de s'envoler et de pouvoir être sur scène.
10:25 Et c'est ce qui est arrivé.
10:26 Et vous, un film, pourquoi pas ?
10:29 Un film ? Oui, avec plaisir, un film.
10:32 Vous êtes plein de projets de toute façon.
10:34 Oui, ce serait génial.
10:35 Le livre, l'album, le film.
10:36 Et puis, c'est un vrai témoignage aussi de notre baie de Somme.
10:39 Il y a des paysages en plus sonores et des paysages réels, visuels.
10:44 On le disait, vous imitez les oiseaux.
10:47 Mais en fait, vous ne les imitez pas.
10:49 Vous dialoguez avec eux.
10:50 C'est-à-dire que vous savez quand ils font un cri d'alarme, un cri de fuite, ce qu'on
10:54 appelle un cri de contact pour justement se mettre en relation l'un avec l'autre.
10:59 Le cri de quémandage pour les petits qui réclament de la nourriture.
11:03 C'est un langage, le chant des oiseaux, comme peut l'être le langage humain ?
11:07 Complètement.
11:08 C'est un son signifiant.
11:10 C'est-à-dire que c'est à la fois beau, ça peut être très beau les cris de parade,
11:14 les cris de séduction sont très beaux.
11:15 Mais parfois, ça signifie quelque chose.
11:18 Ça va impliquer une réaction de l'autre en face.
11:21 On a de vraies différences.
11:22 Le noir, par exemple, c'est un ramage.
11:24 C'est un cri de contact avec une interrogation.
11:33 Là, il y a une réponse.
11:37 C'est un cri de fuite.
11:38 Et puis il y a le petit qui a très faim.
11:40 Vous connaissez tout ça.
11:45 Vous pouvez interpréter les sons, les chants des oiseaux, savoir ce qu'ils vous disent
11:50 à ce moment-là et leur répondre.
11:52 En passant du temps dans la nature, on comprend qu'à chaque émission de son, il y a un
11:55 comportement qui est impliqué.
11:57 C'est comme ça qu'on commence à percer la langue des oiseaux.
11:59 Mais il faut beaucoup de temps.
12:00 Il faut beaucoup de temps, de la patience.
12:04 Et réellement, de façon empirique, on peut s'en apercevoir.
12:07 Il y a une interaction possible et il y a du signifiant.
12:10 Justement, il y a du signifiant.
12:11 Qu'est-ce qu'ils vous ont appris, les oiseaux, après toutes ces années sur nous, les hommes ?
12:15 Justement, c'est sûr de prendre le temps.
12:18 C'est-à-dire de s'arrêter un moment et d'écouter.
12:21 Juste d'écouter.
12:22 C'est-à-dire d'être, moi j'appelle ça la vision périphérique, être dans les sens,
12:27 dans la sensibilité, être totalement en capillarité avec la nature et essayer d'infuser
12:33 les chants d'oiseaux qui vont rentrer en nous pour pouvoir les reproduire.
12:36 C'est-à-dire qu'il faut essayer de… là je vois Jean qui imite, il donne corps à
12:40 l'oiseau.
12:41 C'est immédiat.
12:42 Il voit l'oiseau, il voit le quémandage, il le voit, il le ressent et il crée un corps.
12:47 C'est très important de créer un corps pour créer un son.
12:49 Vous mêlez ces chants d'oiseaux à de la musique classique, entre autres.
12:53 Vous ne faites pas que ça mais vous avez fait cet album "La symphonie des oiseaux"
12:55 notamment.
12:56 Quel est le lien entre cette mélopée aviaire et la musique de Mozart ou Vivaldi ?
13:03 C'est justement de rencontrer la musicalité des sons.
13:06 La première rencontre qu'on a eue avec Jean-François Zizel en 2006, pour le Festival
13:10 des Forêts de Compiègne, lorsqu'on s'est rencontré, qu'on a confronté les deux
13:14 univers, la musique classique et les chants d'oiseaux, on s'est rendu compte qu'il
13:17 y avait quelque chose qui se répondait.
13:19 Sans le savoir.
13:20 Et puis, évidemment, on le savait un petit peu parce que les compositeurs se sont souvent
13:23 inspirés des chants d'oiseaux pour composer.
13:26 Mais d'un seul coup, il y a une espèce d'alchimie céleste qui fait que pour le
13:31 public comme pour nous, comme pour les artistes qui le font, on s'envole.
13:34 En fait, on n'a rien inventé.
13:35 C'est-à-dire que les sons que les artistes retranscrivent en musique, ils viennent de
13:40 la nature.
13:41 C'est ça.
13:42 Et puis, vous savez, depuis que l'homme est homme, il a toujours vécu dans ce bain
13:44 d'oiseaux.
13:45 Donc finalement, c'est un peu notre...
13:46 Je pense que ça a ancré en nous.
13:47 La réception des chants d'oiseaux, notre connexion avec les chants d'oiseaux nous
13:49 apprend aussi dans quel état est le monde.
13:51 On a toujours voulu imiter la nature.
13:52 Oui.
13:53 Vivaldi en oiseau, simplement, en 10 secondes, ça fait quoi ?
13:56 *Chant d'oiseau*
14:05 J'arrête.
14:06 C'est Cardellino et c'était le Chardonnay élégant.
14:08 Et ils sont tous les deux...
14:09 Le Chardonnay élégant, c'est l'espèce.
14:10 Oui, c'est l'espèce et c'est le titre de la pièce.
14:13 Et c'est aussi le Cardellino.
14:14 Ils sont tous les deux à fond en studio quand ils imitent, c'est impressionnant à voir.
14:18 Bonjour Angelo.
14:19 Bonjour.
14:20 Merci de nous avoir appelés au 01 45 24 7000.
14:24 Une question pour nos deux chanteurs d'oiseaux ?
14:26 Déjà, un sentiment fort d'émerveillement et puis dire que je sais le livre que je vais
14:32 acheter la prochaine fois.
14:33 Vous avez répondu à pas mal de questions parce que moi, je passe pas mal de temps dans
14:38 le blocage normand et je siffle aussi, je suis musicien, je fais plutôt du jazz, de
14:43 la bossa nova et au début je sifflais pour m'amuser comme ça en doublant mes chorus,
14:47 voix guitare, etc.
14:48 Et un jour, je suis tombé dans les balades et j'ai commencé à imiter, pas imiter les
14:52 oiseaux vraiment, à inventer ma musique d'oiseaux.
14:55 Je sais pas, simplement, je vais vous faire par exemple...
14:58 Alors est-ce que vous reconnaissez ?
15:03 Oui, alors pour moi, c'est un ramasse de merle noir mais un peu humanisé.
15:08 Et là, on sent vraiment la patte de l'humain en fait.
15:11 C'est ça ou pas ?
15:12 Voilà, moi je cherche pas à imiter les oiseaux.
15:15 Par contre, je vais vous poser une question, ça m'intéresse de devenir meilleur, puisque
15:20 quand je vous entends, je suis au paradis.
15:21 Est-ce que vous abordez au niveau technique le chant d'oiseaux ?
15:28 Ça, ça m'intéresse énormément.
15:30 Alors, Johnny reste peut-être là-dessus.
15:32 Alors, moi, mon père, depuis tout petit, il nous apprenait à chanter.
15:36 Et pour ça, il nous donnait soit des phrases, soit des onomatopées pour essayer d'imiter
15:42 un oiseau.
15:43 Par contre, transmettre une méthode, à part y aller, à part essayer, à part essayer
15:48 avec son corps, parce que quelquefois, on a même remarqué avec Jean, une voix éraillée
15:53 d'un enfant va donner une corneille extraordinaire ou un corps beaufreux ou un signe tuberculé.
15:59 Et c'est ça qui est merveilleux.
16:00 C'est qu'avec un défaut, on peut en faire un atout.
16:02 Alors, on entend votre passion, évidemment, votre amour infini de la nature et des oiseaux.
16:08 Vous êtes des amoureux, vous êtes des artistes.
16:10 Est-ce que vous êtes des militants aussi ? Jean Boucaud ?
16:13 Ce que l'on fait, c'est une forme de militantisme.
16:17 C'est-à-dire qu'on ramène au centre des intérêts la beauté des champs d'oiseaux.
16:22 C'est une forme de militantisme qui, par l'art et par la beauté, rappelle aux gens
16:29 que c'est quelque chose qu'on ne doit pas perdre.
16:30 Le champ d'oiseaux, c'est un trésor mondial.
16:33 Et donc, justement, de le ramener comme ça, c'est ce que nous disent le public quand
16:36 ils sortent d'un concert.
16:37 Ils nous disent "je n'écouterai plus les oiseaux de la même manière".
16:39 Et si on a cette forme, si on a cette réussite, je pense qu'on est dans un acte militant.
16:43 Oui, parce qu'on leur montre quand même qu'il y a des différences.
16:45 Que des oiseaux, ce n'est pas des oiseaux, c'est un rossignol.
16:49 C'est un rossignol philomel, pas protené.
16:51 Voilà, il y a des différences.
16:53 À tel endroit, à tel endroit.
16:55 Mais vous savez, nommer, connaître, c'est le début de la protection.
16:58 Et vous faites des stages, des formations, vous intervenez dans les écoles justement
17:02 pour sensibiliser là-dessus.
17:04 Depuis 1980, c'est le chiffre que j'ai sous les yeux, d'après le CNRS, 800 millions
17:09 d'oiseaux ont disparu.
17:10 Plus de la moitié des populations, en milieu agricole notamment, vous le constatez, vous
17:15 qui passez une grande partie de votre vie dans la nature à écouter les oiseaux, vous
17:20 en entendez moins, tout simplement.
17:21 Il y a un chapitre qui est lié à la louette des chants, dans le livre.
17:25 La louette des chants, il y en a très peu.
17:27 Il n'y en a plus beaucoup.
17:28 Évidemment, c'est un son qui a disparu.
17:30 Et c'est un son qui faisait partie des oreilles de grands-parents.
17:34 La louette des chants qui est extraordinaire.
17:36 Jean Boucaud l'a fait.
17:37 C'est cet oiseau, ce mâle qui chante.
17:39 Vous ne l'entendez plus.
17:40 On l'entend très peu.
17:41 On ne va pas dire plus, mais il faut aller le chercher.
17:44 Alors qu'avant, même mon grand-père me disait que pour parler, les oiseaux étaient
17:48 tellement forts qu'il était obligé d'hausser le ton.
17:50 Et puis, il était obligé de parler fort dans les chants.
17:52 Aujourd'hui, les chants, il n'y a plus rien.
17:53 Il n'y a plus d'insectes, donc il n'y a plus de louettes, il n'y a plus d'hirondelles,
17:56 c'est très compliqué.
17:57 L'oiseau, c'est le marqueur de la disparition des insectes aussi.
18:00 C'est toute une chaîne qui disparaît.
18:02 Quand une étude nous apprend hier, par exemple, que la mortalité chez les poussins de manchots
18:09 empereurs en Antarctique est catastrophique, jusqu'à 100% d'une population disparaît
18:14 à cause de la fonte des glaces.
18:15 Ça vous bouleverse ?
18:16 En fait, la force du manchot, c'est qu'on le voit, on peut le compter.
18:22 Mais c'est pareil, les insectes qui sont plus petits, les poissons qui sont sûrement
18:26 la cause de ça, ils disparaissent, mais on les voit moins.
18:28 Donc c'est juste un marqueur.
18:30 Il faut être ému par tout le reste, pas que par le manchot.
18:34 Mais le manchot n'est juste que l'image de ce qui se passe en dessous.
18:37 Quel est votre rapport à la chasse ? Parce que je le disais chez vous, Johnny, quand
18:41 vous étiez enfant, il y avait des chasseurs, votre père, votre grand-père.
18:43 Tout à fait, il y avait autour de moi existé la chasse.
18:48 Quand on lit le livre, c'est ce qu'on comprend.
18:52 Je suis le fruit de la chasse qui était autour de moi, mais j'ai fait quelque chose d'autre
18:57 de cet art qui était juste d'imiter et de ramener un oiseau.
19:00 Et c'est vraiment ce regard.
19:01 En fait, parce que nous, après, en concours, on rencontrait des chasseurs.
19:04 Des chasseurs qui imitaient très bien le courlis cendré, le chevalier gambette, mais
19:09 qui ne se sont jamais intéressés au rosignol, au goéland argenté.
19:12 Ce sont des oiseaux protégés et très virtuoses.
19:15 Donc il fallait vraiment ce regard d'enfant, je pense, ce regard très pur sur la nature
19:20 pour accéder aux chanteurs d'oiseaux, à ce qu'on est devenu.
19:23 - Beaucoup de réactions sur l'appli mobile de France Inter aussi.
19:27 D'abord pour vous féliciter et vous dire que vous donnez du bonheur aux gens et à
19:31 nos auditeurs ce matin.
19:33 Et ça, c'est déjà formidable.
19:34 Et pour vous dire aussi que les chats de nos amis auditeurs sont comme des fous.
19:38 Et ça, ça dit aussi quelque chose de l'interaction.
19:43 Vous disiez tout à l'heure, il faut prendre la nature dans sa globalité.
19:45 Là, on touche ça du doigt aussi.
19:48 Vous le sentez ? Vous pouvez exciter les chats de vos amis ?
19:52 - Je pense que si on a un don, c'est d'être connecté avec tous les êtres vivants.
19:56 Et comme tout à l'heure, on parlait justement de ce qu'on voit nous.
19:59 On voit les territoires.
20:00 Quand on se promène, on voit les territoires d'oiseaux.
20:01 Là, vous voyez des limites, des barrières.
20:03 Nous, on voit un merle qui prend quatre ou cinq jardins.
20:05 C'est cette vision.
20:06 Et c'est pareil pour cette interaction avec les chats.
20:10 Nous, on les voit aussi en tant que prédateurs.
20:12 Comment est-ce qu'ils vont accéder à un nid ? J'ai ce regard aussi d'oiseau face
20:17 aux chats.
20:18 - Vous nous avez fait rêver, en tout cas, tous les deux.
20:21 Vous nous évadez ce matin sur France Inter et c'est assez rare.
20:25 Donc, on vous remercie pour ça, Jean Boucaud, Johnny Raas.
20:27 Vous êtes les chanteurs d'oiseaux.
20:29 C'est aussi le titre de votre livre paru aux éditions Les Arènes.
20:32 Il y a aussi l'album La Symphonie des oiseaux.
20:34 Et puis, les spectacles qu'on retrouve sur votre site internet.
20:37 Je cite juste deux dates.
20:39 3 septembre à Saint-Aimant en Neurel-Loire et le 8 à Saint-Emilion en Gironde.
20:45 Vraiment, un grand merci.
20:46 Un petit au revoir dans l'espèce que vous souhaitez.
20:48 C'était lesquels ?
20:53 - Le pinson des arbres.
20:54 - Les deux.
20:55 - Les deux mâles.
20:56 - Deux pinsons des arbres.
20:58 Merci beaucoup à tous les deux.
20:59 Vous êtes bien sur Inter 8h42.

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