La chronique _ Niger, le dernier combat de la France en Afrique _

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La chronique : Niger, le dernier combat de la France en Afrique ?

Alain Foka Officiel
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23 sept.
2023
Le départ demandé des français du Niger marque t’il la fin de son hégémonie militaire et diplomatique en Afrique ? Paris a t’elle définitivement perdu la partie au Sahel ?
Maintenant que ses partenaires américains semblent avoir directement pris langue avec les différents régimes militaires du Mali, du Burkina Faso, de Guinée et du Niger, quel type de rapport Paris pourra t’il établir désormais avec ces pays qui étaient considérés comme ses zones d’influence exclusifs ?
Transcript
00:00 Je le dis avec beaucoup de force parce que si on l'oublie aujourd'hui et si on cède
00:07 aux arguments inadmissibles de cette alliance baroque des très tendus panafricains avec
00:18 les néo-impérialistes, on vit chez les fous.
00:23 Vous avez bien entendu, c'est le maître qui rappelle son élève à l'ordre, qui
00:28 lui rappelle qui est le patron, qui siffle à la fin de la récréation.
00:31 Une forme de montée politique du ressentiment qui se nourrit ici de l'anticolonialisme
00:40 réinventé ou fantasmé, là d'un anti-occidentalisme instrumentalisé, la dénonciation d'un double
00:48 standard.
00:49 J'écherche l'humilité évoquée à Grand Renfort Médiatique il y a quelques mois,
00:52 en février dernier, avant sa tournée africaine, mais là je ne trouve pas.
00:55 Peut-être vous, mais moi je ne la trouve pas.
00:57 On ne se refait pas.
00:59 Et c'est justement ce que les Africains en général, et les jeunes en particulier,
01:03 ont du mal à accepter.
01:04 Ils n'acceptent plus qu'on leur parle comme on le faisait avec leurs parents.
01:08 Ce qu'ils demandent, c'est juste du respect, moins d'arrogance.
01:12 Parce qu'en fait, il faudrait produire local, même quand ce sont des putschistes.
01:15 Avaient-ils besoin d'ajouter cette petite phrase qui trahit sa pensée, qui montre bien
01:20 ce qu'ils pensent de la volonté affichée des Africains de produire localement ? Au
01:24 moins c'est ce qu'ils en pensent.
01:26 Le produire local, il n'est pas fan, il n'y croit pas.
01:29 Sauf que l'avenir des Africains passe par là.
01:32 Même si la production locale des putschistes semble être ce qu'ils notent pour le moment.
01:36 Il y a des moments où on se pince pour s'assurer que ce qu'on a entendu est réel.
01:40 Et on voudrait dire que la démocratie est une idée qui est bonne pour l'Afrique ?
01:43 On ne fait pas de double standard ? C'est inadmissible.
01:48 On a un homme intègre, démocratiquement élu, courageux.
01:52 Courageux parce que pour la première fois dans un tel cadre, il ne démissionne pas au
01:56 péril de sa vie et de celle de sa famille.
01:58 Et on nous explique que la bonne politique aujourd'hui, ce serait de le lâcher.
02:02 A qui on veut faire croire que la volonté du président Macron de rester au Niger est
02:05 mue par la seule volonté de restaurer Mohamed Bazoum dans son fauteuil ? Que c'est d'abord
02:10 une histoire de fidélité ? Depuis quand les relations entre États seraient dictées
02:14 par des sentiments personnels ?
02:16 On doit être clair, cohérent.
02:17 Cohérent.
02:18 Sinon, qui nous écoutera ? Dans quel capitaine africain ?
02:22 On peut dire qu'on a une politique de partenariat avec un dirigeant.
02:25 Si quand ils subissent cela, on ne peut pas être en soutien.
02:27 On voudrait bombarder les Nigériens parce que Mohamed Bazoum est un allié fidèle.
02:31 Parce qu'on entretient avec lui d'excellentes relations.
02:34 La ficelle est trop grosse et donne une impression d'amateurisme.
02:38 Chacun sait que la volonté de rester sur place n'est pas motivée par un quelconque
02:42 sentiment d'amitié avec le président déchu.
02:44 Il ne faut pas mentir.
02:46 On ment quand on laisse croire aux gens qu'on veut aller au Niger pour réinstaller
02:55 Bazoum dans un fauteuil démocratique.
02:59 Mais c'est faux.
03:01 Ce n'est pas pour ça qu'on va.
03:03 Ce n'est pas pour ça qu'on va.
03:05 On est pistonnés par derrière.
03:07 On est pistonnés par derrière pour aller faire un coup pour l'uranium, le gaz, le
03:17 pétrole, etc.
03:18 Il ne faut pas mentir.
03:20 La France avait fait du Niger la base principale, je dirais même unique, de ses opérations
03:25 militaires au Sahel.
03:26 L'avenir des 1 500 militaires qui y sont déployés est aussi en mise en question.
03:31 La rhétorique anti-française prend de l'ampleur et tous les accords de coopération militaire
03:38 signés entre la France et le Niger depuis 1977 ont été dénoncés, ce qui revient
03:45 à exiger leur départ du pays.
03:47 Pour l'instant, la question n'est pas posée, mais elle pourrait l'être à court
03:51 moyen terme en dépit d'un début de pourrissement de la situation comme on peut le voir pour
03:55 l'instant.
03:56 Est-ce que cela justifie le fait que l'on veuille mettre un pays à sac pour y rester?
03:59 Est-ce que la diplomatie se résume désormais à des opérations militaires?
04:03 Dès qu'il y a une contrariété, on sort l'armée.
04:06 Non seulement aujourd'hui nous nous voyons évincés d'Afrique, mais nous perdons contact
04:11 avec le Sud qui devient un élément dominant du jeu mondial.
04:14 Nous avons choisi de nous occidentaliser depuis Nicolas Sarkozy, depuis 2007.
04:19 Nous n'avons pas poursuivi dans la voie qu'avait initié Jacques Chirac ou continué Jacques
04:26 Chirac, de liens extrêmement forts avec le Sud dans le cadre d'une politique arabe,
04:30 d'une politique africaine, d'une politique vis-à-vis de l'Amérique latine, d'une
04:33 politique généreuse en matière de taxes financières.
04:35 Tout ceci s'est arrêté par à la fois le retour dans l'OTAN et la France.
04:41 Au moment où les autres pays occidentaux se rendaient compte que la politique d'intervention
04:46 militaire était une erreur, nous nous avons continué.
04:49 Il n'y a aucune raison que la présence française en Afrique demain soit militarisée.
04:54 On ne peut pas être la seule puissance au monde qui n'aurait plus de politique en Afrique.
04:58 Ce serait grotesque, on ne peut pas passer d'un extrême à l'autre.
05:00 Mais il n'y a pas de raison que ce soit sous cette forme militaire.
05:03 Donc il faut tout remettre à plat.
05:04 Le pire c'est de se durcir, de camper sur sa position, d'être convaincu qu'on a raison.
05:09 Beaucoup des erreurs que nous avons commises dans cette région depuis 2013 sont dues à
05:15 l'incapacité à ouvrir les yeux et ouvrir les oreilles sur des réalités que nous comprenions
05:20 mal.
05:21 Autre chose qui m'a également interpellé dans le discours du président Macron aux
05:23 ambassadeurs, c'est cette petite phrase faussement sibylline, cette allusion qui contribue insidieusement
05:29 à nourrir la haine, la division entre les ethnies.
05:32 Une de ces réflexions a priori anodines qui empoisonnent les relations entre les peuples.
05:37 Technique utilisée depuis des décennies pour diviser.
05:39 C'est un coup d'Etat contre un président démocratiquement élu, venant d'une ethnie
05:47 minoritaire.
05:48 C'est grave ces propos.
05:49 La situation actuelle au Niger n'a rien à voir avec le régime d'une quelconque minorité
05:54 ethnique.
05:55 J'avais déjà entendu cette réflexion distillée de façon sournoise par le général Trinquant
05:59 sur un plateau de télévision.
06:00 Les Basous et les Issoufous sont des Arabes.
06:03 Là, ce ne sont pas des Arabes, ce sont des Africains.
06:06 Donc il y a ce sujet qu'on connaît très très mal.
06:09 Cette fois-ci, c'est le président Macron qui reprend cet argument.
06:12 C'est faux et pas responsable.
06:14 A moins que ce soit fait à dessein, la minorité arabe à laquelle appartient le président
06:20 Mohamed Basoum n'a guère été stigmatisée.
06:22 Le renversement de Mohamed Basoum, tout le monde sait dans quelles circonstances il s'est
06:27 fait.
06:28 On sait bien qu'il s'agit d'abord et essentiellement d'une affaire interne entre l'ancien président
06:33 et lui-même.
06:34 Une révolution de palais en somme.
06:36 Le 27 juillet, il y avait un conseil des ministres qui était prévu.
06:39 Et ce conseil des ministres devait se pencher sur la création de cette nouvelle société
06:44 baptisée Petro-Niger.
06:45 Alors c'est quoi Petro-Niger ? C'est une société qui devait s'occuper en gros de
06:49 l'exportation des nouveaux produits pétroliers du Niger.
06:51 Il y a des chiffres qui sont donnés.
06:53 Il y a eu des auditeurs externes qui ont travaillé sur la SONIDEP qui estiment que la fraude
06:57 coûtait environ 50 à 70 millions de dollars par an à l'état du Niger.
07:03 Ce qui est assez énorme pour le budget nigérien.
07:05 Donc effectivement, tout ça, on s'est rendu compte que la SONIDEP était effectivement,
07:10 en tout cas c'est ce qui nous a été dit, une caisse noire utilisée depuis 10 ans par
07:15 le PNDS pour alimenter un certain nombre, pour alimenter en fait le système de corruption,
07:21 n'ayons pas peur de le dire, qui va alimenter notamment les rangs de l'armée.
07:25 Donc c'est en fait cette SONIDEP qui était essentielle pour le parti au pouvoir.
07:29 Et quand Mohamed Bazoum arrive au pouvoir, lui il se rend compte, il a ses chiffres,
07:33 il a notamment les auditeurs du FMI qui l'alertent sur cette question-là.
07:36 Et donc il va vouloir un petit peu changer les choses.
07:38 Donc neutraliser la SONIDEP en créant Petro-Niger, voilà une décision qui avait tout pour déplaire
07:43 au général Tiani qui a pris le pouvoir.
07:45 Ainsi, vous venez de le dire, qu'au propre fils de Mahamadou Issoufou, l'ancien président,
07:49 qui a d'ailleurs mis du temps à afficher sa solidarité envers son dauphin renversé,
07:53 Mohamed Bazoum.
07:54 Ceci explique cela selon vous ?
07:56 - Sani Issoufou, le ministre du Pétrole, s'est longtemps opposé à Petro-Niger.
08:01 Ensuite il a essayé d'en modifier les statuts et donc d'arranger un petit peu les choses
08:06 pour garder le contrôle sur cette nouvelle société.
08:09 Ça n'a pas fonctionné, Bazoum est passé en force et ça a effectivement beaucoup déplu
08:13 au clan Issoufou à cette frange finalement du parti au pouvoir qui restait davantage
08:18 fidèle à l'ancien président qu'au nouveau président.
08:21 Est-ce que c'est cela qui a vraiment déclenché le coup d'État ?
08:24 On n'a pas la preuve d'un coup de fil entre Mahamadou Issoufou évidemment et le général
08:28 Tiani.
08:29 Mais on sait que le général Tiani et l'armée dans son ensemble étaient sans doute alimentés
08:33 par cette SONIDEP, par cette caisse noire.
08:36 Lorsque l'on sait ces détails du Pouche, un homme politique d'envergure, avec tout
08:40 le renseignement dont il dispose, doit éviter d'allumer un autre feu.
08:44 Ce n'est point une affaire ethnique.
08:45 On est trop souvent habitué à écouter ce type de raccourcis que nos intellectuels avalent
08:50 avec les arêtes.
08:51 Mais le plus surréaliste, le plus incompréhensible dans cette affaire de Pouche au Niger avec
08:56 le président Macron, c'est le refus de faire partie de son ambassadeur malgré le
09:00 fait que les nouvelles autorités nigériennes aient demandé son départ.
09:04 Sur ce coup, on a violé toutes les règles internationales.
09:07 Alors qu'on l'ont dit, en être les fervents défenseurs, on fait fi de toutes les règles.
09:12 Tout ceci ressemble par moments à une histoire de cours de récréation.
09:16 L'ambassadeur de France a acquis les nouvelles autorités dans 48 heures pour quitter le
09:19 territoire.
09:20 Qui refuse de s'exécuter parce que Paris dit ne pas reconnaître ces Pouchistes là.
09:24 C'est le bras de fer.
09:25 Elle repose sur le courage du président Bazoum, sur l'engagement de notre diplomate, de notre
09:30 ambassadeur sur le terrain, qui reste malgré les pressions, malgré tout et malgré toutes
09:33 les déclarations d'autorité illégitimes, grâce à l'engagement de nos forces de sécurité
09:38 intérieure et de nos militaires.
09:39 C'est dit.
09:40 Pas question que l'ambassadeur IT s'en aille.
09:42 Il reste.
09:43 Faire preuve de fermeté, faire preuve de conviction, c'est nécessaire.
09:46 Mais pas au détriment de la recherche de solutions.
09:49 Pas au détriment de l'imagination qu'il faut mettre en œuvre dans une ingénierie de crise.
09:54 C'est la crise de l'ambassade de France au Niger sous fond d'interventions étrangères
09:58 pour chasser les Pouchistes.
09:59 Notre ambassadeur, M. Stéphane Hité, qui est ambassadeur au Niger, il n'est pas ambassadeur
10:04 de Macron sur la plaque qu'il y a sur son bâtiment.
10:07 Il n'y a pas marqué « ambassadeur d'Emmanuel Macron auprès de Mohamed Bazoum ». Non, non, non.
10:11 Ça, il faut vraiment ne rien comprendre aux relations diplomatiques.
10:14 Il est ambassadeur de la République française auprès de la République du Niger.
10:19 Même demain, des autorités nigériennes qui réclament le départ des forces françaises
10:23 stationnées au Niger.
10:25 Des autorités désormais soutenues par les populations qui manifestent devant les bases.
10:30 Que disent les textes en la matière, en réalité ?
10:33 Que dit la Convention de Vienne dans ce cas précis ?
10:35 Le texte ratifié par tous les États au monde.
10:38 Article 9, alinéa 1.
10:40 L'État accréditaire peut, à tout moment et sans avoir à motiver sa décision,
10:46 informer l'État accréditant que le chef ou tout autre membre du personnel diplomatique,
10:52 le chef de la mission, est Persona non grata.
10:57 C'est exactement ce qui vient de se produire.
10:59 L'État accréditaire, le Niger, a prévenu l'État accréditant, la France,
11:05 que le chef de sa mission diplomatique, que l'ambassadeur, était Persona non grata,
11:09 et il doit donc partir. Et le Niger, l'État accréditaire, a fixé 48 heures pour que ce monsieur s'en aille.
11:19 Alors on poursuit l'article 9, alinéa 1.
11:23 L'État accréditant rappellera alors la personne en cause ou mettra fin à ses fonctions.
11:30 En diplomatie, comme dans le droit en général, mais dans le droit international encore plus, chaque mot compte.
11:41 Et ce qui compte, c'est les mots qu'ils ont utilisés. Là, c'est la version française qui fait foi.
11:47 Et il y a aussi les mots qui ne sont pas utilisés. Si on a écarté certains mots, c'est que justement,
11:51 on voulait écarter l'idée. Donc là, lorsqu'il est écrit « L'État accréditant rappellera alors la personne en cause »,
12:01 ça ne laisse aucun doute sur la marche à suivre. C'est-à-dire qu'à partir du moment où l'État accréditaire
12:07 a déclaré que l'ambassadeur était Persona non grata, l'État accréditant doit obéir, doit obtempérer,
12:16 il doit rappeler la personne en cause.
12:18 Voilà ce que disent les textes. Mais si comme c'est le cas, l'ambassadeur ou le diplomate refusent de partir,
12:23 que prévoit le texte ?
12:24 A l'inéa 2, si l'État accréditant refuse d'exécuter exactement ce qui se passe, la France, en tant qu'État accréditant,
12:34 refuse d'exécuter l'obligation qui lui incombe au terme du paragraphe 1 du PSA, c'est-à-dire l'obligation
12:40 de rappeler son ambassadeur, puisqu'il a été déclaré Persona non grata... Alors lisez bien ça.
12:46 « L'État accréditaire peut refuser... » Là, il y a marqué « peut ». Ça n'est pas obligatoire.
12:52 « ...mais peut refuser de reconnaître à la personne en cause la qualité de membre de la mission diplomatique ».
13:01 Donc chaque mot compte. Ça veut dire quoi ? Ça veut dire que dans le cas d'espèce, si l'État accréditant,
13:08 la France refuse de rappeler son ambassadeur alors qu'il a été déclaré Persona non grata,
13:15 l'État accréditaire, c'est-à-dire le Niger, peut considérer que l'ambassadeur ne fait plus partie de la mission diplomatique.
13:22 Il a le droit de le faire. C'est dans le droit international positif. Selon l'article 9 alinéa 2 de la Convention de Vienne
13:30 sur les relations diplomatiques du 18 avril 1961, le Niger peut désormais considérer que M. Stéphanité
13:38 n'est plus membre de la mission diplomatique. Ça veut donc dire quoi ? Ça veut donc dire que l'ambassadeur de France
13:44 perd toute son immunité diplomatique. Ça veut dire qu'il peut être arrêté maintenant à tout instant.
13:49 C'est ça que ça veut dire.
13:50 « Mais dans le cas d'espèce, le président Macron rappelle qu'il ne reconnaît pas les autorités illégitimes en place.
13:56 Et qu'elles n'ont pas pouvoir pour mettre un terme au mandat de l'ambassadeur ».
13:59 Un ambassadeur n'est pas accrédité auprès d'une personne. Il est accrédité auprès d'un État. C'est absolument fondamental.
14:06 C'est d'ailleurs une des rhétoriques habituelles de ce qui, normalement, était la diplomatie française pendant des siècles,
14:14 et en particulier sous Charles de Gaulle. La formule rituelle que l'on disait en France, c'est que la France reconnaissait
14:23 des États et ne reconnaissait pas des régimes.
14:27 Je voudrais simplement rappeler qu'en 1974, lorsque le président Kuntsché avait fait le coup d'État contre le président Djori,
14:40 la base française qui était au Niger avait été priée ilico presto de quitter le Niger.
14:50 Les autorités françaises de l'époque n'ont pas prétendu que Kuntsché était un pouvoir illégitime.
14:59 Les autorités françaises de l'époque se sont aussitôt exécutées. Je pense en droit, on parle d'usage.
15:11 Donc ce précédent peut être considéré comme un usage.
15:15 Au moment où la tension atteint son comble, ces derniers jours, où certains parlent de négociations entre Paris et Niamey
15:21 pour parler, sous fond de suspicion, des autorités nigériennes, qui doutent de la sincérité de la partie française,
15:26 de nombreuses voix s'élèvent pour dénoncer la présence même de l'armée française.
15:30 Le Niger appartient aux Nigériens. Alors, dans ce sens, nous nous demandons qu'une chose.
15:35 Nous demandons qu'une chose, que nous demandons pratiquement le retrait des Français de la base militaire française, qu'elle rentre chez elle.
15:41 Ils ont des avions de chasse, des chars, tout le monde a vu les drones qu'ils ont, mais leurs drones ne voient pas les terroristes.
15:47 Donc on n'a pas vu à quoi ça sert de venir rester dans notre pays.
15:51 On est aussi libre de chercher des alliés qui sont fiables, qui traitent égal, égal avec notre pays.
15:57 La France ne peut pas traiter égal, égal avec notre pays parce que ça fait 60 et quelques temps qu'ils exploitent l'uranium dans notre pays.
16:04 Même hier, on a dormi dans les coupures.
16:06 Eux, chez eux, là-bas, ils ne connaissent pas la coupure.
16:09 Face à l'attitude désinvolte et à la réaction de la France relativement à la situation interne qui prévaut dans notre pays,
16:17 le Conseil national pour la sauvegarde de la patrie décide de dénoncer les accords de coopération dans le domaine de la sécurité et de la défense avec cet État.
16:28 En outre, il y a à se poser des questions sur la validité réelle de ces accords.
16:35 Parce que l'article 169 de la Constitution du Niger, en tout cas à l'époque où ces accords ont été signés, cette Constitution était encore valable.
16:48 Cette Constitution disait de manière très claire que les accords de défense, pour être valables, doivent faire l'objet d'une loi de ratification par l'Assemblée nationale.
17:00 Or, ces accords n'ont jamais été soumis à ratification au niveau de l'Assemblée nationale.
17:11 Dès lors, on a le droit de se poser la question de savoir si ces accords sont légitimes.
17:18 C'est un accord entre un individu et un gouvernement étranger.
17:25 Désormais, c'est tout ce qui exige le départ pur et simple de l'armée française du Niger.
17:30 Même ceux considérés comme modérés ne s'encombrent plus de politesse,
17:34 de sorte de leur réserve pour réclamer le départ des troupes basées au Niger.
17:38 Excusez-moi l'impolitesse de dire à la France de foutre la paix aux Africains.
17:43 Nous sommes assez adultes pour pouvoir nous autogérer.
17:48 Quand la France, certains pays sont venus pour la colonisation, ils ont trouvé des empires établis, même du côté de Rwanda.
17:55 Il y avait une hiérarchisation qui faisait que les Occidentaux étaient étonnés
18:00 de voir un ordre politique et économique exister, par exemple, dans les royautés du Rwanda ou du Royaume-Congo.
18:07 Nous n'étions pas venus de notre propre chef, nous n'étions pas venus parce que nous aurions des intérêts,
18:12 nous étions venus parce que nous avions été sollicités, appelés même,
18:16 avec une alerte qui était prononcée bien plus loin que le Mali.
18:21 La France est intervenue dès 2013 parce que des États nous ont demandé d'intervenir,
18:25 parce qu'ils étaient en train d'être simplement coupés en deux.
18:30 Si la France n'était pas intervenue, si nos militaires n'étaient pas tombés au champ d'honneur en Afrique,
18:36 si Serval puis Barkhane n'avaient pas été décidés, nous ne parlerions pas aujourd'hui ni de Mali, ni de Burkina Faso, ni de Niger.
18:43 Ces États n'existeraient plus aujourd'hui dans leurs limites territoriales.
18:47 Je peux vous le dire avec certitude.
18:49 Nous sommes allés aider des pays amis et partenaires à défendre leur sol et à lutter contre le terrorisme chez eux.
18:57 C'est un reproche qu'il faut nous faire ?
18:59 C'est mal d'avoir fait ça ?
19:03 De grâce, non.
19:04 C'est vrai, la France est venue à la demande du Mali.
19:08 C'est vrai qu'elle a stoppé l'avancée des djihadistes qui menaçaient de couper le pays en deux et d'y installer leurs lois.
19:14 Personne ne le lui conteste.
19:16 Mais on n'est quand même pas tous frappés d'amnésie partielle.
19:19 Cet argument qui veut que Paris ait sauvé ses pays des barbares est un peu biaisé, voire pas très objectif.
19:24 Les barbares, les terroristes qui menaçaient de diviser, de faire disparaître ces États, qui les a fabriqués ?
19:30 Qui les a hardis ? Qui les a armés ?
19:32 Les auteurs de ces propos ont-ils oublié qu'ils sont à l'origine du chaos ambiant au Sahel avec leurs foireuses interventions en Libye ?
19:39 La Libye, on n'a pas respecté la souveraineté d'un peuple et ça, c'est une erreur.
19:43 D'accord, merci d'avoir reconnu ça.
19:44 Et si vous reconnaissez ça, vous allez voir que ce qui se passe au Sahel n'est que les conséquences de cette intervention.
19:51 Donc vous êtes au Sahel pour corriger l'erreur que vous avez commise en Libye.
19:56 Et en corrigeant ces erreurs, vous êtes en train de commettre d'autres erreurs.
19:59 Monsieur le Président, je vous rappelle que l'intervention militaire étrangère n'a jamais réglé un problème.
20:05 Arrêtez de dire que nous sommes là pour vous aider.
20:07 Non, vous n'êtes pas là pour nous aider.
20:09 Ce n'est donc que justice si la France et avec elle ses alliés sont venus essayer d'éteindre le feu qu'ils ont allumé.
20:15 Cette propension à rappeler qu'ils ont sauvé le Mali a plutôt tendance à énerver de nombreux Africains qui dénoncent cette mémoire sélective.
20:23 L'histoire se souvient que le développement du terrorisme violent est la conséquence directe de l'intervention occidentale en Libye
20:30 et que l'Europe est plus perçue comme le pompier pyromane que comme le sauveur.
20:35 Ça c'est d'un.
20:36 De deux, il est devenu ainsi de coutume de rappeler le sang versé par les soldats français pour défendre l'intégrité du territoire malien.
20:43 S'il convient de saluer convenablement la mémoire de ces 52 soldats morts dans la campagne sahélienne contre les terroristes,
20:49 encore une fois il faut faire preuve d'un peu de mémoire et de correction.
20:53 En matière de sacrifice pour sauver une nation, les Africains ont largement donné à la France.
20:59 Ils étaient des dizaines de milliers à tomber pendant la première et la seconde guerre mondiale,
21:04 dans l'enfer du nord, à Verdun, en Provence, en Alsace, dans les différentes régions de l'hexagone.
21:09 Ceux-là n'étaient même pas des volontaires.
21:12 Après les avoir enrôlés de force, on les a conduits à l'abattoir.
21:16 Vous êtes obsédés par la guerre d'Ukraine, que faites-vous pour l'Éthiopie, que faites-vous pour le Soudan ?
21:20 Quelle est la leçon que nous tirons de l'Irak ?
21:21 Nous n'avons pas voulu pousser jusqu'au bout les inspections avec Saddam Hussein.
21:25 Saddam Hussein était un personnage odieux.
21:28 Nous avons récolté le chaos et le terrorisme.
21:31 Nous n'avons pas voulu, à un moment donné, pousser les feux avec la Libye de Gaddafi.
21:36 Nous avons récolté le chaos et la situation au Sahel.
21:38 Donc il faut retenir les leçons.
21:40 Il faut prendre en compte ces réticences, cette allergie à l'impérialisme occidental.
21:45 Mais voyez le monde depuis le Brésil, depuis le Moyen-Orient et depuis l'Afrique.
21:49 Il voit la séquence américaine en Irak, l'Afghanistan bien sûr, avec un Roland Ressant.
21:56 Il voit la Libye, il voit le Sahel, il voit l'Amérique en donneur de leçons.
22:02 J'ai été très frappé.
22:04 On remet sur la table, à juste titre, la question de la justice internationale.
22:08 Pour traduire un jour les crimes de guerre et les crimes contre l'humanité commis contre Vladimir Poutine.
22:13 Chaque fois que je me déplace dans le monde, on me dit "mais on n'a pas traduit George Bush et Tony Blair
22:18 devant la Cour pénale internationale, ni devant une juridiction spéciale.
22:22 Le deux poids deux mesures.
22:24 Vous êtes obsédé par la guerre d'Ukraine, que faites-vous pour l'Ethiopie, que faites-vous pour le Soudan,
22:28 que faites-vous pour les pays qui souffrent dans le monde ?"
22:30 Revient constamment.
22:32 Donc il faut, oui, regarder le monde, pas uniquement de notre point de vue,
22:36 mais aussi avec le regard des peuples du monde.
22:39 Comparaison n'est peut-être pas raison, mais il ne faut pas trop souvent rappeler aux Africains
22:42 les sacrifices consentis pour sauver le Mali, le Niger et le Burkina Faso.
22:47 La balance ne pèse pas forcément du côté de Paris,
22:50 qui s'est d'ailleurs dépêché de renvoyer chez eux les rescapés.
22:53 Et pire, d'abattre une centaine qui à Tiaroy, au Sénégal,
22:57 où on les avait réunis en attendant qu'ils rejoignent leur famille,
23:00 réclamaient simplement leur maigre solde.
23:02 S'il vous plaît, ne réveillons pas ce douloureux souvenir.
23:05 Et le trois.
23:06 Contrairement à la Seconde Guerre mondiale, où les Américains et les Alliés ont remporté une victoire au bout de quatre ans,
23:11 l'intervention française, bien que très coûteuse, n'a pas ramené la paix au Sahel.
23:15 Les terroristes n'ont pas cessé de gagner du terrain dans l'ensemble des territoires
23:19 où ces armées étaient pourtant présentes en grand nombre, et largement équipées.
23:23 Ce sont des relations qui sont encore marquées par l'empreinte néocoloniale.
23:26 On rejette l'idée de la France-Afrique, mais pour les Africains,
23:30 l'emblème même de la France-Afrique, c'est la présence militaire.
23:34 - Ça veut dire qu'il faut y renoncer ?
23:35 - Pardon ? - Il faut y renoncer.
23:36 Les 1 500 militaires au Niger doivent parler.
23:38 - Mais la présence militaire ne peut pas se faire sur ce mode-là, ce mode traditionnel,
23:43 c'est-à-dire le mode des interventions, le mode des bases.
23:47 Tout ceci est dépassé.
23:48 Donc il faut le faire dans le cadre de coopérations choisies,
23:52 dans le respect de la souveraineté de ces États.
23:54 Et nous avons pu apparaître dans les dernières années
23:56 comme ne respectant pas toujours cette souveraineté.
23:59 Et en plus, une intervention qui commence en 2013 et qui est toujours présente en 2023,
24:03 c'est absurde.
24:04 S'il y a un pays qui sait, de par son histoire, de par son engagement historique,
24:09 que ce n'est pas ce qu'il faut faire, c'est la France,
24:11 je vous rappelle qu'on a expliqué au monde dans la crise irakienne
24:15 que ce n'était pas la voie qu'il fallait choisir.
24:17 - D'abord, c'est un phénomène général.
24:19 Toute opération militaire sur un territoire étranger qui dure
24:23 est perçue à terme comme une invasion
24:27 et comme une volonté de s'implanter durablement sur le territoire du pays.
24:31 La deuxième raison, c'est que les objectifs n'ont pas été atteints,
24:35 puisque malgré la présence des forces françaises,
24:38 le terrorisme a continué à se développer
24:40 et la situation dans ces pays ne s'est pas améliorée,
24:43 au contraire, elle s'est considérablement dégradée.
24:46 Et parlons d'occupation, encore une fois l'histoire bégaye.
24:49 - Paris brisé, Paris martyrisé, mais Paris libéré,
24:57 libéré par lui-même, libéré par son peuple.
25:02 En 1945, lorsque les alliés américains aident ainsi la France
25:06 à se libérer du joug nazi,
25:07 va commencer une autre bataille plus sournoise, plus feutrée,
25:11 dont très peu de journaux vont parler.
25:13 Les Américains qui avaient dépensé beaucoup d'argent
25:15 et perdu beaucoup d'hommes, n'étaient pas prêts de repartir.
25:19 Ils souhaitaient se payer sur la bête
25:21 en installant une administration pour gérer la France.
25:24 Ils vont même frapper à la hâte une monnaie française.
25:27 - Pour De Gaulle, c'est l'insulte suprême,
25:29 parce que les attributs de la souveraineté depuis 20 siècles,
25:33 c'est de pouvoir battre monnaie.
25:35 Si quelqu'un bat monnaie à votre place,
25:37 vous lui êtes subordonnés, vous n'êtes plus rien.
25:39 - Comme le français le faisait dans les colonies,
25:42 ils voulaient installer leur régime à eux, avec leur frein à eux.
25:45 La quatrième république, inféodée politiquement
25:47 et économiquement aux États-Unis, bascule dans les guerres coloniales,
25:51 provoquant une grave crise politique au printemps 1958.
25:55 - Quand Cotti se tourne vers De Gaulle,
25:57 c'est qu'il n'y a plus aucune solution de rechange,
25:59 que les Américains ne veulent plus prêter d'argent à la quatrième,
26:02 qu'ils ont soufflé à bout de bras pendant 12 ans.
26:05 Et il ne voit plus que cette solution-là,
26:07 à la fois parce qu'elle peut créer un choc psychologique pour l'économie,
26:12 et aussi parce qu'il pense qu'il est le seul à avoir autorité sur l'armée
26:15 qui commence à se rebeller.
26:17 Mais ce qu'ignore De Gaulle,
26:19 c'est que les Américains sont à la manœuvre pour le faire élire.
26:22 Depuis l'ambassade,
26:23 Wels Stabler, un diplomate employé de la CIA,
26:27 achète les politiques français depuis des années.
26:29 Pour cette élection,
26:31 il met en place un stratagème avec Guy Mollet,
26:33 le patron de la SFIO, le parti socialiste,
26:36 pour faire investir De Gaulle président du Conseil,
26:38 le 2 juin 1958.
26:40 Eisenhower craint beaucoup un coup d'État communiste
26:44 et demande à la CIA d'aider au retour du pouvoir de De Gaulle.
26:49 Et comment la CIA va le faire, c'est tout à fait extraordinaire.
26:51 Et ça montre la porosité entre les intérêts américains
26:55 et la classe politique française,
26:57 en demandant à une partie du groupe SFIO, socialiste,
27:01 de voter l'investiture à De Gaulle.
27:03 Il faudrait la perspicacité, la détermination du général De Gaulle,
27:06 que je n'ai pas le temps de vous expliquer ici,
27:08 pour que les Américains acceptent de s'en aller.
27:11 Je prends cet exemple pour que ceux plus jeunes en Europe,
27:14 notamment en France,
27:15 ceux qui n'ont pas vécu ou connu cette histoire,
27:17 puissent mieux comprendre ce que ressentent les Africains
27:20 face à cette présence de l'armée française dans leur territoire.
27:24 Surtout que les résultats ne sont pas au rendez-vous.
27:26 Les plus défavorisés ne voient pas leurs sources améliorées.
27:29 Les classes moyennes sont très soucieuses de souveraineté
27:32 et donc condamnent les attitudes de la France.
27:35 Et les classes dirigeantes se servent de la France comme bouc émissaire.
27:38 Tout cela avec une jeunesse connectée.
27:40 Pourquoi c'est la faute de la France tout ça ?
27:42 Parce que d'abord, les promesses ou les attentes n'ont pas été satisfaites.
27:48 Depuis 2013, la lutte contre le terrorisme
27:53 n'a pas permis de redonner la pleine stabilité,
27:55 même si le président Macron a eu raison de rappeler
27:58 qu'en partie cette stabilité avait été maintenue.
28:00 Mais néanmoins, l'amélioration de ces sociétés
28:03 ne s'est pas fait sentir du côté des populations.
28:05 C'est l'histoire de quelqu'un qui arrive chez vous de force,
28:08 s'installe dans la maison, occupe les plus belles pièces.
28:12 Pendant des siècles, il mange les provisions,
28:14 les réserves de nourriture de vos enfants.
28:16 S'accapare l'essentiel de vous bien souvent
28:18 avec la complicité de vos fils,
28:20 mais très souvent également grâce à votre lâcheté.
28:23 Vous humiliez à chaque occasion.
28:25 Vous faites passer auprès de vos enfants
28:26 pour un démeré, un bon à rien.
28:28 Et de temps en temps, il vous offre généreusement
28:31 les miettes tombées de la table.
28:33 En se vantant à chaque fois de vous aider,
28:35 de vous éduquer, de vous apprendre la vie,
28:37 de faire de vous un homme.
28:38 Bref, c'est lui qui fait la loi chez vous,
28:40 qui vous dit ce qui est bien et pas bien.
28:43 Il est le maître, à l'effondrette, le bon Dieu tout simplement.
28:45 D'ailleurs, après avoir tué le vôtre de Dieu,
28:48 il vous a imposé le sien.
28:49 Et puis un jour, vos enfants qui ont grandi,
28:51 se sont décomplexés, qui par la force des choses,
28:53 par leur expérience de l'international,
28:55 n'acceptent plus ce mépris, cette condescendance,
28:57 cet esclavage, ce hold-up, cette exploitation,
29:00 décident de lui demander de partir.
29:02 C'est gentil de nous avoir fait ce que vous nous avez fait,
29:05 de nous avoir tant malmenés,
29:06 tant fouettés, tant humiliés.
29:08 On ne vous en tient pas pour autant rigueur.
29:10 Mais le moment est venu de vous quitter,
29:12 de partir de notre maison,
29:14 sans rancune ni rancœur.
29:16 Vous avez bien profité,
29:18 vous vous êtes bien gavé, maintenant il faut partir.
29:20 Et sans sourciller, sans gêne, sans honte,
29:22 il vous répond, pas question,
29:24 je n'ai pas l'intention de partir, je reste.
29:26 Et pourquoi ?
29:27 Parce que vous battez votre femme,
29:29 vous élevez mal vos enfants,
29:30 vous vous disputez trop souvent.
29:31 En plus, il y en a parmi vous
29:33 qui ne respectent pas les règles que j'ai dictées.
29:35 Les sacros saintes règles qui doivent régir votre maison.
29:38 La démocratie qui doit être votre bible.
29:40 D'ailleurs, il faut que vous sachiez
29:42 que je suis là pour votre bien.
29:44 Celui qui me demande de partir aujourd'hui,
29:46 même si c'est sa maison,
29:47 n'a pas le droit de m'imposer de m'en aller.
29:49 Ce n'est pas le chef de famille à qui j'ai donné le pouvoir.
29:52 Même si cela ne vous plaît pas, tant pis.
29:54 Nous avons la force et le droit international pour vous.
29:56 Si vous n'êtes pas content, c'est le même prix.
29:59 Même si mes arguments ne sont pas crédibles
30:01 et ne vous plaisent pas,
30:02 il va falloir faire avec.
30:04 Nous sommes là et nous ne comptons pas partir
30:06 pour laisser la place à quelqu'un d'autre.
30:09 Ah bon ?
30:10 Donc pour vous, on est fait pour être des larbins alors ?
30:13 Pour vous, si vous partiez,
30:14 il faut absolument que quelqu'un vous remplace.
30:16 Quel mépris !
30:17 Je le dis avec beaucoup de force parce que si on l'oublie aujourd'hui,
30:20 et si on cède aux arguments,
30:24 inadmissible,
30:26 de cette alliance baroque
30:29 des prétendus panafricains avec les néo-impérialistes,
30:33 et...
30:35 on vit chez les fous.
30:36 Quelle condescendance lorsque l'on écoute le discours d'un président
30:39 sur lequel beaucoup de jeunes Africains
30:41 avaient fondé leurs espoirs de libération.
30:43 Qu'est-ce qui n'a pas marché ?
30:45 À supposer que dans son esprit,
30:46 comme dans celui de ses prédécesseurs,
30:48 il voit les Africains comme des enfants à qui il faut tout apprendre.
30:51 Des êtres inférieurs, pauvres en esprit,
30:53 à qui il faut apporter son aide.
30:55 Je pense qu'il a conscience, qu'il sait que même pour un enfant,
30:58 le parent doit savoir le laisser apprendre tout seul à marcher.
31:02 Il doit pouvoir se lever, tomber, se casser une dent, un doigt, le nez,
31:06 pour mieux comprendre comment se débrouiller seul dans la vie.
31:09 Pour apprendre les vicissitudes de la vie tout simplement.
31:12 Pas besoin que le parent soit tout le temps derrière lui.
31:15 J'ai bien dit, à supposer même que dans son esprit,
31:17 il voit ainsi les Africains comme des enfants.
31:19 Or nous ne sommes pas des enfants.
31:21 Jamais le titre du livre d'Antoine Blaser n'essaie autant de justifier.
31:25 Il y a une très profonde méconnaissance aujourd'hui,
31:28 par un certain nombre des autorités,
31:31 des nouvelles réalités africaines.
31:33 Des nouvelles réalités des sociétés.
31:36 Ce sont des pays où la jeunesse est très importante.
31:40 Cette jeunesse s'informe sur des réseaux sociaux.
31:42 Nous n'avons pas forcément les moyens d'accéder à elle.
31:44 Nous fonctionnons très à l'ancienne.
31:47 La jeunesse africaine demande avec toute sa fougue,
31:49 avec toute son énergie, qu'on laisse faire son expérience.
31:53 Qu'on la laisse construire son modèle.
31:56 L'actuel n'a pas marché.
31:57 Pas besoin d'être un spécialiste pour le constater ou le mesurer.
32:00 Et la jeunesse ne veut plus de faux tuteurs, de faux amis qui la volent,
32:03 la spolient en affichant de faux sentiments d'amitié.
32:06 Elle a conscience que l'aide n'existe pas en vrai état.
32:09 C'est d'abord une question d'intérêt.
32:10 Et elle veut veiller sur ses intérêts.
32:12 C'est légitime, non ?
32:14 J'entends l'argument selon lequel ils vont se planter,
32:16 qu'ils risquent de tout perdre.
32:17 C'est possible.
32:19 Mais au fait,
32:20 qu'ont-ils à perdre lorsque l'on regarde l'état de tous ces pays africains ?
32:23 Qu'est-ce que ces jeunes qui jouent leur vie en bravant le désert,
32:27 ou en les réduisant à l'esclavage,
32:28 ou en traversant toujours au péril de leur vie la Méditerranée,
32:32 vers un hypothétique Eldorado où ils sont indésirables,
32:35 peuvent-ils espérer de ce modèle que les nantis semblent défendre ?
32:38 Que peut vraiment un corps espérer une jeunesse avec le système actuel ?
32:42 Le problème des Nigériens aujourd'hui,
32:44 sont des poutchistes qui les mettent en danger
32:46 parce qu'ils abandonnent la lutte contre le terrorisme,
32:48 parce qu'ils abandonnent une politique qui était bonne économiquement pour eux,
32:51 et qu'ils sont en train de perdre tous les financements internationaux
32:53 qui étaient en train de leur permettre de sortir de la pauvreté.
32:56 C'est ça la réalité.
32:57 Le Nigérien de Yantala ou de Katakouanyame,
32:59 d'Ardit, à Mouret, dans le nord du pays,
33:01 en entendant ça, doit se demander où est passé cet argent ?
33:04 Il est où ce co-développement ?
33:06 Cette richesse, cette pauvreté qui recule ?
33:08 Il doit se demander si l'on parle vraiment de son pays.
33:11 Moi je suis né après toutes les décolonisations.
33:14 Et on ne peut pas dire que le continent africain c'est formidable,
33:16 c'est un continent très jeune.
33:17 70% de ce continent est né après les décolonisations,
33:20 même plus que 70%.
33:22 Et continuer à avoir un dialogue complètement complexé par le postcolonialisme,
33:27 c'est une manipulation, il faut quand même être lucide.
33:29 Nous on ne doit pas tomber du côté de la facilité, des habitudes d'un postcolonialisme.
33:34 Qu'on a nourri après colonisation, il faut être lucide.
33:37 Mais avec lequel on a rompu.
33:39 Rompu, ça c'est pas sûr.
33:40 Mais bon, ce n'est pas parce que l'immense majorité des Africains
33:43 est née après la décolonisation
33:46 qu'ils ne subissent pas toujours les conséquences
33:48 de ce qui s'est passé avant leur naissance.
33:50 Elles continuent de les impacter durement.
33:53 Dans le cas de la France par exemple,
33:55 si le commerce extérieur en Afrique subsaharienne
33:57 ne représente qu'environ 2% de notre commerce extérieur,
34:01 les parts de marché, nous le savons tous,
34:03 sont concentrées dans les mains de quelques grands groupes
34:06 qui font des affaires avec un taux de profit indécent,
34:09 en complicité avec des élites extraverties et corrompues,
34:14 au détriment de la très grande majorité des Africains.
34:17 Il y a en Afrique un profond ressentiment vis-à-vis de la France,
34:23 une profonde suspicion,
34:26 qui est nourrie par un certain nombre d'éléments
34:29 et au premier chef, bien sûr,
34:31 la relation post-coloniale de ces pays africains avec la France.
34:37 Tout cela a été activé dans les dernières années
34:40 par la militarisation de notre politique,
34:43 depuis l'intervention française en Libye en 2011,
34:46 puis les interventions au Mali et au Sahel.
34:51 S'y ajoute par ailleurs le sentiment souvent d'un double discours,
34:54 on le voit sur la démocratie,
34:56 puisque le traitement réservé aux États n'est pas le même,
35:00 selon qu'on ait le Tchad ou qu'on ait le Mali ou la Guinée.
35:05 Et il y a par ailleurs du côté de l'Ukraine,
35:09 alors là, ça a été un choc pour beaucoup de pays africains
35:13 de constater à quel point il y avait deux points de mesure,
35:16 un intérêt très fort de l'Europe et de la France
35:18 pour ce qui se passait à l'Est
35:20 et un désintérêt relatif pour ce qui se passait au Soudan,
35:23 en Ethiopie et dans beaucoup d'autres régions de l'Afrique.
35:27 J'ai souvent dénoncé des exemples caricaturaux
35:30 comme la surfacturation par des groupes français
35:32 du train urbain d'Abidjan
35:34 ou les profits accumulés par le groupe Bolloré
35:36 dans les ports ouest africains
35:38 dont il est parti sans égard pour les pays concernés.
35:41 Il n'y a aucune raison que la présence française en Afrique demain
35:45 soit militarisée.
35:46 On ne peut pas être la seule puissance au monde
35:48 qui n'aurait plus de politique en Afrique.
35:50 Ce serait grotesque, on ne peut pas passer d'un extrême à l'autre.
35:53 Mais il n'y a pas de raison que ce soit sous cette forme militaire.
35:55 Donc il faut tout remettre à plat.
35:56 Ce n'est donc pas un complexe que développe la jeunesse,
35:59 mais une révolte face à une situation inacceptable
36:02 pour une jeunesse mondialisée.
36:03 Nous devons avoir une diplomatie assez simple,
36:06 c'est pour suivre nos intérêts.
36:08 Et partir de là, notre sécurité, nos intérêts économiques,
36:12 technologiques, diplomatiques, culturels.
36:15 C'est de le faire en défendant aussi nos principes,
36:20 et c'est ce qui, je crois, nous différencie parfois d'autres pays,
36:23 une certaine aspiration à l'universel,
36:25 et donc à cet égard la défense des droits de l'homme,
36:27 de la dignité humaine,
36:28 le partenariat avec les acteurs humanitaires,
36:32 la défense du droit international
36:35 et le respect de la souveraineté des peuples.
36:37 J'entends souvent dire,
36:39 ici l'Afrique est notre avenir,
36:41 mais elle est d'abord l'avenir des Africains,
36:44 et c'est par là que tout doit commencer.
36:47 Et qu'avec eux, partenaires enfin respectés,
36:49 nous devrons surmonter les défis communs
36:51 en matière sociale, climatique et environnementale.
36:54 Je ne suis pas pour qu'on passe sous la table,
36:56 même si je reconnais les erreurs,
36:58 les accumulations d'erreurs, les maladresses, oui.
37:00 Mais on ne va pas disparaître, on ne va pas raser les murs.
37:03 Ce n'est pas parce qu'il y a eu des erreurs en Afrique
37:05 qu'on n'aura plus du tout de politique en Afrique.
37:06 Ce que semblent totalement perdre de vue
37:08 les grandes nations occidentales,
37:11 c'est le fait que la jeunesse africaine,
37:12 bien que privée de grands moyens
37:14 et d'infrastructures importantes,
37:16 est ouverte sur le monde.
37:18 Elle vit le monde et ses soubresauts en temps réel.
37:20 Elle voit combien le monde occidental devient obsolète.
37:23 Les pays du Golfe aujourd'hui nous regardent,
37:25 disent "vous êtes là avec vos principes,
37:28 vos droits, vos règles, vos critères du FMI.
37:31 Vous êtes qui ?
37:33 Un vieux continent déclinant démographiquement,
37:36 dépendant énergétiquement, incertain technologiquement.
37:41 Nous allons travailler avec l'Inde, la Chine,
37:43 moins exigeante que vous,
37:45 et beaucoup de pays pauvres en développement
37:46 qui préfèrent notre agenda.
37:47 On les en met moins avec nos critères.
37:50 C'est ce qui se passe dans beaucoup de pays
37:53 où vous représentez la France.
37:55 Quand on n'arrive pas à trouver de l'argent au FMI,
37:56 on va les chercher maintenant dans des puissances
37:58 du Golfe ou d'ailleurs,
38:00 ou chez certaines autres poches profondes
38:02 qui proposent un autre agenda
38:03 avec d'autres critères, d'autres valeurs.
38:06 Je ne surestime pas ce qu'a signifié le sommet de BRICS+.
38:10 Enfin, il a dit quelque chose d'un appétit,
38:12 d'un format alternatif.
38:15 Je n'ai pas vu des gens frapper à la porte du G20.
38:17 Cette perception de l'Europe est largement partagée
38:20 par la jeunesse africaine qui demande simplement
38:22 à traiter avec d'autres partenaires.
38:25 Impossible de les conditionner avec des nouveaux médias
38:28 qu'ils définissent déjà comme des outils de propagande
38:31 au même titre que les autres qui arrosent leur continent.
38:33 Vous ne comblerez pas ce fossé
38:36 en lançant un média de propagande
38:37 pour vanter les mérites de la politique française.
38:41 N'en déplaise à ceux qui au gouvernement
38:43 et parmi nos collègues,
38:44 évoquent abondamment la lutte d'influence pour tout expliquer.
38:48 Le fait que l'Afrique aujourd'hui est mondialisée,
38:49 il y a une ruée vers l'Afrique.
38:51 La position de la France, évidemment,
38:53 est aujourd'hui beaucoup plus relative.
38:54 Clairement, elle doit prendre conscience
38:57 qu'elle doit traiter différemment,
38:59 qu'elle n'est plus en position de monopole.
39:01 Surtout que ses alliés traditionnels
39:03 qui l'ont laissé agir sur ce terrain d'Afrique francophone
39:05 en ont pris conscience
39:06 et semblent désormais disposés à prendre la main.
39:09 Il faut accepter qu'ils aient une pluralité
39:13 de partenaires stratégiques.
39:15 A défaut, nous précipiterons une évolution
39:18 que nous dénoncerons peut-être avec véhémence.
39:21 Les Américains laissent leurs alliés français
39:24 prendre les coups.
39:25 Ils jouent leur propre partition,
39:27 celle que j'appelle la partition des faux amis.
39:29 Ce que nous vivons aujourd'hui
39:32 est plus qu'un test de l'ordre post-Cold War.
39:36 C'est le fin de l'ordre.
39:37 Ce qui nous a amenés à ce moment
39:39 sera le sujet de studies et de débats
39:41 pour les décennies à venir.
39:44 Mais il y a une reconnaissance élevée
39:46 que plusieurs des assumptions fondamentales
39:47 qui ont formé notre approche à l'ère post-Cold War
39:49 ne se restent plus.
39:51 Et Pékin et Moscou travaillent ensemble
39:53 pour faire le monde en sécurité pour l'autocratie
39:55 grâce à leur partenariat sans limites.
39:58 Et comme cette compétition s'amplifie,
40:01 de nombreux pays s'en font les comptes.
40:02 Les BRICS constituent aujourd'hui
40:05 un acteur considérable dans le jeu international.
40:08 Il faut donc prendre axe de cette situation nouvelle.
40:11 Ne pas imaginer que parce qu'ils seraient divisés,
40:13 ils vont compter moins.
40:15 Ils sont au moins unis sur la volonté
40:17 de tenir à distance le monde occidental.
40:19 Mais dans le même temps,
40:21 la jeunesse africaine doit se poser la question
40:22 de savoir pourquoi toute la planète
40:25 se rue sur son continent
40:26 et pendant ce temps, sa population continue de souffrir,
40:29 de tirer le diable par la queue.
40:31 Beaucoup préfèrent fuir vers le nord
40:33 au péril de leur vie.
40:34 Le problème ne peut pas s'expliquer
40:36 que par la faute de l'autre.
40:37 Si l'autre parvient à nous déstabiliser,
40:39 c'est bien qu'il y ait des fragilités à l'intérieur.
40:42 On ne peut pas être aussi bien doté
40:43 du point de vue du sol et du sous-sol,
40:45 du point de vue démographique,
40:47 du point de vue ressources humaines
40:49 et être le dernier de la classe sans raison profonde.
40:51 La critique et la dénonciation sont importantes.
40:54 Elles permettent de situer les responsabilités
40:56 et d'essayer de solder le lourd passif.
40:59 Mais le rejet ne saurait à lui seul constituer un projet.
41:02 Le moment est venu de s'attaquer au mal,
41:04 de déterminer les causes racines,
41:06 de dresser un réel diagnostic
41:08 pour élaborer un vrai projet cohérent,
41:10 solide et efficace,
41:12 afin de remonter la pente
41:13 et retrouver la place de choix
41:14 qui est normalement celle de l'Afrique,
41:17 le berceau de l'humanité.
41:18 Cela passe par une vraie réflexion,
41:20 une démarche méthodique et collective.
41:22 C'est le sens de Mansa,
41:23 qu'en fait un groupe de personnes d'origine
41:25 et de spécialités diverses,
41:26 nous avons mis sur pied.
41:28 Le travail de Mansa, qui touche tous les domaines,
41:30 la gouvernance, les institutions,
41:32 l'économie, la finance, les ressources naturelles,
41:35 l'agriculture, l'éducation,
41:37 les sciences et technologies, les valeurs,
41:39 les traditions, dure depuis plusieurs mois.
41:41 Le groupe Mansa commencera dans les prochaines semaines
41:44 à vous les proposer,
41:45 à les soumettre à votre analyse,
41:46 à votre réflexion,
41:48 afin qu'ensemble, on construise un projet qui nous ressemble,
41:51 qui tienne compte de notre identité,
41:53 de notre spécificité, de nos ambitions.
41:55 Nous avons besoin de définir nous-mêmes notre destination.
41:58 Ensemble, inventons la boussole.
42:00 Traçons notre voie.
42:02 Fixons le cap.
42:03 Sans complexe.
42:04 Au moment où le monde connaît une vraie mutation,
42:06 c'est la fenêtre idéale pour prendre le large.
42:09 Pour ne plus être comme ce cheval
42:10 tenu par une simple et légère chaise en plastique,
42:13 prenons conscience que les chaînes
42:15 qui nous retiennent sont plus dans nos têtes.
42:18 Il suffit d'y penser pour en être libéré.
42:20 Vous en avez désormais conscience.
42:22 C'est le moment.
42:23 Je voudrais vous remercier pour votre fidélité à ma chaîne YouTube
42:27 qui compte de plus en plus d'abonnés.
42:29 Mais également pour mes autres plateformes digitales
42:32 où vous êtes de plus en plus nombreux
42:34 malgré les faux comptes qui continuent de se multiplier.
42:38 Cette fois-ci, plus de réelles raisons de vous laisser avoir
42:40 puisque comme vous l'avez certainement remarqué
42:42 le long de cette chronique,
42:44 nous vous proposons une QR Code à scanner
42:46 pour être sûr d'être sur notre plateforme, la vraie.
42:49 Elle vous évite, du moins pour l'instant,
42:51 de continuer de subir des assauts de cybercriminels
42:54 qui usurpent mon identité à d'autres fins.
42:57 Je vous prie donc de scanner ce QR Code
42:59 si vous ne l'avez pas encore fait.
43:00 Il vous conduit directement à tous mes comptes
43:02 LinkedIn, Facebook, TikTok, Instagram et Twitter.
43:06 En le scannant, vous êtes cette fois-ci certain d'être sur les bons comptes.
43:10 C'est lui qui vous propose le narratif africain
43:12 sans complaisance mais sans condescendance.
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