Transition énergétique : l’Allemagne remet du charbon dans la machine

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Tous les matins après le journal de 8h30, Emmanuelle Ducros dévoile aux auditeurs son «Voyage en absurdie», du lundi au jeudi.
Retrouvez "Voyage en absurdie" sur : http://www.europe1.fr/emissions/chronique-en-absurdie

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Transcription
00:00 Emmanuel Ducrox, dans un...
00:02 - Tout de suite !
00:04 - Non, mais je précise que Jérôme Béglé est en train de rentrer en studio pour son zapping politique.
00:07 - Bonjour, bonjour !
00:08 - Bonjour Jérôme, le premier de la saison.
00:09 Emmanuel Ducrox, on commence avec vous, avec cette image surprenante,
00:12 totalement anachronique en Allemagne, c'est la destruction d'un champ d'éoliennes.
00:17 - Oui, ça se passe pas loin de Düsseldorf, le groupe énergétique allemand RWE,
00:21 qui est l'EDF local, et a commencé cette semaine à mettre à terre sept grandes éoliennes.
00:26 Pas parce qu'elles ne fonctionnent plus, mais parce qu'elles gênent l'extension d'une mine de lignite.
00:30 Le lignite, vous savez, une sorte de charbon, c'est ce qui se fait de pire en matière de combustible fossile.
00:35 Des éoliennes à terre pour laisser la place à un énorme trou plein d'excavatrices.
00:39 Voilà, résumé en une image, les erments de la politique allemande de transition énergétique,
00:43 ce qu'on appelle, vous le savez, l'énergie Wende.
00:45 - Ah oui, énergie Wende, le tournant énergétique, ils sont dans la Wende à toutes les sauces les Allemands en ce moment.
00:50 Ça consiste à fermer en gros les centrales nucléaires pour les remplacer par des moyens de production d'électricité renouvelable.
00:55 - Des panneaux solaires et puis ces fameuses éoliennes. Il y en a 29 mines en Allemagne.
00:59 Problème, l'électricité de ces éoliennes n'est impossible à piloter.
01:03 Il y a de l'électricité quand il y a du vent en gros.
01:05 Et comme il n'y a plus de centrales nucléaires, il faut utiliser un complément des centrales à gaz, mais aussi des centrales à charbon.
01:11 Le gaz s'est devenu très compliqué avec la guerre en Ukraine, et l'Allemagne a donc recours aux mauvaises vieilles méthodes,
01:17 ses ressources en charbon.
01:18 Et c'est pour ça qu'elle en arrive à cette collision ahurissante.
01:21 La mine de Gartzweiler, c'est son nom, a besoin de s'étendre au détriment des éoliennes.
01:26 - On rappelle quand même, Emmanuel, que l'Allemagne a annoncé qu'elle se fixait comme objectif de se passer du charbon en 2030.
01:34 - Elle avait d'abord parié sur 2038, maintenant c'est 2030.
01:37 On se demande comment elle va faire, puisque le vent ne sera pas plus pilotable qu'aujourd'hui en 2030,
01:42 et qu'il y a peu de chances qu'on sache stocker l'électricité à une échelle de 6 ans.
01:46 On peut donc résumer ça comme ça. Pour se passer d'une énergie décarbonée, le nucléaire, puis du charbon qu'il a remplacé,
01:53 l'Allemagne a besoin de plus de charbon.
01:55 En 2022, 27 centrales ont obtenu l'autorisation de réouvrir, et avec elles donc les mines.
02:01 L'électricité allemande est en ce moment 5, 10, voire 15 fois plus carbonée que la nôtre.
02:06 Les émissions de carbone du pays ont cessé de baisser, l'Allemagne a donc sacrifié son bilan carbone sur l'autel d'une sécurité énergétique
02:12 qu'elle s'est d'abord appliquée elle-même à saboter.
02:15 Le nec plus ultra des ravages de l'idéologie anti-nucléaire.
02:19 Qu'est-ce qu'ils en pensent de ces éoliennes qu'on abat pour étendre une mine de charbon, les habitants du coin ?
02:24 Ils sont furieux, parce qu'on a rasé leur maison pour faire plus de place à la mine.
02:27 Ils le digèrent d'autant moins que le gouvernement du Land de Rénani et du Nord-Vestphalie,
02:32 qui leur impose cette politique de gribouille, est composée de chrétiens démocrates, la CDU, et de gruenonnes, les Verts allemands.
02:38 Oui, oui, les écologistes allemands valident une décision aussi affreuse pour le climat.
02:42 Alors écoutez, la justification du ministre écologique de l'économie allemand, Robert Abeck, c'était nécessaire.
02:48 Mais bien sûr que c'est un péché vis-à-vis de la politique climatique,
02:52 et que nous devrions travailler à ce que ça dure le moins longtemps possible.
02:55 Alors en France, cette attitude allemande, ça nous agace un peu, mais il n'y a pas que chez nous aussi, il y a ailleurs en Europe.
02:59 Oui, parce que l'Allemagne, non contente de mener sur son sol des expériences énergétiques hasardeuses,
03:04 a essayé de contraindre le reste de l'Europe à faire de même.
03:08 Ça a donné la bataille sur la taxonomie énergétique.
03:11 Tout l'enjeu, c'était de savoir si le nucléaire décarboné pouvait bénéficier des financements avantageux, comme une énergie verte.
03:16 L'Allemagne était contre, la France s'est bagarrée, elle a obtenu gain de cause.
03:20 Mais lundi dernier, lors de la conférence des ambassadeurs à Paris, Emmanuel Macron a dit stop à l'Allemagne.
03:25 Pas question de suivre l'exemple de son énergiewende paradoxal,
03:29 il a qualifié, tenez-vous bien, de faute historique, l'idée de se priver de nucléaire en Europe.
03:34 Et puis il a dit, si une politique énergétique européenne devait se traduire par plus de charbon, plus de dépendance fossile, ça ne serait pas bon.
03:41 Vous notez le conditionnel bien, bien diplomatique, mais bim, c'est exactement ce que l'Allemagne est en train de faire.
03:46 Emmanuel Ducroix, tous les matins sur Europe 1 du lundi au jeudi.
03:49 Merci beaucoup Emmanuel, on vous retrouve lundi.

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