Alexandre Bompard, PDG du groupe Carrefour, était l'invité de "C'est pas tous les jours dimanche", ce samedi soir sur BFMTV.
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00:00 Alexandre Dompore, vous l'avez entendu, il lance un appel aux forces politiques et aux forces économiques.
00:03 Vous en êtes.
00:05 Qu'est-ce que vous pouvez faire, vous, Carrefour, pour aider à sauver les Restos du Cœur ?
00:09 Ce monsieur parle des gens qui ne pourraient plus être aidés.
00:12 Le chiffre qu'il donne, c'est 150 000. C'est considérable.
00:15 Qu'est-ce que vous pouvez faire pour aider les Restos du Cœur ?
00:17 D'abord, ce qu'il dit, c'est évidemment la réalité.
00:21 Les difficultés des Restos du Cœur sont l'expression des difficultés d'un nombre croissant de Français face au poison lent.
00:28 Quelle hyperinflation qui s'est diffusée depuis deux ans.
00:30 Mais je pense qu'on y reviendra.
00:32 On est partenaire depuis 16 ans des Restos du Cœur.
00:34 On est le plus vieux partenaire dans notre métier.
00:36 On va répondre à l'appel du président des Restos du Cœur parce que c'est notre rôle, notre vocation.
00:42 On peut le faire de deux manières.
00:44 La première, elle est financière.
00:45 On a déjà doublé notre enveloppe financière dans les dernières années pour les Restos du Cœur.
00:51 Et puis, on va réfléchir en manière de mieux organiser encore les dons et les collectes.
00:56 Aujourd'hui, enfin en 2022, on a distribué l'équivalent de 20 millions de repas aux Restos du Cœur.
01:04 Soit suite à des dons faits par l'enseigne, soit suite à des collectes.
01:08 Et donc, on va vite organiser une rencontre avec le président des Restos du Cœur.
01:12 On va essayer d'aller un peu plus loin.
01:13 Pour aller un peu plus loin.
01:14 Pour voir si on met en place des collectes spécifiques.
01:17 Pour voir si on est capable dans nos dons quotidiens de faire mieux.
01:20 On sera là.
01:21 On sera là.
01:22 On l'a toujours été.
01:23 Et il faut qu'on soit là collectivement.
01:24 Très concrètement, le patron des Restos du Cœur parle d'une trentaine de millions d'euros qui manquent pour boucler l'exercice annuel.
01:30 La contribution de Carrefour par an, pour que ceux qui nous regardent aient une idée, c'est combien ?
01:34 Et est-ce que vous pouvez aller plus loin ?
01:36 Vous avez évoqué le fait que vous aviez doublé cette contribution.
01:39 Est-ce que, voilà, vous avez des résultats qui sont positifs ?
01:42 Un semestre qui a été bon, 2023.
01:44 Est-ce que vous pouvez aller plus loin dans cette contribution financière ?
01:47 On l'a doublé et on est légèrement au-dessous d'un million d'euros.
01:51 On va regarder ce qu'on peut faire sur le plan financier.
01:53 Et puis, ce qui a le plus de valeur pour les Restos du Cœur, ce sont les repas.
01:57 Parce qu'on est aux alentours de 20 millions de repas.
02:00 Donc moi, mon attention principale, parce que nous c'est notre métier,
02:04 c'est qu'est-ce qu'on peut faire pour augmenter le nombre de repas qu'on va pouvoir distribuer aux Restos du Cœur et à leurs bénéficiaires.
02:09 Donc ça vous le dites, c'est imminent, on va regarder ça avec les Restos du Cœur.
02:11 On va regarder ça immédiatement.
02:12 Alexandre Bourpaire, est-ce que vous avez le sentiment que les Français sont moins généreux qu'ils ne l'ont été ces dernières années ?
02:19 La question c'est, est-ce qu'ils peuvent l'être autant ?
02:22 Parce qu'il y a bon nombre de Français qui l'étaient et qui sont en train, petit à petit, avec l'inflation sur deux ans, de ne plus pouvoir l'être.
02:31 Moi, je pense que les Français sont généreux, sont généreux par nature, mais un certain nombre d'entre eux ne le peuvent plus.
02:37 Mais vous savez, on a le sentiment, avec cette annonce du patron des Restos du Cœur, au fond, que tout craque.
02:42 La 7e puissance mondiale, qui a une association qui doit aider les plus démunis, qui dit "on ne va pas y arriver".
02:47 Il va manquer des repas pour 150 000 personnes.
02:50 Cette inflation, avec ce que vous avez évoqué, la déconsommation des gens qui n'arrivent plus à acheter, non pas le petit plus, le minimum.
02:58 Franchement, pour la 7e puissance économique du monde, on est quand même dans une situation qu'on n'aurait pas pu imaginer il y a quelques mois, quelques années.
03:04 D'abord, regardons autour de nous.
03:06 En Grande-Bretagne, aux États-Unis, ces problèmes-là sont là.
03:11 Quand on a une inflation à deux chiffres depuis deux ans, toutes les grandes puissances, quelles qu'elles soient, souffrent.
03:19 Parce que 20% d'hyperinflation alimentaire, quand on est habitué depuis quatre décennies à zéro, ça veut dire qu'il y a un certain nombre de Français, de plus en plus nombreux, qui décrochent, qui ne peuvent plus, qui abandonnent l'essentiel.
03:34 En fait, ce que vous décrivez, c'est un changement de mode de vie total.
03:36 Quand vous avez 40% des Français qui sautent des repas, parce qu'ils ne peuvent pas, quand vous en avez un sur deux qui réduit ses portions lors de chaque repas,
03:46 quand vous avez des Français qui renoncent à un certain nombre de produits de soins d'hygiène, c'est simplement la traduction des effets du poison lent.
03:57 C'est un poison très lent, l'inflation. Une inflation qui repasse sur une inflation, une inflation de 20% depuis deux ans, ça a des effets majeurs sur les classes moyennes et sur les classes populaires.
04:11 Depuis des mois, d'ailleurs, on parle d'arbitrage de la part des Français qui sont obligés de faire des choix, qui renoncent à certains produits.
04:17 Vous l'évoquiez à l'instant. Est-ce que c'est pour cela qu'aujourd'hui, vous constatez ce que vous avez appelé un tsunami de déconsommation ?
04:26 Je pense qu'un certain nombre de Français n'arbitrent plus. Au départ, on arbitre. L'année dernière, ils arbitraient. Ils consommaient moins bien, mais ils consommaient autant.
04:37 Concrètement, pour ceux qui nous regardent, "moins bien", ça veut dire quoi ?
04:40 Je réduis mes protéines animales, je réduis la viande, le poisson, je réduis les fruits et légumes, je réduis le bio. Ça, c'est l'année 1.
04:50 La première année, vous baissez la qualité alimentaire. La deuxième année, vous consommez moins, vous réduisez la consommation.
04:58 C'est ça qui s'est passé. C'est vraiment un effet en deux temps. Dans un premier temps, il y a eu une baisse de la qualité de la consommation.
05:05 Dans un deuxième temps, il y a eu une baisse des quantités.
05:08 Le caddie est moins rempli, c'est ce que vous nous dites.
05:10 Le caddie est moins rempli. Le panier moyen baisse. Et à l'intérieur de ce panier moyen, comme vous le savez, les Français ont décidé de se passer de leur marque nationale,
05:20 parce que les marques nationales sont 35 % plus chères que les marques des distributeurs, au détriment des marques de distrib... en faveur des marques de distributeurs.
05:28 Vous avez un discours très franc sur la question de l'inflation et qui, c'est vrai, parfois tranche un petit peu avec les discours politiques.
05:34 On recevait ce midi Bruno Le Maire qui se félicitait du fait que cette fois, vraiment, l'inflation allait ralentir.
05:41 "Je n'ai qu'une parole". Est-ce qu'au fond, il n'y a pas un décalage entre les discours politiques et ce que vivent les Français ?
05:47 Parce que même si l'inflation ralentit, il y a quand même toujours beaucoup d'inflation.
05:51 Et vous ne cessez de répéter qu'on ne reviendra pas au prix d'avant. Il n'y a pas ce décalage, un manque de vérité dans le discours politique ?
05:58 D'abord, il a raison, Bruno Le Maire. L'inflation alimentaire est en train de ralentir.
06:02 Elle est en train de diminuer. Elle était quand même de 17 %, elle est à 12 %.
06:05 Et elle va continuer dans les prochains mois et ça va s'accélérer. On va y revenir à partir de janvier.
06:10 Mais les prix continuent d'augmenter.
06:11 Mais ils continuent à augmenter. Et donc la réalité du consommateur, et nous on reçoit des millions de consommateurs chaque semaine,
06:17 un consommateur qui rentre dans un magasin, un Français d'une classe moyenne qui rentre dans un magasin et qui voit une augmentation de 12 % en moyenne,
06:24 il ne se dit pas "bonne nouvelle, le pic de l'inflation est derrière moi". Il ne se dit pas ça. Il n'est pas économiste.
06:30 Il ne sait. Il voit juste que c'est encore 12 % plus cher que l'année d'avant.
06:34 Alors même en plus que les politiques, depuis un an, répètent que c'est bon, ça va être un septembre vert, le pic est passé, le pire est derrière nous,
06:41 ce sont des prévisions qui, force est de constater, ne sont pas d'arriver.
06:44 Vous n'avez probablement pas entendu évoquer l'idée de septembre vert parce que je n'y croyais pas une seconde.
06:49 Dès lors qu'il n'y avait pas de renégociation avec les industriels, il n'y avait aucune raison que le septembre soit vert.
06:56 Il n'est pas du tout vert pour les Français.
06:58 Alexandre Bompard, on va donner la parole à un témoin touché directement par ce phénomène que vous avez décrit, la déconsommation.
07:05 Bonsoir Laurent.
07:07 Bonsoir.
07:09 Vous avez 55 ans. Merci beaucoup d'être avec nous. Vous êtes chauffeur routier.
07:14 Vous avez trois enfants qui ont entre 11 et 16 ans, c'est ça je crois ?
07:18 C'est ça.
07:19 Et ce que vous nous dites, ce que vous dites aussi ce soir à Alexandre Bompard, c'est que vous n'y arrivez plus que très concrètement,
07:25 compte tenu de l'inflation, vous avez changé votre mode de consommation.
07:30 Disons qu'on a changé notre mode de consommation par obligation.
07:35 Chez moi, il n'y a plus de viande, il n'y a plus de poisson, il n'y a plus de fruits, il n'y a plus de légumes.
07:38 Quand vous voyez les fruits cette année d'été, les pêches, les brunions, ça on n'a pas connu, c'est impossible.
07:45 Moi tout ce que je veux savoir c'est quand c'est que l'inflation va se terminer, quand c'est que les prix vont enfin baisser,
07:50 parce qu'on nous annonce plusieurs fois que l'inflation ça y est, c'est bon et tout.
07:54 Quand je vais dans le magasin, ça continue à augmenter, les prix augmentent à nouveau.
07:58 En plus de ça, moi je suis dans le sud, on a été en zone touristique où les grandes surfaces se sont quand même bien gavées
08:04 en augmentant les prix par rapport aux touristes.
08:07 Et nous qui vivons toute l'année dans ce secteur-là, nous avons fait les frais de tout ça avec.
08:13 Donc on vous a entendu Laurent, et vous voyez Alexandre Bompard, cette idée que l'on évoquait il y a quelques instants,
08:18 malgré les discours politiques, cette impression que ça continue à augmenter.
08:21 Laurent, il vous demande très concrètement quand est-ce qu'il pourra de nouveau acheter de la viande, des produits frais pour ses enfants,
08:27 quand est-ce que ça va vraiment baisser ?
08:29 Alors d'abord, on joue notre rôle.
08:32 Si je prends les fruits et légumes qu'évoquait Monsieur, on a lancé une opération de 17 fruits et légumes à moins de 1 euro, à 0,99.
08:42 Et puis on a lancé nos opérations de baisse des prix, qu'a demandé aussi le gouvernement et qu'on avait fait par anticipation.
08:48 Nous on a annoncé, mercredi dernier, 500 nouveaux produits dont les prix baissent.
08:54 On en avait déjà annoncé 600 en mai-juin, 500 nouveaux.
08:57 Donc on a 1100 produits dont le client, quand il arrive dans le magasin, là il n'a pas de doute, il voit les prix de ces 1100 produits baisser.
09:06 Ça c'est le deuxième élément.
09:07 Et puis, de manière majeure, c'est les renégociations que le ministre a eu la bonne idée d'avancer le plus vite possible,
09:16 qui vont se traduire par le tassement de l'inflation.
09:18 Dès lors qu'on va renégocier, et donc moi j'avais demandé avec mes collègues de la distribution que ces renégociations soient avancées,
09:25 le ministre de l'économie l'a décidé, il y a une loi qui va passer, on va pouvoir gagner 3 mois sur l'inflation,
09:32 puisque les renégociations devaient se finir le 31 mars, elles vont se finir normalement le 31 décembre.
09:37 Ça veut dire qu'à partir du 1er janvier, on va voir le niveau d'inflation, peut-être pas négatif, mais beaucoup plus bas qu'il est aujourd'hui.
09:46 On va passer un dernier mot à Laurent, vous entendez ce que vient de dire le PDG de Carrefour, Alexandre Bompard,
09:52 qui explique au fond qu'il y aura non seulement des négociations avancées, et qu'il y aura des efforts qui seront faits.
09:59 Et c'est vrai que le panier anti-inflation, il y a des mesures qui ont été prises pour lutter contre l'explosion de ces prix-là.
10:05 Oui, alors il faudra que M. Bompard vienne faire ses courses avec moi et montre à peu près, dans les anciennes Carrefour,
10:11 où se trouvent les paniers anti-inflation et les produits à moins d'un euro.
10:15 Moi, je suis prêt à le recevoir chez moi et qu'on alle faire les courses ensemble, et qu'il montre à peu près où se trouvent ces produits.
10:20 Mais ce qui est intéressant dans ce que dit M. Bompard, vous voyez, si on prend notre dialogue du début, c'est ça que vit le français.
10:30 Il existe évidemment les 1100 produits qui vont baisser. Il y a des prix à moins d'un euro sur les fruits et légumes.
10:37 Il y a les 17 fruits et légumes à moins d'un euro. Mais les clients, quand ils arrivent dans les magasins,
10:41 ils sont submergés des augmentations des deux dernières années. C'est ça qu'ils voient d'abord.
10:47 Après, nos paniers anti-inflation, les prix bloqués, etc., ça reste une partie qui est relativement limitée par rapport à l'offre.
10:53 Alexandre Bompard, vous pensez vraiment que les industriels, cette fois-ci, vont jouer le jeu et vont accepter des baisses de prix ?
11:00 En juin dernier, ils s'étaient engagés auprès de vous, auprès de Bruno Le Maire, à revenir à la table des négociations
11:06 pour faire en sorte que la baisse du prix des matières premières soit intégrée dans le prix des produits.
11:13 Aujourd'hui, on voit bien, ils n'ont pas joué le jeu. Est-ce qu'ils vont le faire ?
11:17 Est-ce qu'on a l'assurance que ces négociations, qui se termineront au mois de janvier, aboutiront à de vraies baisses de prix pour les Français ?
11:25 D'abord, je vais vous dire, croyez-moi sur parole, je n'ai aucun plaisir à ce petit jeu qui consisterait à mettre la responsabilité sur les industriels.
11:33 J'ai vraiment plein de choses plus intéressantes à faire. Mais c'est la réalité. Ils n'ont pas joué le jeu de la négociation.
11:39 Ils ne l'ont pas joué. Deux éléments, la thèse. D'abord, il y a eu quatre rapports qui ont été demandés par le ministre et les pouvoirs publics.
11:47 Ils l'ont tous montré. Les marges des grands industriels, des grandes multinationales ont augmenté comme elles n'ont jamais augmenté l'année dernière.
11:53 Et puis, les Français y votent tous les jours avec leur caddie. Depuis le 1er janvier, si je prends le cas de Carrefour, les volumes de nos marques Carrefour ont augmenté de 5 %.
12:04 Les volumes des marques nationales ont baissé de 7 %. Ça veut dire que vous avez un caddie de 100 produits, vous avez retiré 7 produits de marques nationales que vous aimez pourtant,
12:13 et vous avez mis 5 produits de marques distributeurs. Parce qu'il y a un écart de prix de 35 points.
12:18 Alexandre Bompard, vous avez raison dans ce que vous constatez, mais est-ce que, pour autant, on peut réduire tout cela à un schéma aussi simple de les industriels
12:25 s'en mettent plat les poches et ne jouent pas le jeu ? Et face à ça, les distributeurs sont absolument impeccables.
12:30 Bruno Le Maire parlait il y a quelques jours de certains distributeurs qui n'avaient pas joué le jeu, par exemple sur les yaourts.
12:37 Dès 1991, il y a eu trois mois entre le moment où les prix ont baissé et où ça a été répercuté en rayon.
12:42 Écoutez, franchement, sur ce qui s'est passé depuis 2022, les grands distributeurs, qui ont leurs défauts et nous avons les nôtres, franchement, se sont comportés de manière exemplaire.
12:52 Je le dis pour toute notre profession. On a joué le jeu des paniers, on baisse les produits, il y en aura 5000 dans les prochains jours dans les magasins.
13:00 Vraiment, il y a eu... Parce que c'est aussi notre intérêt. Notre intérêt, c'est de conquérir des consommateurs et d'être à leur côté.
13:06 Les industriels ont fait le choix de ne pas participer à ça.
13:10 Mais vont-ils le faire ?
13:12 Alors, si vous me posez la question de comment vont-ils se comporter dans les négociations qui s'ouvrent, je crois que, compte tenu des baisses, des cours qui sont massives
13:20 et qui, cette fois-ci, ils ont une obligation législative de négocier, jusqu'alors c'était une bonne intention de renégocier.
13:26 Là, on va rentrer en négociation. Parce que sur les 75 principaux industriels, j'en ai 50 qui ne m'ont même pas pris au téléphone.
13:34 Qui continuent là à ne pas vous prendre au téléphone.
13:36 Qui ne nous ont pas pris au téléphone. Qui ont refusé même une réunion.
13:40 Quand vous êtes dans un cadre législatif, de manière obligatoire, on va devoir se mettre les uns en face des autres.
13:45 Et normalement, quand on se met en face des autres, on arrive à négocier.
13:49 On va saluer Laurent. Merci beaucoup pour votre témoignage. Et bon courage pour la rentrée. Vous avez eu une invitation.
13:54 Si vous voulez aller voir dans le fil de Laurent. Merci beaucoup d'avoir été avec nous.
13:58 Donc juste pour tous ceux qui se posent les mêmes questions, vous dites bien, à partir du 1er janvier, compte tenu de toutes ces mesures qui ont été annoncées, ça devrait commencer à aller mieux. C'est ce que vous dites.
14:09 Si les renégociations se terminent le 31 décembre, je n'ai pas encore le texte législatif, je ne sais pas quand est-ce qu'il va être adopté.
14:15 Si nous négocions entre le 1er octobre et le 31 décembre, à partir de début janvier, à partir de janvier, on devrait voir le niveau d'inflation baisser de manière significative.
14:29 Est-ce que vous considérez que si les industriels ne jouent pas le jeu, vous parliez d'industriels qui ne vous prennent pas au téléphone, est-ce qu'à un moment donné, il faut utiliser l'arme fiscale ?
14:37 C'est-à-dire que les pouvoirs publics prennent leur responsabilité pour faire en sorte que vraiment, ils acceptent de baisser les prix et de jouer le jeu.
14:45 Est-ce qu'à un moment donné, ça vous aide dans une négociation qu'il y ait cette menace-là ?
14:48 Comme vous le voyez, je ne fuis pas mes responsabilités en ce moment. Il y en a une que je n'ai pas, c'est l'arme fiscale ou réglementaire.
14:55 Ce n'est pas ma responsabilité. Si le gouvernement l'utilise, il aura eu raison de l'utiliser pour ceux qui ne jouent pas le jeu. Est-ce que c'est faisable ? Je ne sais pas.
15:03 Un mot sur une demande que vous avez faite et qui, en l'état, n'a pas été suivie, ce qu'on appelle le moratoire sur la loi des crozailles.
15:09 Pour ceux qui nous regardent, c'est un peu complexe. La loi des crozailles, c'est une loi qui doit rentrer en vigueur au 1er mars 2024 et qui empêche les distributeurs de faire des promotions de plus de 34 % sur tout ce qui concerne, je parle souvent de Gaëtan, hygiène, entretien, c'est-à-dire les couches, les cotons à démaquiller, la lessive, les produits que vous, on achète tous,
15:31 tous les jours, que les familles, dont les familles ont besoin, ce n'est pas l'accessoire, c'est l'essentiel. Vous demandiez ce moratoire. Bruno Le Maire, ce midi, il dit "moi, j'y suis favorable, je n'aimais pas cette loi des crozailles, mais c'est au parlementaire de s'en saisir".
15:43 Une façon, quand on fait de la politique, vous connaissez ce milieu-là, de renvoyer un petit peu au calendre grec. Est-ce que ça, vous nous dites, ça va être un vrai frein pour que les prix baissent s'il n'y a pas ce moratoire sur la loi des crozailles ?
15:53 Ça va être un frein évident. C'est la catégorie, la catégorie des produits d'hygiène, des produits de soins, la droguerie, qui est la plus promotionnelle.
16:01 Ce sont des produits d'appel.
16:03 Ce sont des produits d'appel. Et on va dire aux Français le 1er mars, qui ont l'habitude d'avoir des promotions qui, quelquefois, vont jusqu'à 60, 70, 80 % sur leur lessive, leur déodorant, leur protection féminine et les couches, c'est fini. On se réduit à 34 %.
16:18 Ça va avoir un effet, alors même que les Français sont en train de se priver sur des produits essentiels, qui est vraiment anticonsommateur.
16:25 C'est vraiment un texte qui, en soi, est anticonsommateur et qui, en plus, dans une période d'hyperinflation, est totalement inadapté.
16:32 Et la seule chose qu'on a demandé, vraiment, je ne me suis pas mis au-dessus de ma condition, je n'ai pas attaqué la séparation des pouvoirs, j'ai juste utilisé…
16:40 Oui, parce que certains, je cite de mémoire Roland Lescure, disent, en gros, Alexandre Bonpart, il faut qu'il s'occupe de ce qu'il regarde et il n'est pas parlementaire.
16:47 Ce qu'il me regarde, c'est la consommation des Français. Il y a deux contre-vérités qui sont dites sur ce sujet-là.
16:53 Le premier, c'est que ça n'a pas d'effet sur les agriculteurs. Il n'y a aucun agriculteur français qui fabrique de la lessive, qui fabrique du dentifrice.
17:02 Ce n'est pas l'agriculteur, il n'y en a aucun. Donc, quand vous réduisez les promotions, vous ne favorisez pas le revenu des agriculteurs.
17:09 Au contraire, comme les ménages ont un budget contraint et qu'on va devoir abaisser le niveau des promotions sur les produits d'hygiène, ils vont le répercuter sur les fruits et légumes, etc.
17:19 Si je résume ce que vous dites, on nous vend une loi pour protéger…
17:22 Les agriculteurs ont été protégés par le gouvernement.
17:24 … pour protéger le petit producteur de lait, alors qu'en fait, en faisant ça, on aide Procter & Gamble qui fait des couches Pampers. Je traduis.
17:28 Exactement. Le gouvernement et le Parlement s'est occupé des agriculteurs à travers Egalim et 1 et 2 en sanctuarisant le prix des revenus agricoles et la bienfait.
17:38 Là, c'est les produits d'hygiène et de santé. Et puis, la deuxième chose, c'est que comme citoyen, on n'est pas à Cuba. J'ai le droit de dire qu'une loi n'est pas bonne.
17:46 Et comme chef d'entreprise et comme président d'une fédération qui regroupe un million d'emplois, j'ai le droit de faire des propositions, j'ai le droit d'écrire aux parlementaires et j'ai le droit de leur dire…
17:55 Vous avez eu des réponses ? Parce qu'en l'occurrence, c'est eux qui doivent décider maintenant.
17:58 J'ai le droit de leur dire « Écoutez, on se trompe tous, moi le premier. Mais franchement, ce texte que vous avez adopté, il va arriver dans un moment qui est catastrophique. On a juste demandé… »
18:08 Vous allez voir que ce n'est pas une demande folle. « …un moratoire d'un an. Appliquons-la en 2025. Si vraiment on est convaincu qu'elle est bonne, appliquons-la en 2025.
18:15 Et laissons tranquilles les Français en 2024. Laissez-nous faire notre métier en 2024 pour les consommateurs. »
18:20 Parmi les autres mesures annoncées par Bruno Le Maire en fin de semaine, il y a ces 5 000 références dont le prix va baisser ou bien en tout cas n'augmentera plus.
18:32 Il y aura des contrôles de la Direction générale de la répression des fraudes. Est-ce que vous pouvez nous en dire un peu plus sur ces 5 000 produits ?
18:39 C'est quoi ces 5 000 produits par groupe de distribution ou c'est 5 000 au global et ça concerne quoi ? C'est de l'hygiène, de l'entretien, de la viande, du poisson, du poisson ?
18:49 Je vais prendre l'opération Carrefour. L'opération Carrefour, c'est 1 100 produits dont le prix baisse et il y a une majorité de produits alimentaires sous marque nationale ou sous marque propre.
19:04 Donc vous y trouvez vos grandes marques alimentaires qui ont joué le jeu. Il y a un certain nombre d'acteurs qui ont joué le jeu.
19:09 Lesquels par exemple ?
19:10 Les grandes marques italiennes de pâtes.
19:12 Pour les dire, Barilla, Ponzani.
19:14 Vous allez trouver une moutarde d'amora qui va repasser sous 2 euros.
19:19 Alors qu'elle avait beaucoup augmenté.
19:20 Alors qu'elle avait beaucoup augmenté. Vous allez trouver du papier toilette qui baisse de 10 %.
19:26 Donc on a en moyenne une baisse de 10 % sur 1 100 produits.
19:30 Et ça c'est tout de suite ?
19:31 C'est tout de suite.
19:32 C'est-à-dire que là la personne qui va tout à l'heure faire ses courses dans un Carrefour s'il est ouvert le dimanche ou demain.
19:35 Tout de suite.
19:36 Il y a 1 100 produits qui entre le 1er juin plus les 500 produits qu'on a ajoutés là, ça fait 1 100.
19:41 Jusqu'au 31 décembre.
19:42 En moyenne il baisse exactement de 10 % et on va le faire, le ministre l'évoquait aussi, jusqu'au 31 décembre.
19:49 Donc ça c'est vraiment ce qui va se passer.
19:51 Ça ça sera en 100 ces ports Carrefour.
19:52 Et donc le 5 000, il est l'addition des dispositifs de tout le monde.
19:56 Une question sur les prix.
19:58 Vous ne cessez de dire que vous faites beaucoup d'efforts.
20:00 Vous venez d'évoquer ces 1 100 produits concernés par les 5 000 annoncés par Bruno Le Maire.
20:05 On peut parler de vos concurrents ?
20:07 Je voyais encore une publicité de Lidl qui expliquait que ses prix étaient 12,8 % inférieurs aux vôtres.
20:13 Leclerc aussi se vante d'avoir des prix plus compétitifs que ceux de Carrefour.
20:17 C'est bien la preuve qu'il y a un peu de marge, que vous pourriez encore les faire baisser un petit peu ?
20:21 D'abord dans notre métier, quand on fait un comparateur de prix, moi j'ai arrêté d'en faire parce que je crois que le client a compris ça.
20:26 Quand on fait un comparateur de prix, on prend une méthodologie qui nous arrange.
20:29 Si je prends celle de Lidl, il a pris 200 produits, on en vend 20 000 et il s'est comparé à des produits incomparables.
20:35 Qu'importe. Qu'est-ce que ça signifie de plus intéressant ?
20:37 Ils sont quand même moins chers que vous.
20:38 Qu'est-ce que ça signifie de plus intéressant pour le client ?
20:40 Le client comprend quoi ?
20:42 Qu'il y a une bataille des prix, il y a une guerre des prix.
20:45 C'est la raison pour laquelle toutes les idées qui sont "les distributeurs ne passent pas les prix", etc.
20:50 Elles sont fausses.
20:51 Il y a une compétition permanente entre nous tous, compétition très intense, pour attirer de nouveaux clients.
20:57 Pourquoi est-ce qu'on va mieux, nous, par exemple ?
20:59 Parce qu'on gagne des parts de marché, parce qu'on a conquis 500 000 nouveaux clients au premier semestre,
21:04 parce qu'on a une dynamique commerciale d'ensemble qui est très forte.
21:07 Et donc, on investit en permanence dans le prix pour être le plus attractif possible pour nos clients.
21:12 Donc vous dites, malgré tout, on fait au maximum, on ne pourrait pas aller plus loin.
21:17 Quand vous gagnez autant de clients et quand vous gagnez des parts de marché en volume et en valeur,
21:21 ça veut dire que vous avez une équation commerciale qui aime bien les clients.
21:24 Les clients ont l'impression qu'on les prend aussi parfois pour des imbéciles.
21:28 Ce procédé marketing, la "shrinkflation", qui vient du mot anglais, les contractions,
21:34 "shrink", réduire, est d'inflation.
21:36 En gros, pour expliquer à nos téléspectateurs, le grammage diminue, mais le prix, lui, il augmente.
21:42 Résultat, quand on fait un comparatif au prix au kilo, eh bien là, on a une explosion des prix.
21:48 On prend vraiment les Français pour des imbéciles.
21:50 Là, on est un peu dans le comble du cynisme.
21:52 Il y a un certain nombre de marques, puisque vous citiez celles qui font bien,
21:55 mais aussi celles qui font mal, quand vous avez les chips Lay's de Pepsi qui ont augmenté de 30%
22:01 avec un grammage qui a baissé de 10%.
22:03 Pour ceux qui nous regardent, on achète un paquet de chips, on paye.
22:06 Ça a réduit et vous payez plus cher.
22:08 Donc c'est la double peine.
22:09 Vous achetez des glaces d'Unilever que vous aimez bien, comme Magnum ou Carte d'or.
22:13 Vous avez baissé de 200 ml le contenant et vous avez le prix qui a augmenté de 20%.
22:18 Fin d'use, pareil pour les pommes de terre, etc.
22:20 Mais c'est légal, il faut le dire, c'est légal.
22:22 On prend les Français pour des imbéciles, mais c'est légal.
22:25 Oui, mais il faut que ça s'arrête vite.
22:27 Vraiment, parce que ça, je pense que c'est le comble de l'insupportable pour le consommateur.
22:31 Vraiment insupportable.
22:32 Il faut que ça s'arrête.
22:33 Et le fait de l'avoir dénoncé, mon collègue Thierry Cotillard l'a fait,
22:36 le ministre l'a repris, vous l'avez évoqué dans vos studios, c'est très bien.
22:40 Je pense que cette pratique qui s'est développée ces derniers mois
22:42 va un peu diminuer d'intensité, parce que franchement, on a vu des choses assez incroyables.
22:46 Très concrètement, Bruno Le Maire l'a annoncé comme une mesure en disant
22:49 qu'il faut qu'il y ait plus de transparence, il y aura des contrôles.
22:52 Est-ce que ça suffit ou est-ce qu'il faut passer par la loi
22:55 pour s'assurer que ce type de pratique-là cesse ?
22:58 Parce que vous le dites, elle floue les Français et les consommateurs.
23:01 Moi, je ne suis pas totalement certain que ce soit du niveau législatif.
23:04 Les contrôles, c'est très bien.
23:05 Nous, on va faire notre rôle de négociation maintenant qu'on peut renégocier.
23:09 Donc, on va renégocier et être très vigilants sur ce sujet-là également.
23:13 Pardon de vous poser la question, il y a la responsabilité du législateur,
23:16 de l'État, du ministre de l'Économie.
23:18 Est-ce que vous, en tant que distributeur, vous ne pourriez pas décider
23:21 de déréférencer les produits et les marques qui pratiquent cette shrink-flation
23:25 en disant qu'on est responsable pour nos clients,
23:28 on sait qu'ils se font avoir en achetant le paquet de chips Lay's
23:31 où ils payent plus cher et il y en a moins, donc on va décider de le retirer ?
23:34 C'est une des raisons pour lesquelles nous avons demandé au ministre
23:37 de pouvoir anticiper les renégociations et il l'a accepté.
23:40 Parce que jusqu'alors, nous n'étions pas en position de négociation.
23:44 À partir du 1er octobre, on va renégocier, y compris sur ces sujets.
23:47 Pour ceux qui nous regardent, parce que je pense que c'est un sujet
23:49 qu'on aborde beaucoup et qui est parfois un petit peu abscons,
23:51 pas totalement compris, la question des négociations entre les distributeurs
23:54 et les industriels. Ça veut dire que concrètement, le 15 octobre, au plus tard,
23:58 vous allez vous mettre dans une pièce avec les géants industriels
24:03 et c'est vous, c'est vos collaborateurs...
24:05 J'avais raison de dire les géants parce que ça sera les 75 principaux.
24:07 C'est ça, donc c'est des firmes qui sont d'ailleurs des groupes monzo...
24:10 Qui sont à 99% hors de France.
24:12 Qui ont leur siège à Cincinnati, aux États-Unis.
24:14 Absolument, exactement.
24:15 Comment ça va se passer ? Et si on est une petite souris dans la pièce,
24:18 concrètement, vous arrivez avec votre liste de produits,
24:21 vous dites "alors voilà, là-dessus, on a constaté que ton cours du blé ou de la moutarde..."
24:26 C'est exactement comme ça que ça se passe.
24:27 Vous regardez le cours de matière première, vous regardez les cours des contenants,
24:32 le verre, etc., etc. Vous regardez les coûts de distribution de chacun
24:37 et vous négociez. Jusqu'alors, comme c'était censé être un gentleman agreement
24:41 dans les derniers mois, les industriels étaient en position de dire
24:44 "mais moi j'ai aucune raison de négocier puisque la négociation,
24:47 elle a lieu qu'une fois par an en mars et qu'on m'a juste dit
24:50 ça serait bien de négocier".
24:51 Donc 50 d'entre eux nous ont dit "on ne renégocie même pas".
24:54 S'il y a la loi, et je suis sûr qu'il y aura la loi, je connais Bruno Le Maire,
24:57 on va pouvoir renégocier.
24:58 Alexandre Epar, est-ce qu'il faut en terminer avec cette spécificité française
25:02 justement d'une seule négociation par an ?
25:04 Est-ce qu'il faut faire comme dans tous les autres pays
25:06 et négocier au fil de l'eau ?
25:08 Vous avez totalement raison. Nous, on a un petit avantage.
25:11 Nous sommes présents dans une quarantaine de pays.
25:13 Le seul pays où ça se passe si mal, le seul pays où la relation
25:17 avec les industries industrielles est aussi dégradée,
25:20 le seul pays où la situation est si paroxystique, c'est la France,
25:25 et c'est le seul pays où il y a une négociation annuelle.
25:27 C'est un excédatisme ou un manque de liberté dans les échanges économiques ?
25:32 Il y a un espèce de mythe de cette négociation annuelle.
25:35 Qu'est-ce qui se passe dans les autres pays où nous sommes présents ?
25:37 On a déjà renégocié les baisses de cours de matière première
25:40 puisqu'on négocie tout au long de l'année.
25:41 Dans tous les autres pays, nous renégocions en permanence,
25:46 c'est-à-dire qu'on s'ajuste en permanence sur les prix.
25:48 Et ça se passe très bien. On a une relation beaucoup plus fluide.
25:51 Et j'espère en effet, parce que le ministre a annoncé
25:54 une mission parlementaire sur ce sujet, j'espère en effet qu'on sera
25:58 entendus sur le fait de fluidifier. On est dans une période où il va y avoir
26:03 des aléas climatiques de manière croissante, où il y a des crises
26:05 d'approvisionnement, où il y a des éléments géopolitiques.
26:07 Les cours fluctuent tout le temps. Il faut donc renégocier tout le temps.
26:10 Vous me faites la transition par rapport à ma question suivante.
26:14 Il y a ces renégociations, un espoir qu'à partir de janvier, ça se passe mieux.
26:18 Je vous demande presque de faire une forme de prospective,
26:20 mais vous êtes un grand groupe et donc j'imagine qu'il y a plein de gens
26:22 qui travaillent là-dessus. Comment est-ce que vous voyez les mois qui vont venir ?
26:26 Est-ce qu'il faut que les Français s'habituent, même si ça ira mieux en janvier,
26:29 à de toute façon une inflation qui restera très forte dans les années à venir
26:32 pour toutes les raisons que vous avez évoquées ?
26:33 Est-ce que vous dites aux Français, il ne faut pas se raconter d'histoire,
26:36 on ne reviendra jamais à des prix "normaux" ?
26:40 Donc, ça veut dire qu'il faut que vous vous prépariez à vous serrer la ceinture
26:43 de toute façon à long terme et sans espoir que ça aille vraiment mieux.
26:47 Comment est-ce que vous voyez ?
26:48 C'est toujours très difficile la prévision, mais il me semble qu'il y a un certain nombre
26:52 d'éléments qui aboutissent à ce que l'inflation alimentaire,
26:55 au cours des cinq prochaines années, soit plus élevée que ce qu'elle a été
26:59 lors des quatre dernières décennies.
27:00 Pendant les quatre dernières décennies, l'inflation alimentaire était entre 0 et +1.
27:04 Aujourd'hui, il y a un certain nombre d'éléments.
27:06 La mondialisation fonctionne moins bien, la crise climatique a des effets croissants,
27:11 il y a des éléments de nature géopolitique qui pèsent également,
27:14 il y a des crises d'approvisionnement, etc.
27:16 Donc, il y a la transformation climatique à opérer dans chacun des groupes.
27:20 Si vous prenez tous ces éléments, il me semble qu'on devrait avoir
27:24 une inflation alimentaire, et d'ailleurs une inflation tout court,
27:28 plus élevée qu'au cours des dernières années.
27:30 C'est-à-dire ? Alors, encore une fois, c'est des chiffres,
27:32 et donc ce n'est pas forcément très concret pour ceux qui nous regardent,
27:34 mais là, au mois d'août, on est à 4,8 par rapport à l'année précédente.
27:37 Ça, c'est l'inflation générale, mais l'inflation alimentaire est à 12.
27:39 Sur les prix, on est à plus, à 12 absolument.
27:41 Il faut espérer quoi ? Que ce soit, on peut passer sous la barre des 10,
27:45 ou est-ce qu'on restera sur...
27:46 Ah non, non, moi je suis convaincu qu'au premier trimestre de l'année,
27:49 on sera largement au-dessous de 10.
27:51 J'espère qu'on sera plus près de 5, et j'espère un peu au-dessous.
27:54 Mais on ne sera pas à 0. On ne reviendra pas à ce schéma.
27:58 Le temps d'avance est fini.
27:59 Le nombre de l'inflation alimentaire à zéro, je le crois.
28:02 Je pense qu'il est derrière nous.
28:03 Il y a un sentiment de déclassement social qui a pris
28:08 chez un certain nombre de Français aujourd'hui.
28:12 Est-ce qu'on n'en est pas là aussi à remettre en question finalement
28:17 l'abondance alimentaire ?
28:18 Vous savez, cet hiver, le président de la République avait dit
28:22 "C'en est terminé de l'abondance énergétique,
28:24 on ne pourra plus consommer l'énergie comme on l'a fait."
28:26 Est-ce que c'est la même chose pour l'alimentaire ?
28:28 Est-ce qu'aujourd'hui, on ne pourra plus consommer
28:32 comme on a consommé auparavant ?
28:34 J'ai bien peur qu'on soit un peu au-delà de ça.
28:37 Quand on écoute Laurent tout à l'heure,
28:39 ce n'est pas l'abondance en sujet.
28:41 Il ne se dit pas "Tiens, je vais..."
28:42 Il se dit "Comment je fais pour donner des fruits et legumes,
28:45 des poissons et de la viande à mes enfants ?"
28:48 On est dans ce moment-là.
28:50 Quand on aura passé la période d'hyperinflation
28:52 qui paraît tellement longue à ces personnes-là,
28:55 on pourra regarder quel est le modèle alimentaire de demain.
28:57 Vous savez que c'est notre raison d'être à nous.
28:59 On a fixé une raison d'être, la transition alimentaire pour tous.
29:02 C'est-à-dire avoir une consommation raisonnée
29:06 et le plus responsable possible pour la planète.
29:09 Mais aujourd'hui, ce que se disent les Français,
29:11 ce n'est pas la fin de l'abondance.
29:13 Ils se disent "Comment est-ce que je reviens dans une situation
29:16 où j'offre l'essentiel à mes enfants et à moi-même ?"
29:20 C'est ça le sujet, je crois.
29:21 Dans les prochaines semaines et prochains mois,
29:23 il faut qu'on soit concentré là-dessus.
29:25 - Peut-être quelque chose que vous pouvez constater dans les magasins,
29:27 l'idée de la fin du mois.
29:29 Les témoignages qu'on a beaucoup de Français,
29:31 c'est qu'ils disent, chez les auditeurs d'RMC, sur BFM TV,
29:35 que la fin du mois, ce n'est plus la fin du mois.
29:37 - C'est le dixième.
29:38 - Est-ce que ça, c'est quelque chose que vous voyez,
29:40 c'est-à-dire dans les tendances de consommation,
29:42 qu'en fait, très tôt dans le mois, les gens arrêtent d'acheter l'essentiel ?
29:44 - On le voit de manière absolue.
29:47 La fin du mois, ce n'est pas du tout le 31.
29:50 À partir du 12-15, vous voyez les tendances de consommation qui baissent.
29:54 Et c'est la traduction, évidemment, du fait que les Français sont empêchés,
29:59 ou un certain nombre d'entre eux, dans les classes populaires,
30:01 sont empêchés de consommer de manière acceptable
30:04 dans les derniers jours du mois.
30:06 - Vous parlez des classes populaires, mais ça concerne aussi les classes moyennes aujourd'hui.
30:09 - Au fond, les classes populaires ne peuvent plus consommer
30:15 un certain nombre de produits.
30:16 Les classes moyennes consomment moins de produits de qualité.
30:20 C'est ça qui se passe.
30:21 Vous voyez, les classes populaires, c'est vraiment,
30:23 je ne peux plus consommer tout court.
30:25 Les classes moyennes, c'est, je ne peux plus consommer
30:27 un certain nombre de produits que je consommais jusqu'alors,
30:29 et qui sont la qualité alimentaire ou le produit plaisir que vous évoquiez tout à l'heure.
30:33 - D'où le sentiment de déclassement social.
30:35 - D'où le sentiment qui l'accompagne.
30:36 - Je voulais vous soumettre, parce que c'est quelque chose qui revient beaucoup,
30:39 notamment sur ces plateaux, les propositions des politiques
30:41 pour lutter contre l'inflation.
30:43 Et alors là, systématiquement, depuis six mois,
30:45 vous avez la France Insoumise qui dit, il y a une mesure magique,
30:47 il faut bloquer les prix d'une centaine de produits de première nécessité.
30:50 Et vous avez le Rassemblement national qui dit,
30:51 non, non, non, il ne faut pas bloquer les prix, il faut faire la TVA à 0%
30:53 sur ces produits-là.
30:55 Que dit le patron de Carrefour de ce type de solution ?
30:58 Est-ce qu'elles sont réalistes ?
31:00 - Écoutez, le blocage des prix, il est testé depuis assez longtemps au Venezuela.
31:06 Qu'est-ce que ça fait un blocage des prix ?
31:08 - Pénurie.
31:09 - Quand vous fixez le prix et que le producteur ou l'entreprise
31:13 qui produit a des coûts de production supérieurs au prix de vente,
31:16 il arrête de produire.
31:18 Donc vous avez immédiatement une pénurie.
31:20 Vous l'accompensez comment ?
31:22 En important très cher des produits et en ayant une pénurie alimentaire totale.
31:25 - Donc blocage des prix = pénurie, c'est le message pour Jean-Luc Mélenchon.
31:29 - Franchement, je le crois.
31:31 Je voudrais pouvoir élaborer plus là-dessus.
31:34 - Alors même que vous avez vu, c'est un clin d'œil,
31:36 mais cette semaine, ce que vous avez dit sur le tsunami de déconsommation
31:38 a été repris par la France Insoumise en disant,
31:40 même un patron du CAC 40, Alexandre Bonpart, dit le vrai.
31:43 Ça, vous n'aviez pas prévu dans votre plan de carrière
31:45 d'être repris par le patron de la France Insoumise, Jean-Luc Mélenchon ?
31:47 - Pas totalement, en effet.
31:49 Je crois que le blocage des prix généralisé,
31:51 alors on peut le faire sur des produits, c'est ce qu'on fait,
31:53 mais le blocage des prix généralisé, je crois, sera une très mauvaise mesure.
31:56 La TVA à zéro, moi, je suis aussi conscient des difficultés de l'État.
32:03 On peut tous demander des chèques de la TVA à zéro, etc.
32:06 Mais je ne suis pas totalement sûr que ce soit la mesure qu'il faille prendre aujourd'hui.
32:09 Donc je crois qu'il faut qu'on laisse les mécanismes économiques fonctionner.
32:14 La négociation en permanence entre les acteurs,
32:16 ça, ça peut nous permettre très vite d'abaisser le niveau de l'inflation.
32:18 - La rentrée est difficile pour un certain nombre de Français.
32:21 On l'a vu, l'inflation alimentaire, mais il y a aussi le carburant.
32:24 Le carburant, on en a parlé toute l'année 2022, même en 2023.
32:29 Et à nouveau, en cette rentrée, on voit les prix du carburant qui progressent.
32:34 C'est très compliqué pour tous ceux qui habitent en province
32:37 et qui n'ont pas d'autre choix que de prendre leur voiture pour aller travailler.
32:41 Est-ce que, comme certains de vos concurrents,
32:43 vous allez mettre en place des mesures pour venir en aide aux automobilistes ?
32:48 - Oui, d'abord un mot. L'essence, vous avez raison.
32:51 La rentrée scolaire est très chère aussi.
32:53 Elle est en hausse de 10 % à peu près.
32:54 Mais sur l'essence, en effet, le prix du cours de baril est reparti à la hausse.
32:59 La parité euro/dollar n'est pas bonne.
33:01 Et donc, en effet, on est plus près des 1,95 €/€12
33:05 que là où nous étions au début du mois de mai.
33:08 Donc à nouveau, il y a une tension très forte.
33:11 - Et votre concurrent Leclerc se vante de faire des opérations à prix coûtant ?
33:14 - En réalité, les uns et les autres, on le commercialise de manière différente.
33:18 En réalité, on est à des opérations à prix coûtant.
33:20 C'est un produit sur lequel, comme c'est un produit d'appel,
33:23 c'est un produit sur lequel on fait quasiment zéro marge, voire pas de marge du tout.
33:27 Donc on va continuer, nous aussi, à le faire.
33:29 - Une toute dernière question, Alexandre Pompare.
33:31 Vous êtes à la tête d'un groupe, Carrefour, qui se porte bien.
33:34 Vos résultats au premier semestre 2023 sont très solides
33:36 avec un chiffre d'affaires en hausse de plus de 8 %, c'est ça ?
33:38 - C'est ça.
33:39 - Ça veut dire que malgré l'inflation, malgré la déconsommation,
33:43 vous n'êtes pas en difficulté ? Les résultats sont bons ?
33:46 - Oui, mais ça n'a rien à voir avec l'inflation.
33:48 D'abord, un élément, l'inflation étant la même pour tout le monde,
33:51 j'ai un certain nombre de concurrents, vous le savez, qui sont en immense difficulté.
33:54 L'inflation à 15 %, c'est mauvais pour tout le monde, parce que vos coûts explosent.
33:59 Pourquoi on va bien ? Et je crois que tous les experts s'accordent à le dire.
34:02 Parce qu'on s'est formidablement bien transformé les cinq dernières années,
34:05 parce qu'on a fait une transformation de notre offre commerciale, de nos organisations.
34:08 On a fait des plans d'économie massif, les salariés ont été exemplaires d'engagement
34:12 et on a retrouvé de la dynamique.
34:14 On gagne des parts de marché, on gagne de nouveaux clients.
34:16 Et moi, je ne vais pas m'en excuser. C'est une bonne nouvelle.
34:20 - Mais certains pourraient dire, +8 % de chiffre d'affaires,
34:24 donc il faudrait qu'ils fassent encore plus d'efforts sur les prix.
34:26 - Je ne peux pas m'excuser du fait que Carrefour va mieux,
34:29 et je pense que c'est une bonne nouvelle.
34:31 Pas seulement pour les salariés de Carrefour,
34:32 c'est une bonne nouvelle pour le pays quand un groupe comme ça va mieux.
34:34 On était en difficulté, on va mieux, on se transforme.
34:37 C'est le résultat des extraordinaires efforts faits par l'entreprise
34:40 et puis de la dynamique qui est là.
34:42 - Vous allez donc augmenter les salaires, continuer à augmenter les salaires.
34:44 Il y a un débat sur une conférence sociale pour les bas salaires,
34:48 ce qu'on appelle les minima sociaux en dessous du SMIC.
34:49 La grande distribution joue plutôt le jeu,
34:51 donc elle n'est pas concernée par cette question des minima sociaux en dessous du SMIC.
34:55 Mais est-ce que pour autant, vous allez faire un effort sur la question des salaires,
34:58 compte tenu de ces bons résultats ?
35:00 - Depuis le début de l'inflation, on a beaucoup augmenté nos salaires.
35:04 Cette année, ils vont augmenter de 5,75 %.
35:06 Ça a déjà été négocié, c'est un accord qu'on a eu avec les partenaires sociaux.
35:09 L'inflation étant à 4,5, on est à 5,75 %, donc on est au-dessus.
35:13 Et puis parallèlement à ça, comme on va mieux,
35:16 nos primes d'intéressement et de participation sont à 1 000 €,
35:19 elles ont doublé, on a des remises sur achat à nos collaborateurs qu'on a pu augmenter.
35:23 Bref, on a un modèle social qui fonctionne bien.
35:25 Quel résultat du dialogue social que j'ai avec les partenaires sociaux ?
35:28 - Merci beaucoup Gaëtan Mélin d'avoir été avec nous.
35:31 Merci beaucoup Alexandre Pompare.