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L'invité des Matins de France Culture.
Comprendre le monde c'est déjà le transformer(07h40 - 08h00 - 26 Septembre 2023)
Retrouvez tous les invités de Guillaume Erner sur www.franceculture.fr

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00:00 * Extrait de la vidéo *
00:06 Le Secrétaire Général à la Planification Écologique a rendu sa copie hier et le voici dans ce studio.
00:13 Bonjour Antoine Pellion.
00:15 Vous êtes Secrétaire Général à la Planification Écologique auprès de la Première Ministre
00:19 et comme tel, ce plan qui a été présenté hier, vous en êtes le promoteur.
00:25 La presse d'aujourd'hui est disons mesurée sur ce plan.
00:28 Elle n'est pas enthousiaste. Votre réaction ?
00:30 Bonjour Guillaume.
00:32 Ce plan est complet, c'est-à-dire qu'à la fois il attaque le sujet du changement climatique,
00:36 c'est ça vraiment le sujet central sur lequel Emmanuel Macron s'est prononcé,
00:39 mais aussi les sujets de biodiversité et les sujets aussi de nos ressources naturelles.
00:43 Le Président dit la fin de l'abondance, les ressources sont limitées, il faut trouver des solutions.
00:47 Alors on cherche à avoir un plan qui est à la fois radical, je le dis,
00:50 il faut faire en termes de baisse des émissions plus en 8 ans qu'on a fait dans les 32 dernières années.
00:54 Et là on a apporté les solutions concrètes pour y parvenir.
00:57 Et ces solutions, on a trouvé le chemin pour qu'elles ne soient pas brutales.
01:02 Alors j'entends du coup les réactions, mais je pense qu'on a ce chemin qui permet d'atteindre le résultat,
01:06 et on est prêt à le défendre.
01:07 Alors c'est un choix très électrique, c'est-à-dire que si on reprend les principales mesures,
01:12 pompe à chaleur, voiture électrique, on a un peu l'impression, nous Français, d'être trambalés.
01:17 On nous a dit qu'il fallait abandonner les chaudières au fuel pour avoir des chaudières au gaz,
01:22 puis que le gaz devait être abandonné.
01:24 Alors il y a eu un rétro-pédalage. Mais êtes-vous sûrs, je veux dire collectivement,
01:28 que l'électricité est la bonne solution Antoine Pédion ?
01:31 Alors la première solution c'est la sobriété.
01:33 Emmanuel Macron l'a dit hier, a mentionné le mot de sobriété,
01:36 et ça fait partie des solutions qu'on met sur la table.
01:38 Et puis il y a bien sûr l'électricité, mais pas que.
01:40 Je voudrais peut-être prendre un pas de recul parce que ce qu'on met sur la table,
01:44 c'est avant tout un plan qui va mobiliser d'abord les entreprises.
01:47 50% des baisses qu'on demande et sur lesquelles on a documenté,
01:51 c'est les entreprises qui sont à l'action pour le faire.
01:53 25% c'est l'ensemble des collectivités qui gèrent les déchets,
01:56 font les transports en commun.
01:58 Et puis le dernier quart c'est les ménages.
02:00 C'est ça dont vous parlez, sur lequel il y a une transformation à faire du quotidien.
02:03 Oui d'ailleurs le chiffre est très impressionnant,
02:05 si on prend les émissions des sites industriels les plus polluants,
02:09 c'est de très loin ce qui est le plus émetteur de gaz à effet de serre en France.
02:15 Absolument.
02:16 Donc là on a, vous savez le président de la République a engagé la décarbonation,
02:19 donc comment on sort des énergies fossiles,
02:21 pour les 50 plus gros sites industriels.
02:23 Et ça, ça fait une grosse partie de l'effort.
02:25 Je pense que c'est vraiment important quand on demande aux Français,
02:27 on parle de voitures électriques, on parle de pompes à chaleur,
02:29 il faut avoir en tête que dans le même temps,
02:31 ce qu'on demande à les grandes entreprises, ArcelorMittal par exemple,
02:34 c'est de faire les trois quarts du job finalement,
02:36 la moitié des entreprises et puis un quart les pouvoirs publics et les collectivités.
02:41 Mais alors comparativement, si on prend d'un côté les émissions de ces sites industriels polluants,
02:46 de l'autre, par exemple le passage au vélo, même si on peut aimer beaucoup le vélo,
02:52 Antoine Péllion, on se dit que le vélo finalement ça rapporte des miettes,
02:56 alors qu'au quotidien, beaucoup d'automobilistes sont embarrassés par les pistes cyclables.
03:02 Le jeu en vaut-il la chandelle ?
03:04 Alors moi j'en suis convaincu, oui.
03:06 Ce que montre le travail que l'on a mis sur la table, c'est qu'il n'y a pas de solution magique.
03:09 On a besoin de mobiliser à la fois tous les leviers,
03:11 vous parlez du vélo, les transports en commun, la voiture,
03:13 la rénovation de nos logements aussi, mais aussi en matière d'agriculture, de protection de nos forêts.
03:17 Il faut tout mobiliser en même temps.
03:19 Et ça veut dire aussi qu'on demande à tous les acteurs de se mobiliser,
03:22 encore une fois, pas uniquement que les ménages, pour pouvoir y arriver.
03:25 Mais oui, il faut faire du vélo, il faut faire des transports en commun,
03:27 et oui aussi, la voiture gardera une place, notamment dans toutes les zones périurbaines,
03:31 sur lesquelles elle est indispensable.
03:33 Sur les transports en commun, l'une des annonces les plus commentées est celle de ces RER,
03:39 qui seraient donc programmées en France,
03:41 parce qu'il l'était déjà apparemment.
03:43 Est-ce qu'il n'y a pas une petite astuce ?
03:45 Est-ce que vous n'avez pas repackagé, comme on dit,
03:47 des choses qui étaient déjà en réalité prévues ?
03:50 Antoine Pellion ?
03:51 Je pense que le premier point important, c'est qu'on s'appuie sur un bilan.
03:53 Donc oui, forcément, il y a des actions qu'on avait engagées, qu'on accélère.
03:56 Ce bilan est important, parce qu'on a quand même des émissions
03:59 dont on a doublé le rythme de baisse au cours du dernier quinquennat.
04:02 Et au début de l'année 2023, on a encore accéléré,
04:05 puisque vous savez, le président l'a dit hier,
04:07 avant Emmanuel Macron, les émissions baissaient de 1% par an à peu près.
04:11 On a doublé, 2%.
04:13 Et là, en début 2023, on était quasiment à une baisse de 5% de nos émissions.
04:16 Et donc ça, c'est du concret.
04:18 On y arrive, on accélère.
04:19 Ça s'appuie sur des choses qu'on a déjà engagées,
04:21 et puis des actions nouvelles.
04:22 Bon, il faut parler un peu de ces pompes à chaleur,
04:24 parce que, maintenant, c'est la formule magique.
04:27 Depuis quand la pompe à chaleur est-elle une formule magique ?
04:30 On va être dépendant maintenant de l'électricité.
04:33 Avant, on était dépendant du gaz russe.
04:35 Y a-t-il une certitude que c'est le bon choix ?
04:39 Alors, pour le chauffage, ça fait clairement partie de la solution.
04:42 Ça, c'est clair.
04:43 Emmanuel Macron l'a dit, il a dit une écologie aussi de souveraineté,
04:45 une écologie industrielle.
04:46 Donc, c'est le bon choix aussi, parce qu'on arrivera à les produire en France.
04:49 Et donc là, le président...
04:50 On arrivera à ça au futur, pour l'instant.
04:52 Pour l'instant, on en produit déjà un peu plus de 300 000 par an.
04:54 Et donc, on va monter jusqu'à 1 million de pompes à chaleur produites par an.
04:57 On a un savoir-faire français.
04:58 On avait un savoir-faire de la chaudière.
05:00 On a déjà un début de savoir-faire sur les pompes à chaleur.
05:02 On va le renforcer, et ça, c'est important.
05:04 Bon, mais le choix de l'électrique, Antoine Pellion,
05:06 le fait que la pompe à chaleur va nous rendre tributaire de l'électrique,
05:10 et ça, ça nous renvoie quelques années en arrière,
05:13 où on nous expliquait qu'il fallait se chauffer à l'électrique.
05:15 Puis, les tarifs de l'électricité ont considérablement augmenté.
05:18 Et ceux qui se chauffaient à l'électrique ont été pris au piège.
05:21 Alors, je tiens quand même à souligner un clé.
05:23 Les Français ont l'électricité la moins chère d'Europe, aujourd'hui.
05:25 Et ça, c'est toujours vrai.
05:26 Donc, ça, c'est quand même un point important.
05:27 Toujours vrai, mais ce qu'on aimerait savoir, c'est si ça sera encore vrai.
05:30 Alors, ça, je vous renvoie aussi vers les travaux qui ont été publiés la semaine dernière
05:33 par le RTE, le Réseau de Transport d'Électricité,
05:35 qui, à la fois, nous dit, et donc qui est notre guide,
05:38 sur la façon dont on va pouvoir augmenter la production en France
05:41 et dont on va pouvoir aussi maîtriser le prix.
05:44 Ce que dit RTE, c'est qu'il dit, en accélérant et les énergies renouvelables et le nucléaire,
05:48 qui rentrera en service un peu plus tard,
05:50 on arrive à être sécurisé en termes d'approvisionnement,
05:53 donc ne pas dépendre des autres pays.
05:55 Et puis, par ailleurs, il nous dit aussi que l'évolution des coûts,
05:58 elle est plutôt positive pour les Français.
06:00 On arrivera à avoir toujours une électricité compétitive par rapport aux autres.
06:03 Par contre, il faut que les prix que payent les Français soient proches des coûts.
06:07 Et c'est ce qu'Emmanuel Macron a annoncé hier en termes de prise de contrôle du prix de l'électricité.
06:11 Bon, mais pour que ça fonctionne, il faut, par exemple, des projets très ambitieux.
06:15 Très ambitieux, ça veut dire qu'on peut douter de leur réalisation,
06:18 puisque c'est toujours la même chose.
06:20 Par exemple, ces 50 projets d'éoliennes en mer,
06:25 comment peut-on être certain qu'ils vont voir le jour ?
06:28 Alors ce plan, il y a une grande série d'actions.
06:31 Donc cette question-là, vous pourrez la poser sur plein d'autres points.
06:33 Donc on va le piloter, ce plan.
06:34 On est au début de l'histoire de cette planification.
06:36 Sur les éoliennes, on lance un débat public dès le mois de novembre
06:39 pour pouvoir identifier les nouvelles zones sur lesquelles on va implanter ces parcs.
06:43 Vous savez qu'il y en a déjà les premiers rentrent en service.
06:45 Le parc au large de Saint-Nazaire est rentré en service.
06:47 D'autres sont en construction.
06:49 Il y a une série d'appels d'offres qui ont été lancés.
06:51 Et là, on identifie les zones avec un débat public qui commence en novembre
06:54 pour arriver à ces 50 parcs.
06:56 Et puis, toujours, si on reste dans l'électrique,
06:58 il y a la voiture électrique.
07:00 Une voiture électrique s'ouvrira, c'est reproduite en France,
07:03 avec la possibilité d'avoir un leasing à 100 euros
07:07 pour permettre à tous de bénéficier d'une voiture électrique.
07:11 On ne voit pas quel modèle de voiture électrique pourrait être produit en France
07:16 et acheté pour 100 euros par mois en leasing.
07:19 Antoine Pellion, éclairez-nous.
07:21 Ces voitures, on cherche à ce qu'elles soient vertueuses d'un point de vue environnemental.
07:26 On a mis sur la table, il y a deux semaines,
07:28 les critères qui nous permettent de sélectionner les voitures.
07:31 Ça va conduire à sélectionner les voitures qui sont plutôt produites en Europe et en France.
07:36 Mais elles n'existent pas encore.
07:37 Il y en a un certain nombre qui sont produites.
07:38 Lesquelles ?
07:39 À 100 euros par mois, c'est ça que je veux dire.
07:42 Le 100 euros par mois, ça veut dire que l'État va intervenir pour pouvoir aider
07:46 et mettre une contribution pour que le prix soit rabaissé à 100 euros.
07:49 J'entends bien.
07:50 Aujourd'hui, elles n'existent pas.
07:51 C'est normal, mais elles vont exister.
07:52 Mais quand ?
07:53 Parce que, par exemple, la Cassiane ne rentre pas dans ce cadre-là
07:58 parce qu'elle n'est pas produite en France.
07:59 Et c'est la raison pour laquelle c'est une voiture peu chère.
08:02 Comment réduire ces coûts ?
08:04 Puisque c'est ça, en fait, le problème de cette équation, Antoine Pellion.
08:07 Il y a un certain nombre de chaînes de production qui commencent.
08:09 En 2024, il y aura des voitures qui seront produites en France et en Europe, électriques,
08:13 qui sont plutôt des petites voitures et sur lesquelles, avec l'aide de l'État complémentaire,
08:18 on va atteindre 100 euros.
08:19 Et donc là, très concrètement, fin du mois de novembre, ce qu'a dit le président hier,
08:23 il y aura une plateforme sur laquelle les Français pourront se connecter
08:26 et choisir ce modèle-là qui leur sera livré ensuite en 2024.
08:29 Et puis ensuite, il y a la question des puits de carbone.
08:32 Alors là, c'est cette fois-ci pour diminuer la pollution, l'émission des gaz à effet de serre et les piéger.
08:39 Et là, qu'est-ce que vous avez prévu, Antoine Pellion ?
08:41 Les puits de carbone, quand on met des mots derrière tout ça, c'est concrètement nos sols,
08:45 nos sols agricoles, notamment nos forêts.
08:47 Et donc là, ce qui nous arrive, c'est que le changement climatique d'ores et déjà agit.
08:51 En 10 ans, les forêts, du coup, se sont dégradées.
08:54 La forêt pousse moins vite et donc stocke moins de carbone.
08:56 Donc là, les solutions, elles sont doubles.
08:58 A la fois, c'est mieux gérer la forêt.
08:59 C'est aussi replanter des arbres avec des essences qui sont plus résistantes au changement climatique.
09:03 Et c'est aussi une transformation agricole, puisque les sols agricoles stockent du carbone.
09:07 Et donc là, c'est la façon de changer les pratiques.
09:09 Mettre des couverts végétaux, par exemple, ou du coup, d'éviter de trop labourer.
09:13 Pourquoi ne pas avoir choisi d'en faire plus ?
09:16 Pourquoi ne pas avoir choisi d'aller plus rapidement ?
09:19 Par exemple, pour l'habitat, les choses demeurent encore timides.
09:24 Est-ce qu'il ne serait pas possible d'aller de manière plus audacieuse vers des mesures
09:30 qui permettraient de réduire plus encore ces gaz à effet de serre ?
09:34 Je conteste le manque d'audace.
09:35 Encore une fois, en 8 ans, on va faire autant qu'on a fait en 32 ans en termes de baisse d'émission.
09:39 C'est le faire à moitié plein ou à moitié vide.
09:41 C'est le résultat qui compte.
09:42 Et clairement, en matière de rénovation énergétique, par exemple, deux choses.
09:46 On a dit qu'on allait faire des rénovations globales.
09:48 Et donc, du coup, 200 000.
09:50 Ça, c'est plus qu'une multiplication par deux en un an.
09:52 Donc du coup, ça, c'est massif.
09:53 Et pour ça, on y met des moyens, puisque la première ministre a indiqué qu'on allait renforcer les crédits jusqu'à 5 milliards d'euros pour la rénovation énergétique.
10:00 Et concrètement, cet argent, il sert à quoi ?
10:01 Il sert à diminuer le reste à charge pour les ménages les plus modestes, pour les aider à faire des travaux, jusqu'à 80% de prise en charge.
10:08 Et ça, c'est quand même très notable.
10:09 Même plus généralement, je vous renvoie sur ce qu'a dit Jean Pisani-Ferry hier soir.
10:14 Il a dit que le gouvernement a mis sur la table non seulement un plan, mais il a mis aussi les moyens dès l'année 2024.
10:19 7 milliards d'euros. Le budget a passé de 33 à 40 milliards d'euros pour cette planification écologique.
10:24 Et ça, il l'a dit, c'est à la hauteur.
10:26 C'est lui qui avait été l'auteur d'un rapport en disant quels étaient les investissements nécessaires pour y arriver.
10:30 Oui, mais l'une des choses, par exemple, qui a été discutée, Antoine Pellion, c'est le fait d'avoir une sobriété à la française.
10:36 On a dit qu'est-ce que c'est, une sobriété à la française ?
10:38 Ce n'est pas une vraie sobriété, Antoine Pellion.
10:40 On est sobre, on n'est pas sobre.
10:42 Alors là, le plan qu'on a mis sur la table, pour être très concret, il dit en gros la moitié des actions, c'est on généralise des choses qui existent.
10:49 Et donc, c'est effectivement changer des chaudières, c'est la voiture électrique, etc.
10:52 Et pour l'autre moitié, on fait de la sobriété.
10:55 Donc, plus de 20% des baisses d'émissions, c'est de la sobriété.
10:58 Donc, elle est très présente dans le plan.
11:00 Et puis, le dernier quart, c'est l'innovation technologique.
11:02 Donc, on n'est pas dans la caricature ni du technosolutionnisme, ni de la décroissance.
11:06 On est sur un plan équilibré qui est à la fois sûr.
11:09 On a besoin de la technique de main et de la sobriété.
11:12 Et le président l'a dit très clairement hier.
11:13 Parce que, rapidement, Antoine Pellion, l'exemple de la taxe carbone avec les conséquences qu'elle avait eues,
11:18 notamment, évidemment, les gilets jaunes, tout cela a échaudé le gouvernement.
11:22 C'est de ça dont vous avez collectivement peur ?
11:25 Au-delà de la taxe carbone, le sujet, c'est quand on regarde les autres pays en Europe.
11:29 On regarde l'Allemagne avec les chaudières, les Pays-Bas avec l'élevage.
11:32 On voit qu'il faut trouver la ligne de crête, à la fois d'être radical dans le résultat, mais sans brutalité dans les mesures.
11:37 Merci beaucoup Antoine Pellion, vous êtes secrétaire général à la planification écologique auprès de la Première ministre.
11:42 Vous nous avez exposé ce plan. On le discutera dans quelques instants.
11:46 Nous serons en compagnie du directeur du think tank The Shift Project, Mathieu Ozanno,
11:50 et le journaliste spécialiste de l'environnement pour le journal Le Monde, Nabil Wakhim.
11:55 7h55.
12:04 Dans quelques instants, nous étions avec Antoine Pellion, secrétaire général à la planification écologique.
12:09 L'un des promoteurs de ce plan qui a été présenté hier avec différentes mesures.
12:14 Mais un mot d'ordre général, le passage à l'électrique.
12:17 Électrique pour la pompe à chaleur qui permettrait de chauffer des maisons avec la voiture électrique.
12:24 Le tout de manière souveraine, autrement dit avec des pompes à chaleur et des voitures produites en France.
12:30 A la disposition du plus grand nombre puisqu'il y aurait un leasing pour la voiture électrique.
12:35 Un leasing de 100 euros par mois.
12:38 Bref, voici pour l'essentiel les éléments qui ont été présentés hier.
12:44 Et pour en discuter, nous sommes en compagnie de Mathieu Ozanno en duplex avec nous.
12:49 Bonjour Mathieu Ozanno.
12:51 Bonjour.
12:52 Vous êtes directeur du think tank The Shift Project.
12:55 On vous doit notamment "Climat, crise, le plan de transformation de l'économie française" aux éditions Audit Jacob.
13:00 Et ici même dans ce studio, Nabil Ouakim. Bonjour.
13:04 Bonjour.
13:05 Journaliste au monde, on vous doit un podcast "Chaleur humaine, faire face aux défis climatiques".
13:10 Nabil Ouakim, votre point de vue sur ce plan qui nous a été présenté il y a quelques instants.
13:16 Alors on peut dire, comme vous le disiez tout à l'heure avec Antoine Pellion, il y a le verre à moitié plein et le verre à moitié vide.
13:21 La manière positive de le voir, c'est que c'est déjà un plan qui existe.
13:24 C'est-à-dire que le travail qui a été fait par ce secrétariat général à la planification écologique, honnêtement on peut dire que c'est du bon travail.
13:29 C'est-à-dire jusque-là, on n'avait pas une vision d'ensemble de à quel point chaque secteur contribue au réchauffement climatique.
13:36 Et puis quel type de réponse on peut apporter.
13:38 C'est chiffré, c'est sérieux et je pense même que c'est assez consensuel.
13:41 C'est assez rare pour le dire.
13:43 Maintenant, si on veut regarder le verre à moitié vide, on peut reprendre en tout point, je pense, ce que disait Jean Lemary.
13:47 C'est-à-dire que l'intervention du président de la République hier, elle n'éclaircit pas grand chose sur ce qu'on va faire.
13:53 C'est-à-dire qu'il y a des orientations, mais concrètement, qu'est-ce qui va se passer ?
13:57 C'est-à-dire une planification, elle doit donner des dates, des rendez-vous en disant "ben voilà, en 2024 il va se passer ça, en 2025 il va se passer ça".
14:04 Et qu'est-ce qui se produit si jamais on n'atteint pas ses objectifs ?
14:07 C'est pas ce qu'on a entendu hier, on a entendu une liste de propositions qui sont faites, d'engagement.
14:12 C'est ça qui vous dérange ? C'est-à-dire que si les objectifs ne sont pas atteints, il faudrait quoi ? Un plan B ?
14:18 Ça nous revoit quelques années en arrière.
14:20 C'est le problème qu'on a déjà avec les politiques climatiques depuis des années.
14:23 Prenez la rénovation des logements.
14:25 Voilà des années qu'on dit "il faut rénover des centaines de milliers de logements par an".
14:28 C'est très important.
14:29 On met plusieurs milliards sur la table et là on va en mettre encore plus, 1,4 milliard de plus.
14:34 Comment on sait si ces rénovations fonctionnent ou pas ?
14:36 Est-ce qu'elles font réduire nos émissions de gaz à effet de serre ?
14:38 On n'en sait rien du tout.
14:39 Et donc il y a là, dans cette idée de planification, normalement l'idée de dire "voilà on suit un chemin et on essaye d'avoir en face des résultats".
14:46 Là, ce que nous a présenté le président de la République manquait de cette partie-là.
14:50 Il manquait aussi d'autre chose et ça rejoint ce que disait Jean Lémarie.
14:53 C'est-à-dire il manquait d'une vision entraînante.
14:55 Dire aux français "ah vous allez voir, on va faire tout ça et puis ça va pas trop vous embêter, pardon, mais ça fait pas très envie".
15:01 C'est-à-dire on pourrait imaginer que cette séquence-là, cette transition écologique soit aussi la construction commune d'un avenir
15:07 dans laquelle on puisse se reconnaître tous et toutes en disant "voilà notre vie va être meilleure, elle va pas être moins bien".
15:12 Votre point de vue là-dessus Mathieu Ozanno, vous êtes directeur du Shift Project, vous êtes en duplex avec nous.
15:19 Comment avez-vous reçu ce plan ?
15:21 Déjà, il faut quand même saluer le travail qui est fait.
15:26 Effectivement, la nation se met en marche.
15:29 Ça fait quand même un quart de siècle qu'on a commencé à prendre des engagements, à sortir des énergies fossiles.
15:34 Et grosso modo un quart de siècle que l'on procrastine.
15:38 Les accords de Paris ont été signés à Paris il y a maintenant presque huit ans.
15:44 Il était temps.
15:45 Alors, il y a des montants d'investissement qui sont significatifs.
15:49 Tous les postes, toutes les activités qu'il va falloir transformer sont nommées.
15:54 Donc ça c'est extrêmement positif.
15:56 Encore une fois, la nation se met en marche.
15:58 Et il n'y a pas beaucoup, si on regarde autour de nous, il n'y a pas beaucoup de pays développés
16:02 qui prétendent en faire autant.
16:05 Alors, le verre à moitié vide.
16:08 En fait, on a des solutions qui effectivement sont essentiellement techniques.
16:13 Là où tous les gens qui regardent ça de près depuis des années savent que les réponses ne sont pas strictement techniques.
16:19 La technique ne nous sauvera pas, en tout cas pas à elle seule.
16:22 Et là, on appuie assez peu, voire pas, sur le levier peut-être le plus fondamental
16:29 qui est celui de la réorganisation vers une économie qui serait plus sobre.
16:36 Donnez-nous des exemples, Mathieu Ozzano, qu'on comprenne bien ce que vous voulez dire.
16:40 Quand on appuie fortement sur la voiture électrique, sans dire que pour les transports quotidiens,
16:46 pour les gens pour qui c'est possible, avec les infrastructures qui vont bien, de vélo, de bus, etc.
16:52 La voiture, qu'elle soit électrique ou thermique, c'est terminé.
16:56 Ça, c'est quelque chose qui est très bien compris, qui est très bien documenté.
16:59 RTE, en particulier, Réseau Transport de l'Électricité,
17:02 dit que c'est une allée à fond sur, autant que possible, sur ce qu'ils appellent une sobriété structurelle,
17:10 c'est-à-dire pas demander aux gens de se serrer la ceinture,
17:13 mais nous organiser collectivement de façon à ce que la nation ait besoin de moins d'énergie et de matière.
17:19 C'est la meilleure assurance pour l'avenir.
17:21 C'est très concret parce que RTE, il y a une semaine, a publié un rapport
17:25 dans lequel, si on lit un tout petit peu entre les lignes,
17:27 on comprend que si on n'appuie que sur des solutions purement techniques et qu'on ne change pas nos usages,
17:32 alors dans 10 ans d'ici, on risque de ne pas avoir assez d'éoliennes,
17:36 pas assez de centrales nucléaires pour faire fonctionner la nation, tout simplement.
17:39 Donc la sobriété, c'est aussi un facteur de souveraineté et de pérennité de la puissance nationale.
17:45 Ça, c'est très bien compris et il y a clairement au moins un début de refus d'obstacle là-dessus
17:51 puisque ce qui est présenté est essentiellement purement technique.
17:55 Nabil Ouakim, effectivement, parce qu'il y a un accent qui est mis sur l'électrique,
17:59 puisqu'il y aura des voitures électriques et il y aura des pompes à chaleur qui fonctionneront à l'électricité.
18:05 Ça veut dire qu'on a mis pratiquement tous nos œufs dans le même panier.
18:09 Alors non, pas tous nos œufs sur le même panier, mais ça veut dire qu'effectivement,
18:12 ce n'est pas très facile à comprendre.
18:14 Globalement, la consommation d'énergie doit baisser.
18:17 L'essentiel de l'énergie qu'on utilise en France, c'est du pétrole, du gaz.
18:21 Donc il faut en utiliser beaucoup moins et il faut remplacer ça par de l'électricité.
18:25 Donc il faut baisser notre consommation d'énergie, mais utiliser plus d'électricité.
18:28 Et en plus, il faut que cette électricité n'émette pas de gaz à effet de serre.
18:32 On a déjà en France du nucléaire, des barrages, des éoliennes, des panneaux solaires.
18:35 C'est sur ça qu'il faut travailler.
18:37 Mais je voudrais revenir sur ce que disait Mathieu Ozanno, parce que je pense que c'est vraiment important.
18:41 La notion de refus d'obstacle, c'est une bonne manière de revenir sur ce qu'a fait le président de la République hier.
18:46 C'est-à-dire en essayant de dire "Vous allez voir, il n'y aura pas de contraintes.
18:50 Vous allez voir, tout ça va bien se passer. Faites-moi confiance. On ne va pas embêter les Français."
18:54 Finalement, c'est un peu ça qu'il a essayé de dire hier.
18:57 Effectivement, il passe à côté de ce que dit son propre secrétariat général à la planification écologique,
19:02 qui dit "Attention, pour y arriver, il y a un chemin colossal à faire pour réduire nos émissions de moitié d'ici à 2030.
19:08 Et donc, il faut changer des choses structurellement, dont l'organisation de la société."
19:12 Eh bien, typiquement, ça veut dire qu'il faut limiter un certain nombre de déplacements.
19:17 C'est-à-dire, si on remplace tous nos véhicules thermiques par des véhicules électriques,
19:20 eh bien, en fait, on ne va pas réduire suffisamment nos émissions de gaz à effet de serre.
19:24 La limitation, ça me paraît compliqué.
19:27 Ce n'est évidemment pas de la limitation au niveau individuel en disant "Voilà, ce n'est pas le..."
19:31 Non, mais je veux dire, sans les infrastructures, sans les infrastructures collectives.
19:34 Evidemment, ce que ça veut dire, c'est qu'il faut prioriser des investissements très importants dans des infrastructures collectives.
19:39 Comme le disait Mathieu Ozanno tout à l'heure, des pistes cyclables, des transports publics, du covoiturage.
19:44 Ça aussi, c'est des investissements d'infrastructures.
19:46 Et ça, c'est important de le penser en disant "On va réduire aussi une partie de notre consommation d'énergie."
19:51 "Mathieu Ozzanno, et c'est un cycliste qui vous parle, lorsque je vois les principales mesures envisagées,
19:56 ce que l'on peut attendre du vélo, c'est finalement assez médiocre.
20:00 Alors, est-ce qu'on n'en fait pas beaucoup pour le vélo,
20:04 alors même que dans le mix des réductions d'émissions des gaz à effet de serre,
20:10 il est finalement bien loin après, par exemple, la baisse des émissions des sites industriels
20:15 ou la conversion à la voiture électrique ?
20:18 Oui, oui, vous voyez, vous citez effectivement des leviers qui sont techniques.
20:22 Le vélo, c'est un changement de comportement.
20:25 Ce n'est pas du technosolutionnisme, c'est le contraire de ça.
20:29 Il faut les deux.
20:31 Ce qui est intéressant aujourd'hui, c'est qu'on a un consensus.
20:34 Vous parliez, Nabil Wakhim parlait du Secrétaire Général de la Planification écologique.
20:37 RTE dit s'organiser de façon plus sobre pour les transports, pour l'agriculture, pour l'industrie.
20:43 C'est une assurance-vie pour ne pas avoir une puissance nationale échouée
20:47 faute de suffisamment de capacité de production d'énergie bas carbone.
20:50 Et ça, c'est très concret, puisqu'on voit les projets d'éoliennes qui sortent trop lentement.
20:56 Donc, du coup, on reporte les espoirs sur l'éolien en mer ou sur le nucléaire,
21:01 ce qui est plus loin dans le temps.
21:03 Mais vous voyez, ce qui manque finalement dans ce plan, ça va venir.
21:06 Je pense qu'il y a beaucoup d'acteurs aujourd'hui qui sont suffisamment motivés
21:09 et qui comprennent suffisamment les enjeux pour pousser dans le bon sens.
21:12 Mais ce qui manque, c'est ce qu'RTE, encore une fois, appelle la sobriété structurelle,
21:17 s'organiser collectivement pour être plus sobre.
21:20 Et derrière, ce qui manque incidemment, c'est ce que l'on appelait,
21:23 et je pense qu'on a rebâti la France dans les années 50, une politique industrielle.
21:27 Je vous ai bien compris, Mathieu Ozanno, mais vous ne m'avez pas répondu exactement sur le vélo.
21:33 Est-ce que ça veut dire que dans le plan, par exemple,
21:37 il n'est pas suffisamment ambitieux pour les changements structurels ?
21:40 Et si on avait affaire à des changements structurels comme vous souhaitez,
21:44 comme vous semblez le souhaiter, alors on obtiendrait plus ?
21:48 Est-ce que ça veut dire que finalement, avec toutes les contraintes en matière de déplacement,
21:53 on ne peut pas en attendre plus ?
21:56 Non, non, effectivement, vous avez raison, je suis allé un peu vite.
21:58 Bien sûr qu'on pourrait aller beaucoup plus loin.
22:00 Et en plus, si on avait l'audace et la cohérence d'investir systématiquement
22:05 dans les alternatives à la voiture individuelle pour les transports du quotidien,
22:10 partout où c'est possible, et c'est possible jusqu'en grande banlieue,
22:13 les travaux du Shift notamment le montrent,
22:16 non seulement ce sont des investissements publics qui n'ont rien à voir
22:19 avec l'argent qu'on a pu mettre dans les grandes infrastructures autoroutières ou TGV,
22:24 ça coûte beaucoup moins cher de faire des abribus et de faire des lignes de piste de vélo,
22:30 mais en plus ça permet aux gens d'économiser beaucoup d'argent sur leur budget mobilité,
22:35 c'est des centaines d'euros à 2 euros le litre,
22:37 si vous voulez faire 10 bornes par jour en vélo plutôt qu'en bagnole,
22:42 même si on l'adore, au bout d'un an c'est des centaines d'euros d'économisées.
22:47 Donc là tout est en place, simplement ça demande une audace,
22:51 j'allais dire idéologique, en tout cas politique à coup sûr,
22:56 de dire "Française, Français, la bagnole, même si on l'adore pour les transports quotidiens,
23:03 partout, à chaque fois où on peut s'en passer, il faut le faire,
23:07 et ne vous inquiétez pas, la République bonne mère,
23:09 c'est déjà le cas dans beaucoup de collectivités locales qui sont à l'avant-garde de ça,
23:13 va investir pour qu'il soit possible de se déplacer confortablement et à moindre coût.
23:18 Là aujourd'hui c'est comme si on prenait, imaginez que le Toubib vous dit
23:21 "Monsieur vous avez une maladie grave, voilà les médicaments,
23:25 et puis n'oubliez pas précisément de monter sur un vélo,
23:28 ça va vous mettre en meilleure santé et de manger plus sainement etc."
23:31 Là c'est comme si on prenait les médocs,
23:33 mais on oubliait la partie un peu plus douloureuse,
23:37 qui demande un peu plus d'investissement,
23:39 si ça va avoir un mode de vie plus sain.
23:41 De l'écologie effectivement moins offensive.
23:44 Et c'est pas punitif, c'est salubre.
23:47 Jean-Les-Marie, mon camarade, veut intervenir.
23:49 Il y a un choix politique, là aussi je vous écoute tous les deux,
23:53 c'est assez clairement dit par l'exécutif qui a fait un choix,
23:56 plutôt que de dire aux français "il faut impérativement,
23:59 rapidement, massivement changer nos modes de vie,
24:01 on met en place des solutions qui s'appellent RER,
24:04 qui s'appellent voitures électriques, qui s'appellent pompes à chaleur,
24:08 et ainsi peu à peu nos modes de vie vont changer."
24:11 D'après l'exécutif, ce serait beaucoup plus efficace qu'une injonction.
24:14 Qu'en pensez-vous ?
24:15 Nabil Ouakim, journaliste au Monde.
24:17 En fait il y a un risque là-dedans, d'une petite incompréhension,
24:20 je pense pour un certain nombre de gens,
24:21 sur comment ça marche le changement climatique.
24:23 C'est-à-dire, en fait, le changement climatique,
24:25 il se produit parce qu'on émet des gaz à effet de serre,
24:27 on utilise des énergies fossiles.
24:28 Alors c'est bien de dire aux gens "on va inciter à changer,
24:32 par exemple une chaudière à gaz ou une chaudière fuel,
24:35 et on va mettre à la place une pompe à chaleur."
24:37 Mais à un moment donné, ce dont on a besoin, c'est d'arrêter de faire du gris.
24:40 C'est-à-dire, c'est bien de financer du verre,
24:42 mais si on continue d'avoir beaucoup de gris,
24:44 je veux dire, c'est la blague qu'on fait toujours sur une entreprise comme Total,
24:48 en disant "c'est super qu'ils fassent un peu d'éoliennes,
24:50 mais s'ils continuent à faire beaucoup de pétrole,
24:51 on va de toute façon dans la mauvaise direction."
24:53 Et donc là il y a un petit peu ce risque,
24:54 c'est-à-dire de se dire "on va inciter, inciter,
24:57 au développement d'électriques, au développement des pompes à chaleur,
24:59 mais à un moment donné, et moi non plus j'aime pas la contrainte,
25:02 bien sûr, personne ne l'aime,
25:03 mais à un moment donné, il faut aussi faire en sorte qu'on ait,
25:05 pas seulement moins, mais beaucoup moins d'énergie fossile dans notre consommation.
25:09 Ça veut dire moins de véhicules thermiques,
25:11 ça veut dire moins de chaudières à gaz,
25:13 ça veut dire moins de sites industriels qui utilisent du gaz et du charbon.
25:17 - Mais c'est marrant parce que moi j'ai une autre crainte, Mathieu Ozanno,
25:20 avec la pompe à chaleur qui devient comme ça soudainement une panacée,
25:26 moi je me demande si la pompe à chaleur ne va pas être ce qu'a été la chaudière à gaz,
25:31 souvenez-vous des campagnes publiques il y a quelques années,
25:34 Jean Lemarie a consacré un billet politique à ce thème.
25:38 Bref, si on n'est pas en fait transporté d'une solution à l'autre,
25:43 les solutions d'aujourd'hui devenant caduques quelques mois, quelques années après.
25:49 - C'est ce contre quoi on regarde notamment RTE la semaine dernière en disant
25:54 "attention, si on déporte nos usages d'une technologie qui consomme des énergies fossiles
26:02 vers une technologie qui consomme d'autres matières premières qu'on ne maîtrise pas non plus,
26:09 l'essentiel des minerais aujourd'hui sont raffinés en Chine,
26:15 on déplacerait, si on ne prend pas garde à s'organiser pour consommer moins,
26:21 on déplacerait une dépendance vis-à-vis de l'Arabie Saoudite,
26:24 une dépendance encore plus forte qu'aujourd'hui vis-à-vis de la Chine".
26:27 Il y a ça et puis c'est là aussi où je reste un peu sur ma faim,
26:31 il y a cette question de souveraineté, il y a la question, je le disais tout à l'heure,
26:35 d'articuler un plan, une politique industrielle complète.
26:39 Nabil Wakim parlait des rénovations thermiques,
26:42 ou là en l'occurrence des installations de pompe à chaleur.
26:44 On sait très bien ce qui coince aujourd'hui,
26:46 c'est la même chose qui coince pour le développement du nucléaire, son maintien,
26:51 ce sont les compétences, on n'a plus d'industrie en France,
26:53 à un moment donné il y a un quart de siècle…
26:55 On n'a plus d'industrie en matière d'isolation Mathieu Ozanno ?
26:58 On n'a pas assez de thermiciens, on n'a pas assez de rhumiditiers,
27:01 on n'a pas assez de soudeurs, on n'a pas assez de tuyauteurs,
27:04 réindustrialiser, même réindustrialiser bas carbone,
27:08 ça va supposer de développer des compétences,
27:10 de trouver des moyens pour rémunérer les gens,
27:15 pour attirer les gens à nouveau vers des activités manuelles,
27:19 c'est-à-dire faire le contraire.
27:20 Symboliquement on a un virage à 180 degrés à faire dans plein de domaines,
27:24 là je parle des compétences industrielles,
27:26 ce n'est pas du tout ce qu'on promeut aujourd'hui,
27:28 mais à contrario on a systématiquement,
27:31 si vous ouvrez votre télévision vous pouvez avoir un écologiste,
27:34 un brave écologiste comme moi qui vous dit la voiture c'est terminé,
27:37 et puis l'interview se termine et vous avez une pub pour les SUV.
27:40 Vous voyez, il faut mettre en ordre un peu nos symboles
27:43 et savoir ce qu'on veut, on est face à un choix historique,
27:46 il s'agit d'éviter une tragédie,
27:47 c'est-à-dire laisser une planète pas vivable pour nos gosses,
27:50 il faut maintenant avoir la cohérence et la consistance
27:54 pour ne pas se contenter de mimesures
27:56 et croire que la technologie va nous sauver à elle seule.
28:00 Et c'est là d'une certaine manière qu'il aurait pu y avoir,
28:03 alors je sais qu'on attend toujours beaucoup en France du Président,
28:06 on attend toujours que le Président dévoile un grand chemin
28:09 vers un monde meilleur,
28:10 mais là il y avait quand même une occasion de dire,
28:12 et ça fait tout à fait quoi ce que disait Mathieu Zanon,
28:14 on construit ce chemin et ce chemin il est créateur d'emploi.
28:18 Regardez, il y a un exemple qui a été donné la semaine dernière
28:21 par l'administration Biden aux Etats-Unis,
28:23 ils viennent de créer ce qui s'appelle le Climate American Corps,
28:26 une sorte de brigade américaine du climat
28:28 pour proposer à 200 000 jeunes de se former
28:31 dans des métiers de la transition climatique.
28:33 On ne connaît pas les détails, peut-être que ça ne marchera pas,
28:35 mais je trouve qu'il y a là-dedans une idée intéressante
28:37 qui est de dire, au-delà de toutes ces belles paroles
28:40 de ce plan technocratique, on matérialise quelque chose
28:43 qui va faire qu'un certain nombre de gens vont pouvoir
28:45 faire de la formation professionnelle, trouver du boulot
28:47 dans ces secteurs-là, et aussi peut-être y prendre du plaisir
28:50 et se dire j'ai envie de participer à cette grande œuvre collective.
28:53 Parce que si on veut donner un point positif à ce plan,
28:56 il montre une chose, il montre que c'est possible.
28:58 C'est-à-dire que réduire nos émissions de 55% d'ici à 2030,
29:02 il y a quelques années, les gens disaient c'est n'importe quoi.
29:04 C'est possible de le faire, mais pour le faire,
29:06 il faut embarquer dedans un maximum de gens,
29:08 et ça, ce n'est pas seulement la technique qui peut y répondre.
29:11 Jean Lemarie.
29:12 Je rejoins ce que dit Nabil Ouakim, c'est vrai qu'en France,
29:14 historiquement, on attend toujours beaucoup du président de la République,
29:17 mais la question politique toujours, c'est de savoir si,
29:20 collectivement, nous tous, dans ce studio, ailleurs,
29:23 toutes celles et tous ceux qui nous écoutent,
29:24 nous sommes prêts collectivement à nous embarquer
29:27 dans une aventure comme celle-là, si elle nous est proposée
29:29 par le politique, par les politiques.
29:31 Mathieu Ouzanot, qu'en pensez-vous ?
29:34 Ça, c'est la question à 100 millions de tonnes de CO2.
29:39 Écoutez, moi, j'ai passé, ça fait 25 ans que je travaille sur ce sujet-là,
29:44 presque 30, j'ai passé 25 ans à faire du donquichottisme.
29:47 Moi, je vois une vague dans la société.
29:49 Effectivement, il y a une réaction à cette vague,
29:51 elle est d'autant plus, les attitudes réactionnaires
29:54 par rapport à tout ça sont d'autant plus puissantes
29:56 que la vague est forte.
29:57 Moi, j'ai l'impression qu'on a une génération,
29:59 regardez Antoine Pellion, que vous avez reçu dans votre studio,
30:01 un brave serviteur, grand serviteur de l'État,
30:04 il est quand même emblématique d'une nouvelle génération
30:07 de hauts fonctionnaires qui n'a pas l'intention
30:09 de rester l'arme au pied face, encore une fois,
30:11 à une tragédie historique qu'il convient d'éviter.
30:14 Moi, je trouve ça extrêmement positif.
30:17 Oui, mais vous savez comment on sait, Mathieu Ouzanot,
30:20 il y a donc l'idéologie et puis la mise en pratique
30:22 de cette idéologie, je le dis évidemment
30:25 sans qu'il y ait une dimension péjorative,
30:28 je veux dire, avant que l'on mette nos convictions
30:31 en ordre avec nos manières de vivre,
30:34 ça n'est jamais aisé.
30:35 Oui, c'est bien pour ça qu'il revient au chef de l'État
30:38 de montrer le chemin et de dire un certain nombre
30:40 de messages forts, quitte à ce qu'ils soient
30:42 pénibles à entendre.
30:44 Le discours tchertchien du sang, de la sueur et des larmes,
30:49 lorsque, et peut-être la victoire,
30:52 lorsque l'on est confronté, encore une fois,
30:55 on voit le temps qu'il fait aujourd'hui, fin septembre,
30:57 ça sera dans dix ans, la patrie est en danger,
31:00 il faut quand même dire les choses.
31:01 RTE nous dit, attention, dans dix ans,
31:04 on n'aura peut-être pas assez d'électricité
31:05 pour faire tourner le pays.
31:06 Je veux dire, on en est là et on sait pourquoi
31:09 on en est réglable.
31:10 On a procrastiné sur le climat et on a décidé
31:13 à un moment donné que de ne pas avoir d'industrie
31:14 dans un pays comme la France, c'était une bonne idée.
31:16 Et il n'y en pas assez des meilleurs.
31:18 Il faut se remettre en ordre.
31:20 Je n'aime pas l'expression "effort de guerre",
31:23 je pense que c'est plutôt un effort de reconstruction.
31:25 En 1947, les gaullistes et les communistes,
31:29 lorsqu'il n'y avait plus un seul pont
31:31 entre Le Havre et Paris, ont réussi à se mettre d'accord.
31:34 Là, je pense que, comme disait l'autre,
31:36 on a tous des enfants et qu'on a tous envie
31:39 qu'on ne soit pas la génération.
31:42 Mais alors justement parce que…
31:43 On va laisser chouard et après nous le déluge.
31:46 Les efforts de guerre, Mathieu Zanon.
31:48 Il manque plein de gens qui ne sont pas prêts
31:49 à lâcher l'affaire.
31:51 Comme je ne vous vois pas, vous êtes en duplex,
31:53 je vous coupe et je m'en excuse.
31:55 S'il y a peut-être une manière
31:57 de rendre cela moins douloureux,
31:59 ce serait d'augmenter les puits de carbone.
32:01 Est-ce que ces mesures existent ?
32:03 Bien sûr, notamment avec une meilleure protection
32:06 des forêts, il y a toute une série d'efforts
32:09 qui sont demandés.
32:11 Mais est-ce qu'on pourrait en faire plus
32:13 pour avoir plus de puits de carbone ?
32:16 C'est un pari très risqué.
32:19 Alors les puits de carbone,
32:20 il y en a des plus intéressants,
32:23 ce sont les puits biologiques, les forêts, les prairies.
32:26 C'est d'eux dont je parle.
32:27 Oui, parce qu'il y a des gens qui vous expliquent
32:30 qu'on peut capter le carbone mécaniquement
32:32 et là ce sont des systèmes assez…
32:36 On m'a expliqué que c'était hasardeux,
32:38 mais je me trompe peut-être.
32:39 On peut dire que pour l'instant,
32:40 ce n'est pas démontré économiquement.
32:42 On peut dire que la captation du carbone
32:44 de manière industrielle, c'est en partie
32:46 ce sur quoi repose le plan industrie
32:48 qui a été présenté hier pour un certain nombre
32:50 de sites industriels, de dire "on va émettre
32:52 des gaz à effet de serre, mais on va les attraper,
32:54 on va attraper ce carbone et puis on va le stocker
32:56 quelque part". Aujourd'hui, pour l'instant,
32:57 il n'est pas démontré qu'on sache le faire,
32:59 en tout cas pas à des prix qui sont faramineux
33:02 et dans des conditions technologiques
33:03 qui ne sont encore pas claires.
33:04 Et puis on m'a dit que c'était du technosolutionnisme
33:06 et que ça c'était mal, Nabil Ouakim.
33:08 Ce n'est pas forcément mal,
33:09 on a besoin de la technologie.
33:10 Mais ce qui est intéressant, c'est que dans ce plan,
33:11 on reproche beaucoup à Emmanuel Macron,
33:13 parfois à raison de ne s'appuyer que sur la technologie.
33:15 Mais si on regarde les détails de ce plan,
33:17 la majorité des mesures sont faites avec des technologies
33:19 qui sont déjà existantes.
33:20 C'est-à-dire qu'on n'a pas besoin de réinventer la roue,
33:22 on n'a pas besoin d'inventer la potion magique,
33:23 on peut faire avec ce qu'on a déjà sous la main.
33:25 Mathieu Ozanno, sur le technosolutionnisme,
33:27 je vous entends derrière.
33:28 Oui, oui, c'est extrêmement…
33:29 Si vous voulez, la captation de CO2
33:32 par des procédés industriels,
33:33 pour quel est un impact significatif ?
33:35 Ce sont des investissements qui sont
33:37 absolument colossaux sur des choses qui sont,
33:40 comme disait Nabil Ouakim,
33:41 au stade de pilote industriel.
33:43 Donc c'est extrêmement compliqué de parier dessus.
33:46 Maintenant, les puits naturels, eux, c'est très inquiétant.
33:49 Si vous voulez, le dernier chiffre montre que nos prairies,
33:51 nos forêts ont tendance à capter moins de CO2
33:54 que ce que l'on espérait, et pour cause.
33:56 Parce qu'elles sont notamment durement impactées
33:58 par le réchauffement climatique.
34:00 Donc là encore, on est de haute…
34:02 C'est-à-dire qu'un arbre à chaud,
34:04 quand il a soif, il capte moins ?
34:06 Oui, quand il est mort aussi.
34:08 Vous savez qu'il y a des grandes…
34:10 Ou parce que la forêt brûle, tout simplement.
34:13 Et donc c'est tout ça qui fait que…
34:15 C'est encore en cela que s'organiser
34:17 pour être plus sobre, c'est une assurance-vie.
34:19 C'est un choix sans regret, en termes de sobriété,
34:21 de s'organiser pour parer l'obstacle,
34:26 pour ne pas tomber de caractère dans ce sida.
34:28 Nabil Ouakim, en quelques mots,
34:29 une conclusion, l'étape d'après.
34:31 Qu'est-ce qui va se passer maintenant ?
34:33 Alors là, on va attendre de voir en novembre
34:36 les annonces sur le leasing électrique,
34:38 c'est-à-dire est-ce qu'on va avoir
34:39 une voiture électrique pas chère
34:40 pour la plus grande partie des Français,
34:42 notamment les plus modestes.
34:43 Et puis on va voir ensuite, surtout,
34:45 est-ce que cette planification va se décliner
34:47 avec des mesures concrètes
34:49 qui vont changer nos vies ?
34:50 Mathieu Ozanno, quelques mots de conclusion.
34:53 Moi, je retiens surtout que la nation s'est mise en marche,
34:58 mais il ne faudrait pas s'arrêter à mi-chemin.
35:01 Merci.
35:02 Il y a une recomposition,
35:03 une réorganisation de la société
35:04 qu'il faut inventer.
35:06 Je pense qu'il y a beaucoup de gens
35:07 qui sont prêts et il faut y aller.
35:08 Merci Mathieu Ozanno, directeur du Shift Project.
35:11 Merci Nabil Ouakim, journaliste au Monde.
35:13 Votre podcast Chaleur humaine,
35:15 faire face aux défis climatiques.

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