• l’année dernière

Tous les samedis et dimanches soir, Pierre de Vilno reçoit deux invités pour des débats d'actualités. Avis tranchés et arguments incisifs sont aux programmes de 18h30 à 19h00.
Retrouvez "Ça fait débat" sur : http://www.europe1.fr/emissions/les-grandes-voix-du-weekend

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00:00 - On continue dans Panorama, les débats de Panorama jusqu'à 19h, l'Inde, l'ascension d'un nouveau géant mondial.
00:05 Nous sommes avec les invités, Vahejo Naravan, bonsoir.
00:08 Vous êtes écrivaine, éditorialiste à The Wire.fr, The Hindustan Times et Le Monde Diplomatique.
00:16 Bonsoir Sylvie Matteli.
00:17 - Bonsoir.
00:18 - Vous êtes directrice adjointe de l'Iris, économiste, auteur de Géopolitique de l'économie,
00:22 40 fiches illustrées pour comprendre Le Monde aux éditions Errol.
00:26 Mais d'abord, Capucine Patouillet, bonsoir Capucine.
00:28 - Bonsoir Pierre.
00:29 - On va commencer avec vous sur cette polémique à l'approche du sommet du G20.
00:33 En fait, la raison pour laquelle nous avons fait ce sujet, c'est que tout est parti d'une invitation.
00:38 - Oui, une signature au bas du carton d'invitation officielle au G20 envoyée mardi soir,
00:43 celle de la présidente indienne Drupadi Murmu, qui s'y présente en tant que présidente du Bharat.
00:48 Alors Bharat, c'est un nom tiré d'un texte mythologique hindou rédigé en sanskrit
00:52 et qui désignerait le royaume de l'Inde.
00:54 C'est l'un des deux noms officiels du pays reconnus par la Constitution
00:58 et en opposition avec le nom "Inde" choisi par les colons britanniques.
01:02 Il n'en fallait pas plus par le biais des réseaux sociaux pour que la population,
01:06 et notamment l'opposition du pays, y voient une volonté de Narendra Modi
01:09 d'affirmer encore davantage sa volonté d'hindouiser le pays et de tirer un trait sur son passé colonial.
01:15 - Donc rebaptiser l'Inde Bharat, c'est un concept idéologique fondateur pour Narendra Modi,
01:19 actuellement en campagne, il faut le dire, pour sa réélection.
01:22 - Oui, le premier ministre indien brigue un troisième mandat à la tête du pays
01:25 et cette notion de Bharat, c'est un combat qu'il mène depuis de nombreuses années.
01:29 Il était alors membre haut placé d'une organisation paramilitaire
01:32 défendant le retour à l'Akram Bharat, l'Inde indivisée et proche du parti du premier ministre, le BJP.
01:39 Pour eux, le partage de 1947 serait déclaré nul et non avenu,
01:43 permettant ainsi à l'Inde de retrouver un territoire composé du Pakistan,
01:47 mais aussi de l'Afghanistan, du Bangladesh, le Népal, le Bhoutan, le Tibet, le Sri Lanka et le Myanmar.
01:52 Le G20 est donc une occasion pour Modi d'afficher ses ambitions pour le pays,
01:56 d'autant que ses opposants politiques se sont unis dans une coalition politique
02:00 baptisée Indian National Developmental Inclusive Alliance, l'INDIA.
02:05 - Et bien voilà, les précisions de Capucine Patouillet, vous pouvez le voir.
02:09 Alors, Vaishal Naravane, c'est assez étonnant que cette mutation,
02:16 ce changement de nom qui est quand même quelque chose de considérable
02:20 pour un aussi grand pays, aussi important que l'Inde,
02:24 se fasse un peu en quête imminie sur un carton d'invitation, non ? Ça vous a étonné ?
02:30 - Oui, ça se fait en quête imminie parce que la décision n'est pas encore officielle.
02:34 L'Inde n'a pas véritablement, encore officiellement, changé de nom,
02:39 mais c'est là, dans la tête du parti du BJP qui est au pouvoir,
02:45 parce que leur projet politique, c'est vraiment l'Inde d'abord la nation des hindouistes.
02:52 C'est un projet politique religieuso-ethnique.
02:57 Et c'est la majorité, une espèce de majoritarianisme religieuse avant tout,
03:05 qui changera totalement l'aspect séculaire, inclusif de l'Inde,
03:11 parce qu'on va exclure, ou peut-être mettre au deuxième rang,
03:15 de très grandes majorités qui font partie de l'Inde,
03:19 les musulmans qui sont arrivés au 8e siècle en Inde,
03:23 et les chrétiens qui sont présents en Inde depuis le 2e siècle.
03:27 - Donc ça a l'air comme ça un peu anecdotique,
03:31 il y a beaucoup de pays qui ont changé de nom,
03:34 pour des raisons d'ailleurs très très différentes à chaque fois,
03:37 mais là vous nous expliquez qu'on rentrerait dans une phase un peu de protectionnisme.
03:42 - Pas uniquement protectionnisme, mais aussi de changer le caractère de base de l'Inde.
03:49 C'est un peu comme Israël qui dit "ben voilà, on va devenir un État purement juif",
03:56 parce que la constitution israélienne qui n'est pas acceptée par pas mal de minorités
04:01 qui sont un peu fondamentalistes, qui disent "non on n'accepte pas l'État séculaire".
04:06 On veut un État religieux, c'est ça qu'ils disent.
04:10 Et alors les 200 millions de musulmans en Inde et les 40 millions de chrétiens
04:15 se trouveront comme des citoyens de deuxième zone.
04:20 - De deuxième zone, carrément. Sylvie Mathélie, vous êtes d'accord avec cette analyse ?
04:24 - Oui, je partage cette analyse, alors dans les limites de mes compétences, je suis économiste,
04:30 mais c'est vrai qu'on a vu depuis son arrivée au pouvoir,
04:34 on va pas la rendre à maudit, s'affirmer de plus en plus et affirmer de plus en plus
04:40 la prééminence des hindous en Inde.
04:46 Donc il n'est pas très étonnant qu'on voit aujourd'hui cette évolution
04:51 qu'on pourrait quasiment qualifier de cette dérive.
04:54 - Oui, et alors du coup, comme vous parlez d'économie et que c'est votre spécialité,
04:59 cette façon de porter les choses, est-ce que c'est un risque aussi
05:05 de moins attirer les investisseurs ?
05:09 Est-ce que ça peut être contre-productif pour M. Modi ?
05:13 - Alors dans l'absolu, tout à fait.
05:15 Ça peut être contre-productif parce que le nationalisme, le recli sur soi,
05:20 ce ne sont pas forcément des mouvements qui attirent les investisseurs étrangers,
05:25 mais on est dans un contexte global beaucoup plus complexe
05:29 où on voit l'image de la Chine se détériorer probablement encore plus vite
05:36 que ça pourrait être le cas de l'Inde si l'attitude de M. Modi
05:43 se maintenait aussi strictement.
05:46 Donc je pense que ça n'aura aucun effet.
05:48 Aujourd'hui, on voit bien qu'il y a un certain nombre d'entreprises
05:51 qui se questionnent, on ne peut plus aller en Russie parce que c'est la guerre,
05:54 on se méfie de la Chine parce qu'il y a une confrontation avec les États-Unis
05:57 qui a des conséquences.
05:59 Donc au fond, l'Inde, ça devient un territoire de repli
06:02 et je pense que Narendra Modi et tout son gouvernement l'ont bien compris
06:06 et qu'ils surfent là-dessus et que leur affirmation de puissance,
06:10 c'est aussi un moyen de dire "Aujourd'hui, on assume, venez,
06:14 parce qu'on va vous offrir les conditions du développement
06:17 dont vous avez besoin pour investir chez nous".
06:19 - Oui, Juna Ravane, il y a aussi toute une défiance de l'ancien Commonwealth,
06:23 des Anglais, il y a une façon aussi de dire
06:26 "Voilà, nous ne sommes plus sous le joug des Anglais"
06:29 et il faut le dire d'une certaine manière, donc on le dit
06:32 et c'est pour ça qu'on fait ça.
06:34 - Oui, aussi on a vu qu'il y a le Premier ministre britannique
06:38 qui est d'origine indienne, Rishi Sunak,
06:42 qui était pratiquement au pied de Narendra Modi aujourd'hui
06:46 parce que l'Angleterre post-Brexit,
06:49 le Royaume-Uni post-Brexit,
06:53 a terriblement besoin de signer des accords de commerce
06:59 et il y a cet accord de commerce sur la table avec l'Inde,
07:03 mais l'Inde extrait tous les avantages possibles
07:09 en faisant attendre les Britanniques, en disant "On va réfléchir".
07:14 Donc aujourd'hui, monsieur Sunak a été reçu comme le gendre de la nation
07:20 parce que sa femme est indienne et elle est la fille d'un très grand entrepreneur
07:26 en informatique, d'un milliardaire, en effet,
07:30 mais ça n'a pas véritablement changé,
07:33 ça n'a pas ramolli la position de monsieur Modi
07:36 qui était là en disant "Voilà, vous les Britanniques,
07:39 on vous a, là, on voulait que vous soyez".
07:43 - Sylvie Matteli, c'est un peu la vengeance du serpent à plumes, là, non ?
07:46 Parce qu'il y a eu aussi, dans le spectre des très grandes entreprises,
07:53 monsieur Tata, qui il n'y a pas très longtemps,
07:56 il y a je crois une dizaine ou une douzaine d'années,
07:58 s'est offert Jaguar et Land Rover.
08:00 Ça a été quand même un symbole, on en avait beaucoup parlé à l'époque,
08:05 là effectivement, c'est dans la lignée de ce qui s'était passé avec cette histoire-là.
08:10 - Oui, tout à fait, ce qui est en train de se passer est particulièrement intéressant
08:15 parce qu'on voit un certain nombre de puissances émergentes, l'Inde en tête,
08:19 finalement, les amener en position de dominer les pays occidentaux
08:26 et ces pays qui pendant très longtemps faisaient la loi.
08:29 Il est intéressant de noter d'ailleurs que cette année,
08:32 le PIB de l'Inde a dépassé le PIB du Royaume-Uni.
08:35 Donc je serais tentée de dire, pour résumer tout ça,
08:38 qu'à une époque, l'Inde était non-alignée,
08:41 c'est-à-dire qu'elle refusait de s'aligner,
08:44 ou en tout cas, elle essayait de ne pas avoir à s'aligner sur les grandes puissances occidentales.
08:48 Aujourd'hui, elle se définit comme multi-alignée.
08:51 Alors multi-alignée parce que non-alignée, c'est un concept qui a été porté par le parti d'opposition
08:57 à Narendra Modi, mais multi-alignée, c'est intéressant.
09:01 Ça veut dire que l'Inde aujourd'hui joue toutes les cartes qu'elle peut jouer
09:05 pour défendre l'intérêt national.
09:07 - Et quand vous dites "toutes les cartes", c'est aussi une comparaison avec la Turquie,
09:11 notamment M. Erdogan, qui est proche de la communauté européenne,
09:16 et en même temps, c'est celui qui va faire l'émissaire quand il s'agit d'aller parler à Vladimir Poutine,
09:20 quand il s'agit de parler à Xi Jinping, etc.
09:23 - Oui, c'est vrai. Mais d'un autre côté, vous avez vu que l'Inde a su habilement profiter
09:30 de la guerre en Ukraine et de l'affaiblissement de la Russie
09:33 pour importer du gaz et du pétrole depuis la Russie à des prix bradés
09:38 et le revendre beaucoup plus cher au reste du monde.
09:41 Donc on voit qu'on a un pays, qu'on a un gouvernement aujourd'hui en Inde
09:46 qui s'affirme comme une puissance, et plus juste une puissance émergente,
09:50 et qui se permet de parler et de se comparer, y compris d'ailleurs à la Chine,
09:55 qui est le challenger des États-Unis, donc quasiment la deuxième plus grande puissance mondiale.
10:03 - Oui, Jounar Avan, on est devenu malin en fait en Inde.
10:05 - Oui, on est devenu... - Non pas qu'on ne l'était pas avant,
10:08 mais c'est vrai que cette histoire de gaz, c'était quand même assez effrayant,
10:12 parce qu'on se bouchait le nez parce qu'on ne voulait pas, nous pays européens et occidentaux,
10:17 acheter du gaz qui venait de Russie, parce qu'on voulait justement, d'une certaine manière,
10:23 accabler et faire en sorte que Poutine ne vende plus son gaz à l'extérieur,
10:29 puis finalement les Indiens leur achetaient et le vendaient à prix d'or aux Européens,
10:33 en disant "ah bah non, c'est du gaz indien", en fait c'était du gaz russe.
10:35 - Et les Indiens disaient "ah bah oui, mais vous voulez l'acheter, pourquoi vous nous...
10:40 - Vous en avez besoin. - Vous en avez besoin, donc pourquoi est-ce que vous nous accusez
10:43 de l'acheter à la Russie, quand vous êtes contents de l'acheter à nous ?
10:47 - Mais ça vous a choqué, vous ? Ça vous a choqué à l'époque ?
10:49 - Ça m'a choqué l'attitude de l'Inde sur cette question de l'agression russe.
10:57 Et si on compare le communiqué officiel qui est sorti de ce grande réunion de G20 aujourd'hui,
11:11 si on le compare à Bali il y a juste un an, Lavrov, le ministre des affaires étrangères russe,
11:20 a dit qu'il était vraiment très content.
11:24 Et un journaliste qui a osé poser la question "quelle est la différence entre Bali et Delhi ?"
11:30 parce qu'il y a une nette différence entre les deux communiqués,
11:34 et je vais vous expliquer pourquoi, M. Jai Shankar, le ministre des affaires étrangères indien,
11:39 a séchement répondu "ah, mais Bali, c'était Bali, ça c'est Delhi".
11:44 - Et leur explication de texte ?
11:47 - L'année dernière on avait, dans les thèmes les plus forts,
11:53 condamné l'agression de la Russie contre l'Ukraine.
11:58 - Et là non.
11:59 - Et là on ne parle même pas de ça, on ne mentionne pas Moscou.
12:04 Et on parle de la guerre dans l'Ukraine, on ne parle pas de la guerre contre l'Ukraine.
12:13 Donc on dit qu'il y a une guerre dans l'Ukraine et qu'il y a beaucoup de souffrance,
12:18 il faut mettre fin à ces souffrances.
12:20 - Donc c'est un pas en arrière de la diplomatie indienne vis-à-vis du conflit ukrainien ?
12:23 - C'est-à-dire que c'est un pas en avant pour les indiens,
12:27 et c'est un recul de la diplomatie occidentale,
12:32 et les Ukrainiens sont extrêmement mécontents de se communiquer
12:37 en disant que c'est vraiment dommage qu'on ait utilisé les mots comme ça.
12:41 - On va parler de l'Inde, de Bharat, pardon, 18h46,
12:44 on revient dans un instant avec nos spécialistes.
12:46 A tout de suite sur Europe 1.
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14:16 Europe un soir week-end, Pierre de Villeneuve.
14:19 - Quand l'Inde change de nom, et par ce changement de nom,
14:24 même si ce n'est pas encore officiel,
14:26 c'est peut-être toute une nouvelle façade,
14:29 toute une nouvelle façade politique, géopolitique, géostratégique
14:32 qui s'annonce pour ce grand pays du monde.
14:35 Vaiju Naravan est avec nous, écrivaine, éditorialiste,
14:37 dans plusieurs parutions, notamment "Le monde diplomatique",
14:40 Sylvie Matteli, directrice adjointe de l'Iris, et économiste.
14:44 Comment est-ce qu'il faut regarder maintenant l'Inde ?
14:49 C'est-à-dire que ce pays qui se retrouve avec juste au-dessus de lui
14:53 la Chine puis la Russie,
14:54 on a beaucoup parlé du retour des impérialismes,
14:57 Vaiju Naravan,
14:59 on a évidemment mis tout de suite en opposition
15:03 les Etats-Unis et la Chine.
15:05 Quel rôle de l'Inde maintenant
15:08 entre ces différentes puissances ?
15:10 Alors l'Inde a une position un peu délicate,
15:13 parce qu'ils ont acheté beaucoup d'armes à la Russie.
15:18 Ils en achètent à la France aussi.
15:20 Ils achètent à la France aussi,
15:21 mais la Russie continue à être un des grands fournisseurs des armes aux Indiens.
15:26 Ça doit être à peu près le seul pays où il y a sur le même tarmac
15:28 des migs et des Rafales.
15:30 Exactement.
15:31 Et puis à la fois, ils sont la Chine
15:35 et le premier fournisseur commercial de l'Inde.
15:38 Donc c'est le premier partenaire commercial de l'Inde.
15:42 Mais ils sont dans un conflit qui dure depuis très longtemps
15:47 dans les Hauts-Himalayas, dans la partie de l'Inde qui s'appelle la Dak,
15:51 où en mai dernier, pas ce mai là, mais le mois de mai 2022,
15:58 les Chinois ont fait des incursions.
16:01 Il y a eu des morts de part et d'autre.
16:03 On a perdu 20 soldats côté indien, mais peut-être une cinquantaine côté chinois.
16:08 C'était la première fois qu'il y a eu perte de l'homme.
16:12 Et les Chinois, récemment, ont publié les cartes
16:15 où ils montrent toute la partie nord-est de l'Inde
16:18 comme faisant partie du territoire chinois.
16:21 Donc la Chine et la Russie se rapprochent.
16:25 L'Inde est amie d'un et ennemi de l'autre,
16:28 et ne sait pas comment jouer entre les deux.
16:31 En plus, l'Inde a beaucoup de veilléité vers les États-Unis
16:35 parce qu'il y a énormément d'Indiens.
16:37 Vous avez un Indien qui est maintenant candidat du Parti républicain.
16:42 - Absolument.
16:43 Il s'est beaucoup fait connaître lors du dernier débat, effectivement, entre les Républicains.
16:47 - Et les Indiens adorent les États-Unis
16:50 parce qu'on a épousé la cause de la libéralisation et de la mondialisation.
16:56 Donc pour beaucoup d'Indiens, les États-Unis restent le pays rêve
17:01 où tout est libéré et libéralisé.
17:04 Donc ils veulent jouer le jeu de ce rapprochement avec les États-Unis
17:09 pour contrer la Chine.
17:11 Mais à la fois, il faut qu'ils soient un peu plus vigilants.
17:16 Donc c'est kiff-kiff, on avance un peu de ce côté, puis on recule un petit peu.
17:21 Mais vous avez parlé de « Akand Bharat ».
17:24 On peut le comparer à ce vieux rêve de la Grande Serbie
17:29 quand on a eu les guerres balkaniques.
17:32 Et on parlait de la Grande Serbie,
17:34 et la Grande Serbie c'était quoi ?
17:36 C'était tous les Magyars et tous les autres pays
17:41 qui sont devenus maintenant indépendants dans les Balkans.
17:44 L'Inde a ce vieux rêve, parce qu'au temps du bouddhisme,
17:48 l'Afghanistan faisait partie de l'Inde.
17:52 Quand dans le 326 avant Jésus-Christ,
17:57 quand Alexandre est arrivé avec sa conquête,
18:00 Alexandre de Macédonie est venu en Inde,
18:03 il était là, il y avait le bouddhisme déjà installé en Inde.
18:08 Et on parle de ça, des généraux qu'il a laissés derrière lui.
18:13 - Mais il n'y a pas de véléité de conquête de territoire pour l'instant, rassurez-moi.
18:16 - Le parti au pouvoir aujourd'hui,
18:19 il parle ouvertement de reconquérir ce territoire du Cachemire,
18:25 qui a mené à quatre guerres entre l'Inde et le Pakistan.
18:28 C'est une histoire...
18:29 - Donc ça veut dire qu'il y a une guerre possible à la clé ?
18:31 - Ah oui, il y a une guerre possible, oui.
18:33 - Ah il y a une guerre possible à la clé ?
18:35 - Il y a une guerre possible, même avec la Chine,
18:37 parce qu'on a toujours un peu redouté l'axe sino-pakistanais.
18:42 Heureusement pour les Indiens,
18:44 les Pakistanais sont vraiment dans un état très très très mauvais actuellement.
18:50 Économiquement, le pays s'éclate, politiquement, rien n'est stable.
18:54 Et donc c'est l'abîme du Pakistan qui joue à l'avantage de l'Inde.
19:00 - Sylvie Matteli, nouvelle redistribution des cartes.
19:03 C'est vrai qu'on n'avait pas forcément pensé à des conflits armés.
19:06 Quel est votre point de vue ?
19:08 - Ce qui est intéressant, je trouve, à l'issue de ce G20 à New Delhi,
19:12 c'est que les Indiens se sont positionnés comme le porte-voix des pays du Sud.
19:18 Et quand on dit ça, ça en dit long sur le renouvellement finalement
19:25 des relations internationales qui est en train de se mettre en place.
19:28 C'est un renouvellement où on peut à la fois être le premier partenaire commercial de la Chine
19:34 et en même temps se fâcher, comme ça a été rappelé à l'instant,
19:38 sur un certain nombre de différents territoriaux.
19:42 De la même manière, on peut avoir des intérêts à commercer ou à négocier avec la Russie et avec la Chine
19:51 et être très proche des États-Unis ou en tout cas s'être rapproché des États-Unis.
19:55 Donc on est vraiment dans des équilibres à géométrie variable.
19:59 Alors je ne suis pas certaine que l'Inde ait des velléités de conflits avec la Chine
20:05 parce que la supériorité militaire de la Chine est largement au-dessus de l'Inde
20:12 et qu'elle se ferait écraser tout de suite.
20:15 Mais c'est vrai qu'on a en Asie, et entre l'Inde et le Pakistan, comme ça vient d'être rappelé,
20:21 un certain nombre de différences, un certain nombre de velléités
20:24 et puis surtout une course aux armements qui s'est engagée il y a une quinzaine d'années.
20:28 Ce que je vais vous dire, c'est que les deux pays, aussi bien la Chine que l'Inde,
20:32 achètent de l'armement, des munitions.
20:37 On dit que la Chine fait une flotte de la Marine nationale française tous les trois ans.
20:43 Ça en dit long quand même.
20:45 Alors l'Inde effectivement c'est un peu moins, mais il y a aussi des achats de frégates, etc.
20:48 Donc il y a quand même une course à l'armement et ça c'est presque un peu effrayant.
20:54 Oui et c'est surtout une course à l'armement qui ne concerne pas que l'Inde et la Chine,
20:58 qui concerne l'ensemble de l'Asie depuis 15 à 20 ans.
21:02 Donc on a une accumulation d'armement dans cette région,
21:05 une montée en gamme des armements de la région, je pense aussi à l'Indonésie et tout un tas d'autres pays,
21:12 qui fait qu'à un moment donné, le dérapage est tout à fait possible
21:18 et donc que ça devient une région extrêmement sensible sur ce plan militaire.
21:23 Malgré cela, Sylvie Matelli, vous en conviendrez, et vous qui avez l'économie pour spécialité,
21:29 il y a peut-être, au-delà de la conquête territoriale, un avantage pour les Indiens
21:37 de construire des relations économiques avec les voisins,
21:43 notamment avec les Chinois et peut-être demain avec la Russie,
21:46 quand effectivement le conflit, on l'espère, sera terminé et que les choses seront un peu à plein nid.
21:52 Oui, tout à fait. Il ne faut pas oublier qu'on navigue en fait entre deux logiciels.
21:58 Le logiciel 19e-20e siècle, où la conquête du territoire était une façon d'asseoir son pouvoir,
22:06 et puis le logiciel 21e siècle, mondialisation, où c'est plutôt la conquête économique et la puissance.
22:13 Donc je pense que Vladimir Poutine a fait une erreur en engageant une guerre contre l'Ukraine.
22:18 Il aurait mieux fait d'investir dans son économie et que les Indiens comme les Chinois ont bien conscience de ça.
22:24 Il n'empêche que les vieux logiciels cohabitent encore avec le nouveau logiciel
22:31 et qu'on a parfois du mal à savoir lequel va dominer et qu'on hésite toujours
22:36 entre les intérêts économiques et puis les intérêts plus stratégiques.
22:40 Voilà les conséquences qu'on peut avoir d'une simple mention d'un pays sur un carton d'invitation.
22:47 Vous vous rendez compte où est-ce qu'on est arrivé ?
22:49 Merci à vous Sylvie Matteli, géopolitique de l'économie 40 fiches illustrées pour comprendre le monde.
22:53 C'est aux éditions Erol, merci à vous Vaïjoo Naravan.
22:55 On lira attentivement vos articles dans Industrial Times, dans Le Monde Diplomatique et dans thewire.fr.

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